Accueil > La fonction publique entre dans un nouvel âge
Plus de limite d’âge pour intégrer la fonction publique. Hier matin, à
l’Assemblée nationale, la majorité a adopté une proposition de loi du député
UMP de Loire-Atlantique, Serge Poignant : par un article unique voté par la
majorité, le texte annule toutes les limites d’âge nécessaires pour
participer aux concours de la fonction publique. En apparence, la majorité
UMP-UDF pourrait se targuer de remettre à l’endroit ce qui semble à
l’envers. En effet, à l’heure où l’objectif du gouvernement est d’allonger
la durée de vie au travail, le marché du travail, lui, fonctionne à
l’inverse : les entreprises ont tendance à se séparer des salariés les plus
âgés (à 56 ans, la moitié des salariés ne sont plus en activité), alors que
les limites d’âge dans la sphère publique empêchent d’intégrer de nouveaux
fonctionnaires, en pratique à partir de 40 ans.
« En service actif ». C’est sur ce constat que s’appuie Serge Poignant, qui
souhaite « faire une place plus grande aux secondes carrières des salariés »
dans la fonction publique. Il cite des exemples : pas d’accès au concours
au-delà de 31 ans pour les chargés de recherche, au-delà de 45 ans pour les
inspecteurs du permis de conduire, etc. La proposition de loi prévoit donc
de réserver la notion de limite d’âge aux fonctionnaires dits « en service
actif », c’est-à-dire principalement les policiers, les pompiers et certains
douaniers.
Un texte simple, d’apparence consensuelle, voire sociale, en somme. Mais
c’est plutôt un bâton que l’UMP a jeté dans les jambes du tout récent
ministre de la Fonction publique, Renaud Dutreil. Hier, à l’Assemblée, ce
dernier ne cachait pas un certain embarras. Non sur le fond, puisqu’il juge
la proposition « utile » et « pragmatique », mais sur la forme : « J’ai pris
l’engagement de donner un nouvel essor au dialogue social dans la fonction
publique. » Or les députés UMP ont omis un principe de base : celui de la
consultation préalable des organisations syndicales. Le ministre n’a donc pu
que « regretter de n’avoir pu évoquer [ce texte] avec les partenaires
sociaux », qu’il ne reverra que la semaine prochaine. Dès hier, l’Unsa, très
puissante chez les fonctionnaires, demandait le retrait du texte comme
préalable au dialogue avec le gouvernement.
Position délicate. Si Renaud Dutreil ne s’est pas opposé au texte de l’UMP,
il s’est réservé la possibilité de changer de pied, soit au Sénat, soit en
deuxième lecture. Il va donc se retrouver dans la délicate position de
soumettre à la concertation des conseils supérieurs des trois fonctions
publiques (Etat, territoriale et hospitalière) une mesure déjà adoptée par
l’Assemblée. Un hiatus d’autant plus regrettable que le ministre compte
reprendre le travail de son prédécesseur, Jean-Paul Delevoye, qui avait mis
en branle un projet de loi de modernisation de la fonction publique, dans
lequel les conditions d’emploi des seniors auraient toute leur place.