Accueil > Le SMIC et l’amnistie fiscale de Raffarin

Le SMIC et l’amnistie fiscale de Raffarin

Publie le lundi 2 août 2004 par Open-Publishing

Malgré les vacances, la polémique se poursuit à propos des dernières mesures annoncées par le Premier ministre. Jean-Pierre Raffarin a décidé de reporter la hausse du SMIC et de proposer une amnistie fiscale qui doit inciter les capitaux exportés illégalement à revenir en France.

Au nom du PS, François Hollande dénonçait hier dans le Journal du Dimanche une "concomitance cynique au plan social, dangereuse au plan économique et contradictoire au plan politique".

Il faut dire que les socialistes sont restés traumatisés par la question des bas salaires. Tout au long de la campagne de Jospin, des électeurs venaient se plaindre à la fin des meetings : "Je ne peux plus payer de vacances à ma famille. Votre loi sur les 35H m’empêche de travailler plus et gagner plus".

Mais l’opposition la plus vive est peut-être venue des rangs mêmes de la majorité. De l’UDF bien sûr, où François Bayrou n’a pas manqué l’occasion de fustiger une "politique illisible", mais aussi de l’UMP. Excédé d’avoir été traité en "godillots" lors du passage en force de la loi de décentralisation, les députés du parti chiraquien sont montés au créneau. Avant de partir en vacances, l’ex-UDF Pierre Méhaignerie, président UMP de la Commission des Finances, est allé voir le ministre de l’Economie pour plaider la cause des smicards ou des smicardes car, ne l’oublions pas, 80% de ces salariés à moins de 1.200 € par mois sont des femmes. Or, comment revaloriser le travail, comme le prêche Jacques Chirac, si une mère de famille, qui se lève à 5H00 du matin pour aller à l’usine ou à l’hôpital, vit moins bien que, sur le même pallier, une chômeuse qui bénéficie d’une aide au logement, de la cantine gratuite pour ses enfants, et parfois d’un petit boulot au noir.

Qu’en dit Nicolas Sarkozy ?

Il est tombé d’accord avec Pierre Méhaignerie évidemment. N’a-t-il pas été le premier, à la veille du 14 juillet, à déclarer "l’un des grands problèmes de l’économie française, c’est l’insuffisance du pouvoir d’achat des salariés les plus modestes" ?

Mais, partant de ce constat, que faire ? Imposer une charge supplémentaire aux PME qui emploient des smicards dans des métiers très menacés comme le textile ? C’est les pousser à délocaliser. Leur donner une compensation ? Ca coûterait à l’Etat, pour une hausse de 8% du SMIC, 2 milliards d’euros. Les rentrées fiscales supérieures aux prévisions pourraient le permettre, mais il faut rembourser notre énorme dette. Et puis, Bruxelles interdit toute augmentation de nos dépenses publiques. Retour donc à la case départ. Dans quel budget taper ? Dans celui de la Défense ?

Dans ce cadre arrive le projet d’amnistie pour inciter les évadés fiscaux à réinvestir leurs capitaux en France.

Oui, et là, la gauche et la droite sont aussi presque unanimes à dénoncer son caractère à la fois immoral et inefficace. Car comment convaincre les détenteurs de gros capitaux, qui se sont installés par exemple en Belgique, où la fiscalité a été réformée dans le but de les attirer ? Comment les convaincre de revenir en France si l’impôt sur la fortune et les droits de succession ne baissent pas ? Voilà pourquoi Sarkozy, poussant jusqu’au bout la logique de Raffarin, proposait vendredi de réformer l’ISF. Mais là encore il le sait, le Ministre de l’Economie va se heurter à l’opposition du président de la République. A chacun son combat social et tant pis si les 3 millions de smicards doivent attendre l’été prochain.

http://www.rtl.fr/rtlinfo/info_chroniquesint.asp?rubid=17310&chroni_id=207982