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Les cathos veulent réévangéliser Paris : non merci !

Publie le mercredi 27 octobre 2004 par Open-Publishing
3 commentaires

SOUBRESAUT CATHOLIQUE

Comme souvent en matière de religion, l’essentiel est d’y croire :
croire qu’en une semaine quelques cohortes de jeunes catholiques vont
parvenir à réévangéliser une société qui ne veut plus d’eux. Le coup
d’envoi a été donné dimanche 24 octobre sur le parvis de la
cathédrale Notre-Dame par Jean-Marie Aaron Lustiger devant une foule
béate d’adeptes de la secte catholique. A défaut de proposer un
projet d’avenir fait de liberté, d’égalité et de fraternité, l’Eglise
a choisi de marquer de façon monumentale son empreinte physique : une
croix chrétienne gigantesque de 17 mètres de hauteur a été érigée au
centre du parvis.

Pourtant, la loi de 1905 stipule dans son article
28 qu’ "il est interdit, à l’avenir, d’élever ou d’apposer aucun
signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque
emplacement public que ce soit, à l’exception des édifices servant au
culte, des terrains de sépulture dans les cimetières, des monuments
funéraires, ainsi que des musées ou expositions".

La réévangélisation
de Paris implique le rejet de la laïcité institutionnelle et monsieur
Lustiger en est le croisé acharné (en 1989 il avait refusé d’assister
au transfert au Panthéon des restes de l’abbé Grégoire).

Mais le prétexte de Toussaint ne suffit pas à expliquer l’énergie de
l’Eglise pour reconquérir un terrain qui s’est débarrassé de ses
parasites et a accédé à la fertilité de l’émancipation individuelle.
La période permet en fait de concurrencer Halloween, une fête
récemment importée dont le plan marketing a su capter les enfants.

Les cathos ambitionnent, une fois de plus, de sauver le peuple de
l’enfer contre son gré, ce qui est l’activité permanente de Rome
depuis vingt siècles. La liberté individuelle n’est pas une vertu
chrétienne. Pour ce faire, les entorses au canon se sont bousculées
sur le parvis de Notre-Dame : on chante et on se balance au rythme de
la musique sans se soucier des innombrables condamnations passées des
chansons et danses populaires par l’Eglise, on se mélange entre
garçons et filles alors que la Très Sainte Eglise a toujours mis en
garde contre la mixité. Comme l’heure est grave et qu’il est urgent
d’évangéliser tous azimuts, on remercie les incroyants d’être venus
et on feint de ne pas noter le désintérêt de la société pour la fête
de Toussaint.

Et c’est bien là une des rares raisons d’espérer pour
les cléricaux : au rythme où se dilue la soumission aux dogmes, les
incroyants seront bientôt tellement nombreux que la masse à
évangéliser s’accroîtra d’autant.

Dans l’assistance, de nombreuses religieuses attendent sagement
l’arrivée du juif converti Lustiger. Toutes arborent des hidjabs aux
couleurs ternes qui se déclinent du blanc au noir en passant par le
gris triste et le bleu sombre. Une audacieuse ose le kaki clair.
Autant de vies hors jeu, de vies gâchées par une confiance aveugle
dans une institution qui se nourrit de l’oppression de ses propres
adeptes. Parvenue au bas de la croix, une jeune femme s’agenouille et
se déverse en prières, le regard halluciné par l’instrument de
torture qui fit la fortune du christianisme.

Mais c’était sans
compter avec le pieux service d’ordre : un jeune homme, peu sensible
à l’expression extatique de la foi chrétienne, tente désespérément de
l’empêcher de satisfaire son besoin spirituel. L’immondice cruciforme
qui trône sur le parvis a visiblement moins pour fonction de
permettre l’expression des délires personnels que d’occuper l’espace
public de façon très démonstrative. Une femme qui s’agenouille ça
fait désordre, l’Eglise de France lui préfère des croyants
disciplinés qui chantent, s’agitent et applaudissent quand on le leur
commande.

D’ailleurs, le comédien Michael Lonsdale confirmera plus
tard ce culte de l’ordre en citant la Bible : "Vous êtes mes amis si
vous faites ce que je vous commande."

L’Eglise et ses pasteurs ont toujours manifesté un attachement
intéressé à la manipulation mentale de la jeunesse ; des lycéens
pèlerins assurent donc le quota jeune. Bien que venus de Pontoise en
marchant suffise à faire d’eux des héros, la fascination du martyre
lutte difficilement face au développement du RER. Deux jeunes se
serrent l’un contre l’autre. Mariés ? Pas mariés ? Pilule ou pas
pilule ?

Lustiger s’avance sur le podium, vêtu d’une djellaba blanche
et coiffé d’un bérêt rouge (aussi appelé calotte chez les calotins),
et une oratrice l’accueille par un remerciement mensonger : "merci de
nous accueillir sur le parvis de votre cathédrale." Non ! La
cathédrale Notre-Dame n’appartient pas à l’Eglise mais c’est l’Etat
qui en est propriétaire (cf. article 12 de la loi de 1905). Cet écart
de langage très calculé dévoile l’ambition réelle de l’insidieux
projet de réévangélisation : le rejet des acquis de la laïcité.

L’archevêque de Paris rappelle ensuite que la croix est un horrible
instrument de mort mais le présente aussi comme un "arbre de vie". Le
sadisme chrétien considère l’assassinat d’un fils par son père comme
une preuve d’amour.

Lustiger se dirige vers la croix en bois et l’assistance, à la
recherche d’une émotion très convenue, brandit, non pas des briquets,
mais des fleurs. La divinité imaginaire n’eut donc pas le loisir de
humer l’odeur des sacrifices et des bûchers dont le Pentateuque
ressasse maintes fois qu’elle lui est agréable. Mais l’allégresse bat
son plein et le choeur entonne gaiement : "Voici la croix du Christ,
signe de paix", cette paix chrétienne annoncée par une croix qui a
comblé de bienfaits les victimes des croisades, du franquisme, du
génocide rwandais et les populations soumises au joug du colonialisme
chrétien.

Sur l’estrade qui supporte la croix, un jeune cul-béni
(terme dont l’étymologie le rapproche du mot benêt) s’approche
timidement du prélat et va embrasser l’instrument de torture.
L’idolâtrie n’est jamais mauvaise si elle parvient à faire converger
les superstitions vers la religion unique. Enfin, des colombes
blanches sont lâchées, nourrissant le public de l’illusion bon marché
de vivre un moment historique et émouvant. L’assistance se dirige
alors vers la cathédrale, temple de la superstition et du fanatisme,
et les cloches battent le rappel des troupes, ajoutant à la croisade
antilaïque des nuisances sonores supplémentaires.

Pendant une semaine, des gentils chrétiens aux sourires naïfs
s’échineront à convertir une population qui n’a que dédain pour leurs
niaiseries soporifiques. Car, en effet, il serait vain de compter sur
le catholicisme pour apporter une lueur d’espoir à ceux qui souffrent
du chômage, de la maladie ou de quelque autre difficulté.

A la
solidarité qui ne se contente pas de soulager les maux mais agit
aussi sur les causes sociales et politiques de l’injustice, le
christianisme préfère la charité dont la docilité ne conteste pas
l’ordre établi ou les privilièges. Le christianisme est une doctrine
du passé, une doctrine du renoncement, de la soumission à une clique
de religieux et à un carcan de superstitions qui sont autant
d’insultes à la raison.

La réévangélisation de Paris n’a d’autre
objectif que de combattre l’autonomie de l’individu pour mieux
l’asservir au leurre du divin. Où qu’ils se trouvent, les
missionnaires de monsieur Lustiger ne sont pas les bienvenus.

Jocelyn Bézecourt
www.atheisme.org

Messages

  • "le christianisme est une doctrine du passé"

    En ce qui concerne son pouvoir de nuisance, il apparaît de plus en plus clairement en état comateux ...en Europe. Pas dans les Amériques. Raison de plus pour repousser avec la plus grande détermination l’enseignement du fait (sic) religieux. Et pour ne pas baisser la garde face aux provocations des obscurantismes concurrents.

  • T’as raison, l’église catho et tous les obscurantistes de tout bord ont fait beaucoup de mal.
    Il y a encore des barjots comme Bush et on est pas sorti de l’auberge... Mais ne penses-tu pas que c’est parce qu’elle est reprise par des fanatiques que la religion chrétienne (et toutes les religions sans exception) ont commis de si mauvaises choses ?
    Perso, je suis croyante, je refuse de porter une étiquette, cette société veut tout étiquetter, et je refuse de faire rentrer mes convictions personnelles dans ce jeu là. Mes convictions sont que l’amour doit être le plus important.... c’est ce que tout chrétien retiendra essentiellement de l’évangile... Mais n’est pas chrétien qui le dit, Bush par exemple n’en est pas un, en tout cas pas au sens où j’entend moi le fait d’être chrétien. Je pense que t’es chrétien quand :
    1-tu crois en Dieu (ouais quand même, vaut mieux ;-) )
    2-tu aimes les gens
    3-tu ne condamnes pas
    4-t’es non violent
    5-tu réfléchis sur le monde qui t’entoure et tu te bouge pour le rendre plus beau...
    6- ah oui, et tu n’amasse pas un tas de richesse (comme tous nos dirigeants capitalistes le font par exemple !), tu partages avec les autres et tu gardes pas tout pour ta pomme...

    Conclusion : ceux qui ont fait du mal au nom du christianisme n’étaient pas des "chrétiens"... des manipulateurs oui, c’est sûr. C’est facile de manipuler avec une religion, tu sors des nouveaux préceptes venant du Vatican quand ça t’arrange et les gens te suivent. Aussi fort que Patrick Le Lay, le PDG de TF1... tiens, ça me fait penser, la télé remplacerait-elle la religion dans ce rôle de lobotomie ? Je comprends que tout le monde soit dégoûté du christianisme avec tous ces grands qui l’ont prise comme outil de pouvoir... Mais c’est pas le christianisme qu’il faut condamner, c’est les manipulateurs qu’il faut savoir débusquer où ils se cachent ! Il y en a encore qui courrent, et sûrement leur dieu s’apelle argent.

    Il y a sûrement des "obscurantistes" dans a masse des chrétiens, mais... juge les gens au cas par cas je t’en prie, sinon, tu fais pas mieux que ceux que tu condamnes...

    Tu sais, c’est pas facile de faire son "coming-out" de chrétien... toutes les minorités rencontrent décidement bien du jugement... c’est fou ces a priori. A quand une société faite de respect mutuel ?

    Si seulement on pouvait penser à regarder ce qui rapproche les hommes plutôt que ce qui les séparent !