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Les conseillers du salarié servent-ils plus à leur syndicat qu’aux salariés ?

par didier Schneider

Publie le lundi 2 septembre 2013 par didier Schneider - Open-Publishing
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Titre entier, non coupé : "Les conseillers du salarié servent-ils plus à leur syndicat qu’aux salariés qu’ils sont sensés défendre ?"

Qui sont les conseillers du salarié ?
Un conseiller du salarié est une personne dont la mission est d’assister tout salarié convoqué à un entretien préalable au licenciement dans les entreprises dépourvues d’institutions représentatives du personnel.

« Il est inscrit sur une liste arrêtée par l’autorité administrative après consultation des organisations représentatives d’employeurs et de salariés au niveau national, dans des conditions déterminées par décret.

La liste des conseillers comporte notamment le nom, l’adresse, la profession ainsi que l’appartenance syndicale éventuelle des conseillers. Elle ne peut comporter de conseillers prud’hommes en activité » (Article L1232-7 du code du travail).

Le mandat est départemental, et c’est le Directeur régional du travail qui nomme les conseillers. Ce mandat dure trois ans.
Le Directeur doit d’abord consulter les organisations patronales et salariales représentatives au niveau national siégeant à la Commission nationale de la négociation collective (Article D1232-4 du code du travail).

Ces organisations ont un mois pour présenter leurs observations.
Est-il rassurant, pour les salariés, de s’apercevoir que même les organisations patronales sont consultées pour valider les listes de conseillers du salarié ?
C’est sans doute pour le bien des salariés….

Qui les forme ?
Afin d’exercer leur mandat, les conseillers du salarié doivent se former, en application de l’article L1232-12 du code du travail. Les formations sont dispensées dans des centres agréés, comme le prévoit l’article R3142-2.

Les syndicats confédérés sont présents au travers de centres agréés qui leur sont dédiés. Le grand nombre de leurs syndiqués, de leurs militants, leur permet d’avoir des formateurs expérimentés.
Les petits syndicats peuvent opter pour une formation universitaire.

Un mauvais exemple, les conseillers du salarié dans les Yvelines...
Dans les Yvelines, les conseillers du salarié sont au nombre de 199

La ventilation par syndicat donne respectivement 37 conseillers pour la CGT, 28 pour la CFDT, 32 pour Force Ouvrière, 27 pour la CFE-CGC, 25 pour VEOLIA-Transport, 17 pour les ‘individuels’, 13 pour Solidaires’, 11 pour la CFTC et 9 pour l’UNSA.

La première chose qui surprend, c’est la présence d’un syndicat isolé, VEOLIA-Transport, issu d’une entreprise : VEOLIA. Certes, cette entreprise est grande, mais tout de même !

Deuxième chose, c’est le nombre de conseillers présentés par ce syndicat : 25 !
Soit presque autant que la CFDT (28), que la CFE-CGC (27), deux fois et demie la CFCT (11), plus que l’UNSA et Solidaires réunis (22).
Y-aurait-il tant de syndiqués chez VEOLIA-Transport ? Beaucoup de militants ?
Une simple recherche sur internet semble indiquer que sous la bannière de ce syndicat, est présent un salarié d’une autre entreprise :
Ainsi un conseiller, issu de la CGT, semble travailler pour une société informatique. Un salarié du transport qui aura choisi un conseiller sensé connaitre la problématique du transport et les spécificités des conventions collectives du secteur sera surpris de voir débarquer un informaticien.
On trouve aussi un ancien secrétaire général de l’union locale CGT de Chatou, ainsi qu’une défenseur syndicale agissant pour le compte de l’union locale CGT de Chatou.
La double appartenance syndicale est-elle permise ? N’est-elle pas source de confusion ?
Le salarié qui se fait assister par une conseillère présentée par le syndicat VEOLIA-Transport se verra-t-il proposé d’être défendu par la CGT ?
Ce syndicat ne serait-il pas une simple scission locale du syndicat CGT ?

Troisième surprise de cette liste, c’est la présence de conseillers ‘individuels’.

Les questions ne manquent pas devant cet état de fait :
  Les organisations salariales représentatives au niveau national ont-elles été réellement consultées pour cette liste de conseillers du salarié ?
  Si oui, ont-elles-fait part d’observations ?
  Si oui, que disent ces observations ?
  Si non, pourquoi ?
  Les conseillers du salarié présentés par VEOLIA-Transport ont-ils suivi une formation initiale ? Ou une formation continue par leur structure syndicale ?
  Quand aux conseillers individuels, qui les forme, qui les suit, qui s’assure de leur probité ? De leur implication dans leur mandat ? Le Directeur régional de l’emploi qui les nomme ?
  Comment les syndicats, au niveau national, peuvent-ils laisser passer cela sans ciller ?

Mais alors, pourquoi donc ce syndicat présente-t-il autant de conseillers ?
Le syndicat VEOLIA-Transport est affilié au « syndicat anti-précarité », il en est même la principale force

Ce syndicat a déjà fait parler de lui, en tentant de se présenter lors des élections dans le cadre des TPE, en décembre 2012. Le tribunal d’instance du quinzième arrondissement de Paris l’avait écarté par jugement du 29 octobre 2012, annulant sa candidature au motif que son objet « exclusivement juridique », ne lui permettaient pas de revendiquer la qualité de syndicat.

Les nombreux conseillers du salarié de ce syndicat ont-ils vocation à alimenter le secteur juridique de ce syndicat, avec la manne financière que cela représente ?

Cela permet aussi à des militants de ce syndicat en création d’avoir des salariés protégés qui vont pouvoir, en toute quiétude, tenter de monter une section syndicale dans leur entreprise.

Voilà qui participe à l’émiettement syndical, au grand bénéfice des patrons.
Comme si 5 syndicats (plus l’UNSA, Solidaires, qui existent depuis plusieurs années au niveau national) ne suffisaient pas à représenter les revendications des salariés !

Il est grand temps que les syndicats représentatifs regardent d’un peu plus près ce qui se trame au niveau des désignations des conseillers du salarié.

Messages

  • Excellent sujet, mais qui entre dans un cadre plus général.
    Etant ouvrier à l’aube de la retraite, j’ai vu les syndicats ouvriers changer considérablement ces dernières années, et combien reste t il de vrais syndiqués ? peu helas.
    A cela je vois 2 causes principales, sans doute liées partiellement :
    1 : les principaux syndicats ouvriers sont maintenant gérés par des cadres
    2 : l’augmentation de l’individualisme.
    J’ajouterais également que les "revenus" des syndicats ne reposent plus sur les cotisations, mais sur des subventions sous une forme ou une autre. Et à mon avis, cela est très néfaste à la motivation.
    Alors je ne connait pas ce syndicat (autonome ?) cité, mais je trouve assez logique que si un groupe d’individus se bouge, ce groupe obtienne des résultats qui peuvent paraître surpenants.