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"Mai 78, un maggio italiano" (texte intégral), par Olivier Favier.

par DORMIRAJAMAIS

Publie le lundi 8 octobre 2012 par DORMIRAJAMAIS - Open-Publishing
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(Je découvre aujourd’hui cet excellent texte, que j’ai dévoré de bout en bout, et que je me permets de reproduire ici pour vous le faire partager. LL)


 

 

I – Un monde en noir et blanc

 

 Cohn-Bendit, Paris, Sorbonne, 13/05/1968 : « Je crois que c’est la première fois que nous voyons cela, c’est-à-dire que de fait, ici, nous occupons la Sorbonne. Il est évident que nous n’avons plus le droit d’être ici, donc l’administration a décidé hors-la-loi ceux qui occupent la Sorbonne. Politiquement il faut exactement savoir ce que nous allons faire, car la situation est nouvelle). »

 

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Mai 68.

En Italie, on l’appelle il maggio francese, le mai français.

En Italie pourtant, durant ce mois de mai 1968, il y a une grande agitation, toutes les universités sont occupées. Toutes sauf une, la Bocconi, l’université privée de Milan. L’un de ses derniers présidents, Mario Monti, a récemment succédé à Silvio Berlusconi, comme chef du gouvernement italien.

En Italie, la contestation de mai 1968 vient de loin. Quelque chose de nouveau se passe déjà en janvier 1966, à Trente, où militent Renato Curcio et Margherita Cagol. Quatre ans plus tard, en 1970, ils fondent les Brigades rouges.

En Italie, comme en France, le grand rassemblement de mai s’est préparé deux mois plus tôt.

À Nanterre, en France, avec le mouvement du 22 mars, où s’illustre Daniel Cohn-Bendit.

Mais le 1er mars, à Rome, les étudiants d’extrême-gauche et ceux de l’extrême-droite occupent chacun une partie de l’Université. Les uns et les autres luttent contre la police. C’est la bataille de Valle Giulia, vocabulaire martial pour un semblant de guerre qui fera ses morts ailleurs. En attendant, cette « bataille » n’en fait pas moins de 600 blessés.

Parmi les combattants de Valle Giulia, Oreste Scalzone, extrême gauche, futur fondateur de Potere Operaio.

Oreste Scalzone fera partie, onze ans plus tard, des inculpés du 7 avril 1979, suite à la procédure menée par un juge réputé proche du Parti Communiste Italien.

Il est accusé, ainsi que d’autres intellectuels d’extrême-gauche, d’avoir commandité l’assassinat d’Aldo Moro, le 9 mai 78, clairement revendiqué par les Brigades rouges. L’accusation se révèle sans fondement.

Mais pour ces inculpés, c’est le début d’une longue suite de procédures.

Oreste Scalzone est libéré de prison pour raison de santé en 1981. La même année, il quitte l’Italie, en clandestin.

La même année, en France, en mai toujours, François Mitterrand est élu président. La doctrine Mitterrand protègera les militants ayant renoncé à la lutte armée.

Pour Oreste Scalzone, les poursuites judiciaires en Italie ne prendront fin qu’en 2007.

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Parmi les combattants de Valle Giulia, Stefano delle Chiaie, extrême droite, leader d’Avanguarda Nazionale, accusé par la suite d’avoir pris part à plusieurs attentats. Celui de la Piazza Fontana par exemple, à Milan : 16 morts, 88 blessés, une tuerie froide qui met fin à l’automne chaud des grévistes, en 1969.

Un attentat dont on soupçonne d’abord Giuseppe Pinelli, un anarchiste milanais admirateur de Gandhi.

Trois jours plus tard, le dit Giuseppe Pinelli fait une chute mortelle depuis le quatrième étage du commissariat où il est interrogé. Une des enquêtes conclut au « malaise actif ».

Mais revenons à Stefano delle Chiaie, leader d’Avanguarda Nazionale, extrême droite, plus tard membre éminent de la loge maçonnique Propaganda 2, connue sous le nom de P2, au même titre que le prétendant à la couronne Vittorio Emanuele di Savoia ou que l’ancien président du conseil Silvio Berlusconi.

Stefano delle Chiaie est aussi l’ami de Junio Valerio Borghese, dit le prince noir, avec qui il tente un coup d’état à Rome, en décembre 1970, qu’on appellera par la suite il Golpe Borghese. C’est l’un des quatre projets de prise de pouvoir par la force auxquels est soumise l’Italie de ces années-là. Mais le souvenir s’en est presque effacé.

Stefano delle Chiaie est encore l’ami du dictateur chilien Augusto Pinochet, du dictateur espagnol Francisco Franco, et de Klaus Barbie, l’ancien tortionnaire nazi, qui, jusqu’à l’exécution d’Ernesto Che Guevara, en 1967, œuvre pour la CIA, en Bolivie justement.

Stefano delle Chiaie est enfin un membre éminent de la ligue anticommuniste mondiale, fondée en 1966 à Taïwan par Tchang Kai Chek. Tchang Kai Chek a été le malheureux adversaire de Mao Zedong.

Mao Zedong, lui, à cette heure, se lance dans sa révolution culturelle, dont les 16 points sont publiés la même année. Bilan : en Chine, 1 million de morts, et de nombreux émules, en Italie et en France.

Stefano delle Chiaie, leader d’Avanguarda Nazionale, extrême-droite, est arrêté en 1989 au Vénézuela. Il est aussitôt extradé vers l’Italie. Et il est aussitôt acquitté pour manque de preuves.

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Durant la bataille de Valle Giulia, le 1er mars 1968, il y a parmi les policiers un futur comédien et metteur en scène : Michele Placido, auteur d’un très mauvais film à succès des années 2000 : Romanzo criminale.

Du côté des policiers, il y a aussi un poète, Pier Paolo Pasolini, qui milite au PCI, le Parti Communiste italien.

 « Maintenant les journalistes du monde entier vous lèchent le cul,

écrit-il aux étudiants,

mais pas moi. (…) Moi je sympathisais avec les policiers ! Parce que les policiers sont des fils de pauvres. » « À Valle Giulia, hier, il y a bien eu un fragment de lutte des classes ! Et vous les amis (bien que du côté de la raison) vous étiez les riches. Tandis que les policiers (qui étaient du côté du tort) étaient les pauvres. Belle victoire, donc, que la vôtre ! Dans ces cas-là on donne des fleurs aux policiers, mes amis ! »

Mars 1968 : quinze jours après la bataille de Valle Giulia, le service d’ordre du MSI, le parti de l’extrême-droite « respectable », à ce point respectable que son futur leader, Gianfranco Fini, est aujourd’hui le président de la Chambre des Députés italienne, vient rappeler aux étudiants néofascistes comment ils doivent se comporter.

Parmi la centaine de blessés, on compte Oreste Scalzone, extrême-gauche, futur fondateur de Potere Operaio.

L’extrême-droite et l’extrême-gauche ne se retrouveront plus que pour échanger des insultes et des coups, tout au long des années 70. Et bien plus tard, aussi, dans les années 2000, quand certains éléments troubles viendront s’asseoir autour des mêmes plateaux télévisés.

Ainsi durant ces quelques mois du printemps 1968, et pour toujours, le monde a cessé d’émettre en noir et blanc.

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Le monde en noir et blanc, c’était celui de Giovanni Guareschi, de Fernandel et de Gino Cervi, où s’affrontaient Peppone le maire communiste, et Don Camillo, le curé démocrate-chrétien.

Dans ce monde en noir et blanc, depuis la fin de la guerre, en 1945, les démocrates-chrétiens avaient occupé le pouvoir sans relâche, de coalition en coalition.

 L’opposition, quant à elle, était toujours tenue par le Parti communiste.

Ce monde en noir et blanc n’était guère contrarié que par quelques catocomunisti, des socialistes et des libéraux sans grand prestige malgré leurs héros antifascistes Giacomo Matteotti, Pietro Gobetti, Carlo et Nello Rosselli, qui tous avaient payé de leur vie leur opposition au Duce, Benito Mussolini.

À l’époque du fascisme, le cerveau d’Antonio Gramsci, communiste, continuait à penser dans la prison où l’avait envoyé un procureur du régime. Ce procureur fasciste avait imaginé qu’ainsi, justement, on l’empêcherait de penser.

À l’époque du fascisme, le nouveau secrétaire général du PCI, le Parti Communiste Italien, Palmiro Togliatti, secondait Staline à Moscou et dirigeait le Komintern. Aujourd’hui encore, la ville des automobiles Lada sur les rives de la Volga, s’appelle Togliattigrad.

Dans ce monde en noir et blanc, il y avait bien aussi une poignée de trotskystes et d’anarchistes.

Les anarchistes avaient eu leur heure de gloire un demi-siècle plus tôt, quand deux Italoaméricains innocents, Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti, mouraient sur la chaise électrique.

Avant, longtemps avant, les anarchistes italiens avaient été les émigrés terroristes de leur temps. Un temps où pour beaucoup, chaque émigré italien était un anarchiste en puissance, plus ou moins susceptible de poser ou de lancer des bombes, ou bien encore d’attenter à la vie d’un président.

Mais tous, les démocrates-chrétiens, les communistes et les autres, doivent compter désormais avec un mouvement beaucoup plus large, qui ne comprend pas seulement des maoïstes et des autonomes, ou de futurs membres des Brigades Rouges. Non, ce mouvement n’est pas seulement, loin s’en faut, idéologique et politique. Il n’entraînera jamais une radicalisation des masses.

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Dans le monde en couleurs et en contradictions, les masses mènent une lutte émancipatrice et sociale.

Mais elles veulent aussi consommer davantage. Ce que ni les démocrates-chrétiens d’Aldo Moro, ni les communistes du nouveau secrétaire général Enrico Berlinguer, les deux forces qui, depuis 45, occupaient pour les uns le pouvoir et pour les autres l’opposition, ne sont prêts à accepter.

Dans leurs discours en demi-teintes, l’un et l’autre posent le doigt à leur manière sur les contradictions de la génération montante. Ce que Pier Paolo Pasolini résume ainsi, exemple parmi tant d’autres dans ses écrits de l’époque, le 26 décembre 1974 :

« Je suis profondément convaincu que le vrai fascisme est ce que les sociologues ont trop gentiment nommé la société de consommation ».

La société de consommation. Dans ce nouveau monde en couleurs et en contradictions, le poète en revient toujours à cette étiquette-là, un concept qui, pour lui, peut englober bien des choses. Aussi confie-t-il dans le Corriere della Sera du 19 janvier 1975 :

« Je suis traumatisé par la légalisation de l’avortement, parce que je la considère, comme beaucoup, comme une légalisation de l’homicide.
L’avortement légalisé est en fait, il n’y a aucun doute sur la question, un confort énorme pour la majorité. Surtout parce qu’il rendrait encore plus facile le coït -l’accouplement hétérosexuel- auquel il n’y aurait pratiquement plus aucun obstacle. Mais cette liberté du coït du couple telle qu’elle est conçue par la majorité -cette merveilleuse permissivité à son égard- par qui a-t-elle été tacitement voulue, tacitement promulguée et tacitement introduite, de manière désormais irréversible, dans les habitudes ? Par le pouvoir de la consommation, par le nouveau fascisme. »

Dans la nuit du 1er au 2 novembre 1975, Pier Paolo Pasolini meurt dans des circonstances jamais élucidées : une virée avec un jeune prostitué romain de la gare de Termini à Rome, qui s’achève dans un terrain vague, lorsque, semble-t-il, plusieurs sicaires s’abattent sur le poète qu’ils frappent jusqu’à la mort aux cris de « communiste » et de « pédé ».

Un crime politique sans aucun doute. Mais rendu possible par l’une de ces nombreuses relations tarifées, où s’exprimaient, oui, et dans toute leur violence, de vieux rapports de domination de classe et un consumérisme sexuel de la plus basse extraction.

Le tout marqué du sceau d’un privilège caravagesque, dont seul un grand artiste pouvait bénéficier.

 

II – Mines de plomb

 

 Salvador Allende, quelques phrases de son dernier discours, immédiatement suivi d’une pluie de bombes 11/09/1973 : « C’est sans doute la dernière fois que j’ai la possibilité de m’adresser à vous. (…) Mes paroles n’expriment pas l’amertume mais la déception. (…) Au moins je laisserai le souvenir d’un homme digne, qui fut loyal envers le peuple. Le peuple doit se défendre, mais pas se sacrifier. Le peuple ne doit pas se laisser cribler de balles, mais ne peut pas non plus se laisser humilier. (…) Ce sont mes dernières paroles ! (…) J’ai la certitude qu’il y aura une sanction morale qui frappera la félonie, la lâcheté et la trahison. »

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La mort de Salvador Allende. Le 11 septembre 1973. Il y a des dates qu’on retient au jour près.

Années 70 : années de plomb. Oui, mais ailleurs que dans les grandes démocraties occidentales.

Années de dictature fasciste, d’abord, au nord de la Méditerranée. Au Portugal, en Grèce jusqu’en 74, en Espagne jusqu’en 75.

Ou de dictature stalinienne : en Yougoslavie, en Albanie, en Bulgarie.

Sur ces côtes du Nord de la Méditerranée, avec la France, l’Italie est l’unique démocratie. Fragile. Très fragile. Et ce qui est fragile peut toujours s’effondrer.

Années de dictatures fascistes en Amérique du Sud, dont beaucoup ont vu former leurs cadres à l’école du Panama, dite école des Amériques, où enseigne une autre école, informelle celle-là, « l’école française ».

« L’école française », c’est cette doctrine de la « sale guerre », que des officiers ont mis au point lors de deux grandes boucheries coloniales, l’Indochine et l’Algérie.

Des noms ? Trinquier, Léger, Aussaresses, Bigeard. Bigeard, qui par la suite est secrétaire d’état du premier gouvernement Chirac, en 1975.

Massu encore, qui, en mai 1968, est visité par le général de Gaulle, en prévision d’un coup de force : « Alors Massu, toujours con ? », lui aurait dit le Général en descendant d’hélicoptère : « Toujours gaulliste, mon général ! »

École française donc. Qui donne de nombreux fruits. Dictature militaire au Brésil, dictature militaire au Chili, celle que le général Pinochet met en place le 11 septembre 1973, après la mort de Salvador Allende, dictature militaire en Argentine, en Bolivie, en Uruguay, au Paraguay, etc. etc.

Dans la période qui suit le 11 septembre 1973, au Chili, le chef de file de l’école de Chicago, Milton Friedman, trouve un parfait laboratoire pour ses théories. Pour la première fois, la doctrine ultralibérale est appliquée à l’état pur, sans aucune retenue.

Politiquement, l’ultralibéralisme s’accommode fort bien de la dictature. Économiquement et socialement, il se heurte à un contredit sans appel. Mais il n’en sera pas moins administré, si l’on peut dire, avec ce qu’il convient d’ajustements démocratiques, dans le Royaume-Uni de Margaret Thatcher, dans les États-Unis de Ronald Reagan, tout au long des années 80.

Et par la suite, chaque fois qu’une crise, une guerre, une catastrophe pourra lui donner libre cours. Comme, par exemple, dans les mois qui ont suivi le 11 septembre 2001.

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Dans les anciennes colonies italiennes de la Corne de l’Afrique, « l’Histoire se répète toujours », comme l’avait écrit Karl Marx : « la première fois c’est une tragédie, la seconde c’est une farce ». Sanglante évidemment.

En Éthiopie, Mengistu, le Négus rouge, soutenu par l’URSS et Cuba, lutte au nord contre la guérilla érythréenne d’inspiration maoïste, et au sud contre un autre dictateur d’inspiration marxiste, qui rêve, lui, d’une grande Somalie.

Une Somalie, qui toute petite, finit par se ranger, pour continuer la guerre, du côté des États-Unis.

Quant à l’ancien Négus, le vrai, l’ex-Empereur d’Éthiopie, Hailé Sélassié, l’opposant historique au conquérant fasciste Benito Mussolini à la fin des années 30, il meurt comme un tyran florentin, étouffé sous un oreiller.

Les deux Négus, le vieux, Hailé Sélassié, et le rouge, Mengistu, ont en commun d’avoir laissé leur peuple mourir de faim. De 40 000 à 80 000 décès en 1973-74. Autour d’un million dix ans plus tard, planification oblige.

Entretemps, au Cambodge, la révolution des Khmers rouges, la dernière farce, fait 1 million 700 mille morts, un habitant sur cinq, en quatre ans. Salôth Sar et Ieng Sary, ou si vous préférez frère numéro 1 et frère numéro 3, le premier connu aussi sous le nom de Pol Pot, ont été formés en France, dans des cercles liés au Parti communiste.

Le 17 janvier 1979, Alain Badiou titre dans Le Monde : « Vive le Kampuchéa démocratique ! » « Les peuples soulevés sont rarement victorieux » a-t-il récemment corrigé, en forme de tout regret.

Années 70 : années de plomb.

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Revenons à l’Italie. Ce en quoi certains voudraient voir « une guerre civile de basse intensité », a fait trois-cents morts en douze ans. De ces morts, les deux tiers sont imputables aux réseaux d’extrême-droite et aux franges des services de l’état qui leur sont liées, ou qui les manipulent, c’est selon.

À titre de comparaison, la criminalité organisée -Mafia sicilienne, Camorra napolitaine, ‘Ndrangheta calabraise- a fait deux-mille cinq-cents morts pour les seules années 2000.

Le premier homicide des Brigades rouges est celui, non planifié, de deux militants néo-fascistes. Il fait suite à l’attentat de Brescia, 8 morts et une centaine de blessés, ce dernier fomenté en juin 74, par des néo-fascistes, dont certains collaboraient avec le contre-espionnage. Le double meurtre des brigadistes est aussitôt suivi d’arrestations massives et d’un durcissement du système pénal.

Étonnamment, il fallait pour cela qu’une toute petite frange de l’extrême-gauche bascule dans la lutte armée.

La loi 152 du 22 juin 1975, dite loi Reale, votée avec l’appui du quatrième gouvernement d’Aldo Moro, est la pièce centrale d’une véritable législation d’exception : grâce à la loi Reale, les forces de l’ordre peuvent, entre autres choses, faire usage de leurs armes en cas d’attaque à main armée ou d’enlèvement, même quand il ne s’agit pas de légitime défense.

Entre 1975 et 1990, la loi Reale fait plus de 250 morts et près de 400 blessés. Années 80 : années de plomb ?

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Années 2000, on commémore comme jamais, en Italie et en France.

En Italie, il y a d’abord le jour de la Mémoire, jour de la libération du camp d’Auschwitz par l’Armée rouge en 1945. Ce jour-là, on doit se rappeler « la Shoah (extermination du peuple juif), les lois raciales de 1938, la persécution italienne des citoyens juifs, les Italiens qui ont subi la déportation, l’emprisonnement, la mort, et ceux qui (s’y) sont opposés. »

Le génocide tsigane, 200 000… 400 000 morts…, qui le saura jamais, est passé sous silence.

Ensuite, il y a le jour du Souvenir, jour où l’Italie céda la Vénétie julienne à la Yougoslavie, et aussi deux petits villages à la France, en 1947. À la fin de la guerre, se souvient-on, des ressortissants Italiens ont été les victimes des partisans communistes du général Tito.

Un juste retour des choses, donc, qui place 4 ou 5000 morts sur le même pied que les 6 millions de juifs exterminés par les nazis et leurs alliés. Effacés eux aussi les 13000 Slovènes exécutés ou morts de faim durant les vingt-neuf mois de terreur mussolinienne, avant que les nazis ne prennent le contrôle de la région.

Enfin, il y a le jour de la Mémoire des victimes du Terrorisme, fixé au 9 mai.

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Le 9 mai 1978, le président de la Démocratie chrétienne Aldo Moro est assassiné par les Brigades rouges.

9 mai 1978. Rome. Via Coetani. Le corps d’Aldo Moro, figure centrale du parti hégémonique depuis la libération, la Démocratie italienne, est recroquevillé dans le coffre d’une 4L rouge, à mi-chemin, exactement, entre le siège de la dite Démocratie chrétienne et celui du grand parti d’opposition, le PCI, parti communiste italien, d’Enrico Berlinguer.

Les jours de ces deux partis sont désormais comptés, et cette affaire signe en quelque sorte le début d’un déclin, malgré leur victoire apparente contre les Brigades rouges. L’un et l’autre en effet ont tenu jusqu’au bout la « ligne de la fermeté » contre les terroristes qui disent avoir frappé le « cœur de l’état ».

Le 19 mars 1978, quelques semaines plus tôt, alors que les deux grands partis s’apprêtent à signer un « compromis historique », Aldo Moro est enlevé, son escorte abattue sans autre forme de procès, via Fani, en plein cœur de Rome.

Si ce n’est les quelques radicaux de Marco Pannella, la seule force parlementaire à défendre les négociations avec les terroristes est le parti socialiste. Le parti socialiste sera le grand gagnant des années 80, avant que Bettino Craxi, son secrétaire général, et beaucoup d’autres responsables, ne perdent tout dans les scandales de l’Opération Mani Pulite, « mains propres ».

Bettino Craxi fera alors place libre à un homme qui, jusque là, n’était que son précieux communiquant, occupé à mettre en place un puissant Empire télévisuel et médiatique. Cet homme s’appelle Silvio Berlusconi. En 1978, il est Cavaliere depuis un an.

Le brigadiste Valerio Moruccci au téléphone, le 9 mai 1978 : « Nous accomplissons les dernières volontés du président en communiquant à la famille où elle pourra trouver le corps du député. Aldo Moro. Vous m’entendez ?
-Non, vous pouvez répéter… s’il vous plait.
-Non, je ne peux pas répéter, attention. Alors, vous devez communiquer à la famille qu’ils trouveront le corps du député Aldo Moro via Caetani. Là il y a une Renault 4 rouge. Les premiers numéros de la plaque sont N5. »

Depuis ce 9 mai 1978, depuis le jour où est mort Aldo Moro, tout le monde a entendu en Italie, à de très nombreuses reprises, le communiqué des Brigades rouges annonçant l’exécution. Tout le monde a vu les photographies et les films, en noir et blanc et en couleurs, de ce cadavre en position fœtale, devant lequel policiers et officiels s’écartent consciencieusement, pour que l’image en soit fixée, encore et encore, dans son absurde obscénité.

Pour qu’on immortalise la légende que le titre italien d’un film de Margarethe von Trotta habillera trois ans plus tard de ces mots : années 70, anni di piombo.

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Le 9 mai 1978, le même jour, à Cinisi, en Sicile, on découvre les restes de Peppino Impastato, déchiqueté sur une voie ferrée sans importance.

Mort, affirme-t-on, comme le milliardaire éditeur et apprenti terroriste, Gianfranco Feltrinelli, six ans plus tôt. Mort lui aussi avec la bombe qu’il avait mise en place, et qu’il s’apprêtait à faire sauter.

Seulement voilà, Peppino Impastato n’est pas un milliardaire, ce n’est pas non plus un éditeur, et ce n’est pas un terroriste. C’est un simple pionnier des Radios locales, qui dénonce chaque jour les ravages de la Mafia, à commencer par le clan où s’illustre sa famille. On a reconnu aujourd’hui ce que beaucoup savaient depuis toujours, car c’était là une évidence.

« Je sais,

écrivait Pier Paolo Pasolini, peu avant de mourir,

mais je n’ai pas de preuves. Pas même des indices. Je sais, parce que je suis un intellectuel, un écrivain, qui tente de suivre tout ce qui se passe (…) ; qui lie entre eux des faits même lointains, qui rassemble les morceaux désorganisés et fragmentaires de toute une situation politique cohérente et qui rétablit la logique là où semblent régner l’arbitraire, la folie et le mystère. Tout cela fait partie de mon métier et de l’instinct inhérent à mon métier. »

Les proches de Peppino Impastato n’étaient pas tous des intellectuels ou des écrivains. Sans doute, n’avaient-ils pas besoin de l’être pour savoir ce qu’il s’était vraiment passé.

Ce dont ils avaient besoin en revanche, c’était de quelqu’un pour parler en leur nom. De quelqu’un qui saurait convaincre, quand les mensonges officiels auraient fait leur métier de mensonges.

En 2001, l’écrivain et réalisateur Marco Tullio Giordana a consacré un film à Peppino Impastato, I cento passi. Les cent pas.

Ceux qui séparaient les locaux de sa radio à l’appartement de son oncle mafieux.

Années 70, silence de plomb.

 

III – Un monde en couleurs

 

Peppino Impastato, Radio Aut, 14/04/1978 western à Mafiopoli : (un coup de revolver sur fond de musique de western-spaghetti) « Oui, nous sommes dans les parages du Mafiel de Ville de Mafiopoli… de l’hôtel de ville de Mafiopoli. La commission du logement est réuni. À l’ordre du jour, l’approbation du projet Z- 11. Oui, oui, le projet Z-11. Il y a le grand chef. Ils sont assis. On attend le verdict… On attend le verdict. »

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Mai 78. Un maggio italiano. Qui peut se résumer, faut-il croire, en une seule de ses journées.

Le 9 mai.

Dix ans d’histoire pour en arriver là.

Aux victimes du terrorisme.

Pourquoi n’avoir pas choisi, à tant faire, celles d’un attentat aveugle et sanglant, les massacres de Milan ou de Brescia dont j’ai déjà parlé, ou le dernier d’entre eux, tiens, à la gare de Bologne, le 2 août 1980 : extrême-droite encore, et les mêmes responsabilités troubles, imbriquées, mêlées jusqu’au découragement, 85 morts, record battu.

Ou les victimes de la loi Reale, ou les menaces de coup d’état. Ou tous les morts de ce terrorisme endémique, épidémique, enraciné : la Mafia…

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De ce mois de mai 78, sinon de ces deux morts, celle de Peppino Impastato et celle d’Aldo Moro, celle du jeune idéaliste et celle du vieux politicien, de quoi se souvient-on ?

4 mai 78. Un mort… Non, deux.

En Italie d’abord, Roberto Rigobello, dit Rigo. Une attaque à main armée à des fins politiques, ou pour le dire à la manière d’alors, une « expropriation prolétaire ».

Une affaire qui tourne mal. Rigo cherche à libérer un de ses camarades resté coincé dans la porte d’entrée de la banque qu’ils ont dévalisée.

Quand il saute dans la voiture, il est déjà trop tard. Il meurt d’une balle qui le frappe dans le dos, tiré par un agent de police. La loi Reale.

Le jeune homme resté coincé dans la porte est arrêté, passe plusieurs années en prison et se suicide, beaucoup plus tard, en 1990.

Le même jour, à Paris, le militant communiste et anticolonialiste Henri Curiel est abattu par deux hommes dans l’entrée de son immeuble, devant la porte de l’ascenseur, rue Rollin. L’attentat est aussitôt revendiqué par l’OAS.

Et s’il s’était agi, au contraire, de membres de la DGSE, des services secrets français ?

L’hypothèse a ressurgi en France, en très haut lieu, quarante ans plus tard, en 2008.

Attendez.

Le 4 mai toujours : Mauritanie : 46 morts. Anonymes ceux-là. Des jaguars français ont bombardé le Front Polisario.
8 mai 78. En France, Jacques Mesrine, ancien para-commando en Algérie et ancien membre de l’OAS, s’évade de la prison de la Santé. Il mourra l’année suivante. Une légende persistante fait de lui un héros libertaire.
10 mai 78 : La femme d’un ex-diplomate soviétique passé à l’Ouest meurt à Moscou. Officiellement, il s’agit d’un suicide.
19 mai 78 : les paras de la Légion étrangère sautent sur Kolwezi, à l’appel du maréchal Mobutu, « roi du Zaïre », rempart contre le communisme.
 

Le même mois, un raid de l’Afrique du Sud fait 600 morts en Angola.

Des fedayins et des casques bleus français meurent en Palestine. Une tentative de prise d’otages à Orly fait 6 morts parmi les terroristes. Palestiniens eux aussi. Eh oui, déjà.

Qui se souvient de tout ?

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En Italie ?

Un film hors du temps, entièrement tourné en dialecte bergamasque, L’arbre aux sabots d’Ermano Olmi, remporte la Palme d’or à Cannes.

San Marino, la plus vieille république du monde après l’Islande, 30 000 habitants, reconduit la coalition entre communistes et socialistes au pouvoir.

Elle a été en 1947 le premier pays d’Europe de l’Ouest où des communistes ont pris part à un gouvernement.

Et le premier au monde où des communistes sont arrivés au pouvoir grâce à des élections. Plus de soixante ans plus tard, d’une coalition à l’autre, il y sont toujours. Librement.

Et puis ? Les morts d’Aldo Moro, de Peppino Impastato, de Roberto Rigobello, et de ceux dont avant ou après on a perdu ou gardé la mémoire, appartiennent au passé désormais.

Quoi qu’il arrive, à moins de ne pas voir ce qui se passe aujourd’hui autour de nous, nous cheminons plus vite que ces fantômes aux fronts troués.

Et puis, à s’en tenir aux morts, c’est comme si l’essentiel de ce maggio italiano restait encore à dire.

Deux dates en fait, souvent absentes des chronologies, ou présentées comme secondaires, parce que liées à des problèmes de société -comme si, au fond, la société ne devait pas être la fin de toute politique.

Les 13 et 22 mai 1978.

Deux lois, la 180 et la 194, toujours en vigueur aujourd’hui.

Plus de trente ans plus tard, la première, qui a mis fin à l’institution psychiatrique, demeure unique au monde.

La seconde a permis l’avortement.

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Comme celle qui autorisa le divorce, en 1970, la loi sur l’avortement est pour beaucoup l’œuvre du Parti radical. Sa présidente, Adele Faccio, a eu recours, comme tant d’autres femmes, à l’avortement clandestin. Elle en fait la déclaration publique en 1975, à l’instar des 343 femmes françaises qui, quatre ans plus tôt, avaient signé le manifeste du Nouvel Observateur. Adele Faccio, 55 ans, est aussitôt arrêtée et jetée en prison.

Fort heureusement, la loi sur l’avortement n’est plus vraiment pionnière aujourd’hui. Mais, elle n’a toujours pas d’équivalent dans la plupart des pays de l’hémisphère sud, dans quelques pays d’Europe aussi, l’Irlande, la Pologne, Malte, Chypre et… la République de San Marino.

Ailleurs, le droit à l’avortement est parfois menacé, dans son principe comme en Espagne, ou de manière plus indirecte dans son application, comme en France, où se multiplient les fermetures de centres de planning familial.

En Italie, 30% des médecins, sous la pression constante du Vatican, appliquent encore aujourd’hui l’« objection de conscience ».

30%, c’est à peu près le pourcentage obtenu pour l’abolition du droit à l’avortement, en Italie toujours, lors d’un référendum en 1981. En 1981 donc, la loi qui autorise l’avortement est maintenue en Italie. Elle sort même renforcée par ce large consensus populaire.

Mais il faut attendre 2009, soit vingt et un an de plus qu’en France, pour que soit légalisée la pilule abortive, mise au point en 1980.

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Revenons au 13 mai 1978, date de la première loi.

La loi 180 est connue sous le nom de loi Basaglia. On l’appelle ainsi parce qu’elle est l’œuvre du psychiatre Franco Basaglia, directeur de l’hôpital San Giovanni de Trieste. Cette loi, Franco Basaglia l’a préparée et il a su convaincre les députés de son bienfondé.

Revenons en arrière une dernière fois, juste un peu. Revenons en 1972. Cette année-là, les patients de l’asile San Giovanni de Trieste écrivent à celui qu’on appellerait en France le Président du Conseil Général. Ils écrivent une lettre signée Marco Cavallo :

Trieste, 12 giugno 1972
Ill.mo Signore
Dott. Michele ZANETTI
Presidente della Provincia di Trieste
 
Il mio nome è MARCO,
 
mon nom est Marco, de profession « cheval de trait à tout faire ». Je n’ai pas encore 18 ans et, pourtant, je ne me sens pas du tout vieux. Les zoologues considèrent que je peux travailler encore pendant une douzaine d’années.
C’est avec une profonde consternation donc, que j’apprends que le Conseil général présidé par vous a décidé la vente de ma pauvre carcasse au plus offrant.
Je dois sans aucun doute admettre que l’animal mécanique appelé à me remplacer, fournira des prestations indubitablement supérieures aux miennes. Je vous prie respectueusement cependant, de vouloir examiner sereinement et en toute objectivité mon “curriculum”.
Je souhaite que vous vous rendiez compte des conséguences, funestes pour moi, évidemment, que la dite vente comporte.
J’ai reçu, en effet, déjà, différentes visites de personnes ayant une forte odeur d’abattoir, me tripotant comme il se doit. À propos je me permets de vous suggérer de vous rendre dans un abattoir quelconque et d’assister au meurtre de l’un de mes semblables. Cela pourrait vous être extrêmement instructif.
Je vous implore, encore une fois, de bien vouloir ouvrir Votre cœur généreux à mon dilemme angoissé, aussi parce que, à ce qu’il me paraît, vous êtes démocrate-chrétien et Homme plein de sensibilité.
Si vous savez vous montrer miséricordieux avec moi – malheureux animal – vous jouirez de toute ma gratitude possible, tant de ma part que de celle de mes très fidèles AMIS, joyeux, en ce cas, d’endosser la charge financière de ma cause désespérée.
 
Avec mes hommages et encore … P I T I É !!!
 
Marco Cavallo, via San Cilino,16 – Trieste”
 
 

Cette odeur d’abattoir, on le comprend dans la lettre, est assez proche de celle qui plane dans l’air confiné de l’institution psychiatrique.

Aussi ces hommes qui signent du nom de Marco Cavallo requièrent pour l’animal une retraite décente et le droit de mourir en paix.

L’année suivante, les infirmiers, les médecins, leurs amis, le directeur d’asile Franco Basaglia, réalisent tous ensemble une sculpture de carton-pâte peinte en bleu, qu’ils nomment Marco Cavallo, en hommage au vrai cheval, mais aussi et surtout en réponse aux hommes qui, parlant en son nom, l’ont sauvé de l’abattoir.

Ce cheval bleu est une « machine de théâtre ». Son ventre est rempli de tous les rêves écrits par les patients de l’asile de Trieste, sur de petits bouts de papier.

« Machine de théâtre », car autour de lui, aussi, il est prévu de se rencontrer, de libérer la parole, de dire ce que tout un chacun a envie de pouvoir raconter ou entendre.

Mais ce cheval est si haut qu’il ne pourra jamais passer la porte.

Alors, le 25 février 1973, Franco Basaglia s’empare d’un banc de fonte et brise le mur d’enceinte de cet asile San Giovanni de Trieste dont il est le directeur. Le cheval bleu sort par cette brèche que nul ne saura plus jamais refermer. Avec lui, six-cents patients font le tour de la ville.

Le cheval bleu n’est pas le cheval de Troie. Il ne cache pas de guerriers mais porte en lui les rêves des vaincus du monde extérieur. Il n’est pas l’idole qui ouvre les portes d’une ville assiégée mais une allégorie timide et joyeuse qui brise le mur d’un monde en état de siège, pour que d’autres s’en échappent après lui.

En 1977, un an avant que ne soit votée la loi Basaglia, trois mille personnes se rassemblent dans l’hôpital de Trieste, désaffecté désormais.

Sur les murs couverts de graffitis, on peut lire ces mots :

 

« LA LIBERTÉ EST THÉRAPEUTIQUE. »

 

 

La loi est votée le 13 mai 1978. C’est la première fois qu’une institution répressive s’effondre par des voies légales sans qu’à aucun moment quelqu’un n’ait fait usage de la violence.

La seule force utilisée fut celle d’une volonté implacable : intellectuelle, morale, affective.

 

IV – Épilogue : un arc-en-ciel brésilien

 

 Voix off d’un documentaire sur les luttes féministes en Italie : « Rome, 10 juin 1977. Trois jours après qu’au Sénat, la loi sur l’avortement n’est pas passée. Nous avons été obligées encore une fois d’aller manifester. Nous étions des milliers de femmes de tout âge et de toute d’Italie à crier notre colère et notre protestation, toutes ensemble, contre la violence de l’avortement clandestin, au nom de toutes les femmes qui n’étaient pas avec nous. Celles qui par timidité ou par peur ne trouvent pas encore le chemin de la lutte. L’histoire le démontre. Si nous restons enfermés chez nous, si nous ne prenons pas notre destin en mains, personne ne nous offre rien. »

 

En 1979, Franco Basaglia se rend au Brésil, où il fait un cycle de conférences. En novembre il quitte la direction de l’hôpital de Trieste.

Au printemps 1980, il est atteint d’un cancer au cerveau, dont il meurt la même année, en août.

Dans l’une de ses conférences brésiliennes de 1979, il dit en quelques mots pleins de couleurs, ce qui s’est produit dans ces années qui ont permis la double émancipation du mois de mai 1978, la loi qui a ouvert les asiles psychiatriques et celle qui a permis l’avortement :

 

« Faibles et minoritaires, nous ne pouvons pas vaincre parce que c’est le pouvoir qui vainc toujours. Nous pouvons tout au plus convaincre, et dans l’instant où nous convainquons nous vainquons, c’est-à-dire que nous instaurons une situation de changement sur laquelle on peut difficilement revenir. »

 

FIN

 

Photo : Olivo Barbieri.

Ce texte a été présenté sous forme de conférence-performance au théâtre de l’Espace Kiron le 9 mai 2012 à 20 h 30, par Olivier Favier, avec la participation de Federica Martucci. La lecture était précédée d’une projection d’images et accompagnée des documents sonores signalés ici par des liens. Elle a été suivie de la lecture, par Federica Martucci, de quelques extraits d’Arrange-toi (titre original : La borto) de Saverio la Ruina, dans la traduction de Federica Martucci et Amandine Mélan.

Merci à Juliette Gheerbrant pour le montage des extraits sonores. Merci à Juliette Gheerbrant et à Federica Martucci pour leurs lectures patientes et leurs conseils avisés.

Pour aller plus loin :

  • Corps d’état de Marco Baliani (à paraître aux Éditions de l’Amandier). Un texte de théâtre-récit sur la double mort d’Aldo Moro et de Peppino Impastato, créé en mai 1998. On peut en lire un extrait sur ce site.
  • Sur Marco Cavallo, le cheval de l’antispsychiatrie et Marco Basaglia.
  • La rubrique « L’Italie derrière la mémoire » de ce site.

http://dormirajamais.org/mai78/