Accueil > Médias télé : « La liberté de manifester »

Médias télé : « La liberté de manifester »

Publie le mercredi 3 octobre 2007 par Open-Publishing

Justice . Quatre intermittents étaient vendredi devant les juges de Bobigny, pour avoir envahi le plateau de la Star Ac en 2003.

de Caroline Constant

C’était une action quotidienne parmi d’autres. Le 18 octobre 2003, les intermittents du spectacle, en lutte depuis plusieurs mois, envahissent le plateau de la Star Academy, sur TF1. Pour la première fois depuis le début du mouvement, quelques mois plus tôt, elle se passe mal. Vendredi dernier, soit quatre ans après quasiment, quatre intermittents, Dominique Collignon, Olivier Pousset, Philippe Fusellier et Thierry Levare, sont passés en procès devant la 14e chambre correctionnelle de Bobigny. Ils sont accusés d’« entrave à la liberté du travail », de « menaces de mort » et de « violences ». Mais, au final, n’est-ce pas la liberté de manifester, qui plus est sur son lieu de travail, qui est encore criminalisée ? La justice rendra son verdict le 16 novembre prochain. Le procureur de la République, Rémi Chaise, a requis entre un et quatre mois de prison avec sursis.

Pour Jean Voirin, de la CGT du spectacle, qui a témoigné au procès, ces réquisitions s’apparentent à une première victoire, puisque les peines requises sont légères. Et que le motif « d’entrave au droit du travail » a été « battu en brèche » par l’un des avocats, Michel Henri. « Les cadreurs, les ingénieurs du son ont pu continuer leur boulot, ce jour-là », assure le responsable syndical, qui rappelle que c’est TF1 qui a choisi d’arrêter la diffusion de l’émission. Dominique Collignon, l’un des quatre coaccusés, va plus loin : « Nous avons essayé de prendre la parole dans un lieu public, qui est aussi, pour beaucoup d’entre nous, notre lieu de travail. » Interdire aux intermittents la prise de parole reviendrait donc à les priver de droit d’intervention.

Quasiment toutes les actions des intermittents du spectacle, depuis 2003, se sont déroulées sans anicroche. Y compris lors de leurs prises de parole à la télévision. Pour Jean Voirin, « TF1 avait eu vent qu’on préparait quelque chose et avait renforcé les gardiens, avec des gros bras qui ont cogné. Alors qu’à chaque intervention, on mettait les formes pour entrer, on lisait notre message et on repartait, sans interrompre l’émission. » Pour le coup, c’est TF1 qui a décidé de stopper la Star Ac. Mais n’est pas partie civile. « Pendant l’été 2003, quand le Festival d’Avignon a été annulé pour faute de grève, beaucoup d’artistes nous ont dit : "Allez bloquer les émissions de télévision, parce que c’est là où sont massivement embauchés les intermittents" », explique Dominique Collignon. Parce qu’Endemol, producteur de l’émission, est connu pour être un gros employeur d’intermittents, histoire de faire baisser les coûts salariaux. Ce qu’a aussi rappelé Jack Ralite, appelé à la barre comme témoin.

Il n’empêche. Ce procès a un goût amer. « Quatre ans après, la casse des régimes des intermittents se révèle une catastrophe pour eux et pour la culture », s’agace Jean Voirin. Qui rappelle que les intermittents manifestaient aussi ce jour-là contre « là leur protection sociale, pourtant un droit constitutionnel ». Et qu’à ce jour l’injustice n’est pas réparée. Sans que la justice, prompte à défendre les deux millions « perdus » ce 18 octobre par TF1, ne s’en soit emparée. Vous avez dit justice de classe ?

http://www.humanite.fr/2007-10-02_M...