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Morts Colombiens en Equateur

Publie le jeudi 6 mars 2008 par Open-Publishing
6 commentaires

Morts Colombiens en Equateur

de GOTT Richard

paramilitares en Colombie (dont certains ont récemment avoué "avoir démembré leurs victimes vivantes" - voir fin article)

La mort de Raul Reyes et Julian Conrado, deux figures importantes des Forces Révolutionnaires Armées de Colombie (FARC), constitue à l’évidence un coup dur pour l’organisation de guérilla. Elle interrompra aussi le processus de libération des otages détenus par les FARC depuis de nombreuses années dans la jungle, processus qui avançait lentement sous les auspices du président Vénézuélien, Hugo Chavez. L’éventuelle libération de l’ancienne candidate à la présidence Ingrid Betancourt, libération dans laquelle le président français Nicolas Sarkozy s’était personnellement impliqué, parait désormais improbable et de nombreuses personnes pensent qu’elle est mourante. Les espoirs d’une libération imminente de trois sous-traitants de l’armée US s’envolent également.

A l’évidence, l’attaque nocturne du camp des dirigeants de la FARC, à environ un km à l’intérieur du territoire équatorien, dans la jungle au sud de la rivière Putumayo, était une décision politique prise par le président Colombien Alvaro Uribe et destinée à mettre fin au processus de paix orchestré par Chavez. Quatre politiciens colombiens, retenus en otages par les FARCS ces six dernières années, furent libérés et accueillis avec toutes les honneurs à Caracas. Reyes avait été un de ceux qui avaient organisé leur libération. Tué à l’âge de 59 ans, soit vingt ans de plus que Che Guevara au moment de sa mort, Reyes avait longtemps été plus un diplomate qu’un commandant de guérilla, bien qu’il ait souvent été photographié en treillis militaires et portant une arme.

Selon le président équatorien Rafael Correa, les corps des commandants des FARC et de 13 guérilleros portaient des pyjamas après qu’ils aient été bombardés durant leur sommeil sous des tentes en territoire équatorien. Les forces aériennes colombiennes, selon Correa, ont bénéficié d’une technologie avancée "et l’appui de puissances étrangères" pour localiser le campement et "massacrer" ses occupants. Le gouvernement d’Uribe est un proche allié des Etats-Unis et d’Israel, alors que Correa appartient au camp radical mené par Chavez. Après le bombardement, les troupes colombiennes ont franchi la frontière équatorienne pour récupérer les corps.

Depuis le 11 septembre 2001, les Etats-Unis ont demandé au gouvernement colombien de qualifier les FARC d’organisation "terroriste", un terme employé à présent aussi par l’Union Européenne. Pourtant, la guérilla colombienne est la plus ancienne de ces mouvements en Amérique latine, de bien avant l’actuelle obsession autour du "terrorisme". Leur dirigeant, Manual Marulanda, a d’abord dirigé les FARC au début des années 60 et a survécu jusqu’à ce jour, tandis que Raul Reyes a dirigé l’aile politique de l’organisation pendant de nombreuses années. Négociateur bien connu et promoteur de la cause des FARC en Europe et en Amérique latine, Reyes était un acteur clé dans les récents efforts menés par le président vénézuélien et la sénatrice colombienne Piedad Cordoba pour faire libérer quelques otages colombiens.

Les FARC ont connu de nombreux changements au cours des quarante dernières années, mais aucun n’a entamé leur capacité de survie. Un des changements a été l’accroissement de la production en Colombie de matières premières pour la cocaïne et l’héroïne, fournissant les marchés de la drogue aux Etats-Unis et en Europe, et qui jadis se cultivaient en Bolivie et au Pérou. Les surfaces cultivées consacrées au cannabis, au coca et à l’opium ont été multipliées par cinq en Colombie depuis les années 60, et les FARC ont depuis longtemps offert une protection aux travailleurs de ces plantations tout en prélevant un impôt auprès des barons de la drogue.

Un autre changement a été la montée en puissance des organisations paramilitaires, d’abord sponsorisées par les barons de la drogue, ensuite par l’état, qui ont recrée la situation de guerre civile, un phénomène particulier à la Colombie depuis le 19eme siècle. Parallèle à la montée des groupes paramilitaires, il y a eu le Plan Colombie, d’inspiration étatsunienne, qui est un plan d’assistance militaire initialement conclu par le président Clinton en 1999 et qui a propulsé la Colombie au rang du cinquième bénéficiaire de l’aide militaire étatsunienne dans le monde.

Un troisième changement a été l’effondrement de l’Union Soviétique et la perte d’influence du Parti Communiste Colombien, autrefois le principal soutien politique des FARC. A la mort en 1990 du talentueux dirigeant communiste Jacobo Arenas, Marulanda et Reyes se retrouvèrent seuls aux commandes.

Des négociations entre la guérilla et le gouvernement ont toujours eu lieu tout au long de ces 25 dernières années, mais la malheureuse expérience des années 80 a découragé les FARC. Après un cessez-le-feu déclaré en 1984, les FARC furent encouragées à créer un parti politique légal, l’Union Patriotique, et de présenter des candidats aux élections de 1985. L’Union Patriotique remporta un succès non négligeable en remportant six sièges de sénateurs, vingt-trois sièges de députés et plusieurs centaines de conseillers municipaux. Mais la suite fut un désastre. Après être sortis de la clandestinité, de nombreux partisans de l’UP furent assassinés. Plus de 4000 militants et dirigeants de gauche furent exécutés dans l’année qui suivit les élections. Les guérilleros se retirèrent dans les campagnes et jurèrent de ne plus jamais commettre la même erreur. De nouvelles négociations eurent lieu entre 1999 et 2002 mais les représentants du gouvernement n’ont pas inspiré confiance aux FARC. Lorsque Uribe devint président en 2002, il abandonna toute idée de négociation et opta pour une solution purement militaire.

L’année dernière, Uribe fut soumis à une pression interne intense pour faire plus d’efforts et obtenir la libération des otages, pression exercée aussi par de nombreux états d’Amérique latine ainsi que la France. Hugo Chavez releva le défi et, malgré l’absence de coopération d’Uribe, réussit à faire avancer les choses.

Les FARC vont rapidement désigner de nouveaux commandants, mais le massacre délibéré de Reyes et ses compagnons et la violation de la frontière équatorienne va interromptre pendant longtemps le processus de négociation, ce qui était clairement l’objectif recherché par Uribe.

Richard Gott est l’auteur de "Hugo Chavez and the Bolivarian Revolution" et de "Cuba : a New History."

Article original : Counterpunch, 3 mars 2008

Messages

  • Si les FARC décidaient malgré tout de libérer Ingrid Betancourt, ils prouveraient peut-être aux aveuglés par la propagande, une bonne fois pour toutes, qu’ils ne sont pas une organisation terroriste, qu’ils n’ont rien à voir avec les barbares para-militaires ni avec le narco-trafiquant URIBE.

    Mais s’ils ne le font pas, je n’irai pas le leur reprocher non plus.

    (k)G.B.

    • Mêêêêêê...! Encore faut-il qu’ils PUISSENT !

      Il est bien évident que Uribe a tout intétêt à mettre sur le dos des FARC la non-libération d’Ingrid, et qu’il va s’employer au mieux à la rendre impossible ! S’il pouvait rendre les FARC responsable de son décès, il aurait peut-être... comment dire... des signes de plaisir physiques (visibles par une déformation du pantalon) ! Il n’est donc pas exclu que la vie d’Ingrid soit en danger de part ce désir intense ?

    • ILS LE FERONT (libérer I .BETENCOURT) c’est le seul moyen de

      faire tomber l’assassin URIBÉ .Il le feront avec l’aide de CHAVEZ

      ET CORREA et pour qu’enfin la Colombie retrouve la paix

      et comme l’a si bien dit MORALES pour la BOLIVIE

      " aujourd’hui c’est le peuple qui est souverain ,dehors les

      multinationnales " j’ajoute les USA QUI VEULENT GOUVERNER LE

      MONDE . Restez chez vous BUSH et compagnie ,il y a tant a faire

      chez vous pour restaurer la JUSTICE et le bien être envers vos

      concitoyens ,cesser de jouer aux MALFAISANTS , AUX CRIMINELS

      partout dans le monde avec l’aide des non moins MALFAISANTS

      et CRIMINELS SIONNISTES ISRAEL

    • URIBE a évidemment tout intérêt à ce qu’Ingrid Bétancourt meure, il pourrait dès lors espérer une réaction côté Français, soutien financier, ou militaire, ou même juste diplomatique.

      C’est pourquoi j’espère sincèrement, pour son bien d’abord (oui oui, d’abord), qu’Ingrid soit libérée, pour le bien des autres otages aussi, qui auront une fois de plus la confirmation que les FARC, lorsqu’on traite équitablement avec elles, y répondent de manière positive pour eux, et enfin pour les FARC elles-mêmes, pour leur image, pour leur combat, leur crédibilité révolutionnaire oserais-je même dire ?

      Je pense qu’à l’heure actuelle, il devient urgent qu’elles renoncent à la prise d’otages civils (je ne parle pas de prisonniers militaires) non impliqués directement dans le pouvoir politique d’URIBE ou dans les milices paramilitaires d’extrême-droite.

      (k)G.B.

    • je suis d’accord, ils vont le faire, mais ce qui m’inquiète c’est ce salaud
      d’ Uribe et ses paramilitaires, sous la tutelle de bush, qui vont faire le maximum, pour que cela échoue.

      Vraiment de tout coeur avec les Farcs et Chavez

      lolita

    • Pour les FARC, la situation a changé : elles ne représentent plus un îlot (même grand) de Résistance à l’impérialisme, au pillage de la planète par les multinationales, à la mise en esclavage des humains par les mêmes, au milieu d’une Amérique Latine mise en coupe par des dictateurs US.

      Il y a maintenant autour de la Colombie des chefs d’Etat qui ne mangent pas dans la main des multinationales esclavagistes et qui, en vrai chefs d’états, sont soucieux de leur peuple. Et qui ne combattront pas les autres mouvements de Résistance. Qui les appuieront éventuellement s’ils n’ont pas de méthodes vraiment crades comme la prise d’otages civils. Chavez a peut-être fait sentir cela aux FARC : qu’il vaut mieux, maintenant que c’est possible, renoncer à ces méthodes en échange d’appuis politiques propres.

      Seulement, ça ne plait pas à URIBE. Il voudrait bien arriver à prouver que les FARC écartèlent les humains vivants comme le font ses paramilitaires. Il est bien sûr OK pour les faire écarteler par ses pittbulls afin de faire croire que ce sont les FARC.

      Donc, il fera tout pour tuer les otages avant leur libération. DONC, les meilleurs protecteurs des otages, ce sont les FARC !

      Et que Notre Caniche National ne nous couine pas son petit couplet "adjurant de ne pas commettre l’irréparable" : dès le lendemain du massacre, les FARC ont dit qu’ils poursuivraient la libération des otages !!! La mémoire immédiate ne tient pas quelques jours ? La cocaïne rend Alzheimer ?