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NOTRE AGRICULTURE SE JOUE DE QUIMPER A MOSCOU
par Boris Rannou
Publie le vendredi 4 septembre 2015 par Boris Rannou - Open-Publishing6 commentaires
Génèse de la politique agricole française

L’image d’ Epinal de l’agriculteur en salopette avec sa fourche, chantant gaiement les moissons, est bien révolue. Le monde de l’agriculture a bien évolué. La mécanisation des tâches, à partir du début du XXème siècle a produit une économie rurale tournée vers la productivité. L’après-guerre, laisse un monde à reconstruire en 1945. Tout s’accélère dans les années 60 : le rêve semblait beau : une poignée de travailleurs allaient pouvoir subvenir au besoin de millions de gens. Tous le monde serait gagnant : des produits à moindre frais, des normes respectueuses de l’environnement et du consommateur, un juste retour sur investissement pour le paysan.
La PAC a permis d’ériger une certaine vision de ce que devait être ce marché de demain. Ces principales visées avaient pour objectifs :
d’assurer un niveau de vie équitable à la population agricole ;
de stabiliser les marchés ;
de garantir la sécurité des approvisionnements ;
d’assurer des prix raisonnables aux consommateurs.
Au bénéfice des agriculteurs :
des aides indirectes, les « prix garantis », qui leurs assurent un prix minimum pour leurs productions. Disposition actuellement en quasi désuétude ;
des aides directes au revenu depuis la réforme de 1992 : en échange d’une baisse des prix garantis, l’UE verse des aides proportionnelles à la baisse des prix garantis.
Mais voilà :
Cette aide est depuis 2005-2006 « découplée », c’est-à-dire qu’il y a de moins en moins de liens (voire plus aucun lien) entre la production de l’exploitation et le montant des aides.
En conséquence, la crise rencontre un modèle économique mondiale, mais surtout européen qui est déconnectée du marché : le producteur allemand peut bénéficier de salariés en emploi précaire, payés au lance-pierre, le producteur espagnole à lui moins de cotisations sociales et tous deux ne sont surtout pas limités par le nombre d’animaux à exploiter : la ferme des milles vaches est une réalité tant outre Rhin, qu’au delà des Pyrénées.
Naissance tumultueuse des syndicats

A partir de 1946, naît la FNSEA : syndicat aujourd’hui ultra majoritaire, qui décide de la pluie et du beau temps sur le monde agricole. Quelques 30 ans plus tard, face à la mondialisation son « Paysan Directeur Général » Alexis Gourvennec déclarait :
« Nous devons abandonner à leur sort les minables qui ne nous intéresse pas. C’est à ce prix et à ce prix seulement que nous gagnerons la bataille de la production. Je ne dis pas que cela va sans poser des cas sociaux difficiles et dignes d’intérêt. Mais il appartient à l’ Etat de leur venir en aide, et non à la profession qui ne peut se permettre de traîner des boulets dans la bataille internationale en cours et qui n’est jamais gagnée » (source Fakir numéro d’août 2015)
Aussi, ces « minables » tournés vers une agriculture raisonnée, trouveront en Bernard Lambert leur fer de lance qui leur permettra de créer la confédération paysanne. Deux modèles s’affrontent donc : l’un tourné vers les subventions de l’ Etat et l’alignement sur le productivisme international, et l’autre sur une planification privilégiant le circuit court et les produits de meilleurs qualité.
La crise Ukrainienne en toile de fond

Avec ces deux modèles radicalement opposés, et avec beaucoup moins de poids d’un côté, il faut s’interroger sur l’origine actuelle de cette crise au delà des divisions interne : c’est en effet tout un modèle qui permet de nourrir une population qui est mis à l’épreuve :
La crise en Ukraine qui débute en 2013, trouve ses répercussions le 6 août 2014 en France et en Europe lorsque Vladimir Poutine, en opposition au gel de certains avoirs Russe à travers le monde, décide de ne plus importer certains produits Européen : Porc et lait principalement. La filière Bretonne est donc directement impactée : la Russie importait 747 000 tonnes de viande de porc et 2 milliards de litres de lait.
Comment faire face à la crise avec ce contre coup économique, provoqué dans une certaine mesure par les européens eux même ? Nos agriculteurs victime de la politique ? Victime d’eux même en ayant accepté longtemps des subventions prédatrices pour l’environnement comme dans les années 80 et la pollution des eaux de rivières par exemple ? Victime de vouloir exploiter des animaux comme ce minerai que l’on utilise dans les abattoirs pour produire des viandes toujours moins chères ?
Les questions que soulèvent ce conflit au portes de l’ Europe montre bien que nous vivons dans une Europe incapable de s’assumer tant politiquement qu’économiquement, et toujours à la merci des Etats-Unis, comme en atteste le très controversé Traité Transatlantique en négociation.
Quel modèle pour demain ?

Nous avons tous à cœur de défendre un modèle économique bon pour nous et pour la planète. Nous souhaitons tous que nos paysans vivent du fruit de leur travail et que les animaux soient traités avec un minimum d’humanité.
Mais comment concilier des coûts de production face à la concurrence internationale ? Les réponses à adopter sont systémiques et le politique qui s’y attellera doit faire preuve de courage et de vision non pas à court et moyen terme, mais bel et bien à long terme :
Rendre les moyens de production aux agriculteurs :
Que ce soit de l’élevage (engrais) aux semences, aucune compagnie ne doit pouvoir s’arroger le monopole de la diffusion du vivant. L’ Etat doit assumer son rôle et nationaliser l’entreprise la plus efficace en terme de rendement en même temps qu’elle produit de la qualité. Les agriculteurs en coopérative, doivent pouvoir fixer un prix d’achat raisonnable qui leur permet de nourrir leur bête et planter leur semailles sans pertes.
Privilégier la filière bio
Grâce à de nouvelles subventions, ceux qui décident de passer au tout bio (élevage en plein air à raison d’un minimum horaire quotidien, nourriture non chimique, espace viable) verront leur choix valoriser par des revenus constant grâce à des cotations garanties à minima par l’ Etat.
Orienter la production vers une agriculture raisonnée
En cela il faut privilégier le circuit cours : les AMAP doivent faire l’objet d’une étude sérieuse pour voir comment distribuer leur produit aux grandes surfaces, sans que celles ci ne cherche à vampiriser leur revenu ( mise en avant de la filière locale, produits plus chers mais de qualité, espace d’échange une fois par semaine dans le magasin avec l’éleveur ou le producteur laitier ). Le but est de faire de l’hyper marché, le lieu d’un marché où le consommateur, le détaillant et le producteur puisse identifier clairement les besoins de chacun.
Vers une autre société
La valeur ajoutée de ces produits agricoles présentés en supermarché, doit permettre d’initier un nouveau rapport à l’alimentation en générale : la consommation excessive de viande, de produits gras, de produits transformés chimiquement, doit céder sa place à un marché raisonné et « naturel », où l’hyper deviendrait un lieu de rencontre et d’échange. Pour cela , l’ Etat doit interdire la spéculation à son échelle sur les denrées alimentaires, et donner un essor significatif au circuit cours ( valorisation du locale sur l’internationale, comité d’étude sur l’impact environnementale et social, action culturelle visant à la promotion des énergies départementales, régionales et nationales )
Tout n’ira pas sans heurt, mais si nous voulons que nos enfants connaissent un monde moins « fou », il faut que dès à présent chacun prennent conscience qu’il en va de son devoir pour édifier une société plus juste.
Révolutionnairement Vôtre,
Boris Rannou.
Messages
1. NOTRE AGRICULTURE SE JOUE DE QUIMPER A MOSCOU, 4 septembre 2015, 19:08
"" les AMAP doivent faire l’objet d’une étude sérieuse """
en effet elle sont assez critiquées pour leur produits couteux,leur circuit pas si court que cela et une transparence douteuse des conditions de production.
Sur 5 personnes désireuses de soutenir les AMAP dans mon coin,4 ont arréte au bout ’un an ,écoeurées et se sentant manipulées,et pourtant c ’était des personnes tres impliqués dans une autre agriculture.
1. NOTRE AGRICULTURE SE JOUE DE QUIMPER A MOSCOU, 4 septembre 2015, 21:52, par Marc
et bien je ne connais pas l’amap dont tu parles et de ton coin, mais je vais te de parler de mon amap dont c’est le 10eme anniversaire, elle se trouve dans la ville où j’habite à Rive de Gier près de St-Etienne, ci-joint le dépliant de présentation, il y a 60 familles adhérentes tous les producteurs viennent des communes voisines à moins de 10km, ils sont tous en agriculture paysanne labellisés bio ou pas, sur les prix, ça tombe bien puisque je viens de faire des comparaisons de prix entre carrefour market et l’amap :
lait de l’amap (lait cru, labellisé bio) : 1euro le litre ; lait de carrefour lactel UHT : 0,91e le litre, le lait bio de carrefour : 1,30 e le litre ; je vous informe que le paysan qui vend son lait au laitier destiné pour les magasins de la gde distribution il le vend 30 centimes le litre.
les oeufs de l’amap labellisé bio : 2 euros les 6, oeufs de carrefour : 1.70 les 6, les oeufs bio de carrefour 2,82 les 6.
dans le panier de legumes labellisés bio de l’amap : les tomates 2,30 le kg, les courgettes 2,20 le kg,
A carrefour : les tomates 2,49 le kg, les tomates bio 5,16 le kg ; les courgettes 1,49 le kg ; les courgettes bio 3,10 le kg
ceux sont quelques exemples, je mange bio pour un prix identique voire moins qu’à carrefour, je fais vivre les paysans en circuit court, ils ne vivent pas sur l’or, mais pour eux ça va, et je ne fais pas vivre les capitalistes de Carrefour, chacun son camp à toi de choisir.
Marc
2. NOTRE AGRICULTURE SE JOUE DE QUIMPER A MOSCOU, 5 septembre 2015, 09:06
choisir son camp ?
mon camp n ’est pas de devenir le pigeon des AMAP,les prix que tu cites,tant mieux pour toi,ne sont pas ceux de mon AMAP,la certification Bio laisse à désirer ,et le circuit court n’en est pas un pour beaucoup.
4 personnes sur 5 on fait le calcul sur tout un panier sur trois mois et en ont déduit que ç’ était cher,plus cher que sur un marché de village (calcul fait et refait toute les semaines sur 3 mois ),de plus le choix était non seulement excessivement réduit ,mais de plus avoir 3 semaines de suite 5 betteraves dans son panier c ’était pas trop top.
pas de balance pour vérifier le poids !! transparence : zéro
Quand on regarde qui va aux AMAP ,on trouve surtout des professions largement au dessus du smic(ne parlons pas du rsa qui ne peut absolument pas y aller)
peut être y en a t il de bien,c ’est ton cas,ici dans mon coin (haute normandie) avis assez négatif .
Question qualité gustative, avis partagé ,certains ont trouvé les produits meilleurs,d’autres ni pire ,ni meilleur,question de gôut .
je referai un essai ...
3. NOTRE AGRICULTURE SE JOUE DE QUIMPER A MOSCOU, 6 septembre 2015, 05:54
bonnes remarques.
L’équation d’une AMAP c’est d’atteindre une taille critique. N’importe quelle production doit avoir ’en face’ sa filière. Sinon se replier sur la solution des jardins partagés ou des jardins ouvriers (hormis l’élevage). Et plus généralement, les AMAP devaient amener une réelle transparence économique, qualitative et des pratiques dans la conduite d’une exploitation maraichère. Dans les faits, cela a vite été esquivé, voire même dénaturé en intégrant dans les coûts de production, le fait que l’exploitant rachète le foncier à l’AMAP.
Autre remarque : la ’vente directe’ ne signifie pas obligatoirement une immédiate proximité géographique. C’est bien souvent une activité complémentaire sur l’exploitation qui permet de se payer le beurre dans les épinards...et au prix de vente de l’Iphone ou de la berline allemande...
Ce débat peut également se prolonger sur la fumeuse écotaxe...quand on piste un morceau de porc d’un élevage français à l’étale d’une boucherie parisienne via le marché de gros de Rungis et le fin fond de la Roumanie, là où il est découpé (abattu ?).
2. NOTRE AGRICULTURE SE JOUE DE QUIMPER A MOSCOU, 4 septembre 2015, 23:51, par vero
nous avons un grand besoin de l’agriculture entière et non celle du capitalisme pressant les raisins et abattant les porcs et autres , avant le jus.
Le capitalisme en est la source même, SANS LE JUS .
Une viande, volaille , légume, etc., ne peut être accessible a tous ; a cause de ces financiers capitalistes.
3. NOTRE AGRICULTURE SE JOUE DE QUIMPER A MOSCOU, 5 septembre 2015, 18:09, par JO
Ouais ! Il me semble plutôt que nos décideurs se soient une fois de plus tirés un e balle dans le pied ! Ne serait-ce qu’avec l’embargo contre la Russie ! Beaucoup d’agriculture que ce pays sait faire ou trouver ailleurs ! Et sait faire aussi rendre coup pour coup ! Quoiqu’il en soit le malaise du monde agricole n’est pas nouveau , il serait temps qu’ils s’aperçoivent que leur syndicat des gros céréaliers et des riches propriétaires terriens a toujours revendiqué dans l’intérêt de ces derniers et non dans celui de l’intérêt général ! L’évidence est que les consommateurs devront encore mettre la main à la poche ! Ce n’est pas bien sûr ces grigous de nantis privilégiés qui trinqueront !