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Noël Dubus derrière l’affaire Adem Uzun
par Maxime Azadi
Publie le samedi 20 juillet 2013 par Maxime Azadi - Open-PublishingAssis dans un bar de Montparnasse, sur la rive gauche de la Seine, sans savoir qu’il était tombé dans un piège minutieusement organisé. Quand la police est entrée dans le bar, le 6 octobre 2012 vers 16 heures, cette opération en dix minutes, considérée comme une « réussite » par les services français, avait atteint ses objectifs.
Si quelqu’un a encore un doute sur le fait que le dirigeant kurde Adem Uzun (emprisonné à la maison d’arrêt "La Santé" depuis le 6 octobre 2012) est tombé dans un piège organisé pour le compte des services français de sûreté de l’Etat et se rallie malgré tout à la version officielle de son arrestation qui le décrit comme le commanditaire politique d’un absurde trafic d’armes de Paris vers le Kurdistan irakien, ce quelqu’un devrait lire l’article sur Ziad Takieddine du magazine Paris Match du 4 juillet 2013 (Lire ici l’article du Paris Match) pour dissiper définitivement son doute.
DES PIEGES SUR COMMENDE
Selon des informations fiables obtenues par le site d’information « ActuKurde », Adem Uzun est la victime d’une machination politico-judiciaire organisée par le même personnage qui a piégé M. Takieddine pour le compte de la justice française, un dénommé Noël Delarosa qu’en réalité s’appelle Noël Dubus. Ce qui met en évidence l’existence d’une "cellule" au sein des services français qui organise sur commande de véritables provocations à commettre des infractions pour piéger des cibles politiques prédéfinies.
Dans le cas de M. Takieddine, Noël Dubus a mis à dispositions ses contacts et ses services pour lui faire attribuer un (faux) passeport diplomatique de la République dominicaine qui lui aurait permis d’abandonner le territoire français malgré les restrictions imposées à ses mouvements par la justice française. Sauf que les enquêteurs "bizarrement" savent déjà tout et procèdent à l’arrestation de M. Takieddine une fois qu’ils retrouvent une trace de ce "passeport" dans son Ipad. Suite à son arrestation, et "en utilisant son état de faiblesse et son grand désarroi après deux années d’un contrôle judicaire particulièrement rigoureux" selon les mots de son avocat Dominique Penin reportés par Paris Match, M. Takieddine avoue son implication présumée dans des affaires de financement de la campagne présidentielle d’Edouard Balladur en 1995.
ANTOINE, UN AGENT DES SERVICES FRANÇAIS
Dans le cas de M.Uzun, c’est encore ce Noël Dubus qui s’occupe des détails de l’opération montée contre le dirigeant politique kurde qui a été un des principaux négociateurs pour la paix entres Turcs et Kurdes lors du "processus d’Oslo". Adem Uzun est un homme de paix bien connu pour son action diplomatique en faveur de la réconciliation en Turquie. Noël Dubus est finalement l’animateur du scénario monté contre M. Uzun. Ce scénario prévoit, à total insu de M. Uzun, la "négociation" par un certain agent "Antoine" d’un (faux) transfert d’armes vers le Kurdistan irakien avec un contact kurde basé à Paris qui n’a jamais eu des contacts avec le leadership kurde.
Selon un article paru mi-juin dans l’Express, cinq rendez-vous ont été organisés par des services français pour effectuer « la vente » des armes anti chars et des missiles anti aériens pour un montant de deux millions d’euros.
NOEL DUBUS « AUX COMMENDES »
À la fin de cette "négociation", c’est "Antoine" qui demande de rencontrer Adem Uzun car il dit nécessiter d’une caution politique d’un dirigeant kurde en échange d’un échelonnement du présumé paiement de la (fausse) transaction. Noël Dubus s’activera donc pour faire en sorte qu’Adem Uzun rencontre une seule fois "Antoine" dans un bar de Montparnasse, en faisant annoncer au dirigeant kurde qu’il s’agit plutôt d’une habituelle rencontre politique. Comme par hasard, M. Uzun sera arrêté pendant cette rencontre et il sera accusé du délit d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, malgré que sa surveillance étroite de la part des juges antiterroristes français dans les six mois précédents n’ait pas permis de trouver des éléments contre lui.
Même si M. Takieddine et ses sales affaires qui impliqueraient des responsables politiques français ne sont pas le sujet de cet article, dans les deux cas, c’est le même homme "aux commandes". Un personnage, raconte Paris Match, "qui traîne une réputation sulfureuse, qui a déjà effectué plusieurs séjours à l’ombre. Ancien employé des postes, qualifié d’escroc au renseignement par certains services de police –il n’hésite pas à se présenter comme un agent secret -, Dubus a été condamné dans de multiples dossiers d’escroqueries, souvent mêlés à des sombres histoires de barbouzes, aux Comores ou en Côte d’Ivoire. (…) Sans que l’on sache d’où vient sa bonne fortune, il occupe, Avenue Foch à Paris, un luxueux appartement précédemment loué par Bachir Saleh, l’ancien bras droit de Kadhafi".
QUEL EST LE PRIX DE CES PIEGES ?
On pourrait peut-être se demander s’il existe des tarifs pour les services rendus, y compris dans les deux cas ci-dessus mentionnés. Combien peut "coûter" le piège contre Adem Uzun ? Qui aurait payé ?
Dans le cas d’Adem Uzun, l’affaire prend une véritable dimension politique et diplomatique que la justice et le gouvernement français ne peuvent pas ignorer. M. Uzun est un réfugié politique kurde qui réside depuis de longues années en Europe et qui, pour le compte du Congrès National du Kurdistan, une organisation pleinement légale en Europe, a participé aux premiers pourparlers secrets de paix à Oslo avec les représentants du Premier Ministre turc Erdogan, y compris avec le chef en personne des services turcs de sûreté de l’État. Tout le monde, y compris les services européens de sécurité, est au courant de son rôle politique pacifique et constructif dans le processus d’Oslo.
UNE ALERTE LANCEE PAR ANKARA
La logique voudrait qu’il soit considéré comme une "ressource pour la paix" et qu’il participe aussi à l’actuel "processus de paix" mené directement par Abdullah Ocalan et Tayyip Recep Erdogan. Mais il faut rappeler qu’après la rupture des pourparlers d’Oslo et le changement radical de politique de la part d’Erdogan vis-à-vis des Kurdes, visant l’éradication militaire pure et simple du PKK, une alerte avait été lancé d’Ankara vers la France comme quoi Adem Uzun été "le commanditaire politique" d’un possible transfert d’armes de Paris vers Erbil. Comme déjà rappelé, des longs mois de surveillance n’ont rien donné contre M. Uzun, ce sera donc "Noël" qui se chargera de le piéger. Dans le cas de M. Takieddine on savait déjà quoi chercher sur son Ipad ; dans le cas de M. Uzun, lors de la rencontre avec "Antoine", on sort un papier déjà tout prêt où des chiffres sont marquées -avec, on imagine, le montant de la (fausse) transaction d’armes- pour marquer davantage la supposée implication de M. Uzun dans cette sombre affaire.
LA POLICE BELGE REÇOIT UN MAIL ETRANGE DU JUGE FRAGNOLI
Une autre source affirme que le juge antiterroriste Thierry Fragnoli, connu pour ses opérations sensationnelles contre la communauté kurde, aurait envoyé le 5 octobre 2012 un mail à la police belge pour l’informer que le dirigeant kurde sera arrêté le 6 octobre. Donc, tout est organisé à l’avance, même le jour de l’arrestation d’Adem Uzun. Dans un article de l’ActuKurde, paru le 3 juin 2013, le juge Fragnoli avait été mis en cause par un mail qui révélait les relations du juge avec les milieux nationalistes turcs (Lire ici l’article de l’ActuKurde)
PROVOCATION A COMMETTRE UN DELIT
Au-delà des détails de ces feuilletons politico-judiciaires, certaines considérations s’imposent. Tout d’abord, la provocation à commettre une infraction ou un délit est sévèrement censurée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme, et la jurisprudence de la Cour française de Cassation va dans le même sens. Dans les deux cas, Takieddine et Uzun, tous les éléments sont réunis pour qu’une enquête soit rapidement diligentée par les Ministères compétents pour vérifier si des fausses preuves ont été fabriquées afin de piéger les deux cibles. Il va de soi que ces "activités" sont bien programmées à l’avance, ce qui implique l’existence d’une cabine politique de programmation qui fixe les objectifs à atteindre : cette "cabine" fait appel à des personnages troublants comme Noël Dubus et utilise des méthodes illicites. Les Ministres Christiane Taubira et Manuel Valls n’ont rien à dire à ce propos ? Trouvent-ils ceci normal et compatible avec l’état de droit ?
LA JUSTICE DOIT INTERPELER LA « CELLULE DUBUS »
Il est de plus en plus évident que l’arrestation d’Adem Uzun a été gérée du côté français pour satisfaire une demande politique des autorités turques, et que pour en arriver là on a fait appel à des "professionnel de la machination". D’autres personnes impliquées dans son dossier ont admis d’ailleurs que M. Uzun n’a rien à voir avec les accusations qu’on lui conteste. Est-il acceptable dans ses conditions, aggravées par les révélations de Paris Match, que M. Uzun soit encore en prison ? Estimant que son client a été piégé, Me Antoine Comte, avocat d’Uzun, a déposé en Cour de Cassation une requête en annulation de la procédure : la justice française aurait tout à gagner en crédibilité en lui donnant pleine et rapide satisfaction. Plutôt qu’investiguer sur Adem Uzun, il faudrait que la justice française interpelle la "cellule Dubus" et mette à jour son réseau politique, opérationnel et financier.
Par Maxime Azadi
Source : ActuKurde.fr
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