O TOULOUSE !

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Le jour où la Police m’empêche de filmer

Il est 20h, on est jeudi, devant le Breughel près de la place Arnaud Bernard.
Cela fait une heure que ça dure : la police municipale, la BAC, les chiens, les flash balls, les « en civil » et les habillés comme des CRS, joyeusement accompagnés de leur commissaire en chef.

Ils sont au moins 40 et ont commencé leur tournée, bar après bar. Nous incitent à rentrer, à nous taire, à ne pas filmer, à nous en aller.

Au début, on ne comprenait pas. On se disait « Ils cherchent un mec, quelque chose se passe ».
Et puis, quand on les a vus arriver près de nous, on a compris. En 2014, il y a les élections. En fait, ceux qu’ils cherchaient, c’était nous. Ceux qui sont debout, dehors, qui discutent, qui vivent.

Monsieur Cohen, c’est vous qui nous envoyez tout ce beau monde ?

Nous sommes à Arnaud Bernard. Quartier tristement reconnu pour ses trafics et son insécurité la nuit à Toulouse. Le mois dernier, une de nos connaissances en a déménagé car elle en avait marre de se faire emmerder en rentrant chez elle. Le mois dernier, une jeune femme s’est faite agresser à une heure du matin, la police a mis UNE HEURE à arriver.

Cela fait trente ans que les riverains, associations, bars et restaurants du quartier demandent à ce que l’on agisse. Bien sûr qu’il y a des nuisances, bien sûr qu’il y a des trafics.
Le monsieur qui discute avec le commissaire sur la video, c’est un monsieur qui anime des cafés philo.
Il est 20h. Les gens qui sont en terrasse sortent du boulot et boivent l’apéro.

Monsieur Cohen, croyez-vous qu’en agissant ainsi vous faites autre chose que de l’intimidation ? Lâche intimidation qui plus est, car il est 20h et vous savez aussi bien que moi que ce n’est pas à cette heure-ci que l’on a besoin de la Police. Pas dressée comme ça, contre nous, contre votre jeunesse.

Quel est le message envoyé à votre jeunesse : ne restez pas dehors, vous encouragez les nuisances ?
C’est ce qu’explique le commissaire à ce philosophe qui anime un atelier en extérieur et travaille dans le quartier depuis des années. Vous croyez, vous, Monsieur Cohen, qu’un café philo encourage les nuisances, à 20h, un jeudi soir ? VOUS CROYEZ, VOUS, AU PS, QUE LA VIE SOCIALE D’UN CAFÉ PHILO ET D’UN BAR, À 20H UN JEUDI SOIR, MENACENT LA TRANQUILLITÉ ET LE BONHEUR DE VOS RIVERAINS ?

Quel est le message envoyé à vos riverains ? « Ne vous inquiétez pas, nous agissons, la BAC est là, la Crim’ aussi, regardez, nous sommes là » ? Vous y croyez ?
A 20h ? « A 23h, nous serons devant notre télé par contre ». Ne parlons pas de 2h du matin, là y a plus personne.

Quel est le message envoyé aux trafiquants en tous genre ? « Il ne sert à rien de continuer, nous savons qui vous êtes » ? Non, vous les faites rire en essayant vainement d’intimider 50 jeunes adultes qui boivent un verre en terrasse tranquillement. Vous les faites vraiment rire, ils se marrent là.

Quel est le message que vous m’envoyez à moi, vous qui m’arrachez la caméra ?
Vous ne faites qu’augmenter mon sentiment de révolte.
Vous ne faites que me prouver que tout ça, c’est d’une hypocrisie révoltante.
Vous êtes violents, symboliquement. Vous avez fait entrer 50 jeunes dans un bar en l’encerclant de vos brassards et de vos chiens. Vous avez provoqué la colère de 50 jeunes qui ne faisaient rien d’autre qu’avoir une vie sociale. 50 jeunes, qui ne voteront pas pour vous. Mais vous avez dû faire vos calculs. Vous savez ce que vous faites. Vous aussi, vous avez tout filmé. Vous m’avez filmée, moi et tous les autres, qui n’avons rien à nous reprocher et qui aspirons aussi à la tranquillité. Qui payons des impôts, travaillons et votons.

En m’enlevant ce téléphone des mains, vous m’avez prouvé une fois de plus votre hypocrisie. Merci.
En me filmant sans m’autoriser à vous filmer, vous avez empêché ma liberté. Merci.
Cela s’appelle de la violence, et c’est vous qui la provoquez.

svR Claire Mirabelle.
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