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On s’en doutait, maintenant on en est sûr !

Publie le mercredi 7 septembre 2005 par Open-Publishing
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Les leaders noirs récusent le terme de "réfugiés" pour qualifier les sinistrés en quête d’abris

de Corine Lesnes

Le président Bush a ostensiblement donné raison, mardi 6 septembre, aux responsables africains-américains qui protestent contre l’utilisation du terme de "réfugiés" pour désigner les habitants qui ont perdu leur maison. "Ce ne sont pas des réfugiés", a dit le président, en recevant des responsables d’associations caritatives, "ce sont des Américains" . Le 3 septembre, M. Bush avait été accusé par le rappeur Kanye West d’avoir tardé à secourir les sinistrés de La Nouvelle-Orléans et de "se moquer des Noirs" , lors d’un concert de solidarité télévisé en direct.

La querelle de sémantique a commencé quand les médias ont utilisé le terme de "réfugiés" à propos des sans-abri qui campaient dans le stade du SuperDome. Le terme n’est pas correct, selon la définition juridique (pour être réfugié, il faut se trouver en dehors de son pays et craindre d’y retourner), mais s’il a choqué les leaders noirs, c’est parce qu’ils le trouvent chargé d’une connotation "péjorative" .

Le révérend Jesse Jackson l’a jugé "raciste". Le révérend Al Sharpton l’a lui aussi condamné : "Ce ne sont pas des réfugiés errant quelque part en attendant la charité, mais des citoyens de Louisiane et du Mississippi payant leurs impôts. Ils sont les victimes de la négligence et d’une situation dans laquelle ils n’auraient jamais dû se trouver."

Depuis, les envoyés spéciaux prennent soin de parler de "déplacés" ou d’"évacués" . Les sans-abri sont plusieurs centaines de milliers. Au moins 273 600, selon un bilan provisoire. Ils sont progressivement dispersés de plus en plus loin du golfe du Mexique, dans seize Etats américains.

Mardi, la télévision a montré des survivants arrivant en avion dans tout le pays, de San Diego ­ où le gouverneur de Californie a proposé d’en héberger un millier ­ à Washington, où 290 ont été installés dans l’ancienne armurerie qui abrite la Garde nationale. L’agence des secours d’urgence, la FEMA, essaie de les reloger dans des caravanes, des installations militaires ou des hôtels. Les défis sont monumentaux. Plusieurs dizaines de milliers d’enfants doivent être scolarisés. Des milliers de personnes âgées doivent pouvoir recevoir leur retraite. Au Texas, ils sont 240 000, dont 22 000 sur des lits de camp dans le stade de l’Astrodome à Houston et 16 000 à Dallas. Un projet d’hébergement de 4 000 personnes sur des bateaux de croisière a tourné court, les réfugiés n’avaient pas envie de se retrouver sur l’eau.

Les initiatives individuelles sont nombreuses. L’ancien vice-président Al Gore a payé un charter d’American Airlines pour convoyer, dimanche, tout un groupe dans son Etat du Tennessee. Un homme d’affaires a loué un Boeing 737 pour amener 80 déplacés à San Diego, où leur ont été offertes 4 nuits dans un hôtel de luxe. 150 000 lits ont été offerts par l’intermédiaire d’un site créé par l’association anti-Bush Moveon.org.

Dans ce contexte charitable, Barbara Bush, la mère du président, s’est fait remarquer par un commentaire décalé. Visitant l’Astrodome de Houston, elle a indiqué que l’hospitalité texane était appréciée. "Ce que j’entends, et cela fait presque peur, c’est qu’ils veulent tous rester au Texas", a-t-elle dit. Malgré les conditions de précarité ? "Vous savez , une grande partie des gens qui sont ici étaient des déshérités de toute façon, alors cela leur convient très bien."

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