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Quelques chiffres sur un programme à nature sociale. Qu’en conclure ?

Publie le lundi 19 février 2007 par Open-Publishing
2 commentaires

Eric Besson, l’ex responsable des questions économiques au PS était, il y a deux semaines, sur le plateau de l’émission France Europe Express dont MGB était l’invitée.

Il avait alors reconnu honnêtement qu’il n’était pas question pour le PS de mettre en cause le système, - c’est-à-dire le système économique dominant : l’ultralibéralisme -. Dans ces conditions, le problème qui lui était objectivement posé, était celui du coût de propositions de Ségolène Royal et, incidemment, celui de leur financement. Et le pacte présidentiel aux 100 propositions n’évoque absolument pas les moyens de les financer, ce qui leur enlève d’ailleurs beaucoup de crédibilité.

Le fait qu’il ait démissionné en dit très long sur cette dernière question. Qui est finalement celle-ci : le social libéralisme existe-t-il vraiment ? C’est à dire, est ce que l’on peut engager réellement un programme social, minimum compte tenu des besoins incontournables que réclame la grave situation actuelle, tel que ce pacte présidentiel aux 100 propositions, dans le cadre d’un système ultralibéral, toujours plus exacerbé sous l’action de la commission de Bruxelles ?

Une bonne partie de la réponse est contenue dans le résultat du chiffrage de ce programme.

On peut estimer que si son coût restait dans la limite des 30 milliards d’euros, la réponse pourrait être positive. Et c’est justement ce chiffre que veulent mettre en avant les deux candidats du système économique dominant, l’ultralibéralisme, que sont N Sarkozy et S Royal. (Pour donner un ordre de grandeur on rappellera que le coût des 35 heures pour l’Etat, a été de 60 milliards de Francs soient 9 milliards d’euros, pris majoritairement sur le budget de la sécurité sociale). C’est précisément cela que monsieur Besson n’a pas voulu cautionner, à juste titre on le verra.

Par contre si le coût dépasse les 100 milliards d’euros on entre dans une logique de rupture antilibérale. La durée sur laquelle s’étendrait ce financement va de quatre à dix années.

Le problème économique est aussi plus global que le simple aspect des mesures sociales nouvelles. Il englobe évidemment les déficits actuels, la dette et la croissance

les déficits

Voyons d’abord les problèmes des déficits des régimes sociaux et de l’économie, en laissant de côté le problème spécifique de la dette.

 le déficit de l’UNEDIC et de la Sécurité Sociale atteint presque 30 milliards d’euros.

 Il faut également prendre en compte les régimes spéciaux, la CMU, les allocations relatives aux handicaps.

 globalement les retraités touchent environ 12% du PIB et les cotisations représentent 20% de la masse salariale. Cela situe bien l’ampleur du problème. Pour plus ou moins équilibrer les comptes on a allongé la durée de cotisation de 37,5 à bientôt 42 ans et laissé perdre du pouvoir d’achat aux retraites. Le mouvement inverse que se doit d’appliquer un gouvernement de gauche, coûterait de quelques à plusieurs milliards d’euros par an, suivant l’envergure de la mesure sociale. Somme qui, de plus, augmenterait au fil des années à cause du « papy boom ».

 Au niveau économique, toujours en dehors de la dette, le déficit qu’il faut combler parce qu’il est structurel et, donc, conduit tout droit à l’augmentation du coût de la vie, ainsi qu’à un programme d’austérité, est celui de la balance commerciale. Près de 30 milliards d’euros en 2006, dont une part majeure vient de la facture énergétique.

la dette publique Engagements financiers de l’Etat impliquant le recours à l’emprunt.

Suivant les critères de Maastricht, la dette publique des pays européens ne devrait pas dépasser 60% du PIB, tandis que le déficit budgétaire annuel doit se situer dans la fourchette de 3% du PIB. La France est actuellement au-delà des 60% (c’est le lot commun de la grande majorité des pays de l’OCDE. L’Italie a plus de 100% par exemple, le Japon près de 130%). Elle semble (suivant les artifices budgétaires employés) être maintenant rentrée dans la fourchette des 3%. En 2004 le montant des intérêts, relatif à cette dette, payés par l’Etat s’est élevé à 47 milliards d’euros.

La dette publique n’est pas mauvaise en elle-même. Par exemple elle peut correspondre à des investissements (rail, énergie, Recherche …) qui produiront des revenus. Par contre elle devient malsaine si elle consiste essentiellement à combler des déficits sociaux.

Cette analyse succincte montre que l’on a intérêt, dans le cadre d’une politique de Gauche, à restructurer la dette publique en réduisant les déficits sociaux et en augmentant le poids des investissements productifs (Ferroutage, énergie – pour une plus grande indépendance -, Recherche, ..).

Le relèvement des salaires et minima sociaux

Actuellement près de 20% des salariés sont au SMIC. Le passage à un SMIC net de 1500 euros et le relèvement des minima sociaux implique un budget annuel de plus de 10 milliards d’euros.

le droit à l’emploi

Pour les jeunes, dont la difficulté actuelle à trouver un premier emploi est plus que préoccupante, il faut instaurer un droit à l’emploi. Le coût de cette mesure se situe dans l’ordre de plusieurs milliards d’euros annuels.

Mise en place du RSA (revenu de solidarité active) et de la sécurité sociale emploi.

le logement

Les 100 propositions prévoient la construction de 120000 logements à destination sociale. Il est également nécessaire de prévoir un financement du droit opposable au logement, en dehors duquel celui-ci n’existerait pas, ou alors au détriment de petits propriétaires. Grossièrement, on engage ici un budget de l’ordre de 10 milliards d’euros. Auquel il faut ajouter un investissement en énergie électrique, soit de 1 à 2 milliards d’euros.

les investissements nécessaires

Les investissements à engager dans le cadre d’une vraie rupture avec l’ultralibéralisme, concernent les relances de l’Industrie et de l’Agriculture, la protection de l’environnement, l’énergie et le budget de la Recherche.

D’une manière elliptique, afin de saisir les ordres de grandeurs.

En matière de relance de l’Industrie, il faut que l’Etat investisse à nouveau dans de grands programmes. Par exemple, le Ferroutage qui servira également à la protection de l’environnement s’il utilise de l’électricité « propre », - c’est-à-dire à très faible émission de CO2 -. Si l’on se base sur le coût de construction de ligne TGV (soit environ 20 milliards d’euros pour 1000 Kms) et compte tenu de l’investissement électrique corrélatif, cela représente sûrement un budget d’investissement de plus de 30 milliards d’euros. Auxquels il faut ajouter ceux de l’extension des transports publics, soient encore quelques milliards.

L’Agriculture, en France, malgré la PAC est en déclin. Les pertes d’exploitations et d’agriculteurs s’accentuent depuis les années 90. Dans la balance du commerce extérieur, l’Agriculture est maintenant à peine bénéficiaire. La relance passe par une plus juste redistribution de la PAC, - 9 milliards d’euros -, mais aussi par des mesures d’aides spécifiques aux petites et moyennes exploitations.

La politique de l’énergie doit faire face d’une part à l’accroissement de la demande, -transports, habitat social, production de biocarburants, relance industrielle (en 2006 la consommation industrielle d’électricité a diminué de 1%)…-, et d’autre part à la nécessité d’améliorer l’indépendance nationale dans ce secteur. D’ici 2015 il est prévu, actuellement, de mettre en place une puissance électrique supplémentaire de l’ordre de 30000 Mw. Suivant les techniques et les technologies retenues, cela représente déjà de 30 à 50 milliards d’euros. Et cela ne prend pas en compte : le Ferroutage généralisé, les transports publics électrifiés, le droit au logement.. Pour l’indépendance énergétique et la limitation des rejets CO2, il est préférable que cet investissement dans la production électrique ait recours au nucléaire et aux énergies renouvelables. Ce qui fait glisser l’investissement vers la partie haute de l’estimation précédente, soit un surcoût effectif de l’ordre de 20 milliards d’euros. Il faut rappeler ici qu’il s’agit d’un investissement très productif sur la durée, -40 ans au moins-, puisque le coût du KWh nucléaire est le plus bas et que l’incidence sur la facture énergétique peut être de grande ampleur.

On a déjà là un aperçu de mesures agissant réellement sur la protection de l’environnement :
  limitation de rejet CO2 dans la production électrique, limitation des transports polluants, - camions, voitures -.
  Il y a d’autres éléments comme les économies d’énergie, - outre les transports, essentiellement par la meilleure isolation de l’habitat et une politique du logement qui rapproche les gens de leur lieu de travail -, le traitement des déchets, industriels et ménagers, l’amélioration de la qualité chimique et biologique de l’eau, - limitation de engrais et pesticides dans l’agriculture, traitement biologique des eaux de refroidissement des installations thermiques (raffineries, usines de production de Biocarburants, chaudières thermiques et nucléaires …)- et de l’air. A l’avenir l’utilisation d’une chaleur industrielle d’origine nucléaire, - réacteurs nucléaires à gaz hautes températures-, améliorerait les conditions de pollution sur l’installation industrielle elle-même. Coût estimé : plusieurs milliards d’euros.

Enfin, toute relance de l’économie et de l’industrie dans notre pays, passe par un fort financement de la Recherche. Actuellement au alentour de 2% du PIB, le budget de la Recherche devrait être rapidement porté à 3%. D’où un coût d’au moins 15 milliards d’euros. A ce niveau, il serait bon, également, de stimuler l’investissement privé, notamment celui venant des entreprises moyennes, fantomatique en France alors qu’il est important en Allemagne et a pour conséquences d’offrir à ce pays une position forte sur le commerce extérieur.

Conclusion

De cette évaluation d’ordres de grandeurs, il résulte que le coût d’un programme à vocation sociale, à mesures minimales vis-à-vis des criantes nécessitées actuelles, tel que les 100 propositions du pacte présidentiel de Ségolène Royal, sans tenir compte de la réduction quasi obligatoire des déficits sociaux, ne peut en aucun cas être inférieur à 30 milliards d’euros. Dans le cas du programme plus global de Mme Royal, non seulement on ne voit pas les mesures, - taxation, fiscalité …, investissements productifs..-, qui permettraient de financer cela, mais il y a, en plus des surcoûts qui se profilent. Notamment sur la question de la réduction à 50% d’ici 2020 de la part du nucléaire dans la production électrique. L’organisation Sauvons le climat a ainsi pu calculer que le « surcoût du scénario 50% s’élève à 42 milliards d’euros ». Sans compter que les chaudières à gaz qu’implique ce scénario émettront en 2020 « 38,5 millions de tonnes de CO2 supplémentaires par année ».

Il est plus que probable que ce sont les couches moyennes qui feraient les frais d’un tel programme, avec à terme, des conséquences politiques très dangereuses. Le social libéralisme n’est qu’une illusion qui peut coûter très cher à tout point de vue.

Le coût du véritable programme antilibéral de rupture, de nature sociale, incluant la réduction des déficits sociaux et les investissements de relance économique, industrielle et agricole, la promotion de la recherche, ainsi que des mesures efficaces pour la protection de l’environnement, ne peut être inférieur à 100 milliards d’euros.

Messages

  • Le point commun de tous les programmes y compris l’antiliberal est l’acceptation des criteres du traité de Maastricht, a savoir 3% de deficit,la dette la BCE etc. Aucun ne fait le lien entre le NON de 2005 et ses causes inscrites pourtant deja dans le traité de Maastricht.
    Nous avons besoin d’autre chose pour sortir du carcan !!!.

    Aujourd’hui au nom des regles instituées les etats majors du PS et de l’UMP remettent deja en cause leurs propres promesses avant meme l’election.
    Ils ne veulent entendre la demande sociale d’un revenu garanti inconditionnel pour toutes et tous (jeunes,etudiants,chomeurs,precaires,retraités, paysans,independants,prostitué(e)s,taulards,malades, handicapés etc) qui concerne pourtant pres de 10 millions de personnes qui ont un revenu inferieur au SMIG.

    Aucun candidat n’est disposé a affronter cette question car elle implique de sortir du féodalisme monétaire,préalable incontournable à une refondation économique, sociale et écologique.
    La nation doit pouvoir émettre la monnaie dont elle a besoin, en proportion de son développement.

    Et la monnaie qu’elle crée, elle doit pouvoir l’affecter aux projets qu’elle décide pour demain, non pas au paiement de ceux qu’elle se voit imposer, aujourd’hui, impuissante, endettée.

    Le droit "régalien" de l’Etat de battre monnaie, les Européens l’ont aboli en 1992. La grande majorité l’a fait sans le savoir : tandis qu’on focalisait les débats sur l’euro, on mettait en jeu la décision de libérer plus que jamais, totalement, ce qui consistue peut-être le plus grand "aspirateur" du régime capitaliste.

    http://www.fauxmonnayeurs.org/

    le debat sur la dette doit partir de la...

    le debat sur la fiscalité doit prendre en compte la necessaire taxation des machines numeriques a l’origine des hausses paralleles de productivité et de chomage.
    Ce qui s’appelle remettre le debat sur ses pieds.

  • le ferroutage est en France le parent pauvre du chemin de fer et l enfant handicapé dont on cache l’indigence budgétaire dans l’arrière boutique du ministère des transports. Le ferroutage doit etre envisagé à échelon européen en étant massifié, su rdes axes majeurs pour assurer une rentabilité et une efficacité socio economique viable à long terme. Il ne peut aller contre la chaine de flux tendus qui aujourd hui régimente l’économie moderne de consommation.

    le plus bel exemple de ferroutage existant est le tunnel sous la Manche mais Eurotunnel a ruiné ses actionnaires. rien n’est fait pour encourager à grande échelle le fret ferroviaire et le ferroutage à longue distance pour décourager l’usages des autoroutes bien rentables.

    Allez sur intermodalite.com pour vous tenir au courant du sujet technique mais au combien passionnant.