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Quelques remarques sur la crise italienne
Publie le jeudi 1er mars 2007 par Open-Publishing4 commentaires
de Daniel Cirera
Le point sur la situation italienne par Daniel Cirera, chargé des Questions européennes à la direction du PCF, au 26 février 2007
La crise italienne consécutive à la démission de Romano Prodi suscite de nombreux commentaires, d’inquiétudes à gauche et d’interrogations. On connaît les faits : le gouvernement s’est trouvé en minorité au sénat dans un vote sur la politique extérieure. Il lui a manqué 2 votes pour obtenir le quorum de 160 voix. Or deux sénateurs de la coalition de gauche étaient absents ou se sont abstenus : Franco Turigliatto, de Rifondazione comunista (courant trotskiste) et Fernando Rossi, ex-membre du PdcI (Parti des communistes d’Italie). Fait nouveau, trois "sénateurs à vie" issus de la droite, Andreotti, l’ancien président de la République Cossiga et le très atlantiste Pininfarina, qui jusqu’à présent avaient soutenu le gouvernement se sont cette fois abstenus.
A gauche la contestation et le débat portaient notamment sur la présence de troupes italiennes en Afghanistan dans le cadre de l’Otan, et sur l’élargissement de la base américaine de Vicenza dans le nord du pays, suivant un accord passé sous le gouvernement Berlusconi. Il y a quelques semaines a eu lieu devant la base une manifestation rassemblant 100 000 personnes, dont de nombreux militants de gauche, y compris des Démocrates de gauche, le parti de Massimo d’Alema, le ministre des Affaires étrangères. Le débat était vif, mais pas au point de générer une crise de la majorité. D’autant que la coalition est traversée de tensions depuis ses origines, que ce soit sur les questions sociales ou sur le budget. A chaque fois, des solutions avaient été trouvées.
Cette crise est ressentie d’autant plus gravement qu’elle conforte les ambitions revanchardes de Berlusconi et d’une droite radicalisée et agressive, qui a aussitôt exigé de nouvelles élections. Elle sème le doute sur la capacité d’une coalition de centre gauche a laquelle participent des communistes et des forces de la gauche issue du mouvement social à gouverner durablement l’Italie.
Il est un enjeu propre à la gauche de la coalition, et Rifondazione comunista en particulier. Le parti de Fausto Bertinotti (aujourd’hui président de la Chambre des députés) est présenté comme le responsable de cette crise politique. La crise de 1998 qui avait vu la chute du gouvernement Prodi et la victoire de Berlusconi aux élections qui ont suivi est dans toutes les mémoires. En France le thème est martelé. La "gauche radicale fait tomber le gouvernement", titre Libération. Une dépêche AFP titre sur "la crise des "deux gauches". Rifondazione a immédiatement réagi en réaffirmant sans ambiguïtés son soutien à Prodi, en appelant le gouvernement à poursuivre son action. Le risque en effet existe que l’appel de Romano Prodi à une majorité stable, notamment au Sénat, ne justifie un renforcement de la majorité sur sa droite, au prix d’un affaiblissement de l’influence des courants de gauche, et de Rifondazione en particulier, jugée excessive par les autres forces. L’éditorialiste de La Republicca en appelle aux citoyens "pour sortir la gauche italienne de son paradoxe" : elle ne peut gouverner sans son aile "radicale" qui serait en même temps facteur d’instabilité. "Une des leçons de la crise, explique-t-il, est de construire sans tarder un parti démocratique c’est-à-dire une véritable gauche à vocation majoritaire" en obligeant les leaders de la "gauche radicale" à sortir de l’ambiguïté, car, insiste-t-il : "en Italie aussi on ne peut être à la fois dans la rue et dans les ministères." Le message est clair.
Conscients de tous ces risques, Rifondazione a immédiatement et très nettement renouvelé sa confiance à Prodi, appelé à la poursuite de son action, en insistant sur la mise en œuvre du programme, conclu au terme de longues et difficiles négociations, en avril 2006. Il a appelé à des assemblées dans tous le pays, dimanche 25 février, pour expliquer la situation. Tous les mouvements sociaux, les syndicats ont réagi dans le même sens, en souhaitant la continuation du gouvernement Prodi. L’ensemble des mouvements et pacifistes et citoyens qui avaient appelé à la manifestation devant la base de Vicenza on alerté sur le fait "qu’il n’y a aucune raison pour transformer le vote de ce jour en crise politique générale". Il appellent avec une certaine solennité à ce que le gouvernement aille de l’avant et maintienne le débat et la confrontation ouverts pour une réorientation de la politique extérieure de l’Italie.
Tout laisse penser que l’intérêt des forces qui composent la coalition de l’Unione est de poursuivre l’expérience engagée il y a bientôt un an. Le risque d’élections anticipées semble écarté. Le président de la République a refusé la démission du Président du conseil qui devrait obtenir la confiance des assemblées, y compris le Sénat, après avoir fixé ses conditions aux 9 composantes de la coalition et élargi sa majorité vers le centre. Ainsi, pour mesurer les conséquences de la crise dans l’opinion et sur les rapports de forces au sein de la coalition il faut attendre les décisions du chef du gouvernement dans les jours qui viennent.
Messages
1. Quelques remarques sur la crise italienne, 1er mars 2007, 09:17
Rien, strictement rien dans la Constitution italienne n’obligeait Prodi à démissionner à la suite du vote intervenu sur les crédits pour le contingent italien en Afghanistan et le doublement de la taille de la base américaine de Vicenza. Rien, sinon la volonté de Prodi d’imposer le silence dans les rangs de sa majorité après la manifestation de Vicenza en dramatisant les enjeux.
La charte en 12 points qu’il vient d’imposer à l’ensemble de ses partenaires comme son projet de modification du système électoral indiquent assez clairement quels sont ses projets, de même que la contre réforme libérale prévue du système des retraites. On peut tout à la fois et à juste titre préférer garder ce libéral bon teint qu’est Prodi pour éviter le retour de Berlusconi et s’abstenir de peindre son gouvernement en rose.
Je comprends la prudence de certains sur la crise italienne dans la situation française actuelle. Avec des différences certes : Prodi n’est même pas social-libéral, par exemple. Mais la difficulté qu’il y a à dire une chose dans la rue (à Vicenza) et une autre au parlement devrait leur rappeler certains souvenirs. Je pense au contraire qu’il y a intérêt à faire toute la clarté sur les tenants et les aboutissants de cette crise italienne. Par exemple le texte des Cobas publié en italien sur le site Bellaciao mériterait de ne pas être réservé aux privilégiés qui parlent cette langue. De même il serait sans doute utile de publier la lettre de Franco Turigliatto, que je viens de lire sur le site "europe-solidaire.org".
Bref, il me semble que le site ne profite pas à fond de sa situation privilégiée pour faire connaître en France la situation italienne.
Pierre Petit
1. Quelques remarques sur la crise italienne, 1er mars 2007, 10:35
A lire sur ce même site la contribution du sénateur démissionnaire italien de la Gauche Critique concernant ce problème
2. Quelques remarques sur la crise italienne, 1er mars 2007, 11:36
Je suis d’accord. Le collectif Bellaciao devrait nous faire part de son analyse de la situation.
Le texte de Daniel Cicera ne répond pas à la question principale : à quoi sert refondation communsite dans le gouvernement libéral de Prodi ?
Jips
3. Quelques remarques sur la crise italienne, 1er mars 2007, 17:06
Je vois que je ne suis pas seul à attendre de mon site préféré des éléments et informations qu’il me semble être le mieux placé pour m’aider à comprendre ce que d’aucun nomment " la crise italienne " . Mais peut être que Bellaciao.... c’est nous tous et singulièrement ceux qui sont en mesure d’apprécier mieux que d’autres ce qui se passe en Italie...merçi à ceux là !