Accueil > Sabiha AHMINE : pour le droit de vote des étrangers à Lyon

Sabiha AHMINE : pour le droit de vote des étrangers à Lyon

Publie le lundi 15 novembre 2010 par Open-Publishing

Cette semaine, nous avions rendez-vous à Lyon, comme la plupart des villes françaises, avec la Votation Citoyenne : ce référendum symbolique, organisé avec notre société civile, qui porte sur une seule question : « Êtes-vous pour le droit de vote et d’éligibilité des résidents étrangers non communautaires aux élections locales ? ». En effet, en dépit des difficultés, le droit de vote des étrangers non communautaire, est une autre bataille civique pour l’égalité républicaine que j’ai toujours soutenu activement et officiellement, lorsque j’étais adjointe au maire de Lyon, entre 2001 et 2008 comme aujourd’hui, car elle s’inscrit dans la poursuite du combat responsable et libérateur de nos anciens pour la défense des valeurs de la République, telles qu’affirmées par ses principes universelles fondateurs de 1789.

C’est ce combat même qui doit nous inciter aujourd’hui, plus qu’hier, à intensifier la lutte contre cette forme de discrimination, pour mieux réussir le bien vivre ensemble, la fraternité, la cohésion et le dialogue en humanité. Comme nous l’apprend Angéla Devis : A la base de l’exploitation capitaliste se trouvent toutes les formes de discriminations (dont l’absence du droit de vote des étrangers). Ces discriminations ne sont qu’un moyen de division entre citoyens et salariés. Un outil d’exploitation capitaliste de plus, dont le seul objectif est d’empêcher les citoyens de s’approprier la chose publique... Une autre entrave à la liberté, la fraternité et à l’égalité…

En effet, ils sont combien à savoir que des parents comme ceux de Zinedine Zidane et d’autres n’ont pas le droit de vote ? Que parmi ceux qui non pas le droit de vote aujourd’hui dans nos cités, il y a des descendants d’anciens combattants, d’anciens tirailleurs ou résistants étrangers, qui ont sacrifié leur vie pour que vive la République contre la barbarie nazie et contre son apartheid raciste. Le film Indigènes nous rappel l’urgence de stopper ce mépris, et que la citoyenneté est indivisible. Elle se construit avec des devoirs, mais aussi par le respect et la valorisation des droits, des acquis et des valeurs de la République. C’est pourquoi, même si cette revendication d’extension du suffrage universel à l’ensemble des résidents étrangers est une action marginale, puisque cela ne concerne qu’un nombre relativement restreint de personnes, elle reste une sorte de miroir humaniste qui reflète la nature du traitement réservé aux minorités. Un indicateur du niveau de développement durable d’une société, de la qualité d’intégration de ces habitants et du bien- vivre ensemble. A titre d’exemple, les propositions du Parti communiste français dès 1930, à la veille du Front populaire, jusqu’à aujourd’hui, ont toujours été dans le sens de faire de ce droit de vote des étrangers aux élections locales, et nationale une question clé de son programme. Mais depuis 1981, la concrétisation de cette proposition a toujours été remise à plus tard. Le blocage de la droite au Sénat en est une des causes. Mais pas la seule….

En s’engageant aujourd’hui pour défendre le droit de vote des étrangers, avec notre société civile, dont je tiens à saluer le courage, nous voulons en finir avec ces discriminations qui dure maintenant depuis des dizaines voir des centaines d’années. C’est ce qui nous a exhorté à se battre, par des vœux et autres actions d’organisations de votation citoyenne, pour que les immigrés qui n’ont pas la nationalité française ne soient pas exclus de la vie de la cité lyonnaise. Nous faisons cela parce que nous sommes convaincus que la cause première de l’échec de l’intégration, n’est autre que le manque de reconnaissance et l’absence d’hospitalité dans l’accueil des étrangers.

C’est pourquoi, après avoir fait adopter, en 2002, par le conseil municipal, la charte européenne des droits de l’homme dans la ville, nous avons mis en place en 2005 le Conseil des résidents lyonnais étrangers : le CREL qui était un outil pour associer la population étrangère à la vie politique locale. Le CREL est la seule instance participative à Lyon qui fonctionne sur la base de la parité et de l’égalité homme femme... C’est un symbole de l’hospitalité dans l’accueil et le respect de l’autre. Il s’agit surtout d’un engagement responsable, et fort de sens, puisque le droit de vote des étrangers s’inscrit dans la recommandation de la charte Européenne des droit de l’Homme dans la ville, que j’ai fait adopté en 2002 à la ville de Lyon et qui vise à faire progresser la condition Humaine dans son ensemble.

Voici un résumé de l’intervention du Prix Nobel de la Paix Mme Shirin EBADI, qui était notre invité au CREL en 2005 : « Mme Shirin EBADI a tenu à souligner l’importance du travail réalisé, et restant encore à réaliser, en terme d’intégration et de participation des étrangers à la vie de la cité et les encourage à prendre part, et toute leur part, à l’activité de la cité. Elle leur demande de connaître leurs droits et leurs devoirs et le premier devoir est d’aller VOTER. Elle signale également que le monde ne saurait se développer s’il ne prend pas en compte sa diversité culturelle et donc sa richesse, enfin elle les encourage à continuer leurs travaux et à démontrer que nous pouvons vivre ensemble avec nos différences et construire une paix durable si nous avons en commun une même communauté de destin, celle de l’humanité et de l’universalisme. »

Nous avons ainsi besoin davantage d’éthique citoyenne. La république idéale, selon Machiavel, est le régime dans lequel les citoyens ont intérêt à la vertu. Faisons en sorte que l’une de ces vertus soit le droit de vote des étrangers non communautaires.