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Sarkozy sur Clearstream : deux phrases, trente secondes, quatre erreurs...
Publie le vendredi 25 septembre 2009 par Open-Publishing2 commentaires
de Fabrice Arfi, Fabrice Lhomme
1/ « J’ai déposé plainte contreX. »
Nicolas Sarkozy, et c’est tout sauf un détail, n’a pas déposé plainte, ni contre X ni contre personne. Il s’est contenté de se constituer partie civile, le 31janvier 2006, dans la procédure déjà ouverte. Ses conseillers lui avaient précisément déconseillé à l’époque de déposer plainte, craignant qu’une telle initiative n’apparaisse trop offensive. Et donc comme une tentative de pression sur la justice.
2/ « J’ai déposé plainte contre X quand j’ai découvert avec stupéfaction que j’étais titulaire de deux comptes... »
Là encore, la formulation est trompeuse. Elle laisse entendre à l’évidence que Nicolas Sarkozy a saisi la justice dès qu’il a eu connaissance que son nom figurait surles faux listings. Et il répète à qui veut l’entendre qu’il n’a été informé que très tardivement.
Or, la chronologie démontre le contraire. La présence du nom de Nicolas Sarkozy sur les listings a été évoquée dans la presse, avec celle de trois autres anciens ministres (Alain Madelin, Jean-Pierre Chevènement, Dominique Strauss-Kahn), au mois de septembre 2004. Or, M. Sarkozy, contrairement aux trois autres, ne n’est constitué partie civile qu’en janvier 2006, soit près d’un an et demi après. Sans compter que de nombreux éléments laissent à penser qu’il avait été informé de la présence de son nom dès le printemps 2004.
3/ « Au bout de deux ans d’enquête, deux juges indépendants... »
Pour le coup, il s’agit sans doute du lapsus le plus révélateur de l’intervention du chef de l’Etat. En effet, l’instruction de cette affaire n’a pas duré deux mais... quatre ans, puisque l’information judiciaire pour « dénonciation calomnieuse » confiée au juge Jean-Marie d’Huy – ensuite secondé par Henri Pons – a été ouverte par le parquet de Paris le 3 septembre 2004 et s’est achevée en 2008.
L’enquête s’est terminée en deux temps, les juges ayant clos une première fois leurs investigations le 22 février 2008, puis le parquet a exigé un complément d’information. Ils ont finalement clôturé le dossier le 3 juillet 2008. Nicolas Sarkozy n’a pas évoqué cette période de « deux ans » par hasard : il ne fait visiblement pas de doute dans son esprit que le « vrai » début de l’affaire correspond à son entrée dans le dossier, en 2006 ! De fait, l’enquête des juges avait connu une spectaculaire accélération juste après la constitution departie civile de M. Sarkozy.
4/ « Deux juges indépendants ontestimé que les coupables devaient être traduits devant le tribunal correctionnel. »
Est-il besoin de rappeler que dans le droit français (comme dans la plupart des pays européens), toute personne est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été définitivement établie par un tribunal. Dans l’exemple Clearstream, il faut donc parler de « prévenus » puisqu’il s’agit d’un procès correctionnel – aux assises, on parlerait d’« accusés ».
Et quand bien même seraient-ils condamnés qu’ils seraient toujours présumés innocents dans le cas – probable – où ils feraient appel. Imaginons qu’ils soient ensuite condamnés en appel, ils pourraient encore se pourvoir devant la cour de cassation et seraient toujours, jusqu’à ce que la juridiction suprême se prononce, présumés innocents. Jeudi 24 septembre, les avocats de Dominique de Villepin ont annoncé qu’ils allaient assigner le chef de l’Etat en justice pour « atteinte à la présomption d’innocence ».
Messages
1. Sarkozy sur Clearstream : deux phrases, trente secondes, quatre erreurs..., 25 septembre 2009, 12:44, par tabourré
petit, mais fourbe......
2. Sarkozy sur Clearstream : deux phrases, trente secondes, quatre erreurs..., 25 septembre 2009, 12:45
J’aime ce genre de rappel, de précisions : merci !