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Un cabinet noir à l’Elysée pour enquêter sur l’affaire Tapie ?

Publie le mardi 29 octobre 2013 par Open-Publishing

Dans son édition du 1er novembre, Valeurs Actuelles révèle l’existence d’une cellule chargée de fouiller en toute illégalité les archives de Nicolas Sarkozy.

"Il me demande de faire une recherche sur l’ensemble des supports informatiques, fichiers, etc., auxquels j’ai accès. Il me lit une liste de noms et de mots-clés. Après avoir photocopié une partie de l’annexe, il surligne certains noms." Bernard Muenkel, chef du service des télécommunications et de l’informatique de l’Elysée n’en revient pas quand en avril 2013 Eric Bio-Farina, le commandant militaire du palais lui tend une liste en lui ordonnant de chercher tous les documents capables de gêner des personnalités issues de la précédente majorité. La liste reproduite par Valeurs Actuelles dans une longue enquête que nous avons pu lire en exclusivité est éloquente. On y retrouve tous les protagonistes liés à l’affaire Tapie. L’homme d’affaires bien entendu, ainsi que son avocat maître Maurice Lantourne, les arbitres qui ont rendu la décision qui fait tant parler, Christine Lagarde alors ministre de l’Economie, Stéphane Richard son directeur de cabinet, Jean-Louis Borloo et une poignée d’autres personnages croisés dans le sulfureux dossier.
Trouver des dossiers coûte que coûte

"J’explique à Bio-Farina que je ne suis pas habilité à faire ce genre de recherche, que notre système a été reconstruit, qu’on ne trouvera rien sur les disques durs et serveurs, que les téléphones ont été broyés, les cartes mémoire SD également, rapporte l’hebdomadaire citant les propos de Muenkel. Il veut que j’aille dans les archives de la précédente présidence : que je les ouvre et que je regarde ce qui a été écrit, en les recoupant avec la liste de noms et de mots-clés." Bref, de violer le protocole d’accord signé par Nicolas Sarkozy avec les Archives nationales afin de régler l’accès aux archives de son quinquennat, dont l’ancien président reste le seul propriétaire, ajoute Valeurs Actuelles. Pour convaincre son interlocuteur, Bio-Farina parle d’une demande des juges, mais ne produit aucun document en ce sens. Devant le refus de Muenkel, il réitère les jours suivants sa demande en des termes de moins en moins policés.
Muenkel est mis au placard

Rien n’y fait, Muenkel résiste et Bio-Farina perd patience et adresse un mail -reproduit par le magazine- destiné à Sylvie Hubac, directrice de cabinet de François Hollande, Pierre Valleix, conseiller justice de la présidence, et Alain Zabulon, directeur adjoint de cabinet du président, nommé depuis coordonnateur national du renseignement, un mail dans lequel il dévoile ses intentions et ses manoeuvres. Il va jusqu’à avouer que "légalement, nous ne sommes pas dans la norme". Valeurs Actuelles rapportent ensuite une hallucinante succession de scènes où, au plus haut niveau du cabinet de François Hollande, on ne fait pas semblant de vouloir trouver des dossiers contre quelques barons de l’UMP -dont Claude Guéant- et de fouiller méthodiquement les archives de l’ancien Président au mépris de toutes les règles et de toutes les lois. In fine, Bernard Muenkel a d’abord été "mis au placard", puis arrêté deux mois par son médecin pour "stress professionnel" avant de quitter purement et simplement, il y a quelques jours son lieu de travail. Depuis, il a engagé une procédure contre son ex-employeur.

L’enquête de Valeurs Actuelles est agrémentée de nombreux documents -copies de mails- et rappelle qu’à de nombreuses reprises, ces démarches sont entachés d’illégalité, au regard de le CNIL, des règles qui entourent les avocats, et du protocole passé entre les Archives nationales et Nicolas Sarkozy qui prévoit dans son article 5 que "la consultation ou la reproduction de ces documents par des tiers ne pourront être autorisées sans l’accord écrit de M. Nicolas Sarkozy." Joint par l’hebdomadaire, l’Elysée s’est refusé à tout commentaire se contentant de préciser qu’à trois reprises ses services avaient été saisis de demandes émanant de la justice ou de Conseil Constitutionnel dans le cadre de l’affaire Tapie, de celle de la BPCE et enfin des comptes de campagne de Nicolas Sarkozy.

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