Accueil > Valls ou le bonapartisme décomplexé !
Valls ou le bonapartisme décomplexé !
par Noël Mamère
Publie le dimanche 24 janvier 2016 par Noël Mamère - Open-Publishing2 commentaires

Noël Mamère : « Au lieu de rassembler les Français contre le fascisme religieux, Manuel Valls les divise »
Une fois de plus, une fois de trop, Manuel Valls choisit la division de la gauche et accessoirement des Français, en réveillant avec cynisme et brutalité le débat ultra-sensible sur la laïcité. Mais quel est donc le but poursuivi par le nouveau porte-parole des néo-conservateurs ? A-t-il décidé de se lancer dans la course à la présidentielle, dès 2017, constatant le rejet de François Hollande et sa faveur dans les sondages ?
Dans ce contexte de mort clinique de la gauche, face à la concurrence de l’extrême droite, qui se précise de jour en jour, il considère que les thèmes de l’ordre, de la nation, de l’autorité et de l’identité sont « porteurs » et cherche la moindre occasion de les remettre sur la table de la société. En s’en prenant avec violence aux deux responsables de l’Observatoire de la laïcité, devant « les amis du CRIF », il n’a fait que « communautariser » un peu plus le débat sur la laïcité en tentant d’ostraciser des responsables musulmans et d’absoudre les propos islamophobes.
Idéologie occidentaliste
Au lieu de rassembler les Français contre le fascisme religieux, il les divise. Au nom d’un misérable calcul politicien, il met de nouveau la société en tension au moment où elle aurait le plus besoin d’apaisement. D’ailleurs, Marine Le Pen ne s’y est pas trompée qui, dans un exercice de triangulation inversée, vante « une société apaisée » sur ses affiches style « old school », directement inspirées de la campagne de Mitterrand en 1981.
Manuel Valls est devenu coutumier de ces transgressions néoconservatrices. Il s’en est même fait une spécialité, en déclenchant des polémiques à répétition, le plus souvent avec l’obsession de pourfendre des ennemis de l’identité de la France.
Cette monomanie identitaire recouvre en réalité une idéologie commune à une partie de la droite et de la gauche gouvernementale, l’idéologie occidentaliste. Obsédée par la crainte du déclin de la civilisation occidentale devant la montée des puissances émergentes, par la peur de l’islam considéré comme une menace pour nos « valeurs républicaines », une partie de la classe politique de ce pays s’est constitué un nouvel imaginaire du repli. Il repose sur trois éléments constitutifs.
La laïcité intégriste, ou intégrale, qui considère que l’espace public doit être purgé de tout signe religieux musulman, que l’islam doit retourner à l’âge des caves et qu’il n’y a de bon musulman qu’assimilé. Ainsi conçue et défendue, la laïcité est le nouveau nom d’une guerre antireligieuse fantasmée.
Le deuxième pilier de cette doxa est l’essentialisation. Au lieu d’identifier l’ennemi, le courant djihadiste, c’est-à-dire un fascisme religieux et politique, le premier ministre procède par amalgames récurrents. Ainsi les musulmans qui se réclament de courants relevant de l’orthodoxie seraient par nature les tremplins du djihadisme. Tous sont taxés, pêle-mêle, d’intégristes et d’idiots utiles d’Al-Qaida et de Daech [acronyme arabe de l’organisation Etat islamique]. A ce compte-là, toute femme voilée devient suspecte, puisqu’elle transgresse les lois imaginaires de la laïcité revue et corrigée par ses nouveaux hérauts.
En réalité, si l’on se place dans la perspective politique de Manuel Valls, le musulman est un « bon client », au même titre que l’émeutier cagoulé des médias quand ils traitent des quartiers populaires. Le premier ministre cherche en permanence des cibles, tel Jean-Louis Bianco, sa dernière victime en date, dans le seul but de réduire une réalité complexe à son imaginaire autoritaire, inégalitaire et guerrier.
Jusqu’où ce thuriféraire de Clemenceau ira-t-il pour devenir président ?
La troisième composante de cette idéologie occidentaliste, c’est l’appel permanent à la guerre de civilisation. La République est ainsi réduite à une sorte de forteresse assiégée au nom de l’idée que le premier ministre et ses semblables se font d’une « civilisation » occidentale menacée de toutes parts par les « barbares ». Il faut donc leur opposer une logique de guerre et considérer tous leurs représentants ou supposés tels, présents sur notre territoire, comme une cinquième colonne susceptible de nous attaquer à tout moment. La conséquence de cette logique infernale est une militarisation durable de la société, ainsi que le prouvent la nouvelle prolongation de l’état d’urgence qui s’annonce, la déchéance de nationalité inscrite dans notre Constitution et le recul du protecteur de nos libertés, le juge judiciaire, que prépare la réforme des codes pénal et de procédure pénale.
Jusqu’où ce thuriféraire de Clemenceau ira-t-il pour devenir président ? Pourtant, plus les jours passent et plus il s’installe dans une forme de bonapartisme décomplexé. Bonapartiste, cette tentation autoritaire de gouverner par l’état d’exception permanent, en se débarrassant du contrôle des juges ; bonapartiste, cette volonté de gouverner en instaurant un climat de peur ; bonapartiste, cet attrait pour les ordonnances, en se débarrassant de ces parlementaires inutiles qui empêchent l’exécutif de faire son travail ; bonapartiste, enfin, ce penchant pour la marginalisation de tous ceux qui osent rappeler les règles de l’Etat de droit et de la démocratie.
Pour mieux masquer cette dérive, Manuel Valls nous répète en boucle : « République, République, République. » Comme s’il s’agissait de nous faire oublier qu’elle a toujours été menacée par des boutefeux autoritaires et des va-t-en-guerre arrogants, tout autant que par les tenants de l’arbitraire et les autocrates de la morale républicaine.
Dans les années 1960, Sartre qualifiait déjà la gauche de « cadavre tombé à la renverse et qui pue ». Déjà, Guy Mollet, le représentant de cette gauche près du tombeau, avait fait voter l’état d’urgence et les pouvoirs spéciaux pour mener la sale guerre d’Algérie, au nom d’une vision étriquée de la France et de la République. Cinquante ans plus tard, nous nous retrouvons face à la même faillite idéologique. Nous ne pouvons nous résoudre à cette déchéance.
http://www.lemonde.fr/idees/article/2016/01/24/de-quoi-valls-est-il-le-nom_4852581_3232.html
Messages
1. Valls ou le bonapartisme décomplexé !, 24 janvier 2016, 14:58, par cd
Noël Mamère ou le djihadisme comme prétexte à alliance avec les intégristes
Noël Mamère fait un peu comme Edwy Plénel, il évoque l’intégrisme laiciste et ne dit rien du combat contre les intégristes religieux !
Laissons de côté le débat sur la laïcité un moment
I - Le livre "Pour les musulmans" d’Edwy Plénel ne dit pas un mot des intégristes religieux et en l’espèce des intégristes musulmans Pas une seule fois sur tout le livre ! Par contre, la seule fois ou le terme intégriste apparait c’est à propos de la laïcité, à côté de laïciste
Il en est quasiment de même pour Noel Mamère qui pointe les différences mais pas les points communs entre certains groupes de musulmans réactionnaires
II - Laisser faire l’intégrisme musulman (ou tout autre intégrisme) ?
N Mamère écrit "les musulmans qui se réclament de courants relevant de l’orthodoxie seraient par nature les tremplins du djihadisme. Tous sont taxés, pêle-mêle, d’intégristes et d’idiots utiles d’Al-Qaidaet de Daech [acronyme arabe de l’organisation Etat islamique].
Qui a dit que "les intégristes étaient le tremplin du djihadisme" ? M Valls ? Nul besoin d’imaginer un transfert pour combattre les intégrismes religieux, notamment celui qui impose le sexoséparatisme hard ou soft, ce qui est assimilé à une pratique religieuse orthodoxe semble-t-il !
En fait N Mamère fait surtout semblant d’ignorer le point commun de cet islam réactionnaire (qui n’est pas tout l’islam) - l’obsession sexoséparatiste hard et soft - entre d’une part les intégristes musulmans (qui agissent dans la société civile disons la famille et le quartier) et les islamistes politiques (qui partent à la conquête pacifiste de l’Etat) et les musulmans djihadistes et terroristes
On comprend donc que pour combattre les versions les plus extrêmes de l’islam il faille se taire contre les versions réactionnaires moins extêmes !
Quand au port du voile on sait que certaines les portent librement mais qu’elles sont ce faisant aussi les complices des intégristes ce Monsieur Valls évoque en terme d’idiotes utiles de la domination hyperpatriarcale !
M Valls n’est pas un anticapitaliste, pas plus que M Macron ou M Hollande c’est certain mais il ne pactise pas avec les intégristes religieux et c’est déjà çà !
Contre le capitalisme prédateur et barbare mis en place par le 1% d’en haut adepte du concurrentialisme et de la finance libre, il faut mobiliser un peuple-classe 99 multicolore - donc antiraciste - pour aller tout à la fois vers une autre démocratie et vers le socialisme ou l’écosocialisme
Chris D
2. Valls ou le bonapartisme décomplexé !, 24 janvier 2016, 20:13
VALLS a pour modèle Clémenceau.
Clémenceau disait à propos de son chef de cabinet (Georges Mandel) : "Il est très bien, c’est moi qui pète, c’est lui qui pue".
Malheureusement pour le mini caudillo Manu, c’est lui qui est dans le rôle de Mandel et Hollande dans celui de Clémenceau.
Rappel : Mandel a fini assassiné par la police....euh, non la milice.... française pendant l’occupation. Toute ressemblance avec un personnage actuel...etc...etc