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Aurore Martin : quelques éléments pour comprendre et se mobiliser

Publie le dimanche 28 novembre 2010 par Open-Publishing
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Aurore Martin : inquiétudes de partis et de syndicats après la décision du tribunal de Pau

26/11/2010

Giuliano CAVATERRA

Les organisations politiques, syndicales et associations diverses qui avaient appelé à manifester samedi dernier contre le mandat d’arrêt européen (MAE), ont lancé hier un nouvel appel à manifester. La manifestation aura lieu le samedi 4 décembre à Bayonne.

Les participants ont affirmé que « la mobilisation doit continuer » et appelé l’ensemble des acteurs politiques et sociaux à se positionner.

Première à prendre la parole, l’avocate d’Aurore Martin, Amaia Rekarte, a en premier lieu relevé les contradictions du délibéré de la cour d’appel de Pau qui refuse le mandat d’arrêt pour des conférences de presse et des réunions sur le territoire français mais valide ce même mandat pour... des réunions et des conférences de presse sur le territoire de l’Etat espagnol. Elle s’inquiète que le tribunal n’ait pas retenu « l’inadéquation des faits » entre ce qui est reproché à sa cliente, soit des « activités terroristes », et les faits incriminés, qui consistent en des participations à des manifestations publiques. Elle s’est en outre déclarée « pas optimiste » quant aux suites.

Laboratoire

Anaiz Funosas d’Askatasuna a, au nom des organisations présentes, déclaré que, face à la décision du tribunal palois, « on ne peut rester silencieux. » Pour elle, le Pays Basque est « un laboratoire pour le mandat d’arrêt européen, un laboratoire pour les lois antiterroristes. Mais appliquer le mandat d’arrêt européen ici, cela veut dire que plus tard il pourra s’appliquer pour n’importe quel syndicaliste ou militant politique à n’importe quel endroit ». Elle ajoute que même si la cour de cassation revient sur la décision des magistrats palois, « c’est trop tard, la porte est ouverte ».

Le syndicat Lab par la voix d’Amaia Fontang a d’ailleurs appelé « tous les syndicats » à se prononcer, et au-delà tous les salariés « à se mobiliser. » Autre syndicaliste, Francis Charpentier, de l’union syndicale Solidaires, explique pour sa part que le contexte d’un « système capitaliste en crise » n’est pas étranger à l’affaire et que « l’Europe veut se prémunir alors que la contestation sociale est grandissante en Grèce, en Irlande, en Angleterre, etc. » Il indique que le bureau national de Solidaires va prendre position dans les jours qui viennent.

Ne rien faire, c’est laisser faire

Ce qu’a déjà fait la direction du NPA, qui selon Claude Larrieu, a « dès sa création demandé l’abrogation du MAE » et qui s’est engagé au niveau hexagonal contre la remise d’Aurore Martin à l’Etat espagnol. Le militant du NPA ajoute que « ne rien faire, c’est laisser faire. » Enfin il se demande pourquoi les Etats espagnol et français font montre d’une attitude de plus en plus répressive au moment « où la gauche abertzale fait des pas » et s’engage « pour des moyens pacifiques, politiques et démocratiques » pour résoudre la question basque.

Mertxe Colina qui a pris la parole au nom d’AB s’est exclamé quant à elle : « Nous sommes tous Aurore Martin ». Elle s’est aussi demandé si « le fait de participer à cette conférence de presse ne nous met pas en danger ? ».

http://www.lejpb.com/paperezkoa/20101126/234363/fr/Aurore-Martin—inquietudes-partis-et-syndicats-apres-decision-du-tribunal-Pau

"Militante depuis que je suis toute petite"

26/11/2010

Mikel Lapeyre – Envoyé spécial Ekaitza pour Le JPB

A la reprise de la séance, Marisol se lève et commence sa déposition de cette voix lente, calme et décidée qui en quelques minutes va imposer son rythme et captiver toutes les personnes présentes dans l’enceinte. Par moments, Mikel lui tient la main avec une infinie tendresse.

“Je fais un effort pour m’exprimer en français, mais je le fais en pensant à tous mes camarades qui n’ont pu le faire parce qu’ils ne savaient pas le parler. Ma vie a été marquée par le problème politique basque. Je me rappelle, à 14 ans, les dernières exécutions de Franco et le poème de Txiki […] : ‘Je suis vent de liberté’”.

“C’est toi Marisol ?”
“Mes parents ont choisi d’accueillir des gens d’ETA. En 1981, il y eut des arrestations à Madrid. Un militant a été torturé à mort. Un jour, des policiers sont arrivés autour de la maison familiale. Ils ont crié : ‘Sortez tous !’ On nous a collés contre le mur. Puis la porte d’un camion s’est ouverte et j’ai vu un des deux que nous hébergions. Je n’ai jamais vu un visage aussi décomposé. Un policier lui a posé une question en désignant chacun d’entre nous : “Et lui, il en est ?”.
Mon père n’était pas là à ce moment. Ma mère, mon frère et moi, nous avons été emmenés au commissariat. On a passé huit jours chez les policiers. Je me demandais où était le second que nous avions à la maison. Le dernier jour, on m’a appelée et dans le couloir, je me suis retrouvée avec sept ou huit policiers. L’un m’a dit : “C’est toi Marisol ?” Puis il m’a montré un dossier et des photos. C’était le corps torturé de celui que j’aimais. Des photos que sa propre mère n’a jamais vues. Je ne disais rien. Ils se sont mis à me frapper et à m’insulter. A Madrid, le juge a dit : ‘On garde la mère’ et on nous a libérés là, dans la rue. Nous étions des enfants”.

A ce moment, les regards de tous sont suspendus, magistrats compris, aux paroles de Marisol. Elle raconte sa fuite vers Bayonne, son travail, l’OFPRA, les GAL et les menaces.

“En 1984, quand il a fallu faire renouveler ses papiers à la frontière, je n’y suis pas allée.”

Le président : “Depuis quand êtes-vous à l’ETA ?”
Marisol : “Je suis militante de l’ETA depuis que je suis toute petite.”

Je suis là
Vient ensuite le témoignage de Mme Rozel, enseignante, qui, sur l’île d’Oléron, a participé à la création d’une école laïque, gratuite et libertaire, une “république éducative qui a accueilli pendant plus de 8 ans, plus de vingt enfants.” C’est dans cette école qu’est resté deux ans le fils de Marisol et de Mikel.

Puis celui de Guillermo Etxebarria, directeur d’école, qui a connu Marisol durant l’année 1983-1984 au collège de Cambo. Il raconte les années GAL et la menace qui rôdait autour des familles du collège. “Cette année-là, un père a été assassiné, une autre fois, c’est un enfant qui a failli être enlevé, une coopérative de meubles a brûlé.Après l’épisode de la voiture garée près de l’entrée, Marisol avait peur et sentait sa vie en danger.” Il évoque ensuite une connaissance qu’ils avaient en commun, Marisol et lui, Josu Muguruza.

Marisol reprend la parole et ses mots, comme toujours forts et surprenants, mettront un terme à cette journée d’audience. Les prisonniers quitteront leur box vitré en saluant le public. Marisol et Mikel lèveront le poing en saluant leurs amis.

“Contrairement à moi, Josu Muguruza a choisi de mener une vie normale. Quelque temps plus tard, il est retourné au Sud. Là, il a été arrêté, torturé et emprisonné pendant un an. Puis il est devenu député basque. Un soir, après une séance, à Madrid, les députés basques, des avocats, des amis se retrouvent dans une brasserie. La porte s’ouvre, un fasciste entre et tire une rafale de mitraillette vers le groupe. Josu est tué. Il arrive toujours un moment où l’on doit affronter sa propre vie. J’ai choisi une autre voie. Et puis, aujourd’hui je suis là, devant vous.”
En guise d’au revoir, Mikel lance “Gora Euskadi askatuta”.

http://www.lejpb.com/paperezkoa/20101126/234329/fr/Militante-depuis-que-je-suis-toute-petite


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[Urgent Aurore Martin- >http://bellaciao.org/fr/spip.php?article111103]