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Le Général argentin Arturo A. Corbetta, celui qui ne tolérait pas « des détentions illégales, la torture, ou l’assassinat »

par Martin Edwin Andersen * via RF

Publie le samedi 7 janvier 2012 par Martin Edwin Andersen * via RF - Open-Publishing

La direction du Général Arturo A. Corbetta à la Police fédérale argentine, 29 ans après le coup militaire, donne un exemple d’un Officier préoccupé des droits de l’homme. Témoin direct, l’ambassadeur US Robert Hil informe le Département d’État des États-Unis sur sa conduite. (Voir pièces jointes).

Tandis que les argentins commémorent aujourd’hui le 29 eme anniversaire du coup d’Etat qui a endeuillé le pays pour plus d’une génération, il est peut-être utile de réfléchir à l’exemple d’un militaire qui, selon un document récemment déclassé par le Département d’État, ne tolérait pas « les détentions illégales, la torture, ou l’assassinat » qui ont été appliqués comme politique d’État pendant cette triste période.

Un câble, signé par l’ambassadeur de l’époque, Robert Hill, a informé Washington le 7 juillet 1976 que le jour précédent le Ministère de l’Intérieur avait annoncé la démission du chef flambant neuf de la Police Fédérale Argentine, le Général Arturo A. Corbetta.

Corbetta, remarquait Hill, « il y a eu affrontement presque tout de suite après sa nomination quand il a souligné à ses subordonnés que … bien qu’il avait l’intention de lutter contre la subversion avec tout (s) (les moyens), il attendait de la police qu’ils utilisent seulement des méthodes légales et éthiques ».

« Il n’allait pas, (Corbetta) a-t-il apparemment dit à ses subalternes, tolérer n’importe quelle détention illégale, la torture ou l’assassinat », a informé l’ambassadeur Hill, qui n’avait pas encore appris que cela faisait seulement un mois que l’ex-secrétaire de l’État Henry Kissinger avait donné le feu vert à l’Amiral Cesar Guzzetti pour la guerre sale lors une réunion à Santiago, au Chili.

Selon l’information dont disposait l’ambassade, Hill a continué, écrivant que Corbetta avait dit aux fédéraux que « il avait l’intention de faire des inspections sans préavis préalable dans les commissariats et s’il trouvait, un détenu maintenu illégalement, il allait licencier les responsables et les traduire devant les tribunaux. »

La réaction policière contre son nouveau chef fut « immédiate et intense », a dit Hill. « Beaucoup d’officiers de haut rang dans la Police fédérale ont commencé à se plaindre auprès de leurs contacts militaires que Corbetta portait tort à ‘la campagne anti-subversive’ et qu’il était " pas de confiance" et(ou) "un gauchiste lui même." Une source policière a insisté auprès de l’attaché légal de l’ambassade, Robert W. Scherrer, sur le fait que Corbetta était un « montonero. » [guerrilla de la gauche-peroniste]

La destruction terrifiante le 2 juillet du siège de la Surintendance de Sécurité Fédérale (SSF ; ex-Coordination Fédérale), la centrale d’intelligence de la Police fédérale [sous commandement militaire], a laissé comme bilan 22 personnes mortes et près de 60 blessés, la plus part d’eux étaient des sous-officiers et auxiliaires policiers. Menée par les montoneros, l’attaque a aussi fait chanceler la direction éphémère de Corbetta.

« Il a simplement levé l’humeur des policiers », ironizó Hill. L’opposition à Corbetta dans la force, se résumait dans la phrase : « Vois-tu ce qu’il arrive quand nous devenons mous avec la subversion ? En essayant d’imposer son autorité, le 5 Juillet, Corbetta —qui se trouvait dans une situation où il allait gagner ou perdre — a licencié deux hauts officiers policiers, dont l’un était un ami intime du Ministre de l’intérieur (Gen . Albano) Harguindeguy », a écrit Hill. « Après les avoir licenciés, Corbetta a remarqué que, en tant que commissaires, ils étaient responsables de la sécurité de l’édifice attaqué ». (Les licenciés étaient les directeurs de la Sécurité Fédérale et de la Sécurité Métropolitaine, les commissaires généraux Evaristo Besteiro et Angel Scarsella.)

« Imaginez-vous, parler des codes de procédures [et les avoir] à la main ! », s’est exclamé Harguindeguy à cet auteur des années plus tard, il ne pouvait pas encore le croire).

« Le coup de Corbetta l’a fait perdre », Hill a signalé. « La résistance policière face à lui a été trop forte et l’appui reçu de la part du Ministre de l’intérieur (et peut-être de plus haut) a été insuffisant. Face à une situation presque de rébellion, dans la Police fédérale, Harguindeguy a demandé la démission de Corbetta. »

« Son éloignement est une déception pour les modérés et peut-être cela va promouvoir l’idée dans la Police fédérale qu’ils peuvent mettre en pratique leurs méthodes extra-légales sans aucun empêchement. Peut-être ont-ils raison ».

Il est connu que, à peine quelques jours après le coup d’Etat, Corbetta avait réussi à sauver un couple d’acteurs, Luis Brandoni et Marta Bianchi, des cachots d’Automotores Orletti. Et une fois destitué de la direction policière, Corbetta — qui a été envoyé à [la Caserne dans la ville de] Tandil comme chef de Brigade I de la Cavalerie Blindée -a Sauvé le montonero détenu Juan Carlos Dante Gullo, avant que « la loi de fuites » lui fût appliquée par les gardiens de la prison de Sierra Chica, qui dépendait de la Brigade I.

« Je crois que Corbetta continuait de penser que c’était un pays qui déjà non (n’existait plus), » s’est remémoré Gullo plus d’un quart de siècle après : « il ne validait pas les disparitions ni les "factures" » [assassinats extrajudiciaire en jargon de l époque].

* Martin Edwin Andersen , journaliste et historien étatsunien, est auteur du livre : « La Policía : Pasado, Presente y Propuestas para el Futuro », (la Sudaméricana 2002).

http://www.elcorreo.eu.org/?Le-General-argentin-Arturo-A

Cable de la Embajada de USA sobre el General Arturo A. Corbetta y la Policía Federal - 17 de julio de 1976 (PDF – 2.1 Mo)
Continuación del Cable de Embajada de USA - 17 de julio 1976 (PDF – 2.6 Mo)