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Brevets Logiciels : POUPEES RUSSES !! Deuxième partie

Publie le dimanche 20 mars 2005 par Open-Publishing

première partie
Troisième partie

de Laiguillon

POLITIQUE DU PROBLEME

Nos institutions à la rescousse ?

Nous touchons finalement ici, un des points les plus sensibles. Dans cette question, il s’agit moins de la teneur de ces brevets que de la façon dont les décisions se faufilent dans les méandres de la technocratie européenne. Plus exactement, dans le cadre des brevets logiciels, le cheminement des décisions nous permet d’entrevoir les limites institutionnelles en place. En clair, imaginez une fuite d’eau dans un plafond. Nous savons que cette fuite va causer des dégâts, nous alertons la régie. Celle-ci va prendre des mesures, mais l’eau n’aura de cesse de trouver un moyen pour s’écouler.

1974 : La Convention sur le Brevet Européen (CBE) est un traité multinational indépendant qui a été ratifié par différents pays européens ou non (la Turquie l’a ratifié). L’Office européen des Brevets (OEB) a été crée par la CBE, et les états membres ont incorporé ses principes dans leurs droits nationaux. Attention, l’OEB N ‘EST PAS UNE INSTITUTION DE L’UE.

Ce traité dicte la non brevetabilité des logiciels : « ...Il stipule dans son 2e paragraphe que les "méthodes mathématiques" et les "programmes d’ordinateurs" ne sont pas des inventions brevetables.

Dans le 3e paragraphe, il stipule ensuite que cette exclusion de la brevetabilité ne concerne ces sujets ou ces activités que "considérés en tant que tels".

C’est aujourd’hui selon cette convention que les brevets logiciels sont interdits aux nveaux nationaux.

Oui mais ...

Non respect des textes

OEB : Cette institution entièrement en dehors de l’Union Européenne, est autosuffisante (elle se finance avec l’argent reçu pour l’accord des brevets) et dirigée par les délégués des offices des brevets nationaux des pays souscripteurs. En tant que telle, une directive de l’UE n’affectera jamais directement l’OEB, mais elle affectera l’applicabilité des brevets qu’elle garantit. Parce qu’ils doivent être appliqués par les tribunaux nationaux sous l’égide des lois nationales, elles-mêmes liées aux directives d’européennes.

Malgré le fait de la non applicabilité des brevets aux logiciels, écrit dans cette convention, l’OEB a déjà décerné des brevets.

Dès 1985 les brevets logiciels ont commencé à être délivrés par l’OEB sous forme de revendication de procédé. Depuis 1998 les revendications de programme se sont aussi bien avérées acceptables. Oh, une bagatelle, juste 30’000 brevets

(voir exemples sur FFII)

La commission de l’UE s’en mêle

Que l’on soit d’accord, le fait que l’UE produise une directive est une bonne chose en soit. Rappelons que le but de l’UE est entre autres, de définir des directives qui harmonisent le comportement des pays membres, qui juge par le biais de sa structure démocratique et ainsi établit un cadre de bonnes pratiques.

Pour ceux qui n’auraient pas suivi le fonctionnement des institutions européennes (jeter un œil sur :info-europe)

la commission est la SEULE qui décide des directives. Elle consulte le Conseil Economique et Social (CES). Elle CONSULTE aussi le parlement (membres élus au niveau national) qui statuent sur la directive. Puis ils passent le bébé au CONSEIL pour qu’ils puissent CODECIDER. Enfin ils rendent l’avis à la commission qui sera seule à PRENDRE LA DECISION.

Nous allons assister à un ballet qui correspond à l’article III-396

Ainsi, En 2002, la Commission européenne a alors sorti une proposition de « directive sur la brevetabilité des inventions mises en oeuvreparordinateur ». Son texte a entièrement normalisé les pratiques de l’OEB en matière d’octroi des brevets logiciels, sauf qu’il n’a pas permis les revendications de programme. Cette directive est élaborée sous la procédure de co-décision et a pour référence COD/2002/0047.

Le parlement et le CES ne sont pas d’accord Pas de chance pour la commission, sous la pression du public, le CES et le parlement démolissent cette proposition ou plutôt l’amende (demande des modifications). Ils donnent ensuite (24 septembre 2003) ce projet de directive au Conseil. (Article III-396-3).

La commission donne son avis sur les amendements du parlement, au Conseil.

Les amendements du Parlement sont pour la plupart jugés inacceptables par la Commission et c’est en ces termes que le texte amendé est proposé au Conseil.

Le conseil (des ministres européens) se fout de l’avis du parlement et du CES.

Celui-ci, rejette pratiquement tous les amendements et revient se calquer sur la directive de la Commission !!

Il faut dire que ce conseil a délégué un groupe de travail (Propriété Intellectuelle) pour statuer. Pas de chances, les membres de l’OEB sont les mêmes que ceux du groupe de travail. Ils obtiennent un « accord politique » sur le texte de ce groupe de travail.

Mais le conseil se tire une balle dans le pied

Le Conseil doit transformer normalement cet « accord politique » en « position commune » (entériner une décision informelle). Il le fait directement par un vote ou par la bande. Le vote a lieu le 18 Mai 2004 mais certains pays finissent par ne plus trouver drôle de s’être fait rouler dans la farine et de trouver ces pratiques « anti démocratiques ».

Qu’à cela ne tienne, le Conseil passe par la bande et essaie de faire entériner cet accord en le proposant durant des sessions qui portent sur des sujets totalement différents. Ils tentent ainsi de faire voter cette position commune durant une session sur la ...pêche. Mais le ministre polonais (un des dindons de la farce) participe à cette séance pour repousser ce vote...

Et cette situation n’évolue plus jusqu’à fin février 2005.

Tout le monde est dans une impasse.

Le parlement joue la magnanimité.

Revenons à une première lecture sur ce texte. Ils prétextent que des changements intervenus depuis, pourraient justifier ce retour. De plus, ils votent à l’unanimité cette décision. Tout le monde aurait pu sortir la tête droite de cet épouvantable bourbier.

La commission montre qui est le patron

Et bien non ! La commission (toute puissante) refuse le 7 mars 2005, cette proposition et demande que le texte reparte vers le conseil. Autrement dit : « tant que vous n’aurez pas été d’accord avec ce texte, on ne bouge pas «  !!!

Michel Roccard, comme d’autres, s’exprime sur ce point en ces termes : la moutarde commence à monter au nez des eurodéputés devant ces « inélégances peu démocratiques ».

Le 12 Mars 2005, un membre de la commission , le commissaire McCreevy disait en substance : « Nous ne devons pas nous laisser faire par un parlement qui ne veut que du statu quo »

 FFII

Je rappelle enfin que le parlement est la seule instance élue au suffrage direct par nous, concitoyens. Il s’agit donc de la seule entité démocratique de ce foutoir. Et bien, pas de chance, nous ne sommes pas entendus !!!

BRAVO LA DEMOCRATIE EUROPENNE !!!

Grattons le vernis un petit peu plus

OEB et compagnie

Comme nous le disions, le groupe de travail interrogé par le conseil, qui a planché sur ces brevets logiciels, est constitué des mêmes membres que l’OEB. Et bien oui, il faut des experts. Ces membres de l’OEB sont tous des directeurs ou des directeurs adjoints des instituts nationaux pour la propriété intellectuelle.

Le lien suivant en donne la liste :

 ac.european

Prenons-en quelques uns :

Président : Roland GROSSENBACHER, Directeur, Institut Fédéral de la Propriété Intellectuelle (CH) Vice-Président : Alison BRIMELOW (GB), European Affairs Advisor to the Patent Office (GB) Membres pour la Fance Représentant : M. Benoît BATTISTELLI, Directeur général Institut National de la Propriété Industrielle Suppléant : Mme Martine HIANCE, Directrice générale adjointe Institut National de la Propriété Industrielle

Bien. Maintenant vous devez savoir que le dépôt de brevets se fait contre monnaie sonnante et trébuchante. En regardant les résultats des ces instituts nationaux, vous vous rendez compte immédiatement que le business est assez juteux. N’oubliez pas que lorsque vous déposez un brevet, il faut le faire dans chaque pays dans lequel vous voulez qu’il soit actif. D’autre part, ces instituts n’ont pas en charge le contrôle du respect de ce brevet mais seulement le dépôt. Mais pour ne pas nous éloigner trop, revenons sur ces différents membres. Prenons-en deux au hasard mais l’expérience pourrait s’appliquer, je pense, à tous.

Roland Grossenbacher - Directeur de l’IGH (Institut Fédéral de la Propriété Industrielle)

 ige.ch

Parmi les membres du conseil de cet institut, nous trouvons · Jean-Pierre Maeder, Directeur-adjoint Nestec SA, Vevey · Eric A. Notegen, Directeur de la division brevets du groupe Hoffmann-La Roche AG, Bâle

M. Benoît BATTISTELLI, Directeur général de l’Institut National de la Propriété Industrielle
info.vnatrc.net

L’INPI a été livrée au MEDEF - voir article :
 inpi.fr

Tiens, le MEDEF ?

Si je veux résumer assez sournoisement, je dirais que ces organismes qui se nomment très souvent publiques, sont en fait directement liés avec des intérêts privés. Autrement dit, pouvons-nous décemment penser qu’ils sont réellement objectifs et que les intérêts financiers qui peuvent découler directement ou au travers de leurs partenaires, par de juteux dépôts de brevets en tout genre ne vont pas les inciter à les promouvoir ces fameux brevets logiciels ?

Collusion, conflits d’intérêts, délits d’initiés, je vous laisse juges !!

Les pro brevets

A votre avis qui se cache derrière les pro brevets ?

Bien entendu, il s’agit de sociétés de logiciels à gros moyens.

Pourquoi gros moyens ?

Qui peut se permettre de dépenser sans compter pour des dépôts de brevets dans tous les sens ? Qui peut se permettre d’engager des poursuites tout azimut pour toucher des royalties ou des amendes, suite aux infractions sur ces même brevets ? Des sociétés du genre Microsoft, Alcatel, etc...

Maintenant pensez-vous réellement que ces même sociétés se soucient de vos intérêts à vous, cochons de payeurs ?

http://e-torpedo.net