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Pour un mouvement antifasciste europeen avant qu’il ne soit trop tard...

par Giorgos MITRALIAS

Publie le jeudi 13 juin 2013 par Giorgos MITRALIAS - Open-Publishing
7 commentaires

Pour un mouvement antifasciste européen avant qu’il ne soit trop tard… par Yorgos MITRALIAS

(Athènes, 23 Mai 2013)

L’approfondissement et la généralisation de la crise à –presque- toute l’Europe Unie fait qu’il soit désormais possible d’appréhender non seulement la dynamique et les caractéristiques de cette crise, mais aussi les taches que devrait assumer en toute priorité la gauche qui ne se rend pas et persiste à résister.

1. C’est ainsi que dorénavant on peut parler d’une tendance à la « grécisation » -au moins- du sud européen, dans la mesure où les uns après les autres des pays comme l’Espagne, l’Italie ou même la France voient leur paysage politique en train d’être bouleversé très profondément à l’instar de ce qui se passe en Grèce depuis 2-3 ans.

A des degrés divers mais de façon de plus en plus claire, le pilier de leur système politique, c’est-à-dire leur bipartisme traditionnellement triomphant entre en profonde crise (France, Espagne,…) ou même s’effondre (Grèce, Italie,…) au profit des forces politiques, jusqu’alors souvent inconnues, appartenant aux deux extrémités de l’échiquier politique.

En un temps record, leurs deux grands partis néolibéraux de droite et de gauche qui s’alternaient en toute sécurité au pouvoir et totalisaient 70%, 80% ou même plus des voix, reculent ou pire, se décomposent additionnant désormais moins de 50%, 40% ou même… 30% des préférences des citoyens.

2. Bien que la droite classique subisse aussi les conséquences de la désaffection des citoyens, c’est pourtant la social-démocratie qui en est sa victime principale. Les partis sociaux-démocrates s’effondrent partout (Grèce, Espagne, Italie, France, Allemagne,…) et signe des temps, ils n’arrivent plus a profiter de l’usure de la droite quand elle est au pouvoir. Ils reculent fortement même quand ils sont à l’opposition !

En somme, on assiste à une crise sans précédent de la social-démocratie qui a tous les caractéristiques d’une crise… terminale ! La conséquence est historique et cataclysmique : étant amputé d’un de ses deux piliers, le bipartisme qui garantissait la stabilité politique et le bon fonctionnement d’un système fondé sur l’alternance au pouvoir des partis néolibéraux, reste suspendu en l’air, ne fonctionne plus. Alors, dans ces conditions, la crise de régime n’est pas loin…

3. Force est de constater que la gauche européenne n’est pas aujourd’hui en état d’incarner les espérances des citoyens en colère qui sont en train d’abandonner les partis jusqu’à hier dominants. Sauf en Grèce avec SYRIZA, nulle part ailleurs en Europe la gauche n’a ni la crédibilité, ni la force organisée et l’ancrage social, et surtout ni la capacité pour inspirer les masses qui se détournent des grands partis bourgeois tout en radicalisant leur rejet de l’ordre établi.

La conséquence de l’actuelle impuissance de la gauche européenne face à la crise généralisée du système de domination bourgeois ne peut pas se résumer à la prévision que la gauche ne va pas profiter de cette crise cataclysmique du capitalisme.

Malheureusement, il y a désormais bien pire que ça. Ce qui se profile déjà à l’horizon européen est que cette crise historique combinée à l’actuelle impuissance de la gauche pourrait très bien conduire à ce que des pans entiers d’une société aux abois et désorientée se tournent finalement vers l’extrême droite ou même des forces néo-fascistes et néo-nazies pour exprimer leur révolte anti systémique !

4. Simple hypothèse de travail ? Non, c’est exactement ce que commence déjà à se produire dans un nombre toujours croissant des pays européens.

Maintenant, il ne s’agit plus de l’ « exception grecque » qui a vu l’éclosion et le développement foudroyant des néonazis de l’Aube Dorée. Maintenant, il s’agit d’un véritable raz de marée d’extrême droite, ou tout au moins de l’euroscepticisme réactionnaire (Allemagne, Angleterre), même dans des pays du nord européen encore relativement épargnés par la crise de la dette et les politiques d’austérité !

Encore plus important que la presque généralisation du phénomène est le fait que maintenant l’extrême droite fait une percée historique à un grand pays comme la France, qui a toujours marqué l’histoire de notre continent. Et même là où l’extrême droite reste toujours marginalisée (Italie, Espagne, Belgique,...), la crise sociale et la fragilité politique sont telles que la situation pourrait évoluer au profit de l’émergence d’une force d’extrême droite à un temps-record, d’autant plus qu’il faudra désormais tenir compte de l’effet de contagion…

5. En somme, dorénavant sont présents en Europe tous les ingrédients d’une crise sociale et politique sans précédent depuis la fin de la dernière guerre mondiale, nous rapprochant plutôt de l’entre deux guerres et de ses « démons », bien que le monde actuel a énormément changé depuis les années 1930…

Cependant, les ressemblances avec l’entre deux guerres ne se limitent pas à la situation « objective ». Malheureusement, on voit le « facteur subjectif », la gauche non social-démocrate d’aujourd’hui faire preuve de la même incapacité de la gauche d’alors de comprendre ce qui se passe aux tréfonds de la société, et de réagir en conséquence.

La conclusion doit être catégorique : Bien qu’impétueuse, ce n’est pas la montée de l’extrême droite qui fait peur. Ce qui est effrayant et détermine les taches d’aujourd’hui et de demain est plutôt l’incapacité ou l’impossibilité de la gauche non seulement de résoudre la crise a son profit mais même de faire barrage à cette montée de la réaction et de l’extrême droite !

6. Alors, si le diagnostic est bon, que devons-nous faire, si évidemment on refuse toute attitude passive et fataliste et on choisit de se battre avant qu’il ne soit trop tard ?

La réponse parait évidente :
Il faut au plus vite rassembler toutes les forces disponibles de par l’Europe -est et ouest, nord et sud- afin de mener un combat à long terme contre l’extrême droite montante, néofascisme et néonazisme inclus.

7. Pour faire sens et surtout pour pouvoir donner des résultats tangibles, ce rassemblement antifasciste européen doit être à la fois unitaire et radical, de masse et démocratique.

Toute approche sectaire qui préfère exclure plutôt qu’unir, trahit une profonde incompréhension ou sous-estimation de la gravite de la situation, qui impose la constitution d’un front unique de tous ceux, sans exclusives, qui sont disposés de combattre la peste brune. Les leçons de l’entre deux guerres, celles de l’Italie des années 20 et celles de l’Allemagne des années 20 et 30, sont ici pour nous rappeler que le chemin le plus court vers le suicide programmé du mouvement ouvrier et socialiste passe par ses sectarismes et ses divisions face à la montée de l’extrême droite raciste, fasciste et nazie…

8. Pour pouvoir inspirer les antifascistes et répondre aux attentes des populations en ces temps de guerre sociale prolongée, ce rassemblement antifasciste doit être unitaire mais aussi radical.

Ici, il ne s’agit pas seulement de constater que les combats contre les affameurs du peuple et contre l’extrême droite sont organiquement liés puisque l’extrême droite défend –en dernière analyse- le système et ses fondements économiques.

Il s’agit de tenir compte de la révolte, même si elle est confuse et partielle, des victimes des politiques d’austérité contre le système qui les génère et le personnel politique qui les applique.

Car c’est la « modération » d’une certaine gauche, perçue –à juste titre- par la population comme « mollesse » et refus de traduire en actes les belles paroles de gauche, qui fait tourner les masses paupérisées et désespérées vers les fascistes et autres extrémistes de droite presque partout en Europe…

9. Unitaire et radical, ce rassemblement antifasciste européen doit impérativement être aussi démocratique, fondé sur l’auto organisation des citoyens.

Pourquoi ? Parce que seuls les citoyens et citoyennes mobiliséEs peuvent combattre et battre l’extrême droite et parce que la condition sine qua non pour qu’ils se mobilisent est qu’ils décident eux-mêmes de leur combat, de ses objectifs et de ses formes d’action. En somme, qu’ils prennent leur destin en main…

10. Mais il y a plus que ça.

Si on veut se battre avec des chances de succès contre l’extrême droite, on doit le faire partout, en permanence et surtout de façon globale, sur tous les terrains, sans négliger aucun champ de bataille.

Car il ne s’agit pas seulement d’affronter dans les rues les troupes d’assaut et autres milices et bandes racistes et néofascistes, mais aussi les énormes ravages que fait dans les esprits et les comportements la contre-révolution néoconservatrice, le retour de la pire réaction raciste, antisémite, homophobe et antiféministe et chauvine.

Et tout cela parce que la montée actuelle d’une extrême droite de masse ne tombe pas du ciel, elle a été préparée par l’empoisonnement méthodique des nos sociétés par les « valeurs » égoïstes et antihumaines de la contre-révolution néolibérale, patriarcale et en dernière analyse, misanthrope et barbare.

11. Autrement dit, il n’est pas possible de se dire antifasciste tant qu’on n’est pas en guerre contre les piliers et la raison d’être de l’extrême droite, c’est-à-dire le racisme, l’homophobie, l’antisémitisme, le chauvinisme, le sexisme, et aussi le culte de la violence aveugle, du machisme et de l’intolérance.

En quelques mots, une organisation politique ou autre ne peut pas pratiquer un antifascisme conséquent tant qu’elle reste homophobe, patriotarde, machiste ou…fait même parader ses militants au pas de l’oie.

Alors, qui peut donner toutes ces batailles quotidiennes sinon les premiers intéressés, les citoyens/ennes eux-mêmes, là où travaillent, habitent, étudient, se manifestent, nouent des rapports entre eux, s’aiment.

La conclusion parait évidente : Pour être efficace, l’antifascisme ne doit pas être l’affaire des appareils mais des citoyens auto-organisés partout où ils exercent leurs activités en tant qu’êtres sociaux. Un antifascisme qui ne s’attaquerait pas à tous les aspects de la contre-révolution réactionnaire en marche et qui se limiterait à combattre seulement ses épiphénomènes, serait condamné d’avance à l’impuissance…

12. Mais attention : Vue l’extrême urgence d’une situation déjà critique, le vrai dilemme actuel n’est plus agir ou ne pas agir contre la menace grandissante d’extrême droite. Maintenant, il s’agit de se décider et d’agir vite, le plus vite possible, car on a déjà perdu énormément de temps précieux tant en Grèce et en Hongrie qu’ailleurs.

Qu’on arrête donc de nous mettre en garde en nous disant qu’il ne faut pas laisser le serpent brun sortir de son œuf. Malheureusement, cet avertissement ne sert plus a rien car cela ca fait déjà longtemps que le serpent est non seulement sorti de son œuf mais qu’il est devenu un monstre qui se balade dans les rues semant la terreur au moins dans plusieurs nos pays européens !...

Alors, décidons-nous vite et agissons !

Produit d’une initiative pour le moins atypique, le Manifeste Antifasciste Européen* a le grand mérite d’exister et de nous mettre tous et toutes devant nos responsabilités.

L’heure n’est plus ni a l’indécision des uns ni au fatalisme et à la passivité des autres. Elle n’est plus au sectarisme de ceux qui refusent de comprendre que seulement tous et toutes ensemble nous aurons la crédibilité nécessaire pour inspirer la volonté antifasciste des grandes masses citoyennes.

L’heure est à l’unité et à l’action antifasciste, l’heure est à la création du mouvement antifasciste européen. Aujourd’hui ! Demain il sera peut être trop tard…


Journaliste, Giorgos MITRALIAS est l’un des fondateurs et animateurs du Comité grec contre la dette, membre du réseau international CADTM et de la Campagne Grecque pour l’Audit de la Dette. Il est membre de SYRIZA.


Nb : Le Collectif BC a mis en gras/ italique.

* Campagne espagnole : www.antifascismeuropa.org
Campagne grecque : www.antifascismeuropa-ellada.gr
Campagne française : www.manifesteantifascisteeuropeen.fr/
Campagne slovène : www.odbor.si/antifa

Messages

  • Oui, mais des journaux télévisés un peu plus à l’écoute des Peuples, nous aideraient bien ! Pas les clôturer, les transformer !

  • Même si son texte est critiquable (la propagande pour SYRIZA, là, c’est quand même juste une blague .... ça fait très "faites ce que je dis mais pas ce que je fais", ....d’abord SYRIZA ne fait pas mieux que les autres, ensuite politiquement et idéologiquement SYRIZA ça vole quand même pas haut et ça reste du réformisme, qui en plus cherchait récemment à faire ades alliances indirectes avec la droite non gouvernementale... bref... passons, de ce point de vue, militant de SYRIZA militant du Front de Gauche, même combat...) - Passons le ressassement pénible sur l’Unité - ouais ouais unité faut voir ce que ça signifie ... se faire caporaliser par les extensions locales du PGE, type SYRIZA Front de Gauche et cie NON MERCI !!!! ....

    BREF. Malgré un texte contestable à certains égards, des choses , des analyses que, je ne partage pas et qui sont chez lui le fruit d’une idéologie (le communisme sous un mouchoir, le rassemblement au rabais, une analyse 100% politique et 0% économique, des relents d’antilibéralisme...), donc,

    IL POSE AUSSI UNE NÉCESSITE qui est RÉELLE, INCONTOURNABLE.

    LA LUTTE

    INTERNATIONALE

    ORGANISÉE

    AUTO-GÉRÉE

    ACTIVE

    NON SECTAIRE

    ANTIFASCISTE

    ANTICAPITALISTE

    MAINTENANT !

    Et c’est pour ça, uniquement pour ça que je soutiens cet appel et que je vais le diffuser MAIS avec MES remarques a priori : autogestion, direction coordinatrice ouverte SANS CAPORALISATION DES PARTIS "DE GOOOCHE".

    ANTIFA ET ANTICAPITALISTE (COMMUNISTE, même, c’est pas sale ;)) MAIS je ne veux pas devenir une "excroissance" du FDG ou de SYRIZA ET JE CONCHIE le PGE.

  • Disons qu’à ce stade je soutiens l’esprit global de cet appel et que si nous avons des garanties que ce n’est pas là une créature du PGE qui est en train d’essayer d’être créée dans notre dos (sans nos idées, ni nos objectifs, mais avec "nos moyens".... on nous a déjà fait le coup avec les CUAL hein ;)), je soutiendrais la création et la participation...

    • mouais, mouais..
       :)
      Moi je trouve très curieux qu’un mec qui se réclame de la "gôche" non compromise dans la gestion capitaliste, nous balance comme le premier soc venu ou journaleux aux ordres , (le gras pour m’étonner de ce type d’amalgame..)

      A des degrés divers mais de façon de plus en plus claire, le pilier de leur système politique, c’est-à-dire leur bipartisme traditionnellement triomphant entre en profonde crise (France, Espagne,…) ou même s’effondre (Grèce, Italie,…) au profit des forces politiques, jusqu’alors souvent inconnues, appartenant aux deux extrémités de l’échiquier politique.

      C’est quoi ces "deux extrémités" qui consiste à faire de Clément une victime des"violences entre extrémistes"...dans nos médias crapuleuses...

      Donc, perso, j’attends pour voir..mais je ne"sens pas" ce machin...

      A.C

    • encore unentreprise de rcuperation politicienne...vive la revolution proletarienne.

  • « A des degrés divers mais de façon de plus en plus claire, le pilier de leur système politique, c’est-à-dire leur bipartisme traditionnellement triomphant entre en profonde crise (France, Espagne,…) ou même s’effondre (Grèce, Italie,…) au profit des forces politiques, jusqu’alors souvent inconnues, appartenant aux deux extrémités de l’échiquier politique. »

    Je ne vois pas où, quand, comment, ni en quoi la déroute économico-politique des libéraux ait profité à l’extrême-gauche.

    Ce genre de discours, qui met dans le même sac l’extrême-gauche et l’extrême-droite est dangereux et si ce môssieur aspire à la création d’un mouvement antifasciste européen, c’est mal barré !!

    On veut réunir et on commence par diviser.

    Ridicule !!

    Perso, je suis évidemment d’accord que l’on s’unisse à l’échelle européenne pour lutter contre le néo-nazisme renaissant, mais si c’est pour proposer comme alternative politique une révolution par les urnes, je n’en vois pas l’intérêt. Mieux vaut continuer de combattre l’extrême-droite, avec les antifas d’extrême-gauche !!

  • Le meilleur moyen de lutter contre la montée du fascisme, c’est de s’attaquer au capitalisme pour le détruire.