Accueil > Pourquoi la révélation de l’homosexualité d’une personnalité publique peut (...)

Pourquoi la révélation de l’homosexualité d’une personnalité publique peut être utile

par AJL - Association des Journalistes LGBT

Publie le samedi 13 décembre 2014 par AJL - Association des Journalistes LGBT - Open-Publishing
3 commentaires

Ce vendredi 12 décembre, le magazine Closer révèle l’homosexualité de Florian Philippot, député européen FN et vice-président du parti de Marine Le Pen. A cette occasion, l’Association des Journalistes Lesbiennes Gay Bis et Trans (AJL) rappelle son attachement au respect de la vie privée. Mais elle appelle de ses vœux une évolution des mentalités et de la législation, afin que l’homosexualité ne soit pas automatiquement reléguée à la sphère privée (quand l’hétérosexualité, elle, est toujours publique), et que la conception parfois très restrictive de « vie privée » ne serve pas d’excuse pour entraver la liberté d’informer.

En France, la jurisprudence est ambiguë au sujet de « l’outing » -une pratique née au sein de l’activisme anglo-saxon pour dénoncer les incohérences de personnalités gay ou lesbiennes opposées aux droits des LGBT, et reprise aujourd’hui par la presse. En 2004, Jean-Luc Romero a réussi à faire condamner un magazine qui l’avait « outé », pour atteinte à la vie privée. Depuis, peu de journalistes s’y risquent. Pourtant, en 2005, la justice a débouté Marc-Olivier Fogiel et Stéphane Bern de leurs plaintes contre l’Expansion, car les juges ont considéré que les deux animateurs avaient déjà donné des indications sur leur orientation sexuelle dans la presse et qu’il n’y avait donc pas atteinte à la vie privée.

Dans un livre paru en décembre 2013, Octave Nitkowsky a révélé l’homosexualité de deux responsables du Front national dont Steve Briois, le maire d’Hénin Beaumont. Poursuivi, l’auteur a finalement pu conserver les passages évoquant l’homosexualité du plus connu des deux, soit Steve Briois. La cour d’appel de Paris a en effet estimé que« le droit du public à être informé de l’homosexualité de M. Briois (primait) sur le droit au respect de ce pan de sa vie privée ». Selon les juges, Steeve Briois, secrétaire général du FN, « est une personnalité politique de premier plan », dans une « commune dont le livre rappelle l’importance dans la stratégie de conquête électorale menée par le Front national ». Ils ont souligné que « l’évocation de l’homosexualité de M. Briois (…) (était) de nature à apporter une contribution à un débat d’intérêt général », particulièrement puisqu’il a des responsabilités dans un parti connu pour ses positions homophobes. Jean-Marie Le Pen notamment s’est plusieurs fois distingué pour ses propos stigmatisant les homosexuel-le-s et les personnes vivant avec le VIH.

Qu’en est-il avec Florian Philippot ? N’occupe-t-il pas lui aussi des responsabilités dans un parti connu pour ses positions anti-égalité ? N’est-il pas l’un des plus proches conseillers de Marine Le Pen, qui a longtemps hésité quant à l’attitude à adopter face à l’ouverture du mariage pour les couples de même sexe ? Près d’un an et demi après l’adoption de la loi, la révélation de son homosexualité permet peut-être de commencer à comprendre la relative discrétion de la direction du FN lors des « débats » et des manifestations anti-égalité. En cela, et seulement en cela, elle peut être utile.

Messages