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Appel pour Allende victime ? Moi, je ne signe pas

Publie le lundi 9 octobre 2006 par Open-Publishing
10 commentaires

Quelques amis ont demandé de diffuser et signer un appel contre deux conseillers communaux de Forza Italia qui, à Bologne, prétendent éliminer de la toponymie de la ville la Via Salvador Allende. L’appel, qui a les meilleures intentions, a pour titre : "Révisionnisme Historique : Allende de victime à bourreau". Je publie le link, d’accord, mais moi, cet appel je ne le signe pas. Et j’explique pourquoi.

de Gennaro Carotenuto traduit de l’italien par karl&rosa

Il est inacceptable de classifier comme victime le Président légitime du Chili, Don Salvador Allende. Allende était un marxiste et un révolutionnaire. Il a mené sa bataille et il a perdu. Mais il a combattu. Et avec lui a combattu le prolétariat chilien, de la Legua aux usines de la ceinture industrielle de Santiago, tandis qu’au contraire les cadres de parti, les communistes et les socialistes, qui sont aujourd’hui au gouvernement, rivalisaient pour se cacher dans les ambassades.

Classifier Allende dans la catégorie de victime est une offense à sa mémoire et c’est le pire des révisionnismes historiques, fonctionnel au climat historique que nous sommes en train de vivre. Les amis qui proposent cet appel ne se rendent pas compte qu’ils sont plus révisionnistes que les lugubres individus de Forza Italia, qui continuent justement à voir Salvador Allende comme celui qu’il a été pendant toute sa vie et jusqu’à sa mort : un ennemi de classe.

Allende était et reste un ennemi de classe et c’est pourquoi ils continuent une bataille pour la damnatio memoriae d’un révolutionnaire chilien. Bien fait. Paradoxalement, si les conseillers de Forza Italia arrivaient à réaliser leur propos, cela clarifierait les choses. Parce que ceux qui veulent continuer à avoir leur Via Salvador Allende - comme le témoigne aussi le titre et le mérite de l’appel - ne veulent pas une « Via Salvador Allende - révolutionnaire » ou défendre une « Via Salvador Allende - ennemi de classe des conseillers de Forza Italia », mais il veulent une conforfable, pacifique, rassurante « Via Salvador Allende - victime » et y faire ouvrir aussi, éventuellement, un McDonald.

En effet, ce qui offense est que de l’autre côté il y en a qui veulent une damnatio memoriae bien plus terrible contre Allende. Il s’agit de ceux, de la Concertation au Chili au centre-gauche en Italie, qui trouvent avantageux d’utiliser la figure d’Allende, mais en la dénaturant et en la transformant en victime sans défense, pacifique, pusillanime face à l’ignominie de la réaction des Etats-Unis et des classes dominantes chiliennes.

Voila le destin qu’il est commode de penser à propos du Tiers monde, selon toutes les gauches européennes. Il est commode de pleurer sur de petits Indiens et de petits Noirs quand ils meurent de privations ou sous les bombes, mais il est encore plus commode de prendre nos distances quand ces derniers se soulèvent contre ces privations et ces opprobres. Ils peuvent être des victimes, mais ils ne peuvent pas prendre en main leur destin.

Allende s’est soulevé pendant toute sa vie et jusqu’au dernier jour, le 11 septembre. Don Salvador est mort en combattant à l’intérieur de la Moneda, en tirant jusq’au dernier coup avec l’AK, le Kalachnikov, le fusil mitrailleurs (sur la photo) que lui avait offert Fidel Castro. Allende tira et tua des ennemis le 11 septembre. Il y a les photos et les témoignages mais ils sont utilisés avec parcimonie, ou, mieux, grossièrement cachés. Ce sont ceux qui, au Chili comme en Italie, trouvent depuis 33 ans avantageux de dénaturer sa pratique de révolutionnaire et de le désigner comme victime et agneau sacrificatoire qui sont en train d’offenser sa mémoire, pas les conseillers de Forza Italie qui, au contraire, sont en train de racheter, à leur façon, cette identité.

http://www.bellaciao.org/it/article.php3?id_article=15119

Messages

  • Bravo !

    sc_marcos94

    Pour une via Salvador Allende Revolucionnario.

  • ""tandis qu’au contraire les cadres de parti, les communistes et les socialistes, qui sont aujourd’hui au gouvernement, rivalisaient pour se cacher dans les ambassades.""
    Cet élément de votre article est indigne et le disqualifie !
    Des milliers de militants communistes , socialistes ont disparu , sont morts sous la torture , ou ont du s’exiler , ceux qui ont survécu , ont continué le combat et nombre d’entre eux sont morts aussi .
    Pour le reste , tout le monde sait qui fut Salvador Allende , il n’a pas besoin d’adjectif derriere son nom ,pour etre reconnu pour ce qu’il fut tout au long de sa vie .
    claude de Toulouse .

    • Tout à fait d’accord avec Claude de Toulouse... Il est honteux de prétendre disqualifier la résistance chilienne, et le rôle exemplaire des communistes... Pas seulement...
      Victor jara, le guitariste communiste dont les doigts furent coupés dans un stade et Gladys marin "la roja de todos", la dirigeante du PCC qui jusqu’à sa mort l’an passé a combattu pour la dénonciation des crimes des bourreaux sont autant d’ombres parmi d’autres qui vous interdisent de tels propos.

      Danielle Bleitrach

    • pour gladys
      ""Gladys Marin, une femme qui savait parler au coeur
      La dirigeante du Parti communiste était une figure charismatique dans son pays. Le président a décrété deux jours de deuil national.

      Gladys Marin, présidente du Parti communiste chilien, est décédée dimanche à l’âge de soixante-trois ans (voir l’Humanité du 7 mars). Ses obsèques auront lieu aujourd’hui à Santiago. Elle était, au-delà des clivages politiques et idéologiques, une figure charismatique dans son pays. Le deuil national de deux jours décrété par le président Ricardo Lagos répond au respect et à l’affection que portent de nombreux Chiliens à cette militante restée jusqu’à la fin de sa vie fidèle à ses engagements. Le groupe Quilapayun et son directeur artistique, Rodolfo Parada, ont résumé hier ce que pensent les Chiliens : « Avec Gladys, toute une génération de jeunes fut éduquée dans les principes de la solidarité humaine et de l’attention pour les problèmes sociaux les plus brûlants. Gladys était ouverte au dialogue, sensible et soucieuse de faire partager ses convictions les plus profondes. »

      En 1971, Gladys Marin, alors secrétaire générale des Jeunesses communistes du Chili et membre du Bureau politique du PCC, fait la une de l’actualité en organisant une rencontre mondiale de solidarité avec le Vietnam en lutte contre la guerre nord-américaine. Elle n’en était pas à ses débuts, ayant participé activement en 1970 à l’élection de Salvador Allende à la présidence de la République, ce dernier affichant publiquement son amitié pour cette « femme courageuse et déterminée en qui j’ai la plus grande confiance ».

      Gladys, fille d’un paysan et d’une institutrice, a commencé sa carrière professionnelle comme éducatrice pour enfants handicapés. Son parcours politique démarre aux jeunesses chrétiennes avant de rejoindre les communistes. Dirigeante de la JC, du Parti communiste, députée, elle n’était jamais éloignée de Luis Corvalan et de Salvador Allende. Jusqu’au soir du coup d’État de Pinochet du 11 septembre 1973, où elle est contrainte de trouver refuge dans les locaux de l’ambassade des Pays-Bas à Santiago. C’est dans la cave de cette représentation diplomatique que je l’ai rencontrée pour la première fois. Elle ne savait rien ou presque de ses proches, de son mari Jorge Munoz arrêté en 1976 et dont on n’a jamais retrouvé le corps, rien ou presque de ses camarades. Une femme au courage à revendre. Plusieurs mois après, j’ai retrouvé Gladys. Cette fois à Paris avec l’équipe du Mouvement de la jeunesse communiste de France dirigée par Jean-Michel Catala. Gladys devait récupérer des forces. Nous lui avons trouvé un refuge, des médecins, ses camarades et amis.

      Exil à Moscou, puis à Berlin. Gladys supportait difficilement l’éloignement de son pays. Dès que l’occasion se présentait, elle quittait l’Europe pour l’Amérique latine. « Je veux respirer à proximité de chez moi », disait-elle. Et alors que certains de ses camarades s’opposaient à son retour au Chili, Gladys décide en 1978 de rentrer clandestinement à Santiago. « Malgré les périls et les doutes, enfin je revivais », soulignait-elle.

      Elle sera de tous les combats, occupera les plus hautes responsabilités au sein de son parti et au plus fort moment de crise interne, elle demeurera l’élément rassembleur. Nous aimions Gladys, la communiste. Surtout la femme : elle savait parler au coeur.
      José Fort

    • Pour Victor

      ""On amena Victor et on lui ordonna de mettre les mains sur la table. Dans celles de l’officier, une hache apparut.
      D’un coup sec il coupa les doigts de la main gauche, puis d’un autre coup, ceux de la main droite.
      On entendit les doigts tomber sur le sol en bois. Le corps de Victor s’écroula lourdement. On entendit le hurlement collectif de 6 000 détenus.
      L’officier se précipita sur le corps du chanteur-guitariste en criant : " Chante maintenant pour ta putain de mère ", et il continua à le rouer de coups.

      Tout d’un coup Victor essaya péniblement de se lever et comme un somnambule, se dirigea vers les gradins, ses pas mal assurés, et l’on entendit sa voix qui nous interpellait :
      " On va faire plaisir au commandant. " Levant ses mains dégoulinantes de sang, d’une voix angoissée, il commença à chanter l’hymne de l’Unité populaire, que tout le monde reprit en choeur.
      C’en était trop pour les militaires ; on tira une rafale et Victor se plia en avant.
      D’autres rafales se firent entendre, destinées celles-là à ceux qui avaient chanté avec Victor. Il y eut un véritable écroulement de corps, tombant criblés de balles. Les cris des blessés étaient épouvantables. Mais Victor ne les entendait pas. Il était mort. "

      Miguel Cabezas (extrait d’un article paru dans l’Humanité du 13 janvier 2000).

    • Bonjour,

      les doigts coupés de Victor Jara font partie de la légende (pardon de commencer aussi brutalement). Il existe des témoins de ses souffrances au stade de Santiago - et leurs déclarations ont été recueillies lors du procès de Manriquez - lieutenant colonel responsable de la répression au stade et reconnu coupable de la mort de Victor Jara - en 2004. J´ai malheureusement perdu la déclaration du principal témoin - malheureusement pour le flux de l´information, parce que son récit est particulièrement pénible à lire, surtout pour celles et ceux qui ont cru comme moi durant 30 ans que Victor Jara était mort presque en chantant, la tête haute malgré la torture - mais je joins plus bas un lien (en espagnol) qui résume les faits.

      Ces précisions peuvent paraître futiles, mais en lisant l´histoire des dernières heures de Victor Jara, j´ai découvert que son agonie avait été bien pire que ce qu´on m´en avait raconté, qu´il était mort tout seul comme tou-te-s les torturé-e-s, passé à tabac, au point de perdre un oeil et l´usage de ses mains, puis criblé de balles et abandonné dans un feaubourg de Santiago. Il était inutile d´ajouter les détails sordides des "mains coupées" au traitement qu´on lui avait infligé. Et la légende tragique autour des dernières heures de Victor Jara m´apparaît aujourd´hui indécente. Elle est faite pour nous, gens "sensibles" qui ne supportons pas de voir nos idoles réduites en charpie ; elle est faite pour des gens comme notre historien Gennaro Carotenuto qui ne tolèrent pas les victimes et n´aiment que les héros.
      Victor Jara a été sauvagement assassiné pour ses idées, son engagement inconditionnel auprès de son peuple, et sans doute aussi pour le simple fait d´aimer chanter et jouer de la musique - les fachos n´aiment pas les plaisirs simples de la vie. Comme tant d´autres Chiliens et Chiliennes, il a été humilié, déshumanisé, anéanti avant d´être exécuté et ce n´est pas manquer à sa mémoire que de le faire savoir.
      http://www.memoriaviva.com/Ejecutad...

      Valérie

      PS. au professeur G. Carotenuto : j´imagine - ou plutôt j´ose espérer - qu´en tant qu´historien et journaliste spécialiste de l´Amérique latine vous disposez de données précises concernant les dirigeants communistes et socialistes chiliens qui se sont sauvés en abandonnant leurs bases. Une liste de noms ? Des statistiques ?
      Merci d´avance.

      Le site bilingue italien-espagnol du professeur Carotenuto à visiter :
      http://www.gennarocarotenuto.it/

  • Monsieur Gennaro Carotenuto

    Navré de devoir rectifier quelques petites choses,on n’insulte pas la mémoire d’un homme qui est mort les armes à la mains ou pas, mais la réalité de la periode du "front populaire" au Chili posent des questions qui peuvent permetre des caracterisations politiques.
    Salvador Allendé n’a jamais été un révolutinnaire,c’était un démocrate bourgeois(dans mon esprit cela n’a rien de péjoratif), à aucun moment il ne s’est appuyé sur le peuple jusqu’au bout il a refusé l’armement des travailleurs(il y a un film qui relate cela tres bien)

    Claude

  • Vos propos sont inacceptables pour ne pas dire orduriers !
    Je partage pleinement la position de Danielle Bleitrach et de Claude de Toulouse sur ce point.
    On peut aussi se poser la question de ce que vous faites sur le site Bellacio empreint de liberté d’esprit et de dignité, vous êtes-vous égaré ou c’est de votre part de la provocation gratuite ??
    Passez donc votre chemin. Merci.
    Tzigane

  • Pour luis

    ""A 90 ans, Luis Corvalan croit toujours aux idéaux communistes
    13/ 09/ 2006

    BUENOS AIRES, 13 septembre - RIA Novosti. Luis Corvalan, qui dirigea les communistes chiliens de 1958 à 1989, aura 90 ans jeudi, 14 septembre.

    Luis Corvalan a adhéré au Parti communiste chilien il y a 74 ans. Cet homme-légende croit toujours aux idéaux communistes et pense que l’effondrement de l’URSS et des pays d’Europe orientale n’est pas un échec ni, à plus forte raison, la fin du socialisme.

    "L’effondrement de l’URSS et des pays d’Europe orientale n’est pas du tout synonyme d’échec ni, à fortiori, de mort du socialisme en tant que tel", a déclaré Luis Corvalan à RIA Novosti.

    L’ex-secrétaire général du Parti communiste du Chili estime qu’il "s’agit du fiasco d’un certain type de socialisme fortement marqué par le bureaucratisme et qui était coupé du peuple".

    "Ce qui s’est produit en Union soviétique, aussi douloureux et tragique cela soit-il, doit finalement être une grande leçon pour l’histoire", a dit Luis Corvalan pour qui la bannière du socialisme continue de flotter sur le monde.

    "Je pense que les partisans du modèle socialiste de développement de la société sont nombreux dans le monde. Cela parce que le capitalisme n’est pas capable de régler beaucoup de problèmes sociaux. Ce n’est pas sans raison que nous assistons aujourd’hui à un essor de la lutte contre les tentatives entreprises par les Etats-Unis pour imposer au monde un modèle néolibéral de développement économique et aussi ce que l’on appelle la liberté et la démocratie américaines", pense Luis Corvalan.

    Le communiste légendaire a raconté à RIA Novosti que ses idoles étaient Vladimir Lénine, Karl Marx et Friedrich Engels. Et qu’il éprouvait aussi un grand respect pour Fidel Castro et Hugo Chavez.

    "Je respecte profondément Fidel Castro qui, malgré l’effondrement de l’Union soviétique et des pays d’Europe orientale, continue de défendre les idéaux socialistes sur l’Ile de la liberté", a déclaré Luis Corvalan.

    "J’estime hautement le président vénézuélien, Hugo Chavez. C’est assurément une personnalité brillante. Il est convaincu de la nécessité de procéder à de profondes réformes dans le pays et il les mène malgré la résistance de l’opposition. L’édification du socialisme au Venezuela au XXIe siècle vise à améliorer la vie des couches nécessiteuses de la population", a dit l’ancien dirigeant du Parti communiste du Chili.

    Pour Luis Corvalan, l’actuel "virage à gauche" de l’Amérique latine a pour origine le fait que des pays comme le Venezuela, la Bolivie, l’Argentine et l’Uruguay se sont engagés dans la voie du développement indépendant et cherchent à se soustraire au contrôle du voisin nord-américain.

    Luis Corvalan, qui à l’époque soviétique était introduit dans les instances supérieures du Comité central du Parti communiste de l’Union soviétique, habite avec sa famille une modeste maisonnette à Santiago.

    Il est toujours membre du Comité central du Parti communiste du Chili. C’est vrai que vu son âge et sur recommandation des médecins il ne va plus au-delà des limites de Santiago. Par contre, on le voit souvent dans les manifestations diverses organisées par son parti.

    Luis Corvalan a révélé à RIA Novosti qu’il écrivait un livre. Intitulé "Les communistes et la démocratie", il devrait paraître à la fin de l’année.