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l’interm’ du spectacle a un problème : il est trop nombreux

Publie le jeudi 3 avril 2003 par Open-Publishing

Trop nombreux pour être honnêtes

Depuis quelques temps, l’intermittent du spectacle a un gros problème : il
est trop nombreux.

C’est ce que déplore le rapport (1) commandité par les ministères du travail
et de la culture, après avoir pourtant souligné le dynamisme du secteur
culturel. Pour aider l’intermittent à se réduire, le rapport lui propose
plusieurs solutions (rétrécir son accès aux droits, diminuer ses revenus) et
le traite de fraudeur (2).

Quand il apparaît avec ses annexes VIII et X à la fin des années soixante,
l’intermittent du spectacle fait encore peu de vagues. Il va être pointé du
doigt par les gouvernements - de droite comme de gauche - dans les années
80, et deviendra vite un ennemi personnel du Medef. Un ministre du budget,
Christian Perret, déclara même à la télé : "Je trouve honteux que des gens
gagnent 50 000 F d’Assedic par mois !" Ses conseillers avaient oublié de lui
signaler que les montants sont plafonnés. Mais l’image de l’intermittent est
restée figée : c’est "un privilégié" et son statut génère "des abus". Et le
mythe de la star de cinéma cumulant cachets exorbitants et Assedic est
toujours vivace.

La stigmatisation de l’intermittent s’appuie sur un argument très classique
 : il fait partie de ceux (comme le chômeur, le sans papier, le jeune, le
vieux, le malade) qui creusent le trou de l’Unedic et profitent des
cotisations des vrais travailleurs. Et il est d’autant responsable du
déficit de l’Unedic - comme si l’Unedic avait vocation à être bénéficiaire
 , qu’il est plus nombreux : 100 000 selon le Medef, 60 000 selon les
chiffres des Congés Spectacle, contre 41 000 il y a dix ans. La même logique
est appliquée aux chômeurs en général : l’Unedic est déficitaire parce qu’il
y a trop de chômeurs indemnisés - mais pas parce que trop d’employeurs ont
bénéficié d’exonérations de charges, ont délocalisé ou multiplié les plans
de licenciement.

Récemment, la cour des comptes s’est horrifiée, elle aussi, d’une forte
progression des indemnisations concernant les intermittents. Tout en
constatant le dynamisme et la bonne santé du secteur culturel, et bien que
ses chiffres montrent que le ratio entre cotisations et indemnisations est
resté le même depuis dix ans.

En juin 2002, pour combler le fameux déficit, le gouvernement Raffarin a
décrété le doublement immédiat des cotisations de l’assurance-chômage (parts
salariales et patronales) pour les intermittents. Or, ce déficit est calculé
sans prendre en compte les cotisations versées par les salariés permanents
du secteur culturel, et en oubliant que les retraites du secteur culturel
sont excédentaires. Mis en danger par ce doublement des cotisations, plus
de 200 compagnies de province ont lancé un appel au boycott de la cotisation
patronale.

Sans l’intermittence, c’est l’ensemble du système culturel qui disparaît, et
donc aussi les salariés permanents et les fonctionnaires de la culture. Pour
défendre leurs droits, beaucoup d’intermittents doivent sortir de ce mélange
de honte, de culpabilité et de fatalité qui les poursuit ("privilégiés",
"fraudeurs", "assistés", etc.). Mais se battre pour le statut
d’intermittent, c’est défendre les droits de tous les précaires, et ne pas
laisser s’enfuir l’idée d’un revenu garanti pour tous.

Le salaire issu de l’emploi comme seule rémunération est déjà de l’histoire
ancienne, il est depuis longtemps complété par diverses prestations de
salaire social. En tant que modèle d’une précarité sécurisée, où l’idée de
revenu n’est pas totalement assujettie à l’emploi, le statut des
intermittents du spectacle représente évidemment un danger pour le Medef au
moment où dans tous les domaines du travail, la flexibilité et la
précarisation se sont installées depuis longtemps ( 87 % des embauches se
font en CDD pour durée moyenne de deux mois).

Tandis que le Medef, la cour des comptes et le gouvernement crient au
scandale à propos des droits soit disant exorbitants des intermittents, il
n’est pas étonnant que les associations de chômeurs défilent aux côtés des
intermittents.

Le groupe des Précaires Associés de Paris (PAP), créé fin 2002 par des gens
d’AC !, de la CNT et de SUD a eu la bonne idée d’éditer un recueil de textes
anciens et nouveaux, qui font le lien entre les luttes des intermittents,
celles de précaires, les interrogations sur le travail et le revenu garanti.
Il s’intitule l’Intermutin, Matériaux pour le Précariat, il est disponible
sur le site www.pap.ouvaton.org ou à l’adresse precairesassocies@yahoo.com.
Les encadrés de ce dossier sont extraits de cette brochure, comme les deux
textes qui suivent.

(1) Voir les propositions précises du rapport dans les encadrés ci-dessous.
Le rapport Roigt-Klein est par ailleurs disponible sur les sites
intermittents-danger.fr ou fnsac-cgt.com

(2) Dans la terminologie des deux rapporteurs, ce qui s’appelle "fraude"
chez l’intermittent devient "des problèmes d’ingénierie" chez ses
employeurs.

Rappel Paris AG intermittents
Lundi 7 à 19 H aux Folies Bergères

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