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Fellag : "Cette drôle de guerre"

Publie le mercredi 3 mars 2004 par Open-Publishing

MC93 de Bobigny ( Seine St.Denis )

Du 3 mars au 30 avril 2004,

à 20 h 30 du mercredi au samedi et en matinée le dimanche à 15 h 30.

Attention, relâche jeudi et lundi ( 01 41 60 72 72 )

A paraître fin mars, un livre aux Editions Lattès.

Sa vie. C’est sa vie mode d’emploi. Sa recherche. Il est écrivain autant que comédien. C’est même l’écriture qui est première pour Fellag. Le plus simple moyen de saisir la réalité, de tenter de rapporter dans ses filets souvenirs et raisons d’espérer. Ou de désespérer. Il rit. Il a l’oeil rieur, mais c’est un type grave, en même temps, Fellag. Un homme qui n’a jamais rien entrepris à la légère et qui a la pudeur des esprits ultrasensibles. Il ne s’épanche pas. Son écriture est sobre, stricte, gorgée de sucs en même temps, mais tenue, rigoureuse. On pense à ces très beaux livres que sont Rue des petites daurades et C’est à Alger, recueil de nouvelles ciselées, sans pathos de style, mais bouleversantes.

Au théâtre, évidemment, celui que la France a élu son plus sympathique « Arlequin kabyle » procède légèrement différemment, l’écriture est plus souple, plus en arabesques. C’est de l’écriture à jouer. « C’est si vrai que plus tard paraîtra un livre portant ce titre Le Dernier Chameau, mais l’écriture en sera légèrement différente », dit-il, racontant, amusé, cette nouvelle aventure spectaculaire. Le Dernier Chameau ? « C’est le dernier chameau pour Tamanrasset ! Une blague pour évoquer des années que j’avais laissées de côté ces derniers temps, les années de mon enfance. » Né en 1950 à Port-Gueydon (aujourd’hui Azzaffoun), Fellag est un petit garçon lorsque commence, en novembre 1954, la guerre d’Algérie. Il avait déjà évoqué l’épisode très drôle de l’arrivée des premiers soldats français dans le village de Kabylie... Des Africains qui avaient fort étonné les enfants ! Et ce jour-là, en plein ramadan, la neige était partout. « Leur chef était blanc et eux ils répondaient à l’appel du muezzin et faisaient leur prière ! »

Mais ce sont ses aventures au cinéma qui intéressent surtout Fellag dans ces pages du roman de sa vie. « Sur le plan individuel, le cinéma a joué pour moi la fonction de révélateur, confie-t-il. J’avais accès à autre chose qu’à la scène familiale, on dépassait Tizi-Ouzou ou Alger. Il y avait un côté Cinéma Paradiso de partage et d’émerveillement. »

C’est par l’évocation de cette salle que commence le spectacle. « Ensuite, je remonte à la guerre qui pour moi a d’abord été la guerre des boutons... On transposait la violence des adultes... on inondait les fourmilières avec une conviction certaine. D’autres fois, tout à coup, il fallait se réunir sur la place du village... les soldats cherchaient les rebelles... On voyait les « bananes » voler dans le ciel. C’était très proche et très lointain, mais mon souvenir d’Alger est tout de même que toutes les communautés vivaient ensemble. » Il le précise bien, c’est une comédie qu’il a écrite et joue. On va retrouver cet humour si particulier, ces doux sarcasmes d’homme bon qui regarde ses contemporains avec tendresse même s’il connaît tous leurs défauts.

Kabyle de culture - sa première langue et à son arrivée à l’école il a dû apprendre et l’arabe et le français -, Fellag a su trouver l’universel. Dans les montagnes de son enfance, il n’a jamais vu sa mère voilée. « Elle mettait un petit voile pour aller faire les courses à Alger. Loin du village. Et mes soeurs ne l’ont jamais porté ni ne le portent aujourd’hui en Algérie. » Des tournées, des ateliers avec les femmes de Châteauvallon qui travaillent sur C’est à Alger, un film bientôt avec Marthe Villalonga, fable sur la question du voile, justement, Fellag est un moraliste de tréteaux, de plateaux. Un bel artiste.