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La faim de l’agro-business (ou les ennemis de l’Humanité)

Publie le vendredi 23 mai 2008 par Open-Publishing

Dans le monde entier, les prix des aliments continuent d’augmenter et dans les pays les plus vulnérables, ils conduisent à des situations intolérables comme de grande faim, souvent combinée avec des sécheresses ou des inondations, des effets pervers du changement climatique. Devant la gravité de la crise, des masques tombent et des discours se révèlent creux, comme la recette des agrocombustibles et les gains supposés du libre commerce libre et de l’agriculture d’exportation.

Robert Zoellick, maintenant président de la Banque Mondiale, annonce que les prix continueront élevés pour plusieurs années, et qu’il est nécessaire de renforcer l’ "aide alimentaire" pour traiter la crise. Zoellick, qui a passé à cette charge après avoir été chef de négociations des États-Unis dans l’Organisation Mondiale du Commerce, sait ce dont il parle : depuis son poste antérieur, il a fait tout ce qu’il a pu pour casser la souveraineté alimentaire des pays, dans le but de favoriser les intérêts des grandes transnationales de l’agro-business. Même maintenant, la recette de l’ "aide alimentaire", est encore un soutien caché aux mêmes transnationales qui sont traditionnellement celles qui vendent au Programme Mondial d’Aliments les grains qui à son tour les remet "charitablement" aux affamés, à condition que ceux-ci ne produisent pas les aliments dont ils ont besoin.

Les grands gagnants de la crise alimentaire sont aussi des acteurs centraux et grands gagnants dans la promotion des agrocombustibles : les transnationales qui accaparent le commerce national et international des céréales, les entreprises semencières, les fabricants d’agrotoxiques.

Dans ces deux derniers secteurs ce sont dans la majorité des cas les mêmes entreprises : au niveau global, Monsanto est la principale entreprise de graines commerciales et la cinquième en agrotoxiques. Bayer est la première en agrotoxiques et la septième en graines, Syngenta, la deuxième en agrotoxiques et la troisième en graines, Dupont, la deuxième en graines et la sixième en agrotoxiques. Avec Basf et Dow (troisième et quatrième en agrotoxiques, ces six entreprises contrôlent le total des graines transgéniques dans le monde, qui est aussi par hasard la solution qu’elles proposent à tous les nouveaux problèmes (qu’elles mêmes ont contribuer, pour une partie fondamentale, à provoquer).

Avec ceux qui dominent plus de 80 pour cent du commerce mondial des céréales : Cargill, ADM, ConAgra, Bunge, Dreyfus ; toutes ont eu des profits absolument impudiques, grâce au manque d’aliments, à la promotion et aux subventions aux agrocombustibles et à la hausse des prix du pétrole (les agrotoxiques sont pétrochimiques). Un excellent rapport de Grain (le négoce de tuer de faim, www.grain.org) rend compte de ces profits : pour 2007, Cargill a augmenté son bénéfice de 36 pour cent ; ADM, de 67 pour cent ; ConAgra, de 30 pour cent ; Bunge, de 49 pour cent ; Dreyfus, de 77 pour cent, dans le dernier trimestre de 2007. Monsanto a obtenu 44 pour cent de plus qu’en 2006 et Dupont-Pioneer 19 pour cent.

À cette situation s’ajoute le fait que les grands fonds d’investissement spéculatif -face à la crise financière et immobilière- ont déplacé des millions pour contrôler les produits agricoles sur le marché international ou des "commodities". Actuellement, on estime que ces fonds contrôlent 60 pour cent du blé et des pourcentages élevés d’autres grains de base. La plus grande partie de la récolte de soja des prochaines années, a déjà été achetée comme "futur". Ces aliments se sont convertis en un objet de plus de la spéculation boursière, dont les prix se modifient (et augmentent) en fonction des jalons spéculatifs, non des marchés locaux ou des besoins des gens.

Malgré cette raclée globale à tous les gens communs, pire encore pour les plus dépossédés, les transnationales ne se considèrent pas comme satisfaites et vont pour plus. Maintenant, elles préparent le prochain assaut, en monopolisant à travers des patentes, les caractères génétiques qu’elles considèrent utiles pour faire des plantes résistantes à la sécheresse, à la salinité et autres facteurs de stress climatique. Les gouvernements à leur service, comme le Mexique, prétendent éteindre le feu avec de l’essence : au lieu de souveraineté alimentaire et de contrôle paysan des graines et des facteurs de production, ils proposent des OGM avec encore plus de modifications et plus de risques, un maïs transgénique pour augmenter la contamination et la dépendance, et qui jusqu’aux paysans les plus pauvres, avec des soutiens publics, sèment des agrocombustibles au lieu de nourriture.

 Silvia Ribeiro, investigatrice du Groupe ETC.

http://alainet.org/active/24002