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Fortiche comme Fortis

Publie le samedi 15 novembre 2008 par Open-Publishing
2 commentaires

Par Denis Robert

Un mois après la faillite, 15 millions d’euros sortent de la banque mafieuse.

Je me suis souvent demandé comment ça se passait dans les grands groupes. Qui décide au final ? Le PDG est en première ligne mais, sous lui, des petites mains, des petits cerveaux, des petits juristes, de gros actionnaires jouent leur partition. Je ne vais pas vous reparler de Clearstream mais de Fortis.

Fortis est cette banque qui a failli passer à la trappe le mois dernier. Elle n’est plus qu’une coquille (presque) vide que viennent de se partager la banque hollandaise ABN Amro et la française BNP Parisbas. Auparavant, Fortis avait racheté la Banque Générale du Luxembourg (BGL). C’est là que modestement j’interviens. Lors de l’enquête sur Clearstream, nous cherchons à montrer comment le réseau informatique de la firme pouvait aider à reconstituer des itinéraires financiers.

Nous avions des microfiches de transactions qui dataient de 1991. Cette année-là a eu lieu la plus grande faillite bancaire du siècle. Celle de la BCCI, une banque mafieuse impliquée dans un trafic de drogue. Suite à une enquête de l’administration américaine, le 1er Juillet 1991, les succursales de la BCCI ont été fermées partout dans le monde, y compris le siège de la maison mère à Luxembourg. En fouillant les microfiches, nous avons découvert qu’un important transfert avait été effectué le 8 août 1991. Plus d’un mois après la fermeture, 15 millions d’euros en titres divers étaient sortis de la banque mafieuse pour atterrir sur les comptes de clients de la BGL. Je l’ai écrit en indiquant à tort que cette transaction était "illégale".

Auparavant, j’avais envoyé des lettres recommandées à tous les protagonistes de cette affaire, y compris au liquidateur (anglais) de la BCCI, pour demander des explications. Aucun ne m’a répondu. Je ne savais pas qu’un tribunal d’arrondissement de Luxembourg avait autorisé la transaction. Alors que des millions d’épargnants et de salariés de la BCCI étaient ruinés, quelques clients s’étaient remboursés en douce. Cette information n’a jamais été remise en cause. Par contre, on me cherche des poux depuis sept ans à cause de cette erreur. La transaction était, selon les lois grand-ducales, "légale". Dont acte.

Depuis sept ans, la BGL, Clearstream, l’État luxembourgeois puis les dirigeants de Fortis se servent notamment de cette histoire minuscule pour m’abattre. Ils n’y sont pas parvenus mais le combat est rude et coûteux. L’an passé, pour éviter une prescription, le parquet luxembourgeois a poussé le vice jusqu’à chercher à transformer le délit de presse que j’avais commis en délit de droit commun. Après sept ans d’instruction et deux procès, Fortis a fini par perdre au Luxembourg. Idem en France, sauf qu’après avoir subi deux échecs en première instance et en appel, ils viennent de gagner en cassation.

En mars prochain, je vais donc à nouveau me retrouver devant la Cour d’Appel de Paris. Face à moi, leurs avocats. Le monde a changé. La BGL a disparu, la BCCI aussi. Fortis a changé de PDG et d’actionnaires mais une logique humaine qui m’échappe continue à vouloir ma faire payer (quoi, au fait ?). L’an passé, des amis belges ont voulu boycotter Fortis. Je propose de relancer cette idée. Retirez vos sous de Fortis. Placez-les ailleurs. N’importe où.

Denis Robert

for Siné Hebdo N° 10

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Messages

  • Fortis accuse une perte nette de 135 millions d’euros au 3è trimestre

    LA HAYE - Le bancassureur belgo-néerlandais Fortis, maintenant démantelé et partiellement nationalisé, a annoncé vendredi une perte nette de 135 millions d’euros (172 million dollars) pour le troisième trimestre 2008.

    Fortis a décidé de ne pas publier de résultats trimestriels pour la période finissant en septembre à cause de son récent changement de statut, et a publié à la place un communiqué pour se conformer aux règles européennes en matière de transparence.

    "Fortis, comme toutes les institutions financières, est confronté à une crise financière systémique grandissante, d’envergure sans précédent", indique le communiqué.

    Gravement affecté par la crise financière mondiale, Fortis a été démantelé au début du mois, ses actifs néerlandais nationalisés par les Pays-Bas pour 16,8 milliards d’euros et ses activités belges et luxembourgeoises vendues à la banque français BNP Paribas.

    Dans le communiqué publié vendredi figurent les "chiffres-clés pro forma non vérifiés" pour la nouvelle structure du groupe Fortis, comprenant le Compte Général (le secteur holding et finance) et Fortis Insurance International (à l’exception de Fortis Corporate Insurance, cédé à l’État néerlandais).

    Fortis Insurance International a accusé une perte nette de 30 millions d’euros pour le troisième trimestre et Fortis General Account une perte nette de 99 millions d’euros.

    "Dans les conditions actuelles du marché, des dépréciations d’actifs et des pertes supplémentaires devraient être enregistrées au quatrième trimestre 2008", d’après le communiqué.

    Fortis devrait publier ses résultats annuels 2008 en mars de l’année prochaine.

    14 novembre 2008 22h34

    http://www.romandie.com/infos/News2/081114213402.1awmmrqj.asp

    • Concernant la perte, vous parlez du Holding (la coquille vide) pas des activités de banques et assurances qui se retrouvent maitenant dans les mainds de la BNP et d’ABN Amro notamment, via l’état hollandais.

      Les pertes doivent être autrement plus grande quand par exemple DEXIA, annonce une perte de 1,5 milliards d’€ pour le seul troisième trimestre 2008.