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Lever l’hypothèque électorale !

Publie le vendredi 8 mai 2009 par Open-Publishing
4 commentaires

de Rehcas 38

Avant chaque élection, c’est la même ritournelle. Les scrogneugneux de la "gauche" de la "gauche" étirent leurs litanies pleurnichardes sur le défaut d’union : encore une occasion gâchée-la logique d’appareil les aveugle -le PS remportera la mise-Sarkozy a de beaux jours devant lui, etc., etc. C’est vrai quoi, ils pourraient faire un effort ! Taire leurs divergences le temps d’un scrutin.

Oublier, un instant, que Buffet et Mélenchon ont docilement participé au gouvernement Jospin, champion hors catégories des privatisations et co-signataire du traité de Lisbonne. Cacher, provisoirement, le fait que le PCF gère consciencieusement, sous la férule de l’Etat, des collectivités territoriales en participant, comme à Grenoble, à de larges coalitions allant du PS au MODEM...

Et nous mitonner dans le secret de l’isoloir un beau succès électoral aux alentours de 10-12% des 30% d’exprimés. De quoi nous redonner un peu de baume au coeur par ces temps difficiles. Enfin une victoire... symbolique peut-être, mais une victoire quand même. Et puis ça permettrait de tenir, le coeur un peu plus léger, jusqu’à la prochaines échéance : les régionales. Même si là, ça risque d’être déjà un peu plus compliqué. Surtout du côté du PC qui, moribond ou pas très loin de l’être, s’en ira quémander une poignée de sièges auprès d’un PS goguenard, ravi et méprisant . Il faut bien vivre, et surtout pas mécontenter les quelques élus restants sous peine d’infamie groupusculaire.

A nouveau, les mêmes déplorations se feront entendre. Les mêmes complaintes, écoeurantes dans la répétition victimaire du croyant trahi, s’élèveront du choeur des déçus de cette unité toujours dérobée de « la gauche de la gauche ». Soyez rassurés toutefois, ce type de chagrin s’estompe assez rapidement. La preuve : les « nonistes » de gauche ont mis moins de deux ans à surmonter leur déconvenue. Et l’aube flamboyante de la présidentielle pointera déjà à l’horizon. Alors, la machine repartira. Bové, toute honte bue, sera consulté.

Buffet, Mélenchon et Besancenot reprendront leurs tractations. Des comités , citoyens et républicains, fleuriront. Des appels seront lancés. De martiales mises en garde seront émises : cette fois, faites pas les cons, sinon... Des pétitions circuleront. Mouvement d’autant plus fébrile qu’il s’agira de battre sarkozy et de d’exercer sur le PS une pression « gauchisante ». Pour fatalement retomber au second tour sur le mot d’ordre densément mobilisateur du : choisir le « moins pire » pour éviter le« pire ». Et faire comme si Mitterrand, Rocard, Jospin ou Delors, pour ne prendre que les plus illustres, n’avaient pas largement ouvert la voie à Sarkozy et à sa clique maffieuse. Comme si, depuis maintenant trente ans, cette « stratégie » myope du « moins pire » pour éviter le « pire » n’aboutissait pas logiquement au « pire ».

Car des filiations précises et directes existent entre la criminalisation actuelle des sans papiers et les déclarations fielleuses d’un Rocard sur « la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde » ou entre la Loi Organique sur les lois de finances ( LOLF) concoctée par Migaud, député socialiste de l’Isère, et Lambert, sénateur de droite, et la Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP), puissant instrument de démembrement des services publics. N’insistons pas, chaque segment ou presque des décisions gouvernementales porte la marque de cette filiation, et les exemples sont donc innombrables.

Ainsi, attentes moroses,exaltations passagères et déceptions amères composent le motif dépressif classique du militant éternellement dépité de la « gauche de la gauche ». Bien que prisonnier de cet enchaînement circulaire, il reste fasciné par le spectacle de l’élection, viscéralement attaché à l’idée qu’elle est la solution du problème. Peu importe qu’elle fasse systématiquement défaut, l’enfermant davantage à chaque scrutin dans une ronde névrotique, il lui accorde une sorte de pouvoir cathartique, faible et inconsistante réplique de l’illusion du « grand soir ».

A ce stade, le paradoxe n’est pas mince. Car notre ami est l’un des derniers à croire encore aux vertus transformatrices de l’élection. Il y a belle lurette que les « grands » partis institutionnels, à droite - du FN à l’UMP en passant par le MODEM et l’hétéroclite bazar des socialistes repentis -, à gauche - du PS dans ses différentes variantes jusqu’au PC - n’en font plus quant à eux un enjeu politique mais uniquement gestionnaire, sachant désormais qu’elle ne menace en rien la puissance de l’Etat et les forces de la domination qu’il incarne. Elle en est au contraire l’une des conditions de sa pérennité, son idée régulatrice en quelque sorte. Même l’électeur moyen a perdu ses illusions.

Notre ami, lui, est demeuré « démocrate ». Sauf qu’il confond élection et démocratie, loi du nombre et puissance démocratique, pouvoir et politique. Non l’élection n’est pas la solution, elle est en partie le problème. Le problème de beaucoup de celles et ceux qui combattent sincèrement le capitalisme et qui revendiquent dans le principe d’égalité la condition d’une réconciliation de l’humanité avec elle même dans la multiplicité de ses manières d’être.

Il est donc nécessaire de lever l’hypothèque de l’élection, de dénoncer sans répit l’imposture consistant à mettre un signe d’égalité entre élection et démocratie et de pourchasser, dans nos manières de penser et dans nos pratiques, l’illusion électorale. Laissons l’élection à sa place, comme une forme ritualisée de l’exercice du pouvoir. Le problème de l’émancipation, s’il est le nôtre, n’a pas grand chose à y voir.

En revanche, sortir de l’emprise de l’élection c’est se rendre disponible pour la démocratie, c’est déserter le terrain sur lequel nous contient l’ennemi de classe, le prendre à revers et le combattre à partir d’espaces, dans des formes et dans une langue qui lui échappent et qui sont à construire. De ce point de vue, ami déçu de la « gauche de la gauche » les termes de l’alternative « moins pire/pire » t’apparaitront pour ce qu’ils sont : la forme aboutie d’un simulacre de démocratie et de politique.

Le 7 juin, vote ou écoute pousser l’herbe ou pars en montagne : la différence ne sera pas vraiment énorme. Faire du 7, l’occasion d’une condamnation multiforme de l’état d’exception rampant et de la radicalisation de la justice pénale constituerait par contre un acte politique « vrai », dans le sens où il serait une trouée dans la facticité tranquille et satisfaite de cette journée électorale.

Messages

  • Donc le lendemain, on redémarre les choses sérieuses.

    En espérant que la grande messe électorale n’ait pas trop servi aux patrons et l’agité de Neuilly pour anesthésier les travailleurs pour leur couper un bras ou deux...

    Les choses sérieuses se jouent donc dans notre capacité à aider les travailleurs à s’organiser massivement dans un esprit de résistance, de préparation de la grève générale, de mobilisation populaire et prolongée.

  • Et quid de l’incapacité des "vrais de vrais" à convaincre les foules de l"évidence de leur propos ? A se remettre en cause plutôt que d’accuser son plus proche voisin de lutte d’incapacité,ou de trahison ?

    De la responsabilité des électeurs,qui n’ouvrent plus un journal,ne vont plus aux meeting,ne font plus grève,ou alors juste lorsqu’ils vont être virés,et uniquement pour obtenir de meilleures indemnités de licenciement.Qui adhèrent à un syndicat que lorsque le sort de leur petite personne est menacé.Individualisme forcené qui transforme chaque électeur en défenseur de l’ordre et de la sécurité.Ce français qui,en allant faire son "devoir" d’électeur,présente sa carte électorale sur laquelle est inscrit liberté,égalité,fraternité,mais qui glisse dans l’urne un bulletin sur lequel il voit travail,famille,patrie.

    De la responsabilité des citoyens à s’occuper réellement de l’avenir des générations futures,et non pas seulement du prix de l’essence,de leur abonnement de portable ou du résultat de leur équipe de foot favorite.De leur responsabilité lorsqu’ils s’offusquent des licenciements boursiers,mais qui possèdent quand même quelques actions en banque.

    Alors,peut-on aussi parler de la responsabilité de chacun,et pas seulement de celle de ceux qui sont censés nous représenter ?C’est quand même bien nous qui décidons,non ?

    Je ne me sens trahi par personne,ni par le PCF,ni par le NPA,ni même le PS.Chacun est dans son rôle,et le premier responsable,c’est moi.Et pas le système électoraliste.

  • Arrêtons de cautionner par nos votes (souvent sans illusions... et toujours trahis !) la fiction d’une démocratie qui n’est ici comme ailleurs que purement formelle.
    C’est seulement ainsi que nous mettrons en évidence la grande arnaque grâce à laquelle nous sommes éternellement trompés, bafoués et méprisés.
    Sans mandat impératif et révocabilité à tout moment, "nos" élus ne seront jamais que l’incarnation de nos pires déceptions.
    Otons au pouvoir qui nous opprime la pseudo-légitimité que lui confèrent nos votes : pas besoin de cette mascarade et de ces guignols pour vivre !!!
    Roger Cageot

  • Je ne peux pas voter !En effet j’ai dit NON,a l’europe capitaliste a un certain référundum.Aujourd’hui,mon vote a été bafoué par un nabot.Retourner aux urnes c’est cautionné son sale traité.momo11