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M. Besancenot : "On peut encore remporter des victoires sociales"

Publie le samedi 16 mai 2009 par Open-Publishing
11 commentaires

LE MONDE | 16.05.09

"Avec une popularité qui talonne celle des leaders socialistes, Olivier Besancenot est sur tous les fronts sociaux. Mouvement de protestation dans les universités, mobilisation hospitalière, grèves et occupations d’usines, le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) est présent au point que le gouvernement voit la main de l’extrême gauche partout.

Le leader du NPA s’en défend à peine : la "vraie" gauche doit être solidaire de toutes les luttes contre les licenciements et les réformes du gouvernement. Il houspille les syndicats, jugés trop mous, et pousse le reste de la gauche à constituer des fronts unitaires. Pour lui, la campagne des élections européennes, que son parti a jusqu’ici un peu délaissée, doit être l’occasion d’"être le haut-parleur de la résistance et de la colère". Le discours, axé sur la crise économique et ses conséquences, n’épargne guère les socialistes.

Le gouvernement accuse l’extrême gauche d’entretenir les blocages d’université. Comment réagissez-vous ?

C’est le registre éternel de la droite d’agiter le chiffon rouge de la manipulation par l’extrême gauche. A chaque fois qu’une mobilisation inquiète le pouvoir, on dit toujours que c’est l’extrême gauche. Ce fut le cas en 1995 avec la grève des cheminots, en 2003 contre les retraites, lors de la mobilisation des Michelin ou des P’tits LU...

Mais vous y êtes ou non ?

Encore heureux qu’on y est. Si nos militants n’étaient pas dans le mouvement, on nous le reprocherait. Quand l’accusation de noyautage vient du gouvernement, c’est attendu. C’est plus cocasse quand ça vient de certains responsables du Parti socialiste. Ils feraient bien de regarder de plus près cette mobilisation universitaire et comprendre qu’une partie de leur électorat et de leurs militants en font partie.

En maintenant les blocages, ne craignez-vous pas que le mouvement devienne franchement impopulaire ?

Si le gouvernement avait eu la moindre volonté de sortir du conflit, on l’aurait vu. C’est son choix d’attendre que le mouvement pourrisse jusqu’aux examens.

L’UMP voit aussi votre main dans les usines en grève.

Oui, on a des militants et des sympathisants dans les entreprises comme Caterpillar, Continental, Molex. C’est légitime pour un parti qui se dit anticapitaliste d’être présent dans ces secteurs. Mais nous ne sommes qu’une composante de ces salariés.

N’empiétez-vous pas sur le terrain des syndicats lorsque vous appelez à une marche contre les licenciements ?

Je conteste la séparation qui voudrait que le social, c’est la rue, et la politique, les institutions. Après la mobilisation du 1er Mai, on est en droit d’attendre autre chose qu’un calendrier avec une manifestation tous les deux mois ! Si ce n’est pas la gauche sociale et politique qui soutient les luttes quelles que soient les formes qu’elles prennent - jusqu’à la séquestration des patrons ou les occupations - et qui avance l’idée de la grève générale, qui le fera à sa place ? Une étape intermédiaire pourrait être une marche des licenciés qui rassemblerait des dizaines de milliers de salariés. C’est une question d’efficacité pour éviter l’isolement des conflits locaux.

Vous n’avez de cesse de citer l’exemple du LKP en Guadeloupe. Pour vous, c’est un modèle ?

Il n’y a pas de modèle exportable. Mais ils nous ont donné l’exemple d’une grève générale massivement suivie et d’un mouvement populaire, et la preuve qu’on peut combiner l’unité et la radicalité. Le LKP a réussi à s’installer comme direction politique d’une grève générale qui a déplacé des montagnes, en montrant qu’on peut faire baisser les prix et obtenir une augmentation de 200 euros des salaires. Imaginez ça ici ! Il y a la place en France pour un collectif qui lutterait ici aussi contre la "profitation".

Malgré la crise, Nicolas Sarkozy continue les réformes. La droite n’est-elle pas aujourd’hui en position de force ?

Peut-être, mais je ne suis pas fataliste. La crise du capitalisme lui pose un gros problème. C’est une crise qui vient du coeur du système, qui est profonde et durable. Le plus gros des difficultés économiques, pour le gouvernement, est devant lui. Nicolas Sarkozy veut maintenir le cap de la suppression de dizaines de milliers d’emplois dans la fonction publique, de la libéralisation de la santé, du travailler toujours plus longtemps et du blocage des salaires, mais, avec les contestations dans un certain nombre de secteurs, il est obligé de lâcher du lest.

Il sait que n’importe quelle goutte d’eau peut faire déborder le vase et que le risque d’un embrasement général existe. On est dans un cycle où on peut encore remporter des victoires sociales.

Qu’espérez-vous aux élections européennes ?

Donner à la colère sociale une expression politique. Dans les milieux où nous avons le plus d’écho, les précaires, les prolos, les jeunes nous disent qu’ils n’ont pas forcément envie de voter. A nous de les convaincre qu’avoir des élus anticapitalistes pendant cinq ans au Parlement européen permettrait de relayer les combats sociaux dans les institutions européennes et de prévenir la population, la jeunesse, des mauvais coups qui se trament. Et on aurait un point d’appui pour construire un parti anticapitaliste européen.

Vous vous dites unitaires, mais, quand Jean-Luc Mélenchon vous tend la main vous refusez. Pourquoi ?

Nous avons proposé un front anticapitaliste, apportant des solutions radicales à la crise du capitalisme et qui soit durablement indépendant de la direction du PS. Le PCF comme le Parti de gauche ont refusé une alliance sur le long terme. Nous réclamons un peu de cohérence : nous ne voulons pas faire un bon coup aux européennes si, ensuite, aux régionales, il s’agit pour certains de retourner dans le giron du PS. Car les accords avec le PS aux élections poussent à faire le contraire dans les institutions de ce qu’on fait au quotidien.

Le Parti socialiste n’est plus un parti de gauche ?

On ne va pas faire de démagogie là-dessus. Les militants du PS, on les croise dans les mobilisations sociales, pas ceux de l’UMP. Ça fait quand même une sacrée différence ! Mais on a renoncé à leur demander de faire une politique de gauche qu’ils n’ont pas envie de faire.

Leurs solutions pour sortir de la crise sont compatibles avec l’économie de marché. Pas les nôtres.

Que pensez-vous de l’incursion de François Bayrou sur le terrain de la gauche ?

Je n’ai pas vu Bayrou débouler dans le paysage de la gauche, mais dans le giron des alliances possibles avec le Parti socialiste. Je rappelle qu’il a voté les directives libéralisant les services publics. J’écoute son discours. Dans le camp de la droite, il traduit une autre option possible pour les classes possédantes. Le PS pense qu’il sera amené, lors des prochaines échéances électorales, à faire alliance avec lui. C’est pour cela que nous insistons sur l’indépendance totale à l’égard du PS.

Avec la dispersion des voix à gauche, ne faites-vous pas le jeu de Nicolas Sarkozy ?

C’est un faux procès qu’on fait au NPA. Ça fait deux ans qu’on est de tous les combats contre la politique du gouvernement. On ne va pas s’excuser d’être de cette gauche qui, dès le soir de l’élection de Sarkozy, a dit : "Il faudra le combattre." La vraie opposition à Sarkozy, ce sont des milliers d’anonymes, présents dans toutes les mobilisations sociales. Nous essayons de donner un prolongement politique à cette opposition.

 http://www.lemonde.fr/politique/art...
Propos recueillis par Françoise Fressoz et Sylvia Zappi

Messages

  • En métropole, ça fait des dizaines de jours de grève de 24h que nous faisons depuis quelques temps.

    Pour obtenir quoi au final ?

    Alors plutôt que les rando pédestres tous les 2 mois pour ne rien obtenir, je préfère un mouvement unitaire, déterminé et durable qui nous permette de gagner.

    Je ne vois pas ce que l’unité syndicale historique de ce 1er mai a permis d’obtenir.
    Les acquis sociaux reculent constamment sans que les conf puissent faire quoi que ce soit.

    En Guadeloupe, ils ont réellement gagné. C’est effectivement l’exemple à suivre.

    Jak

    • Je ne vois pas ce que l’unité syndicale historique de ce 1er mai a permis d’obtenir. Les acquis sociaux reculent constamment sans que les conf puissent faire quoi que ce soit.

      En Guadeloupe, ils ont réellement gagné. C’est effectivement l’exemple à suivre.

      Jak

      Entièrement d’accord plus que d’accord et je me demande vraiment ce que l’ont attend !!!!!

      les anciens doivent faire des bonds dans leurs tombes !!!!!!

      et hommage a tous les Guadeloupéens

      elle

  • Je suis d’accord avec Besancenot lorsqu’il cite le LKP en exemple. Si nous avions en France métropolitaine un syndicaliste tel qu’E. Domota, le gouvernement et cette horrible droite cèderaient face à la colère populaire.

    Malheureusement, nous avons Thibault, Aschiéri, Mailly et autres Annick Coupé ("Solidaires")... : la pseudo-lutte se résume en tergiversations, reculs divers, hésitations, et autres blablas.

     L’an dernier : -11500 postes dans l’Education nationale. Cette année, -13500.
     L’an dernier, recul majeur des syndicats de cheminots concernant la retraite.
     L’an dernier, signature par Thibault et Chérèque d’un accord lamentable sur "dialogue social" auprès de X. Bertrand.
     Cette année, des grèves historiques d’étudiants et de professeurs d’Université non soutenues par les syndicats traditionnels. La FSU soutient la mastérisation. La CFDT demande aux étudiants de retourner au boulot.
     Cette année, deux grèves historiques des salariés, auxquelles les "syndicats" ne donnent aucune suite crédible.
     Très bientôt : privatisation de la poste, quoi qu’en dise "Sud".
     L’an prochain, suite de la casse de l’hôpital public.
     L’an prochain : un foctionnaire sur deux partant à la retraite non renouvelé.
     Dans un an, application de la réforme du Lycée.
     Dans un an, application de la réforme du Capes.

    Tout va très bien, Madame la Marquise, tout va très bien : la CGT, la FSU, SUD, la CFDT et autres FO veillent au grain...

    • D’ailleurs pour désigner un casseur de grève, on dit plus un "jaune", on dit un "Chérèque"...

    • Bien d’accord pour ce qui concerne l’appréciation de la politique des directions syndicales majoritaires.

      Dislocation et fragmentation des mobilisations.

      Tout sauf préparer la gréve générale qui certes ne se décréte pas par en haut.
      Mais enfin appeler à une journée de gréve interpro, réunir partout les salariés pour poser cette perspective et faire en sorte qu’ils se prononcent...
      Organiser à cette occasion des collectifs unitaires avec tous les travailleurs qui le souhaitent, syndiqués ou pas, pour préparer la gréve générale...

      Cela ne me semble pas une perspective délirante issue d’un conclave de l’ultra gauche... et cela a bien un petit air de LKP...

      Pour ceux qui auraient un doute...

      Le 26 mai, c’est chronique d’une cata. organisée par lesdites directions.

      A ce jour, il n’y a aucun appel national à la gréve y compris dans les secteurs publics et aucun dans la fonction publique...

      Nos "amis" Tibo, Chéréque, Mailly etc... envisagent sur la région parisienne une manif en direction du siége du MEDEF à.... 18h...

      Paco

      Militant NPA et militant syndical.

  • " Nous essayons de donner un prolongement politique à cette opposition."
    ah bon j’ai pas bien vu lequel ...

  • Le grand intérêt de Besancenot qui est un authentique prolétaire pur jus, c’est qu’il "fait ce qu’il dit", et qu’il "dit ce qu’il fait". La politique, il la vit au quotidien au milieu des travailleurs, connaissant le terrain mieux que quiconque à l’umps, et il a le mérite de ne pas être pris en défaut sur ses convictions. C’est donc normal qu’il séduise et qu’il trouve un écho positif chez les citoyens qui en ont marre des blablas non suivis d’effet, comme au PS qui contre si mollement les attaques de l’umpiste Sarko !

  • Qu’espérez-vous aux élections européennes ?

    Donner à la colère sociale une expression politique. Dans les milieux où nous avons le plus d’écho, les précaires, les prolos, les jeunes nous disent qu’ils n’ont pas forcément envie de voter. A nous de les convaincre qu’avoir des élus anticapitalistes pendant cinq ans au Parlement européen permettrait de relayer les combats sociaux dans les institutions européennes et de prévenir la population, la jeunesse, des mauvais coups qui se trament. Et on aurait un point d’appui pour construire un parti anticapitaliste européen.

    1) Une représentation politique de la colère sociale ne se donne pas par les urnes, encore moins des urnes sur un terrain sans grand pouvoir.
    Une représentation politique d’une colère sociale se crée au milieu d’une classe, dans ses combats , une élection là dedans n’est qu’un des terrains de l’affirmation d’un courant politique, expression de la résistance sociale.

    Mais parmi bien d’autres....

    Des élections sont un reflet très déformé des forces politiques en présence. Pas Plus.
    Elles exprimeront une progression de la colère sociale, du désir de résistance, mais il n’y aura pas de cause à effet mécanique.

    2)

    "permettrait de relayer les combats sociaux dans les institutions européennes et de prévenir la population, la jeunesse, des mauvais coups qui se trament. Et on aurait un point d’appui pour construire un parti anticapitaliste européen."

    Les relais des combats sociaux dans les institutions européennes, ouais, bon, il ne faut pas déconner...

    Je sais bien qu’ils feront ce qu’ils pourront, mais les colères sociales ont d’autres chemins pour faire reculer tant le morceau d’état européen qu’est la commission européenne et la BCE (seuls lieux réels de pouvoir) que les satrapies nationales. Le parlement européen n’est pas un passage obligé. Les frontières se passent de partout, elles ont autres points de passage que Bruxelles et Strasbourg.

    Il y a eu déjà des révolutionnaires dans ce parlement et, contrairement aux discours qui essayent de faire passer les grenouilles pour des bœufs , ils n’ont pas été point d’appui de mouvements et colères populaires. Inaudibles.

    A part Jennar qui a bossé comme assistant d’un groupe et a permis de passer des analyses fines sur les attrape-couillons en cour , de démonter systématiquement le TCE, je ne vois pas de grande bataille ni de relais audible pour les autres..

    Jennar n’était pas député...

    Je sais bien que la poignée de gue-gue va hurler et dire combien ils étaient importants, mais on entendra plus leurs cris de protestation sur leur importance qu’on a entendu leurs protestations contre les mauvais coups tramés (non pas qu’ils n’aient pas protesté mais le relais n’a pas existé, le parlement n’a pas été point d’appui audible, tribune sur l’Europe...).

    Bon, mais on prend quand même pour les gens qui apprendront et informeront des mauvais coups en préparation (mais faut pas rêver, "ils" prendront alors rapidement des contre-mesures, tant ils ne peuvent s’épanouir que dans l’obscurité).

    Pour la question du point d’appui pour construire un parti anti-capitaliste européen, même constat :

    Les frontières qu’a détruit le capital nous permettent, au moins par ce contre-coup heureux, de passer les frontières autrement que par Bruxelles et Strasbourg.

    C’est sur le terrain des batailles de la classe exploitée que se construira un parti révolutionnaire en Europe, d’Istanbul à Alger , de Rabbat à Paris, de Reykyavik à Londres, de Barcelone à Moscou, d’Athènes à Oslo (non, c’est exprès...)...

    Je dis ça pour montrer que l’UE est une commodité de batailles (frontières plus aisées à passer, unification par le capital de certaines conditions de travail, etc) mais pas un espace qu’il convient de respecter, comme beaucoup d’états nations ont été des commodités de batailles (travailleurs parlant une même langue, culture, etc), mais pas des conneries patriotardes comme des gauches de trahisons ont sut le faire avant (passant du nationalisme bêlant avec trémolos dans la voix à l’Europanéïsme couillon, avec une constante : l’union sacrée avec la bourgeoisie).

    La question de représentants dans un parlement (et non seulement le parlement européen comme certains voudraient limiter le problème), quelqu’il soit, ne ressort pas de l’improvisation. Cette question n’est pas nouvelle et a été traitée dans énormément de débats, dés qu’il y eut des parlements.

    Il ne faut pas se cacher que les parlements nationaux, régionaux, européens, etc , sont souvent des utilisés par la bourgeoisie comme outils de corruption des élus populaires, pour les détacher, les autonomiser de leurs bases.

    La question du contrôle des élus est essentielle pour un parti . C’est un peu là dessus également qu’il faut des précisions. L’expression d’un volontarisme ne suffit pas.

    C’est donc une partie ambigüe de Besancenot dans cet échange par ailleurs pas mauvais.

    Mais une partie renvoyant à des questions de fond sur lesquelles il faut éclaircir un peu les choses.

  • Uns seule solution : la greve generale !!!

    A quoi cela nous as t-il servi de descendre dans le rue le 1er mai ? Y avons nous gagner quelque chose, a part le fait de sentir un petit vent de contestation dans nos drapeaux ? A quand la tempête alors ?