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Polpotisme et dictature du prolétariat

Publie le dimanche 20 septembre 2009 par Open-Publishing
9 commentaires

Michel Peyret
20 septembre 2009

POLPOTISME ET DICTATURE DU PROLETARIAT

Bouleversé !
J’ai été bouleversé et je le suis encore !
Une horrible tragédie ! Je savais l’essentiel ! A peu près comme tout le monde !
L’objet de mon émoi : une déposition ! Une déposition devant un tribunal .
Pas n’importe quel tribunal !
Il s’agit de la Chambre de première instance des Chambres extraordinaires dans les tribunaux cambodgien .
Cette juridiction spéciale est née d’un accord entre l’ONU et le gouvernement du Cambodge pour juger les dirigeants Khmers rouges . C’est vrai , ce n’est pas ordinaire !
Ce n’était pas non plus un illustre inconnu qui déposait . Son nom évoque bien des luttes et combats . C’est aussi un bon connaisseur du Cambodge ! Raoul Marc Jennar . Nous y reviendrons !
Et l’accusé lui-même n’était pas un criminel ordinaire , même s’il en est d’autres de ce genre !
Kaing Guek Eav , dit Duch , « membre d’un petit groupe d’hommes et de femmes , d’une conspiration criminelle inspirée pour asservir tout un peuple à une organisation décidée à imposer la plus totale forme d’aliénation qu’une société humaine ait jamais eu à subir » , dit Raoul Marc Jennar qui ajoute :
« Cette conspiration a pris naissance dans l’adhésion de ce petit groupe , qui a fourni les futurs dirigeants du Kampuchea Démocratique , à une idéologie qui au nom de l’émancipation des peuples s’est traduite par une des formes les plus implacables de la servitude . »
Tout cela ne m’amène pas à oublier les tout aussi ignobles crimes du capitalisme et de l’impérialisme , par exemple les Etats-Unis bombardent les forêts du Vietnam , où sont réfugiés populations et combattants , au napalm et aux défoliants après avoir utilisé , pour la seule et unique fois au monde , l’arme atomique contre les populations civiles d’Hiroshima et de Nagasaki , mais si je veux être crédible , les crimes des uns ne doivent pas me faire oublier les crimes des autres , crimes non à l’encontre de l’agresseur mais de leur propre peuple !

LES KHMERS ROUGES

Selon un article de Wikipédia que je consulte et auquel j’invite mes lecteurs à se reporter , « les Khmers rouges , dont le nom officiel fut successivement Parti communiste du Cambodge et Parti du Kampuchea démocratique ( autres noms : Parti communiste du Kampuchea , PCK , Parti communiste khmer , Armée nationale du Kampuchea démocratique , PDK ) étaient membres d’une organisation communiste , fondée en 1954 dans l’ombre du Parti communiste français :
« Ses principaux dirigeants ( Pol Pot , Kieu Sampan , Son Sen...) furent formés à Paris dans les années 1950 au Cercle des Etudes Marxistes fondé par le Bureau Politique du PCF en 1930 , avant de rejoindre les communistes vietnamiens qui leur permettent de prendre le pouvoir au Cambodge en 1975 au moment où eux-mêmes s’emparent de l’ensemble du Vietnam . Ils le garderont jusqu’au 7 janvier 1979 , date à laquelle l’ancien allié vietnamien envahira le pays pour mettre fin « à une série de litiges frontaliers . »

LA PRISE DE POUVOIR

D’abord clandestin au Cambodge , ce n’est qu’après 1970 que le mouvement prend de l’ampleur grâce surtout à l’extension de la guerre du Vietnam au Cambodge qui leur apporta des soutiens prodigieux .
L’article de Wikipédia cite :
 Norodom Sihanouk , qui avait été chassé du pouvoir par un coup d’Etat et qui depuis Pékin lance un appel à prendre le maquis pour combattre l’impérialisme américain ,
 le Nord-Vietnam ,
 la Chine...
Les forces « rebelles » forment le FUNK ( Front uni national du Kampuchéa présidé par SAR Norodom Sihanouk et regroupe toutes les forces de libération nationale , dont les Khmers rouges , et les Khmers romdoh de Sihanouk ).
Finalement , le 17 avril 1975 , ces forces investissent Phom Penh , chassent les habitants des villes sous prétexte des bombardements américains... et éliminent petit à petit opposants er sihanoukistes .
Des élections , auxquelles ne participent que des paysans et les membres du parti , sont organisées , et permettent l’instauration d’une dictature particulièrement dure et extrème sous le nom de « Kampuchéa démocratique ».
En fait , c’est le parti , représenté par une organisation quasi-mystique , l’Angkar , qui devient la seule référence toute puissante et est dirigée principalement par Pol Pot , Nuon Chea , Sau Pheum , Ta Mok , Ieng Sary , Son Sen et une poignée de lieutenants .

LE REGIME

L’Angkar ordonne également l’exécution de tous les intellectuels , de tous les militaires de l’ancien régime , de défroquer les moines... Le peuple est divisé en deux catégories : le peuple ancien , c’est-à-dire la population de base essentiellement paysanne , et le peuple nouveau , principalement anciens citadins qu’il convient de rééduquer , l’idée de propriété devant notamment être abandonnée .
C’est en même temps la collectivisation forcée et brutale , l’alimentation en commun pour assurer l’égalité des rations , les réunions de critique pour chasser l’individualisme , se reconstruire , se soumettre à l’Angkar... avec contrôle policier des comportements et des pensées .
Dans un tel contexte , la situation économique ne peut que se dégrader , des objectifs irréalistes comme multiplier les rendements à l’hectare par trois y ajoutent , de même que la conviction que le premier pas vers l’industrialisation était l’exportation de riz , qui amenèrent Pol Pot à affamer la population cambodgienne pour parvenir à cet objectif .
Dès lors la recherche de « boucs émissaires » dans le parti pour leur faire porter la responsabilité des échecs du système déclencha des purges meurtrières , lesquelles alimentèrent le sinistre centre d’interrogation et d’exécution S-21 .
Au total , selon les estimations , entre 1,5 et 2,5 millions de Cambodgiens ont été victimes , ce que l’ONU a considéré comme un génocide et l’a amené à créer un tribunal Spécial pour les Khmers rouges ( TKR ) , non sans retards et incidents de fonctionnement qui ont permis à la plupart des responsables de mourir sans être inquiétés .

LA DEPOSITION DE RAOUL MARC JENNAR

La déposition de Raoul Marc Jennar , proposé comme témoin par la défense , met en évidence le fait que l’histoire n’est pas close .
Comment pourrait-elle l’être d’ailleurs , au moins dans la mémoire d’un peuple qui a vécu cette tragédie ?
On consultera avec intérêt l’article de Wikipédia qui présente sa biographie , et qui fait état entre autres de sa connaissance du Cambodge .
Pour ma part , si je partage un certain nombre de ses idées sur un plan plus général , j’ai eu aussi l’occasion de polémiquer avec lui à plusieurs reprises , mais la démocratie implique le débat , la confrontation , voire l’affrontement des idées .
Ici , bien évidemment , je prends en compte qu’il s’agit d’une déposition devant un tribunal et au nom de la défense .
L’ensemble de sa déposition est consultable sur son site : www,jennar,fr

LE CHOIX DE CONTRAINDRE PLUTOT QUE DE CONVAINCRE

Que dit Raoul Marc Jennar ?
« Je ne suis pas de ceux qui confondent les idéologies et les renvoient dos à dos . Les racines du communisme n’ont rien de commun avec celles du fascisme ou du militarisme . Mais lorsque les porteurs d’une idéologie font le choix de contraindre plutôt que de convaincre , ils se retrouvent dans le recours à des méthodes identiques et dans une commune aptitude à détruire la volonté des individus et la dignité qui est en chaque être humain .
« Il s’agit donc ici et maintenant de juger ce qu’il conviendrait à mes yeux d’appeler le polpotisme et de vérifier en quoi la mise en oeuvre de cette variante cambodgienne de l’idéologie communiste a conduit à une barbarie qui justifie les qualifications de crimes contre l’humanité et de violations graves des Conventions de Genève . »
Convaincre plutôt que contraindre , je partage ce que dit Raoul Marc Jennar , cependant qu’en parlant là d’idéologie communiste , il innove pas , il n’est pas le premier ni ne sera le dernier à le faire .

LA PREUVE PAR MARX

Je n’innove pas moi non plus . Je soutiens avec d’autres que jamais encore le communisme n’a été expérimenté . En conséquence , il ne peut avoir échoué ni avoir commis les crimes que l’on lui reproche .
La preuve de ce que j’avance ?
Mais la preuve par Marx !
Car pour Marx , ce sont les « masses » , c’est-à-dire les peuples , qui font l’histoire et les peuples sont par définition majoritaires et , en conséquence , en mesure de créer les rapports de force nécessaires pour mettre en oeuvre les changements de société indispensables pour mettre fin au capitalisme !
Selon ma conception et ma conviction , la condition nécessaire pour construire le communisme , c’est de donner le pouvoir au peuple , ou bien plutôt c’est à lui de le prendre , ce qui n’a jamais été fait nulle part , a fortiori au Cambodge où je ne peux distinguer nulle part et en aucune façon que le pouvoir ait appartenu au peuple cambodgien .
Ce qui apparaît au contraire très clairement , c’est que la grande masse du peuple cambodgien , de la ville ou de la campagne , a été soumis à des contraintes multiples , contraintes qui se sont traduites par des morts , et par centaines de milliers , à l’encontre de ceux qui non seulement , pouvaient émettre des désaccords relatifs aux politiques poursuivies , voire simplement parce qu’ils étaient intellectuels ou d’origine urbaine !
Je le dis à nouveau , ceci n’a rien à connaître avec le communisme et en est même la négation !

LA SURDETERMINATION IDEOLOGIQUE
PAR LA DICTATURE DU PROLETARIAT !

J’ai déjà évoqué la formation des principaux responsables du PCK à Paris par les soins du Parti communiste français .
Raoul Marc Jennar est beaucoup plus explicite à ce sujet dans sa déposition :
« Je partage , dit-il , avec Steve Heder ( 1 ) la conviction que la source première du communisme cambodgien à la manière de Pol Pot , c’est la révolution bolchévique . Sans ignorer le rôle des communistes vietnamiens dans la formation idéologique et militaire des communistes cambodgiens , sans minimiser l’importance qu’a pu prendre le modèle chinois dans la politique agraire du Kampuchea démocratique (mis à part un degré de collectivisation et un démantèlement des familles rurales jamais atteint en Chine ) , il n’est pas contestable que , pour ce qui concerne l’organisation politique et en particulier l’organisation du Parti communiste en ce que compris ses règles et pratiques dans le domaine de la sécurité , l’inspiration est clairement bolchévique... »

LE PCF SERAIT-IL RESPONSABLE ?

Raoul Marc Jennar rappelle que « le petit groupe qui va plus tard former la direction du Kampuchea démocratique , ce sont pour l’essentiel les membres du cercle marxiste des étudiants khmers de Paris , un groupe de discussion fondé en 1951 . »
Il ajoute : « Plusieurs d’entre-eux étaient à l’époque membres du Parti communiste français ( PCF ) . Or , on le sait , c’est notoire , de tous les Partis communistes actifs dans les pays occidentaux , le PCF fut le parti le plus inconditionnellement fidèle aux politiques décidées à Moscou . Il fut le plus fidèle à Staline . Et , à l’époque , plus d’un quart de l’électorat français lui faisait confiance... »
« Les cours de formation organisés par le PCF contenaient l’historique de la création de ce parti issu de la volonté d’une majorité de socialistes d’adhérer à la 3eme Internationale , l’Internationale communiste .
« Or une telle adhésion impliquait le respect de 21 conditions édictées par Lénine lui-même . Et parmi ces 21 conditions , on trouve l’obligation d’appliquer au sein du Parti une « discipline de fer » , de soumettre entièrement la presse et tous les services d’éditions au Comité Central du Parti , d’écarter systématiquement les éléments réformistes et centristes , de mettre en place une organisation clandestine avec la pratique du secret qu’elle implique . »
Raoul Marc Jennar indique encore que les éléments de l’enquête révèlent que parmi les livres de Marx , Lénine , Staline et Mao , deux ouvrages faisaient l’objet d’une lecture attentive et de débats passionnés :
de Lénine , l’Etat et la Révolution ,
de Staline , Principes du Léninisme .
De ce second ouvrage sont retenus :
 le Parti est l’avant-garde du prolétariat qu’il doit guider et conduire ;
 le Parti est un tout unique organisé . Sa tâche est d’organiser et encadrer le prolétariat . Il est l’instrument de la dictature du prolétariat ;
 le Parti doit être organisé de la façon la plus centralisée et il doit être régi par une « discipline de fer » touchant de près à la discipline militaire...

CONSULTANT POUR LE GROUPE GUE/NGL

A ce stade , je souhaiterais questionner Raoul Marc Jennar :
« Savait-il ce qu’il dit là quand il accepte d’être consultant pour le groupe GUE/NGL au Parlement européen où il est amené à travailler avec des députés membres du PCF lequel , certes , a modifié profondément ses statuts et renoncé depuis 1976 , Georges Marchais étant secrétaire général , au concept de dictature du prolétariat ?
Et ensuite je souhaite formuler ce qui est plus qu’une remarque : des centaines de milliers de communistes français ont adhéré au PCF lorsque les statuts de celui-ci faisaient encore référence aux 21 conditions édictées par l’Internationale et se sont-ils comportés dans leurs activités , y compris électives et gouvernementales à l’égal des dirigeants du PCK ?
Je pense que l’on peut considérer qu’une telle surdétermination par ces statuts , aurait-elle existé , n’aurait jamais pu conduire aux errements criminels , aux horreurs qui ont été ceux des dirigeants du Kampuchea démocratique !
En tout cas , que des concepts comme ceux de « dictature du prolétariat » puissent être évoqués pour leur donner la justification théorique et concrète rappelée justifie pleinement la décision qui a été prise il y a plus de 30ans par le PCF auquel j’appartenais alors .
Pour ma part , dans le cadre des Assises du communisme que je préconise avec d’autres communistes pour l’élaboration par tous les communistes qui le souhaitent le rester d’un communisme du 21eme siècle et de la formation que le peuple français se donnera pour ce faire , je continuerai à considérer le rôle très marginal que Marx réserve au concept de « dictature du prolétariat » pour donner toute leur place à deux notions pour lui essentielles afin que le peuple ait réellement le pouvoir , puisse se le donner : l’appropriation sociale ou collective contre toute étatisation et le dépérissement de l’Etat pour aller vers une auto-administration de la société par elle-même .
Je pense que c’est cela , et rien d’autre , qui permet de se dire révolutionnaire dans la France de notre temps !

Messages

  • Bon article !

    Il n’y manque qu’un détail, mais quel détail :

    Quand, en 1979, grâce aux communistes vietmaniens et cambodgiens exilés, la vérité sur l’étendue des dégâts des Kmers rouges a été connue, ceux-ci ont trouvé refuge dans le très pro-occidental royaume de Thaïlande, aux frontières du cambodge, ils ont reçu l’aide de nos OPNG (organisations prétendument non gouvernementales), il y ont été armés et équipés, et ils ont pu combattre Hun Sen jusqu’à lui imposer des reculs sérieux, c.a.d. jusqu’à ce que les occidentaux règnet de nouveau sur le Cambodge.

    Sans le soutien occidental, les polpotistes ne seraient depuis 30 ans qu’un groupuscule impuissant réfugié quelque part en Chine.

    Le Vietnam et le Cambodge auraient vécu en paix depuis 1979, après se l’être bien gagné.

    Les droitdelhommistes donneurs de leçons ne l’ont pas voulu.

  • Merci Michel pour cette mise en perspective salutaire de l’histoire.

    Car parler de "variante cambodgienne de l’idéologie communiste" de la part d’un "penseur marxiste" me paraît être, soit du délire, soit de la mauvaise foi.

    Si ça continue, on (et dans ce "on", je n"hésite pas à mettre beaucoup d’ "anciens" maoïstes) va invalider toute aspiration au communisme à partir de références au régime Chinois actuel !!!

    • « Plusieurs d’entre-eux étaient à l’époque membres du Parti communiste français ( PCF )

      De ce que j’en sais, et de ce que j’ai connu enfant, en 1951, les communistes "étrangers" qui n’avaient as la nationalité française n’étaient pas adhérents au PCF. Il y avait des sections nationales pour les différents partis de l’extérieur.

      J’aimerais bien avoir l’avis, (avec quelques exemples précis), de vétérans du Parti qui pourraient me confirmer que ça n’était pas toujours le cas.

      Ho-Chi-Mihn, lui-même, avant son départ en Indochine, était simplement un hôte du Parti et n’avait pas un statut officiel de membre de plein droit. Même s’il participait aux Congrès en tant que représentant un parti "frère".

      Pour le reste, alors que les documents déclassifiés du Pentagone et du Gouvernement américain, prouvent nettement que ce sont les USA, Kissinger, et le Papa G.H. Bush alors ambassadeur US à Pékin, avec leurs complices dirigeants chinois qui ont mis en place et armés les Khmers rouges, faut avoir un sacré culot et pas de figure pour en déduire que s’il y a eu "génocide" au Cambodge c’est la faute aux Communistes français. Et même si alors ils étaient "staliniens".

      Je ne suis pas "contre" la "révision" de l’Histoire. Quelle qu’elle soit. Et je suis même "pour" une révision permanente. Mais à condition qu’on prenne tout en compte. Et qu’on AJOUTE des éléments validés et pas qu’on en enlève d’autres aussi validés que ceux qu’on ajoute pour aller vers ou on veut aller.

      Et s’il y en a qui croient qu’ils nous ont assez décervelés pour faire avaler le poisson, la canne, et le pêcheur avec... Va falloir qu’ils se réveillent.

      On lit tout, partout, même l’illisible et l’indicible, y compris ce qui ne nous fait pas plaisir. On le lit et on l’étudie DANS LE TEXTE, (En l’occurence les docs déclassifiés du Pentagone, de l’ONU, et du DoD), et surtout ON LE FAIT SAVOIR.

      Alors RMJ va falloir qu’il recommence à étudier le problème de plus près s’il veut rester crédible !!!

      C’est pas encore Annie Lacroix-Riz. LOL.

      G.L.

    • Voir aussi ce que dit Noam Chmoski sur le sujet :

      "Par contre, personne en Occident n’avait la moindre suggestion sur la façon de mettre un terme aux crimes de Pol Pot. Et lorsque les Vietnamiens le firent [janvier 1979], ils furent soumis à de sévères sanctions, puis " punis " pour le crime d’avoir délogé Pol Pot par une invasion chinoise soutenue par Washington [février 1979], tandis que les Etats-Unis et leurs alliés accordaient un soutien militaire et diplomatique déclaré à la coalition menée par les Khmers rouges, présentée officiellement comme étant " incontestablement " plus représentative du peuple cambodgien que la résistance timoraise [Fretilin] ne l’était de son propre peuple. C’est ainsi que les Etats-Unis et leurs alliés justifiaient le soutien qu’ils apportaient à la fois à Pol Pot et aux criminels indonésiens.

      En regard de ces faits, Laplace et sa source infamante m’accusaient et m’accusent de " relativiser " les atrocités cambodgiennes. Si l’on traduit cette rhétorique en langage clair, leur position est qu’il est préférable que nous passions sous silence les crimes perpétrés avec la complicité de nos gouvernements — crimes que nous pourrions dès lors chercher à arrêter — et que nous adoptions d’héroïques postures face aux crimes commis par les ennemis de nos gouvernements, sur lesquels nous n’avons aucune prise. Cette position n’est pas sans rappeler cette phrase d’un journaliste français, cité par Jean-Pierre Faye dans la revue Change mentionnée ci-dessus : "L’histoire a des courants principaux, et le courant principal passe par le Cambodge, non par Timor..." Rappelez-vous la période : en 1978, les atrocités au Timor-Oriental avaient atteint leur paroxysme et le gouvernement français avait officiellement annoncé qu’il soutiendrait l’Indonésie et la protégerait contre tout " embarras ".

      "

  • Nous avons tous éprouvé un grand soulagement quand à Saïgon, maintenant Ho Chi Minh ville, les américains durent s’enfuir laqueue entre les jambes en hélico de leur ambassade, quand les blindés saisis par les Kmers rouges ouvrirent la voie à de longues cohortes de soldats de la résistance.

    L’effroyable guerre d’Indochine, ou, du moins les guerres d’Indochine se finissaient enfin, après les océans de massacres perpétués par les Français, les Japonais, les Américains et quelques supplétifs.

    le bilan des interventions des divers impérialismes en Indochine surclasse largement les crimes Kmers rouges .

    Nous pensions que c’était fini, mais loin de là, hélas.

    Peu à peu vinrent les nouvelles de ce qui se passait au Kampuchéa, l’alignement du régime derrière ses protecteurs nomenclaturistes chinois alliés alors à l’impérialisme américain contre la révolution vietnamienne soutenue alors par l’URSS, les nouvelles de plus en plus concordantes sur les boucheries perpétuées.

    Il y a deux chose à constater, d’un côté l’enchainement historique et ensuite la mécanique même du régime kmer rouge.

    Une très longue guerre civile préalable, une montée dans l’horreur progressive entre les massacres américains et la forme particulière du régime de Lon Nol, de 1969 à 1975 , issu d’un coup d’état pro-américain contre Norodom Sihanouk, forme déjà très apocalyptique de commandement, mélangeant grande corruption , massacres, dérives hallucinantes et meurtrières.

    Le régime kmer rouge arriva en 1975 au contrôle de tout le pays et fut abattu par les troupes vietnamiennes en 1979 , continua la guérilla en s’alliant à des forces bourgeoises, royalistes et nationalistes (là contre les Vietnamiens) avec l’appui de l’Europe, de la France, de la Chine et des USA, qui maintinrent le soutien à l’ONU au représentant Kmer rouge comme seul représentant du Kampuchea.

    Il faut rappeler cela et pas s’en prendre aux orgas des droits de l’homme qui là dedans ne furent que ceux qui soignaient les corps, avec divers points de vue, des réacs jusqu’aux orgas progressistes en passant par les entreprises caritatives.

    Dans le même temps le Vietnam fut agressé par une tentative d’invasion chinoise pour voler à l’aide des dictateurs nomenclaturistes kmers rouges.

    Il faut rappeler cela et la défaite destroupes de l’impérialisme chinois (120 000 hommes) allié à cette époque aux impérialismes américains et européens.

    le contexte et l’enchainement des faits qui remonte à l’installation meurtrière et sanglante du colonialisme français , les guerres contre les fachos japonais, puis à grande échelle à nouveau contre le colonialisme français puis l’impérialisme français basculent toute l’Indochine dans un terrible cauchemar qui dura tout le XXeme siècle et qui, avec les moyens militaires modernes monta en horreur de cran en cran, tout le long des années qui s’étalent de l’invasion japonaise à l’occupation américaine (tonnage de bombes balancé sur le Vietnam plus important que tout ce qui fut balancé sur tous les fronts de laseconde guerre mondiale, par exemple, voir la taille du Vietnam).

    Le bouleversement des sociétés, la dévaluation terrible du prix d’une vie, de sa souffrance, sont importants pour tresser l’arrivée du régime kmer rouge.

    Ces fripouilles étaient une nomenclatura, couche sociale dirigeante dictatorialement au nom du communisme, mais dans les faits un système de domination d’une couche sociale, à étudier, sans s’encombrer des oripeaux idéologiques dont elle se revêtit.

    Je suis toujours surprit quand on sur-évalue la puissance du verbe on abandonne l’analyse en terme de lutte de classes d’une société au prétexte d’aller chercher dans les textes ce qui pourrait expliquer ce qui s’y passe.

    Nous avons vu surgir sous nos yeux un système qui puise ses racines dans l’histoire d’un pays et dans la structuration d’une nomenlcatura, classe sociale dirigeante, qui choisit de liquider toutes les autres couches sociales sauf la Paysannerie.

    On a plutôt affaire là, plutôt que de scruter les oripeaux idéologiques dont se revêt ce régime, d’un très vieux système connu dans diverses sociétés , notamment dans l’antiquité , une espèce de théocratie (sauf que le dieu là ce sont les tables de la loi falsifiées du communisme) criminelle qui fait ses sacrifices et domine une société paysanne .

    l’hyper-hierarchisme du système,l’absence absolue de pouvoir de la classe "prétexte" qu’était la paysannerie montre bien qu’on a affaire à une forme de domination d’une classe.

    Le PCF n’y est pour rien en la matière.
    On a parlé de Ho Chi Minh faisant un pont de mauvais gout avec la naissance des bouffons sinistres kmers rouges parce qu’on abandonne l’analyse des mécanismes qui fabriquent une couche sociale et les moteurs qui l’a font agir.

    Pour Ho Chi Minh, aller rechercher les membres fondateurs du PCF .

    On recherche toujours le péché originel ou du moins on surestime son importance plutôt que de continuer à utiliser le champ fécond des analyses des sociétés en termes de modes de productions de classes et de couches sociales.

    Les sociétés nomenclaturistes ou de capitalisme d’état, dont le kampuchea sous domination kmer rouge fut une horreur comparable dans le crime au nazisme représente un cas extreme, n’échappent pas à la lutte des classes, ni à des dominations de classe.

    Ce n’est pas une idéologie qui fit la relation de sur-exploitation de la paysannerie par les nomenclaturistes kmers rouges, ni ce qui fit la propension meurtrière à éliminer toute personnes ayant une qualification jusqu’aux plus bas niveaux, donc l’élimination également d’une toute petite classe ouvrière, mais une couche sociale travaillant à sa domination.

    • Je voulais rajouter que bien que n’ayant pas exactement les mêmes positions de Jennar je trouve qu’il a un sacré courage d’aller dans un procès où il ne peut prendre que des coups ... ici.

    • à propos , samedi dans un "reportage" Arte (soi disant sur la prostitution au Cambodge), j’ai entendu ""....les élites ayant disparues pendant le génocide, le pays est en proie à la corruption....."".

      çà vous la coupe !!!!

      faut dire qu’Arte arrive à faire pire que nos chaines française en matière de reportage (sic )et en rajoute dans les commentaires, sans doute pour combler le vide du salmigondis d’images chocs qu’elle ramasse au hasard.

      SOIZIK

    • Les sociétés nomenclaturistes ou de capitalisme d’état, dont le kampuchea sous domination kmer rouge fut une horreur comparable dans le crime au nazisme représente un cas extrême, n’échappent pas à la lutte des classes, ni à des dominations de classe.

      Et ce constat, qu’est-ce que ça change au fait que ce sont les USA et les Chinois qui ont manigancé l’accession des Khmers "rouges" au pouvoir ? Sous haute protection occidentales. Et pour contrer les Soviétiques qui soutenaient les Viets.

      Et en plus on a les pièces d’archives qui PROUVENT que c’est bien Kissinger qui a induit cette stratégie avec le complicité des Chinois, qui a commandé les bombardement contre le Gouvernement Shianouk, et en plus il l’a déclaré plusieurs fois.*

      Perso, je dis que c’’est honteux d’"imputer" au PCF de 1950, stalinien ou pas, les crimes des sbires polpotiens.

      Et pour aller au bout je dirais aussi que ce genre de manoeuvre, au moment ou le Capital cherche par tous les moyens à faire l’amalgame "Communisme" = "Nazisme" ça m’est encore plus suspect ; surtout lorsque c’est basé sur des faits tendancieux et sur uniquement un procès d’intention.

      Quant à ceci :

      de Lénine , l’Etat et la Révolution , de Staline , Principes du Léninisme . De ce second ouvrage sont retenus :
      le Parti est l’avant-garde du prolétariat qu’il doit guider et conduire ;
      le Parti est un tout unique organisé . Sa tâche est d’organiser et encadrer le prolétariat . Il est l’instrument de la dictature du prolétariat ;
      le Parti doit être organisé de la façon la plus centralisée et il doit être régi par une « discipline de fer » touchant de près à la discipline militaire...

      Qui est mis en avant pour dire que c’était la vulgate appliquée par les Khmers de Pol-Pot, ça ne signifie pas du tout que le Parti doit appliquer aux masses la discipline qu’il doit appliquer à lui même.

      Et seuls des malintentionnés peuvent prétendre que c’est au nom de ça que ces crimes ont été commis.

      Et puisque y en a qui n’ont pas compris ou font semblant de pas comprendre :

      1.le Parti est l’avant-garde du prolétariat qu’il doit guider et conduire ; :

      Ca ne signifie pas que Parti est le charretier qui va conduire des ânes, mais que les membres du Parti doivent s’éduquer et être exemplaires pour pouvoir expliquer aux masses sa politique. Et y a marqué nulle part qu’il faut que ça soit à coup de pioche derrière la tête.

      2.le Parti est un tout unique organisé . Sa tâche est d’organiser et encadrer le prolétariat . Il est l’instrument de la dictature du prolétariat ; :

      Ca, ça ne signifie pas que le Parti est une "secte" qui possède la "vérité" révélée, mais simplement qu’il est un outil de combat dans une guerre sans merci que livre le Capital au Travail. Qu’il doit se mettre en avant pour aider le prolétariat à s’organiser. Et qu’il doit favoriser la VRAIE démocratie qui est la "dictature de la majorité" (les travailleurs), sur la minorité, (les exploiteurs). A moins qu’il y en ait ici qui pensent que la "Démocratie" actuelle qui voit une poignée d’exploiteurs dominer une majorité d’exploités ça soit une VRAIE démocratie. Alors que c’est la "Dictature du Capital" sur le Travail.

      3.le Parti doit être organisé de la façon la plus centralisée et il doit être régi par une « discipline de fer » touchant de près à la discipline militaire...

      Et ça ça veut simplement dire qu’ils étaient moins cons que ceux de maintenant car ils avaient compris que que la Lutte de Classe c’était pas un "jeu" mais une "guerre". Et que qui dit "guerre" dit discipline militaire, commandement central, et le don de soi à la vie à la mort si on veut la gagner sur un ennemi supérieur en moyens.
      Ils allaient pas sucer les Capitalistes à La Lanterne, EUX... Tout "staliniens" qu’ils étaient.

      Ca vous va la traduction dialectique ? Ou faut encore appeler Chomsky à l’aide ???

      Et pour finir, sans vouloir défendre bien des choses indéfendables, le PCF "stalinien" des années 50, il avait au moins à son programme un vrai "programme révolutionnaire". Il l’affichait et en parlait. Et c’était pas le bordel actuel, ni le copinage contre nature avec les valets du capital ; et il était pas comme actuellement à la Droite de la SFIO d’alors, comme le PCF actuel qui dans son genre, (Plus soft, mais ça fait aussi du mal), n’est pas plus "communiste" que le Parti "communiste" du Kampuchea.

      Parce que ça aussi c’est vrai : Le PCF actuel, risque pas qu’on donne sa vie "pour lui", ni "pour ses objectifs", que personne ne connaît réellement. Même pas lui.

      Et on risque encore moins de prendre la vie des autres pour les mêmes raisons.

      G.L.

      *Dans ces années là, ou Pol Pot prenait le pouvoir soutenu par l’ONU et les Occidentaux, j’étais encore un jeune con. Mais lors d’un reportage à la TV, j’avais été frappé par l’image qu’on nous montrait des Khmers de Pol Pot : Ils n’étaient pas en pyjama noir et en tongs, bien modestes, comme les Vietcongs, armés d’AK47 ou de vieux Lebels, mais armés d’USM1 ou de M16 américaines toutes neuves, habillés de treillis américains comme en portaient les Soldats de Saïgon, et de chapeaux de brousse de l’US Army. Et ils roulaient les mécaniques comme des "Conseillers" des Commandos de l’US Army. Je connais bien ceux-ci car je les ai côtoyés quand j’étais sous-off aux FFA. Je peux vous dire que c’est pas des "cadeaux"...

      Et je me suis frotté alors avec des Camarades du Parti qui "défendaient" les KR, (On ne savait pas tout alors), car j’ai fait part de mes doutes sur l’authenticité de la "rougeur" de ces derniers, (J’ai une TRES BONNE formation militaire).

      Ce qui ne m’a pas valu que des amitiés.

      C’est une vieille histoire.

      Ciao. je vais me coucher !!!