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L’Espagne contre le nationalisme de gauche et de droite

Publie le vendredi 24 septembre 2004 par Open-Publishing

Alors qu’en ce moment, la Commission d’enquête parlementaire espagnole sur les attentats du 11 mars, doit auditionner Aznar sur sa responsabilité dans l’énorme manipulation médiatique ayant suivi le massacre de Madrid, c’est un pavé dans la mare qu’a lancé la maison d’édition Gatuzain. Cette dernière vient de publier un ouvrage collectif qui fera certainement référence : « 11 Mars, le grand mensonge ».
Anjel Rekalde, coordinateur de l’ouvrage, Patrick Cassan, rédacteur, et Hartzea Lopez, représentant Gatuzain, ont tenu une conférence de presse à Baiona pour présenter l’ouvrage.

Gatuzain a présenté ce qui l’a amené à publier cet ouvrage. Tout d’abord, la distance nécessaire face à l’émotion suscitée par ces attentats. Ces derniers ont déchaîné les passions durant ces quatre jours qui ébranlèrent, non seulement le Royaume d’Espagne, mais plus particulièrement Euskal Herri, victime collatérale de ces évènements. Pour Hartzea Lopez, « cet ouvrage est une réponse apportée à ces leçons de manipulations »

Gatuzain est revenu sur la Commission d’enquête, menée par le juge Del Olmo, connu pour son parti pris anti abertzale. Le juge refuse de transmettre plus de la moitié des documents demandés par le Parlement, classés top secret. La Commission a aussi mis en lumière, que des « taupes » des services secrets espagnols auraient fournis les explosifs aux auteurs de l’action, et qu’une partie des personnes arrêtées étaient appointées par ces mêmes services. La Commission d’enquête parlementaire a été le théâtre d’affrontement entre le PP et le PSOE sur l’opportunité d’auditionner ou non Aznar.

L’ouvrage

Dans sa préface, Angel Rekalde (à droite sur la photo) cite un disciple de Jünger « Lorsque tu aperçois un géant, regardes bien la position du soleil, il se peut que ce soit l’ombre déformée d’un pygmée ».
Quatre chapitres structurent le livre pour donner une vision d’ensemble de ce qui s’est passé ce 11 mars. Car il y a en effet plusieurs volets à ce dossier .

« Trois jours de tromperie qui ont changé un gouvernement »

" Trois jours de tromperie qui ont changé un gouvernement " a été écrit par Jabier Salutregi (ancien directeur d’Egin) qui, décortique pas à pas tous les évènements de cette journée et des trois jours qui ont suivi : de la sortie des kamikazes de leur fourgonnette, aux premiers éléments prouvant la filière islamo-radicale, de la volonté d’Aznar de charger à tout prix ETA, jusqu’au mouvements de haine anti-basques : l’assassinat d’Anjel Berrueta (épicier tué par un flic car il ne voulait pas mettre une affiche anti ETA), la mort de Konchi Sanchez (tuée lors d’une charge de l’Ertzaintza), jusqu’aux manifestations ayant abouti à la chute du gouvernement Aznar.

« L’Espagne du Parti Populaire »,

Pour bien comprendre ce qui a permis à Aznar de se livrer à de telles manipulations, Giovanni Giacopuzzi, spécialiste italien de la question basque a écrit « L’Espagne du Parti Populaire », qui revient sur la constante du gouvernement Aznar a mener une guerre sans merci au peuple basque. Les processus de règlement du conflit sont analysés : Forum d’Hermua, accords de Lizarra-Garazi etc... Au delà de la criminalisation de la gauche abertzale, l’auteur revient sur ce qui a marqué la fin du règne d’Aznar : la marée noire du Prestige, l’alignement sur la position américaine dans la guerre en Irak etc...

« la vie sur la planète terre, un 11 mars quotidien »

Santiago Alba Rico, collaborateur de Gara et connaisseur du monde arabe, replace l’évènement dans son contexte international : « la vie sur la planète terre, un 11 mars quotidien ». Ordre impérialiste, engagement en Irak, redéfinition des cartes géo-stratégiques entres les nations détentrices du pouvoir économique, rapports au monde arabe sont analysés.

« les médias français, une désinformation assumée »

C’est le titre du dernier chapitre écrit par Patrick Cassan, collaborateur au Journal du Pays Basque, qui revient sur le rôle des médias français. En exergue, il cite le Plan Zen, le plan d’exception espagnol, qui contient un volet " média " et qui prpéarait à une telle crise. Il souligne l’appel des médias à de pseudos « experts », qui vont aller dans le sens du gouvernement espagnol. Il faut dire que dès les premières heures, la Moncloa contacte tous les correspondants étrangers à Madrid en vue d’accréditer sa thèse. Et les médias français d’adhérer sans nuance à cette vision. Puis c’est le glissement vers la thèse « Al Qaida/Eta », alimentée par l’engagement anti-guerre abertzale, qui donnera lieu aux versions les plus loufoques. Quand la vérité se fera jour, aucun mea culpa, aucun bilan ne sera tiré par les médias.

Un ouvrage à lire d’urgence, qui fournira certainement les premières clefs de réflexion, pour comprendre un événement, et d’autres avant et après lui, où le traitement médiatique remplace le raisonnement par de l’émotion brute. Certainement une leçon pour l’histoire.

« 11 Mars
le grand mensonge ».
Editions Gatuzain.
15 euros.