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Entre le marteau et l’enclume - I - (sur l’€ et l’Union Européenne)

28 septembre 2011, 10:35

Voici l’un des extraits du texte de Lordon par ucet été ds Le diplo qui m’a fait quasi-vomir de dégoût que ce genre de choses puisse être écrit sous la plume d’un osi-disant mec "de gauche". L’intégralité (dispo ici : http://toutsurlachine.blogspot.com/2011/08/analyse-la-demondialisation-et-ses.html car sur le site du "diplo" il n’ y est que partiellement)

LL


"(...)
C’est en ce point précis que le débat vient à se crisper à gauche. On n’aurait pas imaginé en effet que des membres du conseil scientifique de l’Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne (Attac) pussent s’alarmer de la mise en circulation du thème de la démondialisation, moins encore dans les termes de la stigmatisation du " repli national " qui résonnent étrangement avec les habituelles fulminations de l’éditorialisme libéral, et préparent le terrain de l’assimilation aux " politiques brunes [qui] se frayent un chemin sous les déguisements les plus divers (14) ".

On reste confondu de cette contribution peut-être involontaire, mais en tout cas objectivement constituée, d’une partie de la gauche critique aux pires défigurations de la démondialisation, et notamment celle qui persiste dans la fantasmagorie obsidionale, le " syndrome de la forteresse ", à base de remparts, de ponts-levis et d’économie autarcique. On croyait réservée au chroniqueur du Figaro Alexandre Adler l’antinomie qui ne conçoit que la Corée du Nord et la forme " royaume-ermite " comme opposé dialectique de la mondialisation, mais voilà que les allusions des signataires d’Attac viennent alimenter à leur tour cette figure imaginaire qu’un regard jeté sur une histoire économique récente suffit pourtant à invalider.

Car si, rapportée à nos normes (d’ailleurs singulièrement, et symptomatiquement, déplacées) d’aujourd’hui, la configuration fordiste du capitalisme d’après-guerre a tout de la démondialisation, on y chercherait en vain les barbelés et les miradors, les économies hermétiquement closes et les projets d’autosuffisance. Terrible infirmité de la pensée du tiers exclu qui ne conçoit que le monde mondialisé ou bien l’enfer des nations, mais rien entre les deux, et contre laquelle il faut rappeler sans cesse la possibilité de l’international, qu’il faudrait peut-être écrire inter-national pour lui faire encore mieux dire ce qu’il veut dire, à savoir qu’il peut y avoir des nations et des liens entre les nations.

On ne sache pas en effet que la période 1945-1985 ait ignoré les échanges extérieurs - sans doute le commerce international était-il moins développé qu’aujourd’hui... mais il n’est pas certain que ce soit une tare. On ne sache pas non plus que cette restriction, dans un régime d’échange que nos normes d’aujourd’hui qualifieraient indiscutablement de protectionniste, ait porté la guerre que nous promet M. Lamy chaque fois qu’il est question de ne pas tout sacrifier au libre-échange - et, catastrophique convergence rhétorique, certains altermondialistes annoncent que des droits de douane " nourri[raient] la xénophobie et le nationalisme (15) ", soit, lu à l’aveugle, du Lamy dans le texte.

Aussi aimerait-on rappeler que l’" horreur national-protectionniste " fordiste a été une époque, sans doute imparfaite, de plein-emploi, de croissance - il est vrai sans conscience écologique - et de paix entre pays avancés, certes relative seulement, mais tout de même... On ne sache pas davantage que le principe national ait été aboli même dans le monde supposé mondialisé car, informons les libéraux et les altermondialistes, il y a encore des nations ! Il y a la Chine, il y a les Etats-Unis, dont curieusement on ne questionne jamais ni le nationalisme ni les affirmations de souveraineté. Ces deux-là riraient beaucoup si on leur demandait de se fondre dans de plus vastes ensembles. Et, chose plus surprenante, ces indécrottables nations ne se font pas nécessairement la guerre, et elles ne nous la font pas non plus ! (...)"