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> des actes portés au coeur du capitalisme

7 novembre 2005, 18:09

Les banlieues et les villes populaires n’ont pas toujours été ainsi, preuves donc que même sous le règne du capitalisme les inegalités ne prennent pas la forme folle que l’on connaît actuellement.

Personne n’est dupe sur la responsabilité la plus importante de l’action ultra-liberale des gauches et droites gouvernementales qui se sont succédées. Même du temps du gaullisme on n’avait pas vu celà.

Ce que ne veulent, ou ne peuvent, pas comprendre, la plupart de ceux qui s’investissent si résolument dans la possibilité d’une ’alternative politique anticapitaliste’, c’est que le capital n’est pas d’abord le produit d’une politique conduite par tel Etat dont se serait emparé la bourgeoisie . De même, l’Etat et la démocratie même sont des produits d’une économie politique, celle du capital dont Marx a posé les fondements critiques dans le Capital, comme il avait posé dans sa jeunesse les fondements critique de la politique, de l’Etat, et de la "société civile" (en dépassant les principes révolutionnaires bourgeois de 89, les Lumières, Hegel etc).

Autrement dit l’Etat n’est pas une instance neutre a priori, au dessus des rapports sociaux, dont la nature changerait selon qu’il est entre telles ou telles mains.

Le so-called ultra-libéralisme n’est pas d’abord le produit d’un choix politique. Celui-ci est dicté par les dures considérations économiques du capital, qui a une histoire, des cycles etc. C’est la période de restructuration des conditions de l’exploitation qui détermine la nécessité pour le capital de sortir de la logique keynésienne (compromis fordiste... étét-providence, montée en puissance du mvt ouvrier et de ses organisations...).

Autrement encore, il ne faut pas confondre ce que le capitalisme a pu concéder parce que c’était aussi son intérêt, des années vingt aux années 50-60 (première période du capital en subordination réelle), avec ce qu’il pourrait concéder aujourd’hui, sous la poussée d’un gouvernement de "la vraie gauche". Il n’y a de fait que Moulier-Boutang, négriste français, pour théoriser un New-Deal, sur la base de la caducité de la loi de la valeur (la valeur d’une marchandise liée au temps de travail... Marx, Capital I), avec la batterie conceptuelle ’capital cognitif’, ’revenu universel’... dont même les ’économistes’ de la LCR (Husson, Artous), ou Harribey par ailleurs ont montré le vide théorique et le fait qu’il renvoie... à l’Etat.

Faute d’une critique conséquente de l’économie politique, et de l’Etat, on voit les meilleures intentions du monde de gauche partir dans des fantasmes gouvernementaux alternatifs sans le moindre réalisme et là, devant un événement aussi parlant en termes de classes, user de rhétorique dénuée de tout contenu critique du capitalisme actuel et de ses déterminations.

Il ne s’agit pas de prétendre que les émeutes actuelles présentent un caractère insurrectionnel visant à renverser le système, mais simplement de constater que par leurs cibles aussi, et par delà les drames humains, elles pointent l’essence même du capitalisme actuel, et les limites de toute réponse politique qui ne se proposerait pas de l’abolir. Les discours peu ou prou de ’conscientisation’, de ce point de vue, sont totalement décalés avec la réalité "sous l’apparence des choses", telles que les portent ces prétendues analyses politiques, sociales, sociologiques, psycho-ethnique et je ne sais quoi encore. Ce qui ne signifie pas que le fond (l’essence des contradictions) ne prennent pas des formes adaptées aux circonstances (le post-colonialisme français, la personnalité de Sarkozy etc.).

Sur ce dernier point, je crains que de focaliser à outrance sur la "démission" de l’Iznogood préféré des Français ne soit à terme contre-productive. Elle est en tous cas porteuse de toutes les illusions, désillusions, et incompréhension quant à ce qui s’en suivra, démission ou pas, car cela ne détermine que fort peu la suite des événements à moyen terme, qui est d’ailleurs relativement indépendante de ce qui se passera en terme de gouvernement de gauche ou de droite, de machin ou truc à la présidentielle.

Qu’on se garde à un moment donné, tout de même, que les discours de la droite "modérée" (les supposés moins méchants que Sarko ou Le Pen) ne ressemblent par trop à ceux de la gauche immodérée : lire les appels aux calmes comme première condition (à quoi ?) où il n’est pas dit que le talent de Chirac ne marque encore quelques points chez ceux qui ont voté pour lui en 2002, "contre Le Pen". Et qu’on se garde aussi, parce qu’on en voit, j’épargne les citations, de so called "marxistes révolutionnaires" tenir rien moins que des propos du meilleur étatisme fascisant.

Mais bon... C’était juste en passant, avec la conscience d’être complètement à côté de la plaque des sentiments dominants ici, pour ne pas dire politiquement incorrect.

P.