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10 novembre 2005, 23:02

06 Décembre 96 - POLITIQUE

Il y a dix ans, Malik Oussekine
était matraqué à mort

MERCREDI, Joris Clerté et Stéphane Lavignotte ont déposé des fleurs sur la tombe de Malik Oussekine, à Paris. En décembre 1986, Joris, aujourd’hui réalisateur
de télévision, et Stéphane, journaliste, étaient en terminale au lycée Camille- Guerin de Poitiers, où ils animaient les manifestations lycéennes contre la loi Devaquet.
Aujourd’hui, ils s’indignent que, en fêtant ses vingt ans, le RPR oublie que dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986 à Paris, en plein conflit gouvernement-étudiants,
alors que Charles Pasqua était ministre de l’Intérieur, Malik Oussekine fut matraqué à mort par deux policiers de la brigade des voltigeurs motoportés.

Cela se passait peu après minuit rue Monsieur-le-Prince, où se trouve un club de jazz que Malik fréquentait. Dans le hall du no 20, l’immeuble où le jeune homme
s’était réfugié à la suite d’une manifestation pacifique marquée par la répression policière. Français d’origine algérienne, étudiant à l’école supérieure des professions
immobilières (ESPI), ce jeune homme souffrait de déficiences rénales et devait être dialysé trois fois par semaine. Il n’était pas à proprement parler directement
impliqué dans le mouvement qui s’était emparé de la jeunesse lycéenne et étudiante depuis le 25 novembre. Mouvement qui contestait un projet de loi visant à
instaurer la sélection à l’entrée de l’université.

Seul témoin du drame, Paul Bayzelon, fonctionnaire au ministère des Finances, habitant l’immeuble, a raconté : ’Je rentrais chez moi ; au moment de refermer la porte
après avoir composé le code, je vois le visage affolé d’un jeune homme. Je le fais passer et je veux refermer la porte. Deux policiers s’engouffrent dans le hall, ils se
sont précipités sur le type réfugié au fond et l’ont frappé avec une violence incroyable. Il est tombé, ils ont continué à frapper à coups de matraque et de pieds dans
le ventre et dans le dos.’ Au lendemain de ce drame, Alain Devaquet, ministre délégué à l’Enseignement supérieur et auteur du projet contesté, présentait sa
démission. Au même moment, les étudiants défilaient massivement en silence, un peu partout en France, en portant des pancartes ’ils ont tué Malik’.

Une gigantesque marche silencieuse se déroula le lundi 8 décembre. Trois cent mille personnes défilèrent à Paris, 1 million en France. Et Jacques Chirac, alors
premier ministre du gouvernement de cohabitation, décidait de retirer le projet de loi. Les deux auteurs du matraquage mortel, le brigadier Jean Schmitt,
cinquante-trois ans à l’époque, et le gardien Christophe Garcia, vingt-six ans, ont comparu trois ans plus tard devant la cour d’assises de Paris pour ’coups et
blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner’. Ils furent condamnés le 28 janvier 1990 respectivement à cinq ans et deux ans de prison avec sursis.
Leur administration n’a pris aucune sanction notable : l’un a vu sa retraite avancée, l’autre a changé de poste.

PIERRE AGUDO.