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> La fièvre du poulet chinois et le vraisemblable

26 novembre 2005, 17:55

Bonjour.
Pandémie ou pas pandémie : vrai risque ou arnaque ?
Votre analyse d’éveilleur est riche et très éclairante sur beaucoup de points. Une affirmation me parait pouvoir cependant en être contesté.

Vous écrivez à propos du H5N1 :
"or comme son nom l’indique, le virus n’étant pas transmissible depuis un porteur humain vers un autre humain, le risque de pandémie mondiale est une des plus grandes arnaques du siècle écoulé et de celui-ci à peine entamé".

Outre, que je ne comprend pas bien ce que vous entendez par "comme son nom l’indique", personne ne me emble à ce jour pouvoir affirmer ni démontrer que le risque pandémique n’existe pas.

1) L’OMS reconnait 3 cas de contamination interhumaine possibles et plausibles. Même s’il s’agit du cercle familial ou des proches (pas de contacts avec poulets ou oeufs supects), cela montre que le virus a des potentialités, qu’on pense d’ailleurs pouvoir de mieux en mieux expliquer avec l’éclairage de ce qu’on déduira des études rétrospectives du virus de 1918 qui est certes d’un type différent, mais néanmoins avec de nombreux points communs.

2) De plus dans un des cas de transmission inter-humaine suspectée (au VietNam) il s’agit d’une patiente chez laquelle on a trouvé plusieurs variants du H5N1, résistants à un ancien antiviral et pour l’un déjà résistant au Tamiflu. (30 sept 2005 : des chercheurs de Hong Kong annoncent avoir trouvé une souche du virus H5N1 apparue en 2005 dans le nord du Viêt-nam déjà résistante au principe actif du Tamiflu, l’oseltamivir.

3) Enfin lors des pandémies précédentes, on a d’abord eu à faire à des virus peu pathogènes qui ensuite devenus très pathogènes et/ou à des virus qui ont muté et/ou se sont recombinés pour devenir très contagieux d’homme à homme. Plus le nombre de virus est grand, plus on a de chance de voir apparaître une mutation dangereuse pour l’homme

4) On constate de 1997 à 2005 :
· Le H5N1 a gagné en virulence et en pathogénicité depuis 1997.
· Adaptation du virus à l’environnement (il y survit plus longtemps et mieux, au point qu’il semble être devenu endémique en Asie du sud est alors que dans le passé, selon les chroniqueurs en tous cas, les foyers aviaires locaux étaient localisés et brefs (quelques mois, quelques dizaines de mois au plus).
· Le H5N1 actuel semble au moins aussi robuste que les virus responsables des pandémies précédentes (il ne lui reste qu’à muter ou se recombiner pour développer une pandémie).
· Selon la FAO et l’OIE, il y a expression silencieuse du virus chez les canards y compris domestiques (et chez d’autres espèces ?)
· Il en existe sans doute un certain nombre de variants, dont certains de plus en plus pathogène :
Plus grave : il semble être capable de passer par un plus grand nombre de vecteurs (chats et félins en particulier, qui attrapent les oiseaux malades) qui sont proche de l’homme. (H5N1 s’est avéré très pathogène et très contagieux chez le chat, en condition expérimentale, et chez les félins dans les zoos ou parcs). pas de traces dans la nature, certes, mais on n’a pas cherché, et les félins, comme les oiseaux d’ailleurs se cachent généralement très soigneusement pour mourir. Un bon naturaliste ou un chasseur a moins de 1% de chance de trouver les individus mourants je pense (à moins que ce virus modifie leur comportement à l’aube de la mort – à vérifier).
· Un variant résistant au Tamiflu déjà détecté au VietNam, chez une patiente qui semble de plus avoir été infectée par contact humain-humain et non par la volaille.
· Il ne lui manque que quelques caractéristiques pour devenir aussi dangereux que celui de 1918.
Bref, ne sommes-nous pas à peu près dans la situation de 1916-1917 (celui qui aurait à l’époque alerté aurait été taxé d’alarmiste, ou probablement de vouloir freiner l’effort de guerre..). Aujourd’hui, nous n’avons pas de vrai médicament efficace, sur ce point vous avez raison, et nous avons à faire face à des conditions nouvelles de mondialisation et de transport international rapide qui augmentent le risque de pandémie.

Certes pour l’instant le problème est essentiellement vétérinaire et peut-être localement écologique, et non sanitairement humain (si ce n’est par les conséquences directes et indirectes socioéconomiques pour les populations touchées), et personne ne peut affirmer que la pandémie est pour l’année prochaine, ou dans 2 ou 5 ans ou qu’elle viendra du H5N1 plutôt que d’un autre virus grippal... Mais le fait qu’un actionnaire et membre d’un laboratoire qui a isolé la molécule active du tamiflu fasse partie du Gvt. des USA, s’il nous interroge sur plusieurs aspects, éthiques notamment, ne peut hélas pas conduire à affirmer que la Pandémie est une « arnaque ».

FL