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> CPE : Chirac promulgue la loi et on continue la lutte !

1er avril 2006, 14:16

Je suis assez d’accord avec cette idée d’occupation pacifique et durable d’espaces publics ("à l’Ukrainienne"), avec des tentes, des cantines ...Mais elles réclament deux choses : 1) une mobilisation quantitativement plus massive (hier à soir à Paris, la manif était vraiment géniale, au niveau de l’ambiance, de la complicité entre les manifestants, de la détermination... ; mais c’est vrai aussi, nous n’étions que quelques milliers) ; 2) un bon niveau d’organisation (au sens "auto-organisation"). Et si aujourd’hui de nombreux groupes d’étudiants (par groupe affinitaires et ou de petites "chapelle" et courants politiques) sont maintenant assez bien organisés, aptes au dialogue et à la délibération collective (l’expérience de 2 mois de mouvement, où les personnalités de chacun se sont révélées), les salariés, précaires et chômeurs ne sont pas du tout à ce niveau.(à part les syndicalistes, mais il est vrai qu’ils restent dans leurs formes classiques de mouvement).
Les militanst de toutes tendances, aux échelons locaux, seraient bien inspirés, au lieu de se limiter à la propagande publicitaire pour leurs petites boutiques (et de ce point de vue, il y a aujourd’hui quelque chose d’assez obscène, de voir les différents partis, restés sur les trottoirs en regardant passer les défilés, retardant et gênant souvent ces derniers, à seul fin de battre l’estrade, de montrer leur drapeau et leur logo, espérant que le manifestant, subliminalement, en retiendra quelque chose lors des prochaînes échéances électorales. Ou encore de squatter la scène médiatique, en mulitpliant, des centaines de fois par jour (dans les dépeches AFP, Reuters, AP etc.) les communiqués les plus creux et les plus pauvres (toujours le même message, tenant en 50 mots, sans doute pour "éclairer l’opinion". Plus vraisemblablement pour rappeler qu’ils existent,que c’est eux qui comptent, alors que la pauvreté même de leur message, le caractère restreint et oligarchique de leur petites castes n’attirent pas franchement les foules en ce moment, qui tendent plutôt à "exister par elles-mêmes".), au lieu de se limiter donc à la promotion publicitaire de leurs "enseignes" et à leurs creux slogans, de bien plutôt faire du "travail de masse ", de proximité. Appeler à des assemblées publiques - de quartier, de communes etc. - où les points de vue se confrontent, des actions sont décidées, des informations circulent, des complicités se nouent etc. C’est cela la "démocratie participative" (comme ils disent) ou la "démocratie directe". Cela pourrait s’appeler des "comités de salut publique pour le retrait du CPE/ CNE", ou "comités locaux de lutte contre la précarité", "assemblées intercatégorielles de mobilisation contre la précarité et le CNE / CPE", "comité d’action locale", peu importe. Le premier objectif serait de réussir la manif / Grève générale du 4 avril. Mobiliser les hésitants, leur expliquer en quoi ils sont tous concernés et pas seulement les jeunes. Qu’autour de cette question du contrat de travail, c’est un véritable choix de société qui se dessine etc. etc. Ensuite, comme malgré l’immense succès que sera le 4 avril, le gouvernement tergiversera, magouillera et jouera comme d’hab, la division, la provocation et l’espoir du pourrissement, s’orienter vers ce scénario "à l’Ukrainienne", avec des campements dans divers endroits hyper passants de centaines de villes en France, y compris dans les banlieues. Les gens qui ne peuvent aujourd’hui se lancer dans une grève illimitée (surendettement, précarité, rapports de force très défavorables dans les petites boites - qui via la sosu-traitance et "l’externalisation des fonctions", emploient aujourd’hui la majorité du salariat-, grandes boites privées ayant sélectionnées leurs salariés sur la base de critères psychologiques très fins, de passivité et de respect de la hiérarchie etc.), pourront tout à fait se joindre aux mouvements, le matin, le midi, le soir, la nuit, les week-ends... Et avec la masse d’inemployes que compte le pays, le mouvement comptera une "armée de réserve" impressionnante (ce qui sera une excellente occasion pour beaucoup d’entre eux de se "resocialiser positivement", comme disent les sociologues et les travailleurs sociaux ! plutôt que de financer des stages bidons).
Evidemment, ne soyons pas angéliques, il y aura de sérieux problèmes, avec tous les "malades sociaux" qui errent comme des spectres dans la cité. Mais justement ce sera une bonne occasion de commencer cette vaste thérapie collective dont le pays a tant besoin !
Voilà c’est complètement utopiste, et sans doute complètement débile diront les plus réalistes !
Mais la conjugaison d’une occupation statique de "Campements de la liberté anti-pécarité" avec des défilés tous azimuts hyper-mobile (500 personnes X 10 (ou x) sillonant une ville dans tous les sens, vous voyez l’efficacité : y compris en terme de visibilité "non médiatique", mais "immédiate", par les gens que vous croisez, et auxquels vous pouvez vous adresser. Ajoutons que ces défilés auront un grand impact sur la salubrité publique, en faisant diminuer la circulation automobile et donc les pollutions : les automobolistes comprenant très vite qu’ils faut limiter ses déplacements motorisés au strict nécessaire, et plutôt marcher, prendre le vélo et les transports en commun, qui seront redevenus beaucoup plus sympa, puisque les gens feront moins "la tronche", sourieront et se parleront à nouveau. Ensuite cette situation nouvelle de réappropiration des espaces publiques par les corps vivants, et non plus les corps incarcérés dans leur sarcophage de ferraille automotorisée, par les machines et les corps réduits à l’état de monade automate, permettra certes quelques actions de blocage stratégique de la machine économique (salons marchands, réunions de "décideurs", circulation des marchandises..), et très vite, très, très, très vite, le gouvernement devra non seulement retirer ses mauvaises lois, mais aura même du souci à se faire. Il est sûr que les adeptes de la "démocratie médiatico-parlementaires" des oligarchies technocratiques (PS, Verts...) ne seont peut-être pas très enthousiastes vis à vis de ces perspectives qui redonneraient du "pouvoir au peuple" (Démocratie), et diminueraient donc une part du leur. Mais l’appétit vient en mangeant et "the proof of the pudding is in the eating" !