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> Deux légistes américains en Irak pour savoir comment Zarqaoui est "réellement" mort

12 juin 2006, 15:03

Période irakienne d’Al-Zarkaoui

Le mystérieux Al-Zarkaoui semble donc être un homme fort occupé. Regardez-y de plus près, regardez ce qu’il a fait au printemps 2003. Depuis sa cachette irakienne - protégé du regard des équipes des inspecteurs de l’ONU qui quadrillent le pays en long et en large - notre super terroriste préparait du ricin pour sa correspondance états-unienne, se donnait du mal pour enterrer quelques bombes radiologiques, organisait et coordonnait son réseau criminel nouvellement étendu dans quatre pays européens et, pour couronner le tout, faisait l’intermédiaire entre Al-Qaida et le régime de Saddam Hussein. Pas même l’invasion états-unienne de l’Irak ne réussit à freiner cette activité frénétique. Bien au contraire ! Depuis, les faits qu’on attribue à Al-Zarkaoui sont immenses, en premier lieu par leur nombre. Son nom est en effet prononcé avec à peu près toutes les actions terroristes !

The Weekly Standard, revue proche des cercles néoconservateurs du groupe PNAC, écrivait le 24 mai 2004 : « El-Zarkaoui a commandé non seulement l’assassinat de Nick Berg, mais encore le carnage de Madrid le 11 mars, le bombardement des Shiites en Irak le même mois, l’attentat kamikaze du port de Basrah le 24 avril. Avant le 11 septembre 2001, il complotait afin de tuer des touristes israéliens et américains en Jordanie ».

Abou Moussab al-Zarkaoui est devenu le nouveau « génie du mal » de l’islamisme, pendant que peu à peu on oubliait Ossama ben Laden. La CIA a augmenté la récompense pour la capture de Zarkaoui de dix à trente millions de dollars. Une somme en accord avec son rang de super-terroriste.

De manière étrange et malgré son implication dans de si nombreuses activités criminelles données comme assurées, Zarkaoui demeure un personnage fantomatique. Les informations qui le concernent continuent d’être très sommaires. Les responsables de la CIA ont reconnu dans la même livraison du Weekly Standard, que l’Agence ne dispose que d’une seule photographie dont elle suppose que c’est celle de Zarkaoui, et elle ne connait ni sa taille ni son poids !
La videocassette de l’exécution de Nicolas Berg

Au mois de mai 2004, Al-Zarkaoui est accusé d’avoir fait décapiter Nicolas Berg [2] après l’avoir pris en otage. Certains commentateurs ne peuvent s’abstenir de remarquer que cette exécution - surmédiatisée - tombe à point nommé pour Donald Rumsfeld. Au milieu du scandale de la prison d’Abu Ghraib, nombre de sénateurs états-uniens demandent la démission du secrétaire à la Défense qu’ils considérent comme responsable (au moins moralement) des horreurs qui se pratiquaient dans cette prison.

L’enregistrement vidéo de l’exécution de Nick Berg crée dans l’opinion publique un courant d’indignation anti-irakienne qui distrait l’attention de deux questions importante. Le 11 mai 2004, CNN présente un rapport mystérieux découvert sur un site islamique, dans lequel on accuse Zarkaoui d’avoir décapité Berg. Après deux jours, CNN annonce : « La CIA confirme que l’assassin de Nicholas Berg a bien été Abou Al-Zarkaoui ».

La preuve : une videocassette intitulé, « Abou Moussab al-Zarkaoui présente l’exécution d’un Américain ». Dans l’enregistrement on voit un individu masqué qui parle l’anglais et dont les experts de la CIA disent à l’unisson : « C’est Zarkaoui ! »

Sirajin Sattayev dans « Was Nick Berg killed by US intelligence ? » signale une série d’absences de concordances dans la vidéocassette. Sattayev remarque ainsi : « Zarkaoui est jordanien. Or l’homme dans la vidéocassette ne parle pas avec l’accent jordanien ! Zarkaoui est amputé d’un pied, or, pas un seul des deux pieds de l’homme présent sur la cassette ne présente cette anomalie. De plus, l’homme que l’on prétend être Zarkaoui porte une alliance jaune, probablement en or ; or voilà ce qu’aucun islamiste fondamentaliste ne ferait parce que sa foi ne le lui interdit. »

Immédiatement après la médiatisation de cette véritable bombe - un Zarkaoui avec ses deux pieds, une alliance en or à l’annulaire, et qui parle l’anglais - la revue News and World Report du 24 mai 2004 affirme : « Les personnalités officielles et autorisées de l’information états-unienne, qui croyaient que Zarkaoui avait perdu un pied en Afghanistan, ont modifié récemment leur opinion, ils affirment maintenant que Zarkaoui possède ses deux pieds. » Voilà qui change la situation.
Le mystère des otages en Irak

À la différence de ben Laden, Zarkaoui n’a jamais fait une seule déclaration appelant à la « guerre sainte » contre les juifs ou les chrétiens (les « croisés »). Lors de sa déclaration devant le Conseil de sécurité de l’ONU, Colin Powell a « oublié » de mentionner deux faits importants : d’une part que Zarkaoui et son organisation « Ansar al-Islam » étaient opposés à Saddam Hussein, et d’autre part, que les États-Unis n’ont manifesté aucun intérêt (alors qu’ils l’auraient pu) pour détruire sa base du Nord de l’Irak, dans une zone majoritairement habitée par les Kurdes. Pourquoi cela ?

Depuis quand, en Irak, les prises d’otages apparaissent-elles comme moyens stratégiques ? Environ six mois après que la Coalition dirigée par les États-Unis ait occupé le pays. En mai 2004 (après environ un an d’occupation) Nick Berg est décapité. Suivent Eugène Armstrong et Jack Hensley au mois de septembre 2004, puis le britannique Ken Bigley en octobre 2004.

Ce qui est frappant, c’est le fait que parmi les otages de Zarkaoui on compte des personnages particulièrement déplaisants pour la Coalition. Il est question d’hommes d’affaires suspectés de faire de l’espionnage, de journalistes de « gauche » ou indépendants qui relataient des faits allant à l’encontre des intérêts des forces d’occupation et qui n’avaient cure de la censure militaire, ou, enfin d’activistes d’organisations humanitaires indépendantes.

Par exemple, Nick Berg a été enlevé au moment où il était suspecté par la Coalition de se déplacer clandestinement d’Irak en Iran. Selon les dires de son père, le FBI menait une enquête sur toute la famille Berg au États-Unis, cherchant des informations sur les voyages de Nick en Iran. Les reportages de Giuliana Segrena, la journaliste du Manifesto (journal communiste italien), n’étaient pas du tout favorables aux troupes d’occupation, rappelant sans cesse le « génocide de Fallujah ».

Les États-Unis n’encouragent la venue en Irak que les journalistes nommés « correspondants de guerre », accrédités auprès des forces de la Coalition. À ceux-là, l’armée états-unienne fournit un uniforme, ainsi qu’une protection militaire ; dans le casier de leur chambre d’hôtel, ils reçoivent notes et vidéocassettes contrôlées par la censure militaire. Comme pendant la guerre avec l’ex-Yougoslavie, ces très nombreux « correspondants de guerre » ne quittent guère leur hôtel pour envoyer à leur journaux les dépêches que leur fournit toutes prêtes l’armée des États-Unis.

Les autres journalistes, ceux qui font leur travail sans passer par la censure militaire, risquent de tomber dans les mains de « Zarkaoui » et d’être soit décapités, soit l’objet d’une demande de rançon. L’idée n’est-elle pas d’instiller la peur chez les journalistes et les travailleurs des ONG indépendantes (cf. le programme du Pentagone « P2OG »), afin de les inciter à demeurer éloignés des zones « sensibles » ?

Quelque soit le degré d’imprévisibilité de la situation en Irak, on ne peut qu’être étonné par la manière plus que bizarre employée par Al-Zarkaoui pour atteindre ses cibles ! Nombre de victimes des actions de son organisation n’avaient pas, a priori et de manière explicite, à se garder d’être pris pour cible par les terroristes islamiques.
10 000 dolars pour une accréditer la fiction « Zarkaoui »

Le nom de Al-Zarkaoui a été invoqué, en 2003, afin de justifier la guerre en Irak. Aujourd’hui, il est présenté comme le fer de lance de l’insurrection, motif avancé pour affirmer que la paix n’est pas pour le moment possible, et qu’ainsi les troupes de la Coalition doivent repousser leur retrait et demeurer sur place. On attribue à l’organisation de Zarkaoui toutes sortes d’actions terroristes : des attentats à la voiture piégée, des enlèvements, des prises d’otage et des exécutions. Tant d’actions diverses et si complexes qu’il semble difficile de croire qu’elles aient été dirigées par un seul homme. Le quotidien australien, The Age, a avancé une hypothèse intéressante : « Al-Zarkaoui n’existe pas ». Ou, à tout le moins, le personnage flamboyant et hyperactif décrit par les services secrets états-uniens n’existe pas. C’est un personnage de fiction. The Age rapporte, sous couvert d’anonymat, le témoignage d’un officier des opérations psychologiques de l’armée états-unienne. Celui-ci aurait déclaré au quotidien australien : « J’ai payé jusqu’à 10 000 dollars des opportunistes et des criminels de droits commun pour qu’ils affirment ici et là, interrogés par des journalistes, le fait que Zarkaoui existe, faisant ainsi de lui le héros de chaque action terroriste en Irak. »

Où donc est le vrai et où est le mensonge derrière la légende des nouveaux personnages du terrorisme ? Ce personnage est-il fabriqué en totalité dans un laboratoire de la désinformation, ou, partant d’une base réelle, lui a-t-on grossi quelque peu les « traits » ? Quoi qu’il en soit pour ce qui concerne ses débuts dans la lutte islamique, la CIA devrait en savoir beaucoup.

Les médias évitent de rappeler un fait extrêmement important : « Al-Qaïda » est née en 1987, dans les camps islamistes du Pakistan comme mouvance soutenue par la CIA et l’ISI (service de contre espionnage de l’armée pakistanaise) qui luttait en Afghanistan contre l’occupant soviétique. C’est pendant cette période que la CIA recrute ben Laden. Lui, comme le jeune Zarkaoui, servaient les intérêts des États-Unis contre l’ennemi de l’époque, l’Union soviétique. Ce fait a été même reconnu par l’ancien secrétaire d’État Colin Powell, le 5 février 2003 dans sa présentation des faits irakiens devant le Conseil de sécurité. Il existe une très riche documentation, systématiquement ignorée des grands quotidiens et des chaînes de télévisions, quant à l’aide et au soutien accordé par la CIA durant ces années à « Al-Qaïda ». Des personnages politiques de première grandeur comme Colin Powell et Richard Armitage se sont alors directement impliqués afin de canaliser les efforts des insurgés islamistes en Afghanistan. De ce fait, il faut conclure que tant Ossama ben Laden qu’Abou Moussab al-Zarkaoui ont été de pures « créations » de la CIA.

Un nouvel argument se fait jour présentement chez les néo-conservateurs, à savoir qu’Al-Zarkaoui serait financé par l’Iran ! C’est pourquoi on insiste sur le fait que ce pays serait dès lors placé par Washington sur la liste des pays de l’« Axe du Mal ». Ainsi l’« époque d’Al-Zarkaoui » ne semble pas prête à s’achever. Il se pourrait donc que le terroriste-fantôme soit utilisé aussi contre l’Iran.