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Bal tragique au PCF : mort de la candidature unitaire

21 décembre 2006, 22:03

L’important, pour la secrétaire nationale du PCF, c’est de trouver « une solution pour que la gauche gagne et réussisse » et de « rendre possible le très large rassemblement politique qui peut changer la donne à gauche, battre la droite et ouvrir en 2007 pour notre peuple une nouvelle période de progrès social et démocratique ». On peut même penser que, dans un « très large rassemblement populaire », il doit y avoir la place pour quelques dirigeants de l���UDF...

Le décor est donc planté. On dirait même que, dans une stratégie globale de captation de militants et d’électeurs, les démarches de Marie-George Buffet, Ségolène Royal et Dominique Voynet ressemblent étrangement à un partage de tâches et de rôles en vue d’une opération politique ultérieure. Peu importent les divergences politiques affichées, ou les hypothétiques rivalités personnelles. En l’occurrence, on peut raisonnablement penser à une alliance d’intérêt jugée incontournable par la coupole du PCF.

Des procès d’intention, des phrases extrapolées ? Honnêtement, je ne le crois pas.

Dans un entretien publié par L’Humanité le 23 novembre, la dirigeante du Parti communiste revient à la charge : « Si je disais à l’une ou l’un de ces salariés rencontrés dimanche, si je disais aux familles en attente d’un logement que notre rassemblement n’aspire qu’à témoigner du bien-fondé de nos propositions ou à faire émerger une union de la gauche de la gauche, elles diraient : " Dans quel monde vit-elle ? Ne voit-elle pas l’urgence de battre la droite ? " Notre rassemblement doit clairement viser une majorité populaire pour constituer un gouvernement. Ne mettons donc aucune frontière ! ». Notamment, à « des hommes et des femmes de gauche » [qui] « ne se retrouvent pas dans le terme "antilibéral" ». Le seul objectif sensé est donc de « battre la droite » et de « ne pas laisser les clés de la République à Nicolas Sarkozy ». On ne peut pas être plus clair.

Evidemment, une telle politique d’alliances ne peut pas ne pas générer de laissés-pour-compte. Les silences « au bon moment » en témoignent déjà. L’axe Royal-Buffet-Voynet, qu’on semble bien nous préparer, augure, malgré toute la phraséologie pré-électorale, une « gauche musclée » avec une politique sociale « dure ». De 1997 à 2002, Lionel Jospin n’a guère respecté ses promesses électorales et a sorti de son chapeau de nombreuses mauvaises suprises. Ce sont les mêmes à présent, et il faut s’attendre aux mêmes pratiques. Excluant donc, dans la réalité, un certain nombre de compromis et d’ouvertures. José Bové ne s’y est pas trompé lorsque, le 23 novembre, il a adressé aux collectifs « pour des candidatures unitaires de la gauche antilibérale » une lettre retirant sa proposition de candidature présidentielle. Un communiqué aussitôt qualifié de « signal d’alarme » par des membres de ces collectifs.

Mais pouvait-on sérieusement espérer, par exemple, qu’un milieu politique ayant gouverné en 1997-2002 aide José Bové à accéder à des responsabilités d’une certaine importance ? Ce serait oublier un peu vite que le gouvernement Jospin était très favorable aux OGM. Qu’en 2001, des poursuites engagées par le Parquet et par un organisme de recherche public, le CIRAD, ont abouti à la condamnation de l’alors dirigeant de la Confédération paysanne, ainsi que d’autres militants, à de lourdes peines d’emprisonnement. Ni le monde politique ni les institutions n’aiment se déjuger sur des questions aussi graves.

En réalité, des organisations comme le PCF ou les Verts, voire la « gauche socialiste », s’étaient rapprochées d’une certaine « extrême gauche » après la débâcle électorale de 2002. Suite logique d’un processus amorcé dès 1998-1989, lorsque la politique du gouvernement de « gauche plurielle » a commencé à susciter un mécontentement croissant, et qu’il est devenu impératif de « ne pas perdre de vue » les militants qui prenaient leurs distances. La volonté de récupération avait toujours été évidente. Mais avec la mise en orbite supermédiatisée de Ségolène Royal, les intérêts de carrière des appareils de ces partis pointent à nouveau vers une alliance sans fissure avec la direction du Parti socialiste afin de pouvoir accéder à ministères et administrations, de bénéficier de cette alliance lors des élections législatives et par la suite... Ce qu’un article d’Indymédia a appelé le buffet royal. Il ne pouvait pas en être autrement. Les tondus seront, comme d’habitude, les citoyens confrontés au « choix » entre une énième alternance, dont au fond ils n’attendent plus rien, et la continuité d’une majorité, dont la politique les a également laminés.

Enfin, à l’égard des empêcheurs de tourner en rond dans cette démocratie-fiction, le bunker des cinq cents signatures risque de s’avérer un excellent cordon sanitaire. Les élections ne sont tout de même pas faites pour que les citoyens puissent exprimer ce qu’ils pensent vraiment...

MILLAU