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Le Parti communiste va-t-il disparaître ?

2 mai 2007, 04:23

« Le régime cubain ne tient que parce que Castro est encore vivant... Castro mort, je ne donne pas 6 mois au système avant qu’il ne s’écroule et revienne au capitalisme... comme l’URSS, comme la Chine. Je ne m’en félicite pas mais c’est ainsi... tu vis sur un mythe en sursis. »
Rémi la Garonne

Quand, en janvier 1990, on a vu débarquer à La Havane toute une flopée de journalistes venus assister aux premières loges à l’effondrement du « castrisme », nous qui étions sur place et qui savions que rien n’allait se passer, nous avons pris ça à la rigolade : bah, les pauvres, ce n’est pas de leur faute, ils ne sont pas en courant.

Quand, fin 1991, après l’implosion de l’URSS, on nous a annoncé : cette fois-ci, ça y est, sans les milliards de roubles du « grand frère soviétique », le « castrisme », c’est foutu, on a continué de rigoler en se disant : tiens, ils ont au moins de la suite dans les idées.

Quand Cuba a sombré dans le gouffre en se retrouvant seule au monde et que les augures nous ont dit : enfin, ça ne va plus durer longtemps, ici, on a serré les dents et la ceinture, et on a continué à s’accrocher.

Quand la Maison-Blanche a entériné la loi Torricelli en 1992 puis la loi Helms-Burton en 1996 (avec un programme de transition à la démocratie à la clef), alors que nous étions toujours au fond du gouffre, et qu’on nous a dit : arrêtez donc votre baroud d’honneur, les carottes sont cuites, on a continué de serrer les dents même s’il n’y avait toujours pas beaucoup de carottes à y laisser passer et on a continué de s’accrocher.

Mais nous prenions les avis de pythonisses de moins en moins à la rigolade, même si on continuait de les mettre sur le compte de la méconnaissance des faits…

Mais que, dix-sept ans après, on continue de nous seriner des augures à la Remi la Garonne, alors là, vraiment, on n’a plus du tout envie de rigoler, parce que ce n’est plus de l’ignorance, c’est de la rage ! Les idées reçues ont décidément la vie dure, même à contre poil des faits les plus têtus…

Ceci dit, vous auriez tout intérêt, ceux d’entre vous qui vous abreuvez de révolutions jamais faites ou toujours faites au coin du feu, de révolutions idéales, de révolutions toujours remises au surlendemain, à chercher des leçons dans celles qui existent vraiment et se font les pieds dans la gadoue et les mains dans le cambouis, mais la tête dans les étoiles, à apprendre, par exemple, de la Révolution cubaine comment on peut passer outre aux conditions objectives en créant les conditions subjectives, comment on peut sortir des manuels pour implanter de nouvelles méthodes de lutte, comment on peut œuvrer à l’unité de composantes révolutionnaires ne partageant pas les mêmes vues, comment on peut finir par unir dans un seul parti communiste des mouvements dont une bonne partie des membres étaient « naturellement » anticommunistes, comment, pour faire cette unité, il faut savoir écouter l’autre, comment on parvient à mobiliser les gens et finalement tout un peuple lui aussi « naturellement » anticommuniste parce que vivant dans une néocolonie étasunienne autour des idées du socialisme, comment on parvient à jouer si fin que l’adversaire est toujours en retard d’un pion, etc., etc. J’en passe, parce que les exemples fourmillent. Que la Révolution cubaine continue d’exister cinquante ans après à quelques encablures du monstre impérial prouve bien qu’elle a su y faire.

Quant aux leçons à ne pas suivre (et qui sont bien entendu bonnes à apprendre), je ne m’appesantis pas là-dessus, parce que celles-là, vous et les vôtres ne cessez de les mettre au premier plan.

Quoiqu’il en soit, un peu moins d’arrogance prétentieuse et désinformée ne serait pas plus mal ! Surtout quand on voit le panorama français…

Jacques-François Bonaldi (La Havane)
jadorise@ifrance.com