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suez/gaz de france : la cgt inquiète !

Publie le lundi 22 mai 2006 par Open-Publishing

Le gouvernement doit transmettre demain au Conseil d’Etat son projet de loi sur la privatisation du gazier français. L’Etat compte garder la minorité de blocage dans le futur ensemble Suez-GDF, ainsi qu’une « golden share ». Mais, les syndicats restent prudents, la législation européenne n’étant en effet guère favorable à ces actions préférentielles.

Bercy vient de mettre la dernière main au projet de loi sur la privatisation de GDF, un texte dont le vote est indispensable avant la fusion. Il devrait être transmis demain au Conseil d’Etat. Il s’agit d’une étape clef. Elle marque la fin de la première phase de concertation avec les syndicats et de préparation politique de ce dossier très sensible. Le gouvernement, qui a déjà tenu plusieurs dizaines de réunions avec les partenaires sociaux sur le sujet, estime désormais avoir suffisamment déminé le terrain pour passer à la suite.

Après son examen par le Conseil d’Etat, le texte sera transmis au Parlement, qui devrait s’en saisir « avant le début de l’automne », a indiqué Thierry Breton. « Maintenant, on va rentrer dans le temps parlementaire, le temps des débats », a dit Breton. D’ici là, le gouvernement va continuer à faire oeuvre de pédagogie pour créer un consensus. Une mission de concertation liée spécifiquement au projet de loi est ainsi confiée au ministre délégué à l’Industrie, Loos, associé au député UMP JC Lenoir, qui devrait être nommé rapporteur du texte à l’Assemblée.
Pour tenter d’apaiser les inquiétudes que fait naître la future privatisation de Gaz de France, notamment à gauche, Thierry Breton insiste sur deux points. D’une part , l’Etat conservera « plus du tiers du capital du futur groupe », assure le ministre. Pas question, donc, de tomber en dessous de la minorité déblocage, comme cela avait pu être envisagé ces dernières semaines. Thierry Breton n’a cependant pas précisé si ce seuil de 34 % serait ou non inscrit dans la future loi. Une incertitude qui suscite les plus grandes craintes de la CGT, le principal syndicat chez GDF. « Si ce verrou des 34 % ne figure pas dans la loi, il sera plus difficile de résister à la pression des actionnaires de Suez, qui, lors des assemblées générales de fusion, voudront obtenir des parités plus favorables », critique Jean-Pierre Sotura, le responsable du dossier à la fédération CGT des mines et de l’énergie.
Droit de veto
Deuxième « garantie » apportée par Thierry Breton : selon le projet de loi, l’Etat bénéficiera d’une action spécifique, une « golden share » lui donnant un droit de veto sur certaines décisions. En cause : « la protection des enjeux stratégiques qui sont vraiment liés au réseau de distribution du gaz, aux terminaux méthaniers, aux stocks stratégiques », a-t-il détaillé. Grâce à cette action, la puissance publique garderait une sorte de contrôle ultime de certaines « entités parfaitement détourées et définies », selon les propos du ministre. Le réseau de gazoducs, par exemple.

Les syndicats, cependant, restent sceptiques. Car la législation européenne n’est guère favorable aux « golden shares », ces actions préférentielles que les Etats avaient l’habitude de se garder dans les sociétés fraîchement privatisées. Sous la pression de la Cour européenne de justice, la France a ainsi dû renoncer en 2002 à celle qu’elle détenait dans Total (alors TotalFinaElf).
Selon Bercy, le dispositif envisagé est similaire à un autre déjà validé par la Cour de justice, et Thierry Breton a affirmé mener un « dialogue très étroit » avec Bruxelles sur la question. Mais « l’histoire montre que ce genre de dispositions ne constitue pas une garantie de long terme, estime-t-on à la CGT. La réalité, c’est que lorsqu’on perd la majorité du capital, on tend à perdre le pouvoir. »
La CGT s’affirme plus mobilisée que jamais contre le projet. « En outre, nous n’avons toujours pas obtenu de réponse écrite aux 71 questions posées dans le cadre des discussions avec Bercy », relève Jean-Pierre Sotura. Pour le gouvernement et les dirigeants des deux groupes, l’affaire paraît donc encore loin d’être bouclée.

ET pour nous ?
Ouverture du marché du gaz et de l’électricité
Le projet de loi visant à privatiser Gaz de France devrait aussi être l’occasion de procéder à la dernière étape de l’ouverture du marché du gaz et de l’électricité.
Transposant la législation européenne en droit français, le texte devrait fixer au 1er juillet 2007 la date de l’ouverture totale du marché à la concurrence. Après les grands industriels, puis les PME, les particuliers pourront ainsi mettre en concurrence les différents fournisseurs.
Mais le gouvernement veut aussi leur laisser la possibilité de rester clients d’EDF-GDF et de profiter du tarif régulé. Une option qui serait inscrite dans le texte.