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objet : [zpajol] visite domiciliaire à rennes
Avant le chant du coq
Lundi 10 décembre. 7h15. Quelqu’un frappe à la porte fenêtre avec 
violence. Une fois, plusieurs coups. J’entends des bruits de pas sur le 
gravier devant la maison. Des lampes torches projettent leurs faisceaux 
fugaces. On frappe encore. Avec insistance.
Je ne travaille pas le lundi matin. Les bruits répétés m’arrachent 
progressivement au sommeil. Joëlle, ma compagne, sujette à insomnie, a 
changé de chambre pour écouter la radio.
Je descends dans la salle au rez-de-chaussée. Dehors, la nuit. La 
campagne déserte serait calme sans cette troupe sombre que maintenant je 
perçois aux abords. On frappe à nouveau. J’ouvre. Ils sont là. 
Immobiles, tels des géants dans leurs uniformes sombres. Un bref silence 
puis : « on peut entrer ? » j’hésite, leur demande de quel droit. Celui 
qui semble être le chef me tend un carton orange au bas duquel le 
Procureur de la République a apposé sa signature. Je pense donc que je 
ne peux pas m’opposer à leur venue. « Brigade de Gendarmerie de 
Mordelles, Visite Domiciliaire : est-ce que Monsieur E. est ici ? » Je 
ne connais pas Monsieur E. Joëlle descend à son tour. Elle connait ce 
Monsieur mais il n’est pas là. Il n’est jamais venu ici. A la demande 
d’un avocat elle l’avait domicilié pour recevoir le courrier afférant 
aux démarches effectuées à l’époque. Il n’était pas à ce moment en 
situation irrégulière.
Ils sont allés partout, scrutant chaque pièce, exigeant d’être 
accompagnés par l’un de nous. Ils ont soulevé les couettes, pris avec 
suspicion une montre d’enfant qui trainait par terre. A chaque pièce 
visitée, ils prenaient des notes. Les couvertures et les draps étaient 
palpés sans doute pour y sentir la chaleur laissée par l’homme en fuite.
Ils ont inspecté les abords de la maison. Le garage, le hangar et même, 
tout au fond du terrain, la cabane où je range les aliments pour les 
volailles. Ils ont ignoré la cabane à outils dans le jardin la nuit la 
dissimulait, on ne peut pas le leur reprocher ce manquement.
En les raccompagnant, je me suis aperçu que trois gendarme montaient la 
garde à l’extérieur, sans doute pour arrêter la fuite du nègre marron 
échappé du fantasme colonial d’une plantation imaginaire.
Ils étaient venus dans trois véhicules. Deux voitures et un petit 
fourgon. Ils étaient peut-être au nombre de dix. A aucun moment, je n’ai 
été en mesure de compter avec précision.
Au moment de leur départ, trois quarts d’heures plus tard, le chef, 
l’Adjudant S. m’a remis une convocation pour que je me présente avec 
Joëlle à la Brigade territoriale Boulevard Clémenceau à Rennes.
Nous y étions à neuf heures le lendemain . J’ai été interrogé par le 
même Adjudant S. 35 mn, Joëlle une heure et quinze minutes. Moi, 
j’ignorais tout, précisant que ma femme en savait sans doute plus. Le 
ton était sec, voire agressif. Il avait préparé la déposition et 
commençait : « je déclare que.. » je l’ai interrompu : « déclarer c’est 
beaucoup dire car je ne connais rien à la situation » il s’est mis en 
colère, m’accusant de mauvaise foi et disant qu’il se moquait de ce que 
je pouvais penser de la gendarmerie.
Ensuite : » après avoir exigé que l’on me présente un document 
autorisant la visite domiciliaire j’ai invité les gendarmes à entrer » 
Je ne vous ai jamais invités à entre ai-je précisé. Il a accepté de 
retirer le mot.
Questions : comment rencontrez-vous des ressortissants étrangers ? Vous 
arrive-t-il d’en héberger ? Pas de réponse à la première, non à la 
deuxième question.
Ca l’a énervé que je n’aie pas pris mes lunettes. J’ai pu lire malgré 
tout, j’ai corrigé quelques fautes et j’ai signé.
Pour joëlle ça a pris plus de temps. Elle a raconté dans quelles 
circonstances elle avait domicilié Monsieur E. Elle a exigé que 
certaines formulations soient revues.
J’ai attendant dans le froid que Joëlle sorte . Je ne supportais pas 
d’attendre dans le confinement d’une salle d’attente exigüe et vétuste. 
Quand elle est sortie, l’Adjudant S. m’a appelé. Il voulait que je signe 
un document relatif à la visite domiciliaire. Joëlle avait refusé, j’ai 
fait de même. Nous ne l’avions même pas lu.
Cette mobilisation de la gendarmerie montre l’ampleur des moyens mis en 
œuvre dans le chasse aux étrangers. Mais pas seulement. C’est aussi la 
manifestation d’une volonté d’intimider les soutiens aux sans papiers. 
La police et la gendarmerie n’ignorent rien de notre engagement. Notre 
participation aux manifestations se fait à visage découvert. Nos visites 
aux « retenus » sont enregistrées par l’administration du CRA ainsi que 
notre exigence parfois véhémente que les droits des personnes soient 
respectés. La police n’ignore pas davantage que les moyens que nous 
utilisons respectent la légalité. Pensent-ils nous dissuader ? est-ce 
une punition qui nous est infligée pour avoir mis sur la place publique 
des pratiques qui , par leur inhumanité, choquent un bon nombre de 
citoyens ? A-t-on voulu là nous montrer la toute-puissance des forces de 
l’ordre ? La question de la légalité de l’opération s’est en effet posée 
 : l’article 76 du code de procédure pénale stipule que « /les 
perquisitions, visites domiciliaires et saisies de pièces à conviction 
ne peuvent être effectuées sans l’assentiment de la personne chez 
laquelle l’opération a lieu./
/Cet assentiment doit faire l’objet d’une déclaration écrite de la main 
de l’intéressé… »/
Mais il est précisé plus loin « /Si les nécessités de l’enquête relative 
à un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée 
égale ou supérieure à cinq ans l’exigent, le juge des libertés et de la 
détention du tribunal de grande instance peut, à la requête du Procureur 
de la République, décider, par une décision écrite et motivée, que les 
opérations prévues au présent article seront effectuées sans 
l’assentiment de la personne chez qui elles ont lieu » /Nous sommes bien 
dans ce cas de figure car l’aide au séjour irrégulier, ce qui aurait été 
le délit susceptible d’être constaté si le fuyard avait été hébergé chez 
nous, est en effet passible de cinq ans d’emprisonnement ( à quoi 
peuvent s’ajouter 30 000 euros d’amende, Article L622-1 du Code de 
l’entrée et du séjour des étrangers et demandeurs d’asile, CESEDA) . 
Bien entendu je n’ai vu trace d’une décision d’une décision écrite et 
motivée « /par référence aux éléments de fait et de droit justifiant que 
ces opérations sont nécessaires/ » mais je crains que quelque tour de 
magie policière ne fasse surgir en cas de contestation le document ad hoc.
Alain, RESF35.
ZPAJOL liste sur les mouvements de sans papiers





Messages
1. visite domiciliaire à rennes , 20 décembre 2007, 13:30
C’est scandaleux !
Mais ne lachons rien et continuons notre combat pour que tout le monde ait des papiers !