Accueil > Berlusconi du soir, Staline espoir

de Utopico traduit de l’italien par karl&rosa
Une année comme 2005, peut-être la pire de l’âge berlusconien, ne pouvait que s’achever par une conférence de presse où le Petit Homme plastifié d’Arcore a donné le mieux de son répertoire de cabotin prêté à la politique. Ou, mieux, de guignol de variété qui s’est emparé de la politique italienne. Celui qui se fait appeler Président du Conseil s’est présenté devant les représentants de la presse, qu’il considère comme des communistes et des défaitistes, tiré à quatre épingles au sens propre du mot.
Après les fatigues et l’exhibition dans le petit salon de la sucette Bruno Vespa, le Cavalier Inexistant a montré, orgueilleux et hautain, l’œuvre de restauration réalisée dans la nuit. La plaque au titane positionnée sur la calotte du crâne, représentant un simulacre de chevelure, les globes oculaires affreusement tirés, des kilos de fard appliqués par une asphalteuse sur le visage et sur les joues qui tombent.
Le Bonimenteur a commencé son exposition logorrhéique des résultats, à ses dires, du Gouvernement qu’il préside. Les questions des journalistes n’étaient, dans la plupart des cas, que des suggestions permettant au Divulgateur d’étaler sa grandiloquence. Une conférence de presse plate et monocorde, un des nombreux monologues vides et baroques que Berlusconi a déversés, pendant toutes ces années, des écrans de télé, des journaux et des affiches électorales.
Mais dans la somnolence générale, qui n’était que de la résistance passive en vue du "buffet qui allait suivre" il y eut un réchauffement soudain quand Berlusconi a répondu à sa manière à une journaliste de L’Unità, le quotidien que le Cavalier Banane définit "le quotidien de la haine" et qu’il indique comme l’un de ses ennemis les plus féroces.
Berlusconi, en bombant le thorax et les joues, au risque de faire crouler son lifting, déjà précaire, s’est saisi d’une vielle première page de L’Unità, de 1953, où on donnait la nouvelle de la mort de Staline et, en l’agitant, a déchaîne sa haine en s’adressant a la journaliste de L’Unità : "Vous devriez avoir honte ! Vous vous déclarez complice de cent millions de meurtres, je crois qu’il n’y a aucune possibilité d’un changement de votre attitude préjudiciable et je ne viendrai donc pas chez vous pour essayer de vous convaincre : c’est impossible".
Les commentaires de ces derniers jours ont mis en évidence plusieurs choses. La première, comme cela a été dit ici, dans le site de Bellaciao, est que la mort de Staline eut des déclarations, même de regret pour sa disparition, de la part de nombre de représentants politiques nationaux et étrangers, dont certains, comme De Gasperi, sont ceux que Berlusconi, indignement, compte au nombre de ses inspirateurs politiques. La deuxième est que, comme l’a écrit Beppe Grillo, les personnes âgées ont besoin dans cette période des fêtes de se sentir considérées et même de trouver quelqu’un qui soit disposé à les écouter.
La troisième est que Berlusconi est arrivé au bout de son répertoire des rêves et des illusions et que sa campagne électorale sera caractérisée par ce qui fut l’affrontement de 1948, les laïcs contre les cathos, l’Eglise contre l’État. Et là, il a un allié comme Ratzinger et un ambassadeur au Vatican comme Marcello Dell’Utri, un affilié à l’Opus Dei.
Ce que nous voudrions souligner est le triste et dangereux déclin du Petit Homme d’Arcore. Lui, qui fut l’ami et le compère de Bettino Craxi dans un Milan rampant. Lui, qui apprit les rudiments de la libre maçonnerie du Grand Maître Licio Gelli, lui, qui a acheté presque toute l’Italie grâce aux lois faites pas les amis des amis et par son Gouvernement embaumé, lui, habitué à avoir et a gagner, a compris aujourd’hui qu’il était seul. Irrémédiablement seul. Avec des alliés comme Follini auparavant et Casini maintenant, qui ne perdent pas une occasion de le poignarder dans le dos, avec Fini qui a compris que le bateau coule et qu’il est préférable de le quitter et avec cette compagnie de saltimbanques qu’est la Ligue de Umberto Bossi, embaumé lui aussi.
C’est pourquoi Berlusconi essaie de détourner l’attention des Italiotes vidéo dépendants vers d’autres thèmes folkloriques comme celui d’agiter une photo de Staline et de craindre le danger communiste aux portes. Il ne répond pas, le pauvre Silvio, sur l’échec de sa politique économique, de son aventure va-t-en-guerre, sur la démolition de l’État, sur les lois ad personam, mais il continue à imaginer et à proposer une Italie qui n’existe pas et qui, heureusement pour nous, n’a jamais existé.
Il lui reste une seule possibilité. S’il n’arrive pas, aux prochaines élections, à conquérir le fauteuil de Président de la République, il poudra s’adresser au Vatican. Un autel de bienheureux ou de saint, on ne le refuse à personne, enfin ! Mais les bienheureux et les saints ne sont proclamés qu’après leur décès... et nous imaginons déjà la première page du quotidien La Padania : "Berlusconi est mort. Qu’on le fasse saint tout de suite !"