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Bologne : un désastre cherché

Publie le mardi 11 janvier 2005 par Open-Publishing


de GUGLIELMO RAGOZZINO

Quelques désastres sont vraiment prévisibles. Par exemple le choc entre deux
trains qui s’est produit à Crevalcore, prés de Bologne. Peut-être les enquêtes
diront-elles quelle en a été la cause ultime, mais à coup sûr les trains couraient
dans un brouillard épais sur une voie unique, le long d’une ligne très fréquentée,
partagée par des convois locaux, interrégionaux, internationaux et de fret et
disposant donc des timing très serrés et des horaires à respecter. Poutrelles
de fer contre banlieusards. Le matériel - locomotives, voitures, signaux, rails,
aiguillages - était usé. Autrement dit, hier, toutes les causes des accidents
qui en cinquante ans ont coûté la vie à trois cents personnes sur les rails italiens étaient
réunies. Chaque fois, devant le désastre, on avait promis qu’on aurait changé,
innové, transformé. Au contraire, rien.

Le brouillard, dans la plaine du Po, en janvier. Quelle nouveauté, pensez donc ! En cas de brouillard, les chemins de fer sûrs ont un système de freinage arrêt obligé pour les trains qui pour quelque raison que ce soit négligent les sémaphores. C’est un système vérifié, seulement un peu coûteux. Mais comment faire pour investir dans les Grandes gares et en même temps dans les sémaphores et les senseurs le long des rails ? Que diront les actionnaires des trois ou quatre sociétés ferroviaires publiques ? Toutes motivées par l’avis des financiers et par l’hypothèse de débarquer en bourse ? Qui va préférer des trains sûrs à des bilans généreux ?

Le cas des trains anglais en est un exemple bien mesquin. La réduction du personnel, l’investissement dans les méga gares, désormais considérées comme des centres d’affaires et de commerce de luxe, en négligeant la sécurité des voyageurs et l’efficacité des convois ; en un seul mot, la privatisation, a amené à la spéculation et aux deuils.

Et enfin, la voie unique sur une ligne internationale est un paradoxe. Quand, en juillet 2002, un train dérailla à Rometta Marea, en Sicile, les autorités ferroviaires et étatiques dirent que le problème des voies uniques était résiduel et en train d’être résolu. Et cependant, plutôt que le résoudre sérieusement, on a continué à investir le peu d’argent disponible dans la grande capacité, c’est-à-dire la grande vitesse, mélangée, à cause de la grande démagogie, aux trains de marchandises : en rêvant toujours des profits impossibles. Tout comme auparavant, tout comme toujours.

Certains désastres sont vraiment prévisibles. Mais seulement le dire ne sert à rien.

Traduit de l’italien par Karl & Rosa de Bellaciao

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