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DROGUE, ECONOMIE SOUTERRAINE ET SOCIETE PARALLELE

Publie le dimanche 3 juillet 2005 par Open-Publishing
5 commentaires

de Patrick MIGNARD

Il ne s’agit pas de porter un jugement sur cette activité (chacune et chacun sera à même de le faire en connaissance de cause), mais au-delà des lieux communs et anathèmes faciles, de comprendre le « pourquoi » d’une telle situation.

« Economie parallèle », « trafic »... les qualificatifs ne manquent pas pour la nommer, par contre les statistiques manquent pour l’évaluer... et pour cause. Elle est une réalité de plus en plus prégnante et en particulier dans les cités dites « sensibles », et porte en deçà de la drogue, sur des biens de consommation courante. Elle est devenu un véritable moyen de vie pour certains des exclus de nos cités.

La chasse à l’économie souterraine n’est pas aussi systématique qu’on pourrait le supposer. En effet, entre l’entorse à la norme et le maintien de la « paix sociale », l’Etat n’hésite pas. A-t-il d’ailleurs le choix ?

LE LIEN SOCIAL EN DECOMPOSITION

Nous savons que le fondement même du système marchand en matière de constitution du lien social réside dans le fait de disposer, et d’intégrer la force de travail, donnant ainsi les moyens au salarié d’exister économiquement et socialement (voir les articles « LE TRAVAIL EN QUESTION »).

Ce mécanisme social n’est cependant pas automatique... il est en effet soumis à la règle du marché de cette même force de travail. Le statut marchandise de celle-ci fait qu’elle est employée, non pas du fait de son existence, mais en fonction des besoins de la production. Autrement dit, c’est le marché, et le calcul économique de l’entreprise qui détermine l’existence sociale ou non de l’individu.

Tant que le système a eu un besoin massif de force de travail pour faire fonctionner son appareil de production, il arrivait à créer, de manière contradictoire, mais à créer tout de même, et à stabiliser le « lien social » (plein emploi), quoique des périodes de crises pouvaient rompre cette « harmonie » (chômage conjoncturel). Cette situation a été celle des pays industriellement développés jusqu’aux années 70 du 20e siècle, c’est-à-dire jusqu’à la fin de l’époque de leur monopole de domination économique.

La mondialisation marchande a mis fin à cette situation en redistribuant les marchés (voir l’article : « AUX LIMITES DU SYSTEME MARCHAND ») ; le travail, mais aussi le progrès technique qui a permis de remplacer avantageusement une force de travail de plus en plus chère et exigeante (productivité croissante, recherche de la rentabilité et donc tendance au chômage structurel...).

Une telle évolution ne pouvait aboutir qu’à un processus d’exclusion économique et par voie de conséquence, sociale.

Les premières et principales victimes, ont été, et sont encore aujourd’hui, celles et ceux qui ont vu leurs postes, soit transformés par la robotisation, soit leur entreprise carrément disparaître, victime de la concurrence internationale.

Les « cités ouvrières » des années de l’ « âge d’or de la croissance » sont peu à peu devenues des cités de concentration d’exclus. Les travailleurs immigrés et / ou d’origine immigrée, sans avoir été les seuls à être touchés par l’exclusion ont cependant payé un lourd tribu à cette évolution... car, étant essentiellement non qualifiés, donc rapidement et facilement remplaçables par la robotisation. Et les travailleurs sous payés des nouveaux pays industriels.

Les « cités » sont donc logiquement devenues des lieux dans lesquels, le lien social, la reconnaissance sociale, ont été le plus fragilisés.

UNE RECOMPOSITION PROBLEMATIQUE DU LIEN SOCIAL

Toute collectivité humaine a besoin de produire et d’assurer la reproduction du lien social, c’est-à-dire d’une relation normalisée qui assure l’existence et la reconnaissance sociales de tous ses membres.

Le système marchand est désormais incapable d’assurer cette tâche, du moins en ce qui concerne une forte minorité de la population (voir l’article « DECADENCE »).

Ces populations sont socialement (au sens du lien social) abandonnées à leur sort, même si elles bénéficient, dans une certaine mesure, d’une aide sociale. Notons que cette aide sociale n’est pas, et n’est d’ailleurs pas perçue, comme constitutive du lien social (voir l’article « TRAVAIL SOCIAL, MISSION IMPOSSIBLE »). L’aide sociale agit sur les conséquences, pas sur la cause de la destruction de ce lien.

L’alternative qui s’impose à des populations est donc clair : soit dépérir économiquement et socialement, soit créer du lien social en organisant une « activité économique » et/ou à la marge du système qui les exclu.

Dans un système aussi développé et normalisé que le notre, trouver sa place, alors que l’on est exclu, n’est pas facile. En l’absence d’un vision et d’une conscience politique claires, c’est donc dans les failles de celui-ci que réside la/les « solutions ».

L’ « économie » qui s’installe est donc, non officielle, hors norme et hors législation, « souterraine » par opposition à celle qui s’exerce au « grand jour » et qui est soit officielle, soit politiquement revendiquée (structures alternatives).

La production n’existant pas, à proprement parler, dans cette logique, celle-ci vient du détournement et donne lieu à ce que l’on appelle des « trafics ». La source de l’échange étant illégal, tout le reste le devient : trafic, recel, détention illégale,. Les participants deviennent des « complices » (et non des associés), l’organisation, une « bande de malfaiteurs », une « maffia » (et non une entreprise).

Si l’on ajoute à cela le fait que l’exclusion a frappé, et frappe, des communautés immigrés (les plus vulnérables dans l’appareil de production), on en arrive logiquement au stéréotype largement exploité par le racisme des « bandes ethniques » foncièrement délinquantes,... même celles et ceux de cette population en situation légale sont suspects et sont « mis dans le même sac ». ... les fantasmes racistes font le reste.

En comprenant bien le mécanisme de l’exclusion on se rend compte que ce n’est pas un communauté qui s’exclue, mais que c’est son statut économique qui l’exclu.

La solution n’est évidemment pas dans la répression. Celle-ci peut, certes, dans une certaine mesure, contenir les dérives, mais en aucun cas apporter une solution au problème posé.

La prévention a elle aussi ses limites. Elle permet de prévoir, de tenter d’éviter les dérives. Elle permet d’organiser des structures dites de prévention, d’insertion. En aucun cas elle ne résoud le problème de fond, en aucun cas elle ne peut remplacer le système dans sa capacité de créer du lien social.

Le problème, et sa solution, est essentiellement économique et social. Ce ne sont pas des individus et/ou des communautés qui font problème, ce qui fait problème c’est la manière dont le système marchand traite, considère l’individu et ce, que ce soit à l’échelle de la ville ou à celle de la planète.

ILLEGALITE ET IDENTITE

Une telle situation peut-être non seulement assumée, par celles et ceux qui en sont victimes, mais aussi revendiquée. Elle devient un moyen de survit, mais aussi de reconnaissance au sein du groupe et une manière d’identification. L’attitude de délinquance n’est plus perçue comme une déviation, mais au contraire comme une attitude de défi, un astucieux moyen de débrouille au regard d’un système qui exclu, qui nie l’individu. Une telle attitude est parfaitement incompréhensible pour celles et ceux qui ne sont pas dans cette situation, le citoyen moyen, « normalement » inséré. Paradoxalement, la répression, qui ne manque pas de s’abattre sur ces catégories sociales déviantes, dévient un référent socioculturel, une manière de souder les membres de la communauté, une manière d’accroître la différenciation, la différence, d’avec le reste de la société perçue comme hostile.

L’appel à la répression devient général et est largement partagé par les victimes réelles et potentielles de cette délinquance. Les minoritaires (militants politiques, associatifs, travailleurs sociaux,...), qui le sont effectivement, qui s’y opposent et la dénoncent passent pour des irresponsables et des rêveurs.

L’incompréhension entre victimes sociales du système et le reste de la population se double d’une incompréhension entre ceux qui appellent à la répression et celles et ceux qui s’y opposent. L’incompréhension est générale ce qui bloque toute tentative de dépassement de la situation. Seul le système « tire les marrons du feu » en stabilisant la situation, jouant l’arbitre neutre (ce qu’il n’est pas) en utilisant la répression et/ou la prévention en fonction des circonstances et des enjeux politiques électoraux.... Jouant en cela sur les peurs et les fantasmes.

INTERVENIR OU LAISSER FAIRE ?

C’est le dilemme devant lequel se trouve l’Etat. En principe il ne peut se laisser se dérouler une activité qui se situe en dehors de la norme... il y va dans le meilleur des cas de sa crédibilité. Tout trafic, toute activité non socialement organisée et autorisée est illicite. L’Etat se doit d’intervenir.

La réponse apportée n’est cependant pas aussi systématique.

L’économie parallèle a en effe

Messages

  • bon article. je rajouterai que j’ai rencontré plus de dealeurs honnêtes que de directeurs de supermarchés honnêtes, et les bonnes gens à qui je dis ça ne me croient jamais. un dealeur, il ne l’est que pour être riche sur le dos de ses potes apres tout non ? eh bien non, pas forcément, c’est surtout des gens qui financent leur conso perso et permettent aux autres de fumer, ou qui ont besoin d’un petit complément de revenu. par contre, les directeurs de supermarchés, c’est toujours le cas, on ne fait ce genre de boulot que pour s’enrichir (ou pour le pouvoir, va savoir).

    • c’est merveilleux,nous vivons dans le meilleur des mondes,les petits dealers sont sympas ,ils pensent aux autres ,Ils financent leur conso perso,c’est bien entendu,ils permettent aux autres de fumer surtout à ceux qui se détruisent les neurones ou qui ont besoin d’un complément de revenus équivalent à celui d’une profession libérale(10000 € par mois),c’est sympa.
      jc

    • je connais tres peu de vendeurs d’herbes qui sont capables de se payer un loyer et une bagnole en même temps. tu peux dire d’ou tu les sors tes 10000euros par mois ? si tu prend un vendeur qui n’habite pas chez ses parents, c’est quasi impossible qu’il ne puisse vivre que de ça, à moins d’appliquer les méthodes capitalo mafieuses genre intimidation de la concurrence et balançage aux keufs.
      tous les vendeurs que je connais ont un boulot en même temps. à part un, mais il est trop jeune.
      par contre, tu en connais beaucoup des commerciaux légaux qui pensent aux autres ? les directeurs de supermarchés, ces enfoirés, ils font venir la banque alimentaire pour se donner une conscience sociale mais la plupart du temps ils ne donnent RIEN DU TOUT alors que les gens achetent plus pour donner. les vendeurs d’alcool et de tabac, ils font de la pub partout où ils peuvent. les vendeurs de bagnole, laisse moi rire si tu crois qu’ils pensent à l’environnement. jte parle pas des pétroliers ou des politiques.

      et je fais ce que je veux de mes neurones, les vapeurs diesel les niqueraient de toute façon.

    • je suis sûr que tu est sincère quand tu parles des vendeurs d’herbes et tu as sûrement raison pour la plupart de ces gens mais pas pour tous.
      tu l’as très bien dis c’est en appliquant des méthodes capitalo mafieuses genre intimidation que l’on s’enrichit avec la drogue,il y a des bandes organisées dans des cités qui ne font pas dans la générosité.
      quand aux lobbies financiers ,ils manipulent ces populations pour affaiblir les classes populaires.
      c’est classique ,vaut mieux des alcooliques ou des drogués dans la classe ouvrière que des gens sensibilisés aux problèmes de société.
      la came procure peut un bien-être dans l’instant mais il vaut mieux combattre tous ces ultra-libéraux qui vous "mènent par le bout du nez".
      as tu votez non au référendum ?,pas sûr ?

      jc

    • remarque que j’ai parlé d’herbe, pas de came. et je sais également qu’il y en a qui se prennent pour scarface à 15 ans, même chez les fumeurs.
      autre chose, je ne fume pas des joints pour avoir un flash de plaisir. je peux tres bien me sentir bien sans fumer. je fume depuis 6 ans, plutôt quotidiennement, mais quand j’ai du partir 5 mois dans un pays ou c’était strictement impossible d’en trouver j’ai eu aucun mal à arrêter. pour la cloppe c’est pas pareil du tout.
      pour le référendum ça n’a tellement aucun rapport que je preffere ne pas répondre (je connais des fumeurs ouistes comme nonstes).