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L’Europe, pas à pas vers la négation des peuples

Publie le jeudi 2 octobre 2008 par Open-Publishing
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de Michel MENGNEAU

On a tendance souvent à oublier que l’Europe est sous-jacente dans les politiques menées par nos gouvernements… Quelques infos récentes ne seront à priori pas inutiles pour revigorer les mémoires.

Si l’on se souvient, en tant que Président en exercice du Conseil Européen Sarkozy a quelques dossiers en souffrance, dont certains qui lui tiennent à cœur et qu’il aimerait réaliser avant la fin de la présidence française.

Dans l’immédiat il y en a un urgent qui n’était pas prévu, celui de la crise financière. Pour le dépatouiller il a donc été prévu de réunir les "cadors" -et oui, il semblerait que de petit état comme la Lettonie, par exemple, ne serait pas apte à appréhender la situation- afin de se pencher sur le capitalisme défaillant, et surtout l’impératif majeur est de le sauver d’une autodestruction que certains stigmates laissent présager.

Ne nous leurrons pas, les décisions qui émaneront de se mini sommet n’irons probablement pas dans le sens d’une embellie de la condition sociale des plus défavorisés, qui à l’évidence seront plutôt mis à contribution, c’est ce qui leur pend au nez.

On peut relever aussi tant cela parait dérisoire qu’il y a aussi chicane pour surveiller les distorsions de concurrence dans le cas de nationalisation, le tout en surveillant qu’elle soient en conformité avec le pacte de stabilité et de croissance révisé, on croit rêvé à l’heure où c’est le lampiste qui va payer les pots cassés.

Bref il s’agit là de l’imprévu, mais il y en a un dossier récurent c’est l’adoption du Traité de Lisbonne. On sait que Sarkozy met un point d’honneur -disons plutôt qu’il n’a point mis d’honneur en passant outre l’avis du peuple français- à boucler cette affaire avant la fin de sa présidence. Comme ça le démange, il est toujours sur le pont en exhortant les protagonistes afin de faire avancer au plus vite le règlement de l’anomalie qui veut que les Irlandais ne soient pas d’accord avec lui. Dans cet état d’esprit, il a donc reçu (je n’ose pas écrire : convoqué, même si cela y ressemble fort) de nouveau Brian Cowen premier ministre irlandais le 1 octobre pour tenter de débloquer la situation. Sans doute on-t-ils abordé le fait de faire revoter les Irlandais ainsi que l’avait déjà suggéré Sarkozy, mais on sait que cette demande est formulée comme une sorte exutoire intellectuel dans la mesure où il est prévisible que les habitants de la verte Erin vote encore « non ». Aussi, en usant d’une forme de chantage à l’encontre des Irlandais en proposant de se passer d’eux pour réaliser ledit Traité on verrait alors l’opposition juridique de ceux qui n’ont accepté que du bout des lèvres Lisbonne. Même en s’agitant dans tout les sens ainsi qu’il en est coutumier Sarkozy n’a pas tout de suite vu le bout du tunnel, ce qui pour ma part suscite une légère satisfaction quand on sait avec qu’elle décontraction il a fait fi du « non » français. De surcroît, n’oublions pas que sont liés à ce traité le renouvellement de la commission en 2009 ainsi que, et surtout, le vote pour élire les députés européens auxquels il va falloir s’intéresser assez rapidement dans la mesure où ceux-ci pourraient changer un peu la donne au niveau de la représentation citoyenne.

Si la mise en branle du Traité de Lisbonne reste encore en suspend en attente du bon vouloir Irlandais ou de l’arrivée d’une solution plus ou moins boiteuse, il n’en est pas de même du « pacte sur l’émigration et l’asile » qui a trouvé un aboutissement sous l’égide de la présidence française. On n’est pas surprit de cette réussite lorsque l’on connait les conseils judicieux que le spécialiste Hortefeux aura prodigué à ceux qui se voyaient dépassés par les évènements. Ca tombait bien la France pouvait servir d’exemple en matière d’expulsion. Le projet adopté est ni plus ni moins la carte bleu dont il avait été déjà question et qui favorise l’immigration choisie, on pourrait même dire : triée sur le volet ; accompagnée pour être sur que n’importe quel quidam ne viendra pas troubler la quiétude des européens d’un renforcement des contrôles aux frontières. D’ailleurs, l’effet de cet accord se fait déjà sentir car l’on voit l’Espagne changer totalement sa stratégie en matière d’émigration, finies donc les régulations massives et retour au pays sans autre forme de procès. On peut noter que cette Europe là est loin d’être un continent d’accueil !

Il y a eu aussi un événement ayant peu intéressé les médias, c’est la refonte de la PAC qui a réuni à Annecy les ministres de l’union sous la présidence de Michel Barnier. Mais en concomitance, à deux pas du premier, un autre événement a été passé pratiquement sous silence par les médias, il s’agissait du contre sommet réunissant des syndicats agricoles ou autres en générale moins inféodés au pouvoir que ne l’est la FNSEA, comme la Confédération Paysanne, le Modef et diverses associations proches du monde agricole un peu en marge de l’agro-business. En effet s’il n’existe pas de distensions profondes dans la volonté de pérenniser la PAC entre ces sensibilités différentes, ils en existent néanmoins sur la méthode et les moyens. Il est évident que les grands céréaliers ne seraient pas opposés à la continuité du régime actuel dans la mesure où ils ont profité abondamment des subventions en même temps qu’ils voyaient les cours des denrées qu’ils vendent s’envoler. On comprend qu’ils n’aient pas envie de changer le système. Par contre, les éleveurs qui doivent acheter des céréales à des prix exorbitants, les agriculteurs écolos qui sont en partie laissés pour compte, aimeraient bien que l’on s’intéresse un peu plus à eux en leur octroyant des aides substantielles. Barnier n’est pas tiré d’affaire car d’un autre coté certains pays comme le Royaume-Uni, la Suède, le Danemark, les Pays-Bas prônent la liberté des marchés et verraient bien s’estomper les subventions. Affaire à suivre avant la fin de l’année…

Pour conclure, je vais utiliser un langage trivial en disant qu’il ne faut pas cracher sur les 1 Milliard d’Euros débloqués pour aider les pays pauvres à développer leurs agricultures. C’est sans doute insuffisant mais c’est mieux que rien. Mais où je suis plus dubitatif, c’est comment vont être répartis ces subsides. Si une volonté profonde de la part des donateurs fait que cet argent va directement aider les petits agriculteurs, d’accord ! Mais si comme je le subodore une partie va vers l’implantation d’une agriculture plus industrialisée, le but à atteindre, qui est de stabiliser entre autre les migrations campagnardes dans les zones défavorisées, aura été dévoyé au service une fois de plus d’une classe favorisée*, donc cette bonne intention mérite toute notre attention. En restant vigilant nous verrons donc d’ici quelques temps comment les évènements se déroulent.

Si j’ai émis des doutes, c’est que cette Europe qui se met en place semble s’éloigner de plus en plus des aspirations profondes des peuples au profit d’un libéralisme débridé.

* Je me suis exprimé sur ce sujet dans un article intitulé :
 Agro-business, nouvel eldorado des capitalistes.

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