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Loi de prévention de la délinquance

Publie le dimanche 26 décembre 2004 par Open-Publishing


de Ekaitza

Entretien avec Francis Charpentier, du Collectif anti-délation qui s’est monté à Baiona. Il nous précise les enjeux de cette loi qui devrait être débattue au Parlement en janvier 2005.

Ekaitza : Peux tu nous re-préciser le cadre juridique de ces lois ?

Francis Charpentier : Il faut d’abord rappeler le cadre de la loi en deux mots. Il s’agit des lois Sarkozy qui veulent donner un pouvoir accru aux maires dans leur rôle d’officier de police judiciaire. A ce titre se créent des « Comités Locaux de Sécurité Prévention de la Délinquance » qui réunissent, dans les municipalités où ils se mettent en place, divers acteurs de terrains. Sur Bayonne, ce sont des représentants de la police nationale, de la police municipale, un délégué du maire et des services municipaux. Pour la « société civile », il y a le représentant des cafetiers de Bayonne.

Comment ça fonctionne ?

Il s’agit de réunions qui se tiennent à la demande de la municipalité. A Bayonne, ont été abordées la question des SDF, celle de la consommation d’alcool des jeunes dans le Petit-Bayonne pendant ou hors des fêtes, ainsi que la question de la délinquance dans les quartiers Nord. Dans d’autres villes, comme Tarbes, les commissions se réunissent beaucoup plus fréquemment et on commence déjà à entamer des discussions sur ce que l’on appelle " des situations particulières ". Pour l’instant ces comités viennent juste de se mettre en place. Il existe quelques sites-pilotes en France qui fonctionnent. Si la loi passe le maire de la ville aura des compétences très larges : au niveau de l’habitat et du logement public, de l’apport de certaines aides aux familles, des relations avec l’école etc.

Localement, l’expérience est-elle tentée ?

La municipalité met en place ce Comité de Prévention, comme un bon élève de la classe politique UMP. Je pense que ça c’est clair. Le problème c’est qu’on nous dit que la loi ne sera jamais mise en place, alors que ces lois risquent d’êtredébattues en janvier 2005, et que si on fait des expériences nationales ici ou là en impliquant autant de gens, c’est sûrement pas pour s’amuser dans son coin. Toutefois il existe effectivement une volonté politique locale de voir appliquer une bonne partie du texte de monsieur Sarkozy. Ailleurs il existe des maires qui refusent de mettre en place ces comités.

Quelle est l’implication des services sociaux ?

Il s’agit de l’introduction et de la mise en place de logiciels fichant les populations précaires (RMi, ASS, API, etc...), avec l’informatisation d’un certain nombre de renseignements. Ceux-ci peuvent être très précis parce que les gens parfois viennent livrer un peu de leur malheur et de leur vie. Ce logiciel, Perceval, a été mis en place par le Conseil Général, à titre d’expérimentation sur deux sites : Orthez et d’Anglet. Cela concerne les travailleurs sociaux qui sont directement liés au Conseil Général. Ces renseignements sont mis en place après les entretiens systématiques qu’ont les gens qui sont au RMI, parce qu’ils sont obligés d’aller dans un service social départemental pour régler, par exemple, leur contrat d’insertion mais cela peut aussi entrer dans le cadre de rendez-vous avec le travailleur social sur une forme d’aide...

Qui accède aux informations ?

Pour l’instant, cela ne concerne que les services du Conseil Général autour du RMI. Après, malgré ce que disent les promoteurs de ce genre de logiciels informatiques, est-ce qu’on ne pourra pas le coupler avec d’autres systèmes informatiques qui existent déjà... Toute la question se pose.

S’agit-il d’une loi isolée ?

Aujourd’hui, ces lois, si elles sont votées, viendront compléter ce qui existe déjà dans les lois Perben au niveau de ce que l’on appelle " les bandes armées " et des poursuites judiciaires autour de ce thème. C’est une atteinte directe aux libertés individuelles parce qu’elles ne touchent pas seulement le " public précaire " ou les travailleurs sociaux, mais aussi l’Education Nationale et d’autres structures. Il va être demandé aux chefs d’établissements scolaires de prévenir le maire de la ville de l’absence d’un enfant pendant plus de trois jours. Ce qui peut amener les parents à suivre un stage de parentalité obligatoire, payant, de 750 euros. Il existe aujourd’hui en France plus de 80 comités anti-délation centralisés depuis le 1er trimestre 2004.

Quelles sont vos revendications ?

Les revendications du Collectif sont claires. Ces lois ne doivent pas être votées. Ces lois liberticides rappellent les heures sombres de notre histoire. Ces collectifs mobilisent non seulement les travailleurs sociaux, mais aussi les associations de parents d’élèves, les syndicats de l’enseignement et tous les gens qui ont conscience aujourd’hui qu’il y a une menace potentielle sur l’ensemble de la population, parce que seulement quelques privilégiés y échapperont par rapport à la majorité. Le problème c’est que peu d’information est fait autour de cette question-là. Peu de gens ont au courant de ce qui leur pend au nez donc la première des choses, c’est d’avertir la population. Nous allons distribuer un tract, ciblant les personnes qui sont en butte avec ce texte de loi

Plus d’infos sur
http://www.abri.org/antidelation
Mel local : antidelation.paysbasque(hat)laposte.net

http://ekaitza.free.fr/954/antidelation.html