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Mumbai : D’un workshop à l’autre, quelques paroles sur la communication

Publie le mercredi 21 janvier 2004 par Open-Publishing

Au FSM, on s’habitue vite à courir d’une tente à l’autre, à la recherche de discours audibles, nouveaux et intéressants. Zapping d’un stand a l’autre autour du theme de la communication : medias, logiciels libres et NTIC

10h35, Hall 1. Public : peut-etre 500 personnes. Theme : Medias, culture et savoir. J’arrive au moment ou Bernard Cassen termine son severe portrait des grands groupes de medias modernes qui, "au lieu d’etre le 4eme pouvoir qu’ils etaient autrefois, font aujourd’hui partie du pouvoir (economique, me permets-je d’ajouter) en place". Le public rale devant la traduction simultanee, sans ecouteur, que leur impose notre camarade. Apres une concertation, il continue en anglais pour calmer le jeu. Pour Cassen, il faut oser la critique des medias, meme si celle-ci est souvent mal interpretee. "Comme pour l’industrie, critiquer l’entreprise n’est pas s’attaquer aux ouvriers. Et si nous attaquons les medias ce n’est pas contre les journalistes. (A bon entendeur,...). L’orateur continue : "Il nous faut creer un 5eme pouvoir !" Et de citer, pour appuyer l’urgence de cette nouvelle arme, le cas du Venezuela ou Hugo Chavez a ete scie par des medias tout puissants qui n’ont comme objectif que la protection de privileges mis en danger par kes reformes du gouvernement populaire du pays. "Une guerre ideologique, affirme Cassen, pire que celle mene contre Aliende a l’epoque."

Cassen reconnait la liberte d’entreprise, mais refuse que cette valeur soit placee "au-dessus" du droit des peuples a etre informes (et non soumis a la propagande). Ils appelle les medias a satisfaire aussi bien leurs actionnaires qu’un veritable role social. L’intervention permet de conclure avec la presentation rapide du nouvel "Observatoire international des Medias" qui doit faire l’objet dans les jours a venir d’un seminaire specifique. Cassen precise seulement que l’organe a une vocation tripartite : journalistes, academiciens et citoyens (lecteurs).

Richard Stallman, eminent developpeur et defendeur des logiciels libres (et non pas "gratuits" precise-t-on pour les francophones) prend la parole. Il defend la liberte de creer, de developper, de partager, d’echanger, de modifier a l’aide d’une metaphore tres eclairante : il en est des logiciels comme des recettes de cuisine. Un "chef" les invente (quoi qu’on sache que rien ne s’invente, ndlr), et des confreres, concurrents et autres cordons bleus s’en inspirent, les modifient, les ameliorent, decennies apres decennies. Seule une industrie apre au gain a pu tenter de nous faire croire que de simples outils de travail pouvaient etre proteges comme ils le sont aujourd’hui. Et l’Americain de rappeler que la planete s’est passee de copyright pendant des millenaires... "Ce qui est amoral, c’est precisement de refuser ces echanges", tempete ce sympathique informaticien a la pilosite new age.

Richard Stallman fait cependant une difference avec les travaux de la recherche qui eux pourraient encore meriter (si nous nous comprenons bien) le copyright. Car ne sont pas de simples outils de travail, des donnees echangeables par simple liaison telephonique... Et pour ceux qui doutent encore du logiciel libre, ajoutons quelques exemples qui feront la difference : dizaines d’administrations tournant desormais sur Linux, un logiciel aussi complexe que Photoshop desormais concurrence par le "libre" ou encore la production actuelle d’une encyclopedie ouverte, d’un dictionnaire anglais, d’un dictionnaire wallon (francais reveillez-vous), etc., etc.

L’Indien qui suivra cette intervention, N. Ram, criera d’abord sa rage de devoir parler anglais, "un autre imperialisme dont on ne parle pas assez !" Et de poursuivre tour a tour en indi et en anglais, au grand desespoir des Occidentaux pour qui le message est divise par trois. Mais l’essentiel a a voir avec le discours de Cassen : "Celui qui n’a pas un engagement social ne peut s’affirmer journaliste", affirme l’Indien. Et on aimerait placarder ca sur la porte d’entree de toutes les redactions d’Europe au minimum... Helas, "Tous les medias ont abandonne cette perception de leur mission, ils ont abandonne le militantisme et sont devenus les hauts-parleurs des transnationales.

Fernando Martinez Heredia, de Cuba, chercheur qui s’est longuement penche sur la question, confirme, affirmant que la soupe mediatique et culturelle servie aux masses sert de prevention a la rebellion (que l’incapacite des gouvernements a subvenir aux besoinbs essentiels pourrait susciter)... "Il s’agit de la complete formation de l’opinion publique, de ses gouts, sentiments et desirs : et cela, pour ceux qui font partie du systeme comme pour les autres, afin de developper ambition, desir d’adhesion ou resignation. L’exemple de Cuba est clair en ce domaine, qui ajoute a la negation de toutes les valeurs une totale domination mediatique".

13. Workshop Nouvelles technologies de l’information et societe civile. 13 personnes, c’est tout le public que ce workshop a pu reunir, un signe de l’erosion du mirage numerique ? Sont la un Kenyan (l’animateur), trois Indiens, un Americain, un Hollandais, un Taiwannais, un Sud-Africain et quelques badauds qui quittent vite les lieux. L’animateur se demene avec son oirdre du jour. On s’entend a peine, soumis que nous sommes a un bruyant chantier qui jouxte notre salle de conference faite de toiles et de branches. Impossible de comprendre l’anglo-indi dans cette avalanche de decibels. Qu’est-ce qu’on creuse de l’autre cote ? L’odeur de merde est insupportable, on abandonne lachement la petite assemblee en entendant une derniere voix demander : "Attendez, c’est quoi l’objectif, ici ?"