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PLANETE TRAVAIL : perdre l’emploi au-delà du mur

Publie le mercredi 20 octobre 2004 par Open-Publishing


de VITTORIO LONGHI

Derrière les atrocités de la guerre en Palestine, derrière les incursions et
les massacres de l’armée israélienne, il y a une autre guerre, plus silencieuse
et profonde, qui empêche le travail et rend impossible même la simple survie
aux familles palestiniennes. La dernière Intifada, en septembre 2000, a été suivie
par des licenciements en masse de travailleurs palestiniens des entreprises israéliennes
et les restrictions économiques imposées par le gouvernement Sharon ont également
obligé les activités des territoires à faire des coupes sombres dans les emplois.

Le taux de chômage en Cisjordanie et à Gaza a désormais atteint des niveaux insoutenables et est en train de provoquer une situation d’urgence sociale sans précédents. Les autorités palestiniennes lancent ces jours-ci un nouvel appel à la communauté internationale afin qu’elle fasse pression sur Israël pour enlever les blocages, à commencer par le mur qui devrait bloquer les terroristes et qui en réalité n’arrête que le travail et les salaires. Selon les ministres de l’Anp, l’économie interne palestinienne ne pourra jamais absorber les plus de 310 000 chômeurs actuels, plus de 34% de l’entière force de travail. Les quatre dernières années, plus de 130 000 personnes ont été licenciées par Israël et environ 150 000 par les entreprises palestiniennes elles-mêmes.

Jusqu’à il y a six mois, ils étaient 30 000 à réussir encore à travailler tous les jours de l’autre côté du mur, même si c’était dans des contextes d’absolue précarité, pour des occupations saisonnières, liées surtout au bâtiment et à l’agriculture. Aujourd’hui, même ce nombre s’est réduit à quelques milliers, en particulier depuis la fermeture de la zone industrielle de Erez, si bien qu’en Israël n’entre que de la main d’œuvre étrangère. Des milliers de migrants du Sud-Est asiatique, des ex-républiques soviétiques et de la Fédération Russe elle-même, qui sont en train de remplacer presque complètement la force de travail palestinienne, générant de partout des déséquilibres salariaux et des phénomènes de dumping social.

La responsabilité directe de cette situation appartient sans aucun doute à l’action de répression civile et militaire du gouvernement Sharon mais on constate surtout les effets de l’excessive dépendance de l’économie palestinienne par rapport à l’économie israélienne, un rapport qui dure depuis la constitution de l’état juif. "Les politiques d’Israël ont toujours empêché toute possibilité concrète de développement de l’économie et du travail palestinien - explique Ghassan Khatib, ministre du travail de l’Anp - c’est pourquoi nos activités demeurent fermées, n’exportent ni biens ni force de travail. En plus d’être limité, notre marché interne est fragmenté et n’est pas capable d’offrir de nouveaux emplois, un scénario encore plus inquiétant si l’on considère l’augmentation démographique constante".

Selon les syndicats, le taux de chômage est pratiquement le double par rapport aux estimations de l’Anp et atteint une moyenne de 60 % en Cisjordanie, avec des pointes de 80 % à Gaza, dans un contexte où environ la moitié de la population vit en dessous du seuil de la pauvreté, avec moins de deux dollars par jour et seulement grâce aux aides et aux services des agences de l’Onu et des organisations non gouvernementales. La confédération du travail palestinienne, Pgftu, pourvoit dans de nombreux cas, à l’assistance aux familles les plus pauvres et aux personnes âgées, sans oublier quelques services sanitaires de base, la distribution directe de vivres et la distribution de subsides aux chômeurs. Depuis le début de l’Intifada, un véritable programme d’urgence a été mis en route, financé par un fonds spécial auquel contribuent différents pays arabes pour porter des aides directes, en argent, aux familles.

De plus, les centaines de milliers de licenciés n’ont encore reçu aucune forme de compensation et le syndicat offre une assistance légale pour des cas de licenciements sans motif valable. Jusqu’ici, les procès intentés par le Pgftu sont au nombre de 200 000, aussi bien contre des entreprises israéliennes que contre des entreprises palestiniennes. Ces cas ne sont pas aidés par la politique de l’Anp qui n’a prévu dans le code du travail adopté il y a deux ans aucune forme d’amortisseur social pour le chômage et pour les accidents du travail. Les seules pensions sont réservées aux salariés de l’Autorité et toutes les autres personnes âgées, les handicapés et les chômeurs sont obligés de compter exclusivement sur les revenus et sur l’assistance de leur propre famille.

Traduit de l’italien par Karl et Rosa - Bellaciao

http://www.ilmanifesto.it/Quotidiano-archivio/17-Ottobre-2004/art71.html