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Patimat, immigré clandestin et désobéissance civique
Publie le samedi 29 avril 2006 par Open-Publishing9 commentaires

de Bruno Corpet
L’histoire de Patimat et sa mère est un exemple des conséquences des lois dont nous gratifient nos élites politiques. La désobéissance va-t-elle devenir le seul moyen de s’opposer a la dérive sécuritaire de nos institutions ?
Patimat n’est pas une "handicapée", mais est bien une enfant en "situation de handicap" exclues de l’école. Pour la première fois un quotidien national (Libération) sort un article (voir ci-dessous) sur l’histoire de cette mère et sa fille qui ont fui les dérives d’un extrémisme religieux dans leur pays et se retrouvent face à l’arsenal répressif législatif et réglementaire de pays qui se disent civilisés (France et Allemagne).
Ce qui me semble intéressant est de constater le paradoxe d’une réaction locale citoyenne et « hors la loi » qui va bien au-delà des clivages politiques traditionnels de notre pays (J’ose espérer que la réaction aurait été la même si cette enfant avait été handicapée).
L’impact sur la « blogosphère » est insignifiant actuellement (2 post sur technocratie) alors mobilisez vous avant qu’il ne soit trop tard !
Pour vous aider à comprendre la situation, je vous propose une série de liens chronologiques vers des pages racontant les divers épisodes de l’histoire de Fatima et des citoyens qui prennent le risque de s’opposer à la loi :
Patimat, 6 ans, cachée pour échapper à l’expulsion
A Brest, depuis trois semaines, des familles se relaient auprès de la fillette.
de Jacky DURAND
Patimat est arrivée chez Brigitte et Michel (1) comme une évidence. « Ça allait de soi, dit Brigitte. Cela ne relève même pas de la réflexion. Ne pas l’accueillir aurait été de la non-assistance à personne en danger. » Depuis plus de trois semaines, des familles bretonnes se relaient pour cacher cette petite fille sans papiers. Avec le même dévouement pour l’aider à supporter sa séparation avec sa mère. Avec la même assurance pour braver l’illégalité, assumer la clandestinité. Car la mère ne peut être expulsée sans sa fille. L’histoire de Patimat, 6 ans, et de Sakinat, 44 ans, a fédéré à Brest des consciences, des sensibilités différentes, voire opposées, mais qui se sont retrouvées dans une « désobéissance civique », selon l’expression d’une mère de famille.
Patimat est née le 1er février 2000 dans une petite ville du Daguestan, république autonome de la Fédération de Russie. De mère célibataire. Autant dire enfant de rien dans cette région du Caucase gagnée par l’islam intégriste, affirme sa mère. D’ailleurs, Sakinat ne l’a pas déclarée à l’état civil pour éviter le déshonneur. Mais les ennuis sont venus quand même. Licenciée pour « immoralité » et privée de ses droits d’enseignante, Sakinat a décidé de s’enfuir. Sa famille a réuni les 1 300 dollars qui lui ont permis de gagner Berlin avec son bébé de dix-huit mois. Mais l’Allemagne a refusé leur demande d’asile, parce que Sakinat s’était présentée sous un faux nom. Menacée d’expulsion vers la Russie, elle a réussi à s’enfuir de nouveau. Et débarque à Brest le 16 janvier dernier.
Patimat est inscrite en grande maternelle à l’école Jean-Macé, dans le centre de Brest. Sakinat et Patimat vivent dans une chambre d’hôtel, mangent froid. Elles détonnent dans ce quartier plutôt huppé où l’on est médecin, officier de la Royale, avocat, magistrat, commerçant... Personne ne soupçonne leur situation. La petite fille « s’intègre parfaitement » à sa classe, écrit l’institutrice, et « ses progrès en langue française » sont remarquables.
« Elle parle bien le français ». « A l’époque, on ne connaissait rien de leur vie, raconte une mère. Mon fils m’a dit "tu sais, il y a une nouvelle. Elle ne parle pas très bien le français. Elle parle aussi russe". » D’autres parents se souviennent « d’un petit bonjour » avec une mère solitaire, aux cheveux blonds. Le 3 avril, Sakinat reçoit une notification de reconduite à la frontière. Le 6 avril, à 5 heures du matin, la Police aux frontières (PAF) vient chercher la mère et la fille pour les expulser. Mais Patimat a été cachée la veille.
La mobilisation est née ainsi, dans l’urgence, autour de quelques parents d’élèves. « Ça a été instinctif. Quand on m’a raconté l’histoire de Patimat et de sa mère, je n’en ai pas dormi de la nuit », raconte Alexandra, une mère d’enfant scolarisé à Jean-Macé. Je me suis dit : "Qu’est-ce que je pourrais bien faire pour elles ? Je ne suis pas juriste." On s’est dit que si on ne faisait rien, on ne pourrait plus se regarder dans la glace », ajoute-t-elle. Le comité de soutien, fondé il y a trois semaines, compte aujourd’hui plus de 550 adhérents, et la pétition qu’il fait circuler a recueilli plus de 5 000 signatures. « Cette mobilisation est d’autant plus remarquable qu’elle rassemble des gens qui ne font pas partie des circuits traditionnels de soutien aux étrangers », analyse David Rajjou, l’avocat de Sakinat, qui conseille depuis dix ans les sans-papiers de la région brestoise. « Ce ne sont pas des gens qui vont débarquer chez le député du coin ou renverser le PS », ironise un Brestois. « Quand j’ai vu les noms inscrits sur les pétitions, je me suis dit que ce n’était pas possible. Il y avait des gens adhérents de l’UMP », se souvient Philippe.
Jeudi soir, une dizaine de membres du comité de soutien se sont retrouvés autour de Sakinat à l’école Jean-Macé après avoir suivi l’intervention de Nicolas Sarkozy sur l’immigration au journal de 20 heures de TF1. La conversation roule sur les courriers en cours, des élus qu’il faut contacter, le blog qu’il faut alimenter et un concert de soutien. « Pendant que l’on prépare tout ça, on ne fait pas de shopping », lance une provocatrice. Alexandra « On est comme tout le monde. On a pris conscience de cette histoire parce qu’elle est arrivée près de chez nous. » Anne « Moi, je ne savais même pas qu’aider un sans-papier pouvait constituer un délit. Il ne faut leurrer personne là-dessus. Si cette histoire s’était passée à dix kilomètres de Brest, on n’en aurait peut-être jamais entendu parler. »
Recours. L’histoire de Sakinat et de Patimat a changé « durablement le point de vue » de ces parents d’élèves, qui veulent ignorer ceux qui leur « ont rebattu les oreilles » avec la petite phrase de Michel Rocard alors qu’il était Premier ministre en 1990 : « Nous ne pouvons héberger en France toute la misère du monde. » Catherine explique « Quand les gens me disent "au Daguestan, ils ont leur culture, tu ne peux pas changer les choses", ça décuple ma volonté. Notre but immédiat, c’est de pouvoir sortir cette petite fille de la clandestinité en lui obtenant un statut provisoire. » Plusieurs recours ont été déposés, et Patimat n’ayant pas été reconnue au Daguestan, une demande a été formulée auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) pour la faire reconnaître apatride.
Ce vendredi, Patimat cueille des fleurs qu’elle voudrait faire parvenir à sa mère. Elle promène ses yeux noirs sur cette maisonnée attentive et disponible. « Elle ne pose aucune question, elle comprend tout et est extrêmement affectueuse », dit Brigitte, qui ne connaît pas encore la mère de Patimat, mais « l’aime déjà ». Après quatre années d’errance entre chambres d’hôtels et centres d’accueil, puis trois semaines de séparation d’avec son enfant, Sakinat dit, le regard un peu éteint : « Je voudrais que ma fille puisse avoir une enfance comme n’importe quelle autre enfant. Jusqu’à aujourd’hui, elle a eu une vie d’adulte. Pas d’enfant. »
(1) Les prénoms ont été changés.
Messages
1. > Patimat, immigré clandestin et désobéissance civique, 29 avril 2006, 16:07
je dis bravo pour ces familles brotonnes trés humaines qui cachent la petite , j’espere q’elle ne sorte pas trop tromatisé de cette histoire douleureuse .
1. > Patimat, immigré clandestin et désobéissance civique, 30 avril 2006, 20:51
C’est vrai que cela mérite d’être connu des gens.
Je vais y contribuer modestement :
Infos grapillées par le Ptit Gauchiste
2. > Patimat, immigré clandestin et désobéissance civique, 1er mai 2006, 06:35
Bravo pour cette solidarité. Mais il se trouve encore des salauds pour aller arrêter des gens et les expulser. Les flics n’ont pas changé, aujourd’hui comme hier ils sont prêts à toutes les bassesses.
Rémi la G.
1. > Patimat, immigré clandestin et désobéissance civique, 1er mai 2006, 08:28
Entierement solidaire de cette solidarité , entierement opposé à toutes ces lois qui designent l’immigré comme coupable potentiel , entierement révolté par ce ministre qui ne respecte pas sa parole sur la non expulsion des enfants scolarisé, parole arrachée par les reactions de notre peuple qui est moins raciste que certains se plaisent à le dire .
Entierement convaincu de la responsabilité des politiques dans cette affaire .
Mais une fois de plus entierement contre la position de Remi la garonne , qui une fois de plus se trompe de cible .
La police obeit aux ordres de l’etat , en l’occurence , du gouvernement . Dans quelle republique vivrions nous si la police , force armée , n’obeissait pas au gouvernement ?
Remi la Garonne prefere t il une police ressemblant à la guardia civil espagnole en 1936 ?
A la police n’obeissant plus aux ordres du president allende ?
Parcequ’elle est une force armée , en republique , la police ne peut et ne doit qu’obeir au gouvernement . Sinon c’est le pronunciamento permanent .
Le ministre de l’interieur est coupable ! les electeurs lui regleront son compte .
claude de toulouse .
2. > Patimat, immigré clandestin et désobéissance civique, 1er mai 2006, 08:50
Je condamne la servilité d’individus qui sont prêts, moyennant finance, d’accomplir les tâches les plus basses d’un gouvernement, aussi démocratique soit-il... ce qui est le cas de la police. Il ne s’agit pas là de légalité mais de morale. Et oui, les deux peuvent être en opposition, même dans un système qui se dit démocratique.
Question à Claude de Toulouse : imagine que tu sois flic, en France aujourd’hui, donc dans un état qui se dit démocratique, et que l’on te demande d’aller arrêter un enfant pour l’expulser. Iras-tu ? Peux tu faire cela ? Moi non. Toi non plus je pense. Au nom de quoi nous refuserons ? De l’éthique, de la morale. Pourtant des individus sont prêt à commettre cette infâmie. C’est cette attitude que je condamne... et la plupart des flics sont prêts à ça comme à une époque ils ont arrêté les Juifs ou balançé les Algériens à la Seine.
Rémi la G.
3. > Patimat, immigré clandestin et désobéissance civique, 1er mai 2006, 11:38
Remi ,
on est tous plus ou moins confrontés à sa conscience un jour ou l’autre dans sa vie , et quelque soit le job qu’on fasse .
Quand on rentre dans la police , dans l’armée , (ou c’est plus visible ) ou dans tout corps de l’etat (ou ça l’est moins ) on connait les servitudes qui s’y rattachent .
Le corps de fonctionnaires ne peut qu’obeir à l’etat , ensuite chacun individuellement est libre de ses actes , on peut faire jouer une clause de conscience , ou demissioner .
Mais le responsable je me tue à te le dire , ce n’est pas le salarié , mais le donneur d’ordre , dans ce cas le ministre .
Que certains n’aient pas de problemes et se contentent d’obeir aux ordres , c’est ainsi .
claude de T.
4. > Patimat, immigré clandestin et désobéissance civique, 1er mai 2006, 12:30
Ce que tu dis est d’une froideur juridique et administrative effrayante. Avec ce raisonnement on peut tout justifier. Pourquoi avoir, à la limite, condamné les criminels nazis qui n’avaient qu’une seule explication : "j’ai obéit aux ordres". Où places tu la limite de l’acceptatble et de l’inacceptable ?
Rémi la G.
5. > Patimat, immigré clandestin et désobéissance civique, 3 mai 2006, 12:38
Bien sur que les fonctionnares doivent obéir à l’etat, ils sont payes pour çà. Mais quand les employés
préfectoraux font tous pour humilier les demandeurs d’asile.
Quand ils omettent de fournir un dossier complet aux tribunaux administratifs
Obeissent-ils aux ordres ?
Heureusement que bon nombres de français, se mobilisent. être parfois dans l’illégalité est un acte républicain
Et la je suis fiére dêtre française. deuxiéme génèration evidement.
Souvenons-nous des bons français dénonçant ça et là leur voisin, communiste, juif, résistant, ils étaient eux aussi
de bon français.
Souvenons-nous de l’affiche rouge, des MOI,etc... Etaient-ils de bons français,
Souvenons-nous des tirailleurs sénègalais étaient-ils de bon français
La liste serait longue.J Vincent
3. > Patimat, immigré clandestin et désobéissance civique, 9 mai 2006, 06:18
Bravo à ces braves gens, c’est une belle leçon de solidarité et d’entraide.