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Thatcher pleure la mort de Pinochet

Publie le lundi 11 décembre 2006 par Open-Publishing
17 commentaires

de Jean-Yves DENIS

La mort d’Augusto Pinochet a déclenché dimanche une vague de réactions diverses et variées au Chili, mais aussi dans le monde.

Ses obsèques font déjà l’objet d’une polémique. La présidente Michelle Bachelet, qui a été emprisonnée et maltraitée pendant sa dictature, a déclaré récemment : ce serait "une violation de ma conscience" d’assister à des funérailles d’état pour lui.

Le fils de Pinochet, Marco Antonio, a affirmé pour sa part que son père avait demandé à être incinéré pour éviter une profanation de sa tombe par "des gens qui l’ont toujours détesté". Il est probable qu’il ait des funérailles militaires.

Il laisse derrière lui son épouse, Lucia, qui dirigeait une association bénévole de femmes, consacrée à l’aide aux plus démunis, deux fils et trois filles.

En France, Bruno Gollnisch, le numéro deux du Front National, se lâche : « le général Pinochet restera dans l’histoire comme celui qui a sauvé du communisme, non seulement le Chili, mais sans doute toute l’Amérique latine ».

Dans un concert plus ou moins sincère de rappel à la mémoire des victimes du vieux militaire, une déclaration va peut-être faire un peu de bruit, celle de l’ancienne premier ministre britannique, Margaret Thatcher.

Margaret Thatcher se déclare elle « profondément attristée » de la mort du Dictateur, et compte transmettre ses « plus profondes condoléances » à la veuve du général Pinochet et à sa famille. Pinochet avait apporté son aide à la Dame de fer lors de la guerre des Malouines, qui opposait l’Angleterre à l’Argentine.

Cette tendresse s’explique en effet par l’histoire de la guerre entre l’Angleterre et l’Argentine en 1982, et un lien avec le Chili existe :

Margaret Thatcher n’a jamais caché que c’est grâce à ses services secrets que le Royaume-Uni réussit à triompher de l’Argentine, lors de la guerre des Malouines, en 1982. Cependant le mystère restait entier sur l’origine des renseignements dont ils disposaient. La chaîne TVN a diffusé le 30 août 2005 un reportage de Santiago Pavolovic révélant que c’est en fait le Chili qui informait secrètement Londres. Fernando Matthei Aubel, membre de la junte du général Pinochet, y raconte en détail l’aide apportée par son gouvernement au colonialisme britannique en Amérique latine.
On comprend désormais mieux la sollicitude dont le Royaume-Uni a fait preuve pour aider le vieux dictateur a échapper à la justice.

L’histoire de Thatcher est aussi étroitement liée au massacre des forces syndicalistes et de la gauche anglaise.

Quand elle arrive à la tête du parti conservateur en 1975, le Royaume unis sont secoués par Le Bloody Sunday (émeutes d’Irlande) et les grandes grèves de 1973-1974.

En 1977, c’est le marasme économique et la fin des haricots pour le monde ouvrier en Grande Bretagne.
C’est la période "No Future" des Punks Londoniens.

En 1978-1979, de nouveaux conflits sociaux (grève des camionneurs et des services publics) entraînent la chute du parti travailliste.

En 1979, elle devient premier ministre après la victoire des conservateurs.

Elle incarne le retour à l’ordre conservateur, une novatrice dans son genre, comme les Beatles avaient inventé le pop-rock, elle a inventé le néo-libéralisme avant Reagan et nos nains politiques de Droite actuels.

Longtemps avant Sarkosy, Thatcher se fait aimer de la Droite par ses discours tranchants et sans pitié et son mépris affiché pour les questions sociales.

En 1981, Emeutes noires à Liverpool et début des vagues de privatisations qui iront en s’amplifiant.
En 1982, il y a 3 millions de chômeurs dans l’île.

Elle ne quittera le pouvoir qu’en 1990, mais depuis la gauche en Angleterre est devenu le Blairisme, une pente que la France est en train de prendre.

En 1998, elle se distingue encore en considérant l’arrestation de Pinochet comme une grave erreur.

Un quotidien anglais disait à l’époque (pardon ma traduction est mauvaise) :

Madame Thatcher a dénoncé le rôle de M. Straw’s sur cette affaire. « Il avait le pouvoir suffisant pour mettre un terme à cet épisode honteux et préjudiciable. Il a choisi, au lieu de cela, de prolonger la procédure d’extradition. Ni lui ni le gouvernement ne peut se cacher derrière cette posture légale. C’était une décision politique et il représente un échec de notre politique. »

On n’a toujours pas de réaction de Sarkosy à l’annonce de la mort du dictateur.

Mais ce qui est sûr, c’est que des points communs unissent l’ex Dame de Fer et l’apprenti président Sarkosy ; l’amour de l’ordre et du libéralisme économique, associés à une haine tenace envers le syndicalisme et le communisme.

En 1973 comme en 2006, comme le disait Renaud, « le fascisme c’est la gangrène, de Santiago jusqu’à Paris ».


Sources :

 Figaro

http://www.lefigaro.fr/international/20061210.WWW000000086_opposants_et_defenseurs_reagissent_a_la_mort_du_dictateur.html

 Réseau Voltaire

http://www.voltairenet.org/article127232.html

 Nouvel Obs

http://tempsreel.nouvelobs.com/depeches/international/ameriques/20061210.FAP1037/augusto_pinochet_est_mort.html

Messages

  • Je pense à tous ces camarades inconnus qui participèrent sous la menace des soldats à l’enterrement d’un Communiste illustre ; PABLO NERUDA, je pense à Miguel CASTILLO mort les armes à la main, à Victor JARA supplicié et je me dis avec Fidel, avec Chavez et avec d’autres que le capitalisme et l’impérialisme ne sont pas la fin de l’Histoire.

    • Tu m’as donné la fraternité

      envers celui que je ne connais pas.

      Tu as ajouté à mon corps

      la force de tous ceux qui vivent.

      Tu m’as redonné la patrie

      comme par une autre naissance.

      Tu m’as donné la liberté

      que ne possède pas le solitaire.

      Tu m’as appris à allumer,

      comme un feu, la bonté

      Tu m’as donné la rectitude qu’il faut à l’arbre.

      Tu m’as appris à voir l’unité

      et la variété de l’homme.

      Tu m’as montré comment la douleur

      de l’individu meurt avec la victoire de tous.

      Tu m’as appris à dormir dans les durs lits

      de mes frères.

      Tu m’as fait bâtir sur la réalité

      comme on construit sur une roche.

      Tu m’as fait l’adversaire du méchant,

      tu m’as fait mur contre le frénétique.

      Tu m’as fait voir la clarté du monde

      et la possibilité de la joie.

      Tu m’as rendu indestructible car grâce à toi

      je ne finis plus avec moi.

      P. Neruda "A mon parti".

      Non, certainement pas la fin de l’histoire.

      SBM.

    • Juste une petite précision, ce n’est pas Thatcher qui invente le néo libéralisme.

      Les idées viennent de Friedrich Hayek et Milton Friedman. La première application est justement sous Pinochet, le libéral-fasciste. Socialisme de Salavador Allende ou Dictature, ils ont choisi.
      http://www.ldh-toulon.net/spip.php?article483

      panorama photos de pinochet
      « Il [Pinochet] lance le Chili dans une série de réformes économiques, s’inspirant notamment des travaux de l’école de Chicago, menée par le prix Nobel Milton Friedman. Mais si le taux de croissance du pays se classe durant 8 ans parmi les plus élevés du continent, la répression continue contre les opposants. (AP)
       »

      Milton Friedman n’est pas mort :
      http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2006-11-30-Milton-Friedman
      « 
      "Avec est sans doute le penseur qui aura le plus inspiré la révolution néolibérale. Son décès, le 16
      Friedman interviendra dans l’arène politique pour favoriser le triomphe de ses conceptions hostiles à une politique économique active de l’Etat contre le chômage. Aux Etats-Unis, il soutiendra Barry Goldwater (candidat républicain à l’élection présidentielle) et Ronald Reagan. Au Royaume-Uni, Mme Margaret Thatcher. Au Chili, le général Augusto Pinochet. Car, il faut le rappeler, c’est à Santiago, pas à Londres ou à Washington, que les idées de Friedman reçurent leur première application. Après le coup d’Etat du 11 septembre 1973, les syndicats et les partis de gauche chiliens n’étaient plus en mesure de résister à la « thérapie de choc » rêvée par les économistes « libéraux » de l’université de Chicago." »

    • Mais il y aura toujours quelques illusionnistes pour soutenir que démocratie et libéralisme (lire capitalisme) sont forcément synonymes...
      Au fait, il est encore temps d’inculper Henry Kissinger, qui commence à se faire vieux bien qu’il conseille toujours (mal) Georges Bush : Nixon lui avait confié la tâche "d’avoir la peau de ce fils de pute" (sic) qu’était selon lui Allende.

      Valère

  • Cette ordure de Pinochet ne va même pas pouvoir pourrir en paix, sa famille à décidé de l’incinérer pour éviter que sa sépulture ne soit saccagée. Même dans la mort ce salaud ne sera pas tranquille. Ce soir je vais me coucher apaisé en pensant à cela.

    Tante Honorine

    • Tante Honorine,je crois que je vais faire un film "j’irais cracher sur vos tombes" oh pardon c’est déja fait,alors "j’irais cracher sur vos urnes funéraires"
      Jean Claude des Landes

    • Pas "sur" mais "dans"... et attention de ne pas respirer de ces cendres !

      Tante Honorine

    • À l’émission "Riposte" de dimanche (hier) S.Moati ,à l’annonce de la mort de Pinochet,a demandé à Sarko. si il avait quelque chose à dire ?le nain a répondu :"je n’ai aucune déclaration à faire" TEXTO !!! Heureusement G. Filoche était là qui avait quelque chose à dire,il a rappelé quelques uns des "explois" de Pinochet.Le contraste était énorme et les pendules remises à l’heure. Merci Gérard.

      François.

    • Oui, j’ai vu ça, Sarko a été particulièrement merdeux.

      Tante Honorine

    • Je ne vois vraiment pas l’intérêt de dire "le nain" en parlant de Sarkozy. Qu’on critique sa politique, oui. Qu’on contre-argumente, J’encourage. Mais je ne trouve pas nécessaire d’utiliser le terme "nain" comme terme dépréciatif. On est là pour faire avancer les choses ou pour se complaire dans la raillerie ?

      JPP

    • Je pense qu’employer le terme "nain" pour un pauvre gars très petit est nul.

      Je pense en revanche qu’utiliser le terme "nain" pour Sarkosy ne correspond pas à une raillerie depreciative, mais à un reflexe d’autodéfense devant les ambitions de grandeur de cet homme de taille moyenne d’un point de vue purement physique.

      Il faut voir cela sous l’aspect purement métaphorique.
      On parle du nanisme de sa pensée.

      Je pense que les nains de gauche qui nous lisent auront l’intelligence de le comprendre.

      jyd

  • Là Bas si j’y Suis de ce lundi 11/12 consacré au Chili d’Allende, autour de militants chiliens qui y étaient très intéressants, les derniers mots d’Allende à la radio
    pour écouter
    cliquez sur le lien
    http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=1055

    Eric

  • la terre respire un peut mieux un de moins sur cette planete !

  • Que s’est-il passé dans la tête de Nicolas Sarkozy dimanche soir, à la fin de l’émission Ripostes, sur France 5, dont il était l’invité principal. Quelques minutes avant la fin du programme, son animateur Serge Moati coupe la parole à ses invités pour annoncer une information qui vient de tomber : Pinochet est mort.

    Aussitôt, il demande au ministre de l’intérieur quelle est sa réaction à cette nouvelle importante. Quelques secondes passent, Nicolas Sarkozy est visiblement dans l’embarras. Il finit par abdiquer : "Aucune".

    "Aucune ?" est obligé de reprendre l’animateur qui ne s’attendait pas à ça. La mort de Pinochet, l’un des plus grands dictateurs de ce siècle ne suscite aucune réaction chez un candidat à l’élection présidentielle française...

    La bonne réaction, c’est un autre invité de Ripostes qui l’a eu : "Pinochet est mort avant d’avoir été jugé. C’est ça qui est important". En effet, l’ancien dictateur du Chili n’a jamais été jugé pour ses crimes. Pour un ministre de l’Intérieur qui n’a que les mots justice et sanctions à la bouche, on s’attendait à mieux.

    • Mais il ne pouvait rien dire !

      Dans les années 70-80, au plus fort de la disctature, qui dénonçait Pinochet dans la classe politique à part la gauche ?

      En 1978, qui étaient devant leurs écrans de télé pour se désoler de la défaire de l’equipe de france devant l’Argentine qui organisait le coupe du monde de foot ?
      Les français...
      Les français ne pensaient qu’à Platini, comme aujourd’hui ils applaudissent Zidane qui va soutenir le Président Algérien (Silence radio aussi sur ce point sur Bellaciao).

      Et Pinochet, c’est le capitalisme moins la démocratie, c’est le libéralisme économique total plus un gouvernement autoritaire.

      Cela ne peut pas totalement dégouter Sarkosy.